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BULLETIN
DE LA
SOCItTt SCIERTIFIQUE. HISTORIQOE
BT
ARCHÉOLOGIQUE
DE
LA CORRÈZE
SIÈGE A BRIVE
leoottiie d'itlUté piMiqve (Décret du 30 noTembre 1888)
TOME TRBNTifeMB
AVBC PLANCHES BT FIGURBS DANS LB TBXTB
1" LIVRAISON
BRIVE
ROCHE> IMPRIMEUR DE LA SOCIÉTÉ
Janvier-Mars 1908.
TABLE DES MATIÈRES
DE LA !'• LIVRAISON-
TEXTE
Pages
1 . Liste des Membres de la Société ; i. 5
2. Station préhistorique de la Coumba-del-Bouïtou,
par MM, les abbés À. et J. Bouyssonib et Babdon 17
3. Les Maîtres du Paysage limousin, par M. Johannés
Plantadis 51
4. Notice sur un jeton de Charles de Lévis, baron de
- Charlus, par M. lé docteur Charvilhat. 99
5. Histoire de la paroisse de Saint-Eloi (2"* édition),
par M. l'abbé Joffre • . . . . 101
6. Un Briviste à la Conciergerie (Thermidor an II),
par M. J. DE Saint-Germain 1 15
7 . Le Monastère de Coiroux, par M. J.-B. Espéret, . . 121
8. Ecus d'or trouvés au Mas, près Brive, par M. Ph.
Lalande 123
9. Bibliographie, par M. G. de Lépinay 125
GRAVURES
1 . Fig. 9 à 28, silex de la grotte de Coumba-del-Bouï-
tou 18 à 48
2. Le Pont de la Folie, à Crozant 58
3. La Dordogne, à Beaulieu 67
4. L'Inferno, à Gimel 72
5. Les Tours de Merle (hors texte).
6. La Redole, à Gimel 74
7. Lever de Lune sur Tétang (hors texte).
8. Le Matin, Bruyères en fleurs (hors texte).
9. Le Saut de la Virole, à Treignac 78
10. Le Plateau de Millevaches 83
11 . Vallée de la Glane 88
12. Le Meneur de Loups. 94
13 . Une Femme des Hauls-Plateaux 96
14. Jeton de Charles de Lévis. 99
BULLETIN
DE LA
S0CI8T8 SCIENTIFIQUE. HISTORIQUE
ET
A.RG ti ^ O H. O C3-I Q XJ E:
DE
LA CORRÈZE
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BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ SGIENTIFiaUE, HISTORIQUE
ET
ARCHÉOLOGIQUE
DE
LA CORRÈZE
SIÈGE A BRIVE
leoouae d'utilité pvbUqve (Dicret do 30 noTembre 1868)
TOME TRENTIÈME
AVEC PLANCHES ET FIGURES DANS LB TEXTE
BRIVE
ROCHE. IMPRIMEUR DE LA SOCIÉTÉ
1908
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LISTE
DES MEMBRES DE LA SOCIETE
BUREAU
Présidents d'honneur :
M. le comte Robert de LASTEYRIE, *, I. P. Ur niemlne
de rinstitut, à Paris.
M. Ernest RUPIN, *, I. P. O, lauréat de rinstitut, à Biivc.
Président :
M. GoDiN DE LÉPINAY, château de MorioUes, par Ivurchu.
Vice-Présidents :
M. Philibert LALANDE, I. P. O, à Brive.
M. Louis de saint-germain, *, à Brive.
Secrétaire général :
M. Jean-Baptiste ESPÉRET, I. P. O, Professeur, avciïue
de la Gare, à Brive.
Trésorier :
M. J.-B. GOURD AL, Pharmacien, à Brive.
Bibliothécaire :
M. Alfred MAS, à Brive.
Membres du Bureau :
M. Louis BONNAY, Architecte, Inspecteur des Monuments
historiques, à Brive.
M. le D' DUB0U8QUET-LAB0RDERIE, I. P. O, à Brive.
M. Pierre FOURNBT, A. «, Architecte, à Brive.
M. Ludovic de VALON, à Brive.
— G —
MEMBRES FONDATEURS ET TITULAIRES
MM.
Albe (l'abbé), curé de Notre-Dame, à Cahors.
Argueyrolles (l'abbé), curé de Saint-Sernin, à Brive.
AsHER (A.), libraire, 13, Unter den Linden, à Berlin W.
Bar (Joseph-Louis de), propriétaire, à Argentat.
Bellefon (Aloïs de Méric de), ancien magistrat, 3, rue de
l'Hôtel-de-Ville, à Montauban (Tarn-et-6aronne).
Besse (le R. P. dom Martial; , religieux bénédictin, directeur
de la Revue Mabi/ion, à Ghevetogne, par Leignon, pro-
vince de Namur (Belgique).
Bessou (l'abbé), chanoine honoraire, curé-doyen de Luber-
sac (Corrèze).
Blanc (Antoine), juge de paix, à Ayen.
Blanc (Augustin), négociant, rue Toulzac, à Brive.
BoNNAY (Louis), architecte, place Champanatier, à Brive.
Bosredon (M"' Mathilde de Lamberterie de), au château de
la Fauconnie, par Terrasson (Dordogne).
Bosredon (Jean-Baptiste), au Seuil-Haut, par Mansac.
BoYSSON (Richard de), maire de Cénac, canton de Domme
(Dordogne).
Breton (l'abbé Germain), chanoine honoraire, Ecole Bossuet,
par Cublac.
Brive (Bibliothèque de la ville de).
Brousse (l'abbé), vicaire à Arnac-Pompadour (Corrèze).
Brugeilles (Fernand), ancien inspecteur principal des che-
mins de fer du Midi, 30, rue Leberthon, à Bordeaux, et
Conseiller général de la Corrèze, à Obazine.
Brugère (Eugène), à Saint-Ybard, par Uzerche (Corrèze).
Buffet (Paul), 13, rue Cassette, à Paris, et à la Borie, près
Brive.
Cars (le duc des), 80, rue de Lille, à Paris, et château de
Sourches, par Cernay-Champagne (Sarthe).
Celor (F.), I- P- M> organiste et maître de chapelle, profes-
— 7 —
MM.
seur aux écoles de la ville de Paris, 49, rue Gay-Lussac, à
Paris.
Chabrerie (Louis), I. P. Q, principal honoraire, maire de
Sarran, par Corrèze, à Flojac, par Aubazine.
Champeval (Jean-Baptiste), avocat, à Bourganeuf (Creuse)*
Charvilhat (6.), A. Q, docteur-médecin, 4, rue Blalin, à
Clerraont-Ferrand.
Chauveron (Audoin de), président du Tribunal de première
instance, à Louviers (Eure).
Chiroux, ex-vérificateur des poids et mesures, à Ussel (Cor-
rèze).
Clédat (Gaston de), ^, commandant au 95™* territorial» ïi
Brive, et château de Maubec, par Uzerche.
Clément-Simon (Gustave), 3fe» ancien procureur-général ^ au
château de Bach, par Naves (Corrèze).
Collège de Brive (M. J.-J. Redier, I. P. Q, Principiil du).
Conseil Général de la Corrèze (Bureaux de l'archiviste de
la Préfecture, à Tulle).
CoRBiEB (Luc de), au château de Saint-Martin-Sepert, par
Lubersac.
CosNAC (la marquise Henri de), à Brive.
CosNAC (le comte Paul de), au château de Friac, par Meviiisac.
Decoux-Lagoutte (Edouard), A. Q, ancien magistrat, 12^ rue
Bourdei.les, à Périgueux.
Delisle (Léopold), O. *, directeur honoraire de la Biblio-
thèque nationale, 21, rue de Lille, à Paris.
Dubousquet-Laborderie (Henri), A. Q, J, à Vayrac (Loi).
Dubousquet-Laborderie (Louis), I. P. Q, docteur-médecin,
à Saint-Germain, près Brive.
Ducourtieux (Paul), I. P. <|, libraire-éditeur, 7, rue des
Arènes, à Limoges.
Dumas (André), avocat, à Brive.
Dutheillet de Lamothe, à Caramija, par Lubersac, et 10, rae
Brichaut, à Schaerbeck, faubourg de Bruxelles.
EspÉRET (Jean-Baptiste), L P. Q, professeur d'histoire au
collège de Biive.
— 8 —
MM.
Fage (René), I. P. O, avocat, 80* rue Lauriston, à Paris.
FoROT (Victor), L P. O, ^, ingénieur, à Bourrelou, près Tulle.
FouRNET (Pierre), A. O, architecte, à Brive.
GiRou (Pabbé Etienne), curé de Hommes, canton de Château-
la Vallière (Indre-et-Loire).
GouRDAL (J.-B.), pharmacien, à Brive.
Herbette (Maurice), secrétaire d'ambassade, 46, rue du
Général-Foy, à Paris.
JossE (Gabriel), à Payrac (Lot).
JouvENEL (le baron Raoul de), O. ijfe, ancien préfet, au châ-
teau de Castel-Novel, par Varetz (Corrèze), et 195, rue du
Faubourg Saint-Honoré, à Paris.
Labesse (comte de), au château de Chabrignac, par Juillac
(Corrèze).
Labrunie de Laprade (André), au château de Balagé, par les
Quatre-Routes (Lot).
Lafarge (Aimé), notaire, à Lagraulière (Corrèze).
Lafarge (René), docteur en droit, 60, rue Gay Lussac, Paris.
Laffont (Marc), L P. Q, docteur-médecin, lauréaî de la
Faculté de médecine de Paris, 32, avenue des Champs-
Elysées, à Paris.
Lagane (Élie), pharmacien, à Brive.
Lalande (Philibert), I. P. |>, receveur des HospiceSi à Brive.
Lamberterie (le baron Albéric de), 10, rue de Duias, Paris.
Lapierre (Gabriel), 8, boulevard Poissonnière, à Paris, di-
recteur des Eaux du Mont-Dore.
Lasteyrie (le comte Robert de), *, L P. ^, membre de
l'Institut, professeur d'archéologie à l'École des Chartes,
ancien député de la Corrèze, 10 bis, rue du Pré-aux-Clercs,
à Paris.
Lasteyrie (Charles de), inspecteur des Finances, 6, rue de
Solférino, à Paris.
Laval (Henri), îjjr, A. ^i>, ingénieur, à Paris, et avenue Char-
les-Rivet, à Brive.
Lépinay (Gaston de), au château de MorioUe, par Larche
(Corrèze).
— 9 —
MM.
Lbspinas (Edmond), avocat, ancien map^strat, boulevard de
Vésone, 35, à Périgueux.
Lbspinâsse de Pebeyre (Charles de], au château de Pebeyre,
par Laroche-Canillac (Corrèze).
Limoges (Bibliothèque de la ville de) (Haute- Vienne).
Maubeau (Eugène), 0. ij^, ancien conseiller d'État, 14, ave-
nue Henri-Martin, à Paris.
Marche (Pabbé Adolphe), à Allassac (Corrèze).
Mariel (Edouard- Alfred), ij(j, A. U, membre du Club Alpin
fraiçais, 23, rue d'Aumale, à Paris.
Martnie, C. *, I. P. ^j contrôleur-général de l'armée en
retiaite, 68, rue Jouffroy, à Paris.
Mas (ilfred), boulevard des Sœurs, à Brive.
Masséjat-Déroche (M"«), 240 bis, boulevard Saint-Germain,
à Pa'is.
Maynah) (Baron Marc de), au château de Copeyre, par
Martd (Lotj.
MiGiNiAc (Louis), avocat, Brive.
MoNjAUzi (Henri), A. O, faubourg des Gaulies, Brive.
MoRÉLY (^éopold), docteur-médecin, à Argentat (Corrèze)'.
MouRET (Ceorges), *, ingénieur en chef des Ponts et Chaus-
sées, à lesançon.
NoAiLLES (e comte Alexis de), 16, rue Chauveau-Lagarde,
à Paris.
NussAC (Loiis de Clarix de), A. <|, sous-bibliothécaire au
Muséum, 3, rue Linné, à Paris.
Perrier (Ednond), 0. *, L P. (i>, membre de Tlnstitut,
directeur di Muséum, rue Cuvier, à Paris.
Plantadis (J6annès), I. P. |>> rédacteur au Ministère du
Commerce, secrétaire général de la Ruche Corrézienne,
81, rue BouBault, à Paris.
PouLBRiÈRE (rbbé), chanoine honoraire, inspecteur de la
Société Franaise d'Archéologie, à Beaulieu (Corrèze).
Roche (Émile),docteur en droit, avoué, 4, boulevard Beau-
marchais, à (iris.
Roche, imprimur, à Brive.
10 —
MM.
Roque (Antoine), banquier, à Brive.
Rupin (Ernest), ijfc, I. P. Q, lauréat de Tlnstitut, à Brive.
Sainte Fortunade (comte Albert de Lavaur de), au château
de Sainte-Fortunade (Corrèze).
Saint-Germain (Louis de) ijfe, directeur honoraire de TEnre-
gistrement, place Champanatier, Brive.
Saint-Germain (Paul de), greffier en chef du Tribunal civil,
à Brive.
Salvandy (comte Paul de), A. Q, ancien député, 18, rue
Cassette, à Paris, et au Teinchurier, près Brive.
Segol (Antony), propriétaire, à Beaulieu.
SouLHiÉ (Louis), notaire, à Vayrac (Lot).
SouLiÉ (Guillaume), A. Q, conducteur des Ponts et Ciaus-
sées en retraite, à Argentat (Corrèze).
SouLLiER (Fabbé Martial), secrétaire-général de TÉvê^hé et
chanoine de la cathédrale, à Tulle.
Stechert (G.-E.), libraire, 76, rue de Rennes, à Parif.
Tardieu (Ambroise), historiographe de l'Auvergne, 2, rue
Bansac, à Clermont-Ferrand, et 10, boulevard G<mbetta,
à Alger.
Teyssier (T.), ^f directeur honoraire des Confibutions
directes, 25, rue Saint-Genès, à Bordeaux.
Ussel (Baron d'), 6, rue Alboni, à Paris.
Vachal (Joseph), ancien député, maire d' Argentat (Corrèze).
Valat (Julien), à Souillac (Lot).
Valon (Comte de), au château de Saint-Priest, p/r Gimel.
Valon (Ludovic de), chef de section au chemin ie fer d'Or-
léans, à Brive.
ViCANT (M°**), boulevard du Salan, à Brive.
— Il —
MEMBRES CORRESE>ONDANTS
MM.
Delmond (P.), I. P. Il, instituteur, à Allassac (Corrèze).
JoFFRE (l'abbé), curé de Saint-Éloi, par Ségur.
Lavialle (Jean-Baptiste-Ernest), 0. {, à Sanas, près Juillac
(Corrèze).
Rivière (l'abbé), chanoine à Tulle.
SouLiÉ (Antoine), A. <|, directeur de l'École communale de
dessin, à Tulle.
— 12 —
SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES
ÉCHANGE DE BULLETINS
Allier
Société d'Émulation du Bourbonnais, à Moulins.
Alpes-Maritimes
Société des Lettres, Sciences et Arts, à Nice.
Bouches- du Rhôyie
Annales des Facultés de Droit et des Lettres, à Aix.
Société d'Horticulture et de Botanique de Marseille, 52, A,
rue Thubaneau.
Charente
Société Archéologique et Historique de la Charente, à An-
gouléme.
Charente-Inférieure
Société des Sciences naturelles de la Charente Inférieure, à
La Rochelle.
Société archéologique de l'Aunis et Saintonge, à Saint-Jean-
d'Angély.
Cher
Société des Antiquaires du Centre, à Bourges.
Constantine {Province de)
Académie d'Hippône, à Bône (Algérie).
Corrèze
Société des Lettres, Sciences et Arts, à Tulle.
Càle-d'Or
Commission des Antiquités de la Côte-d'or, à Dijon.
Creuse
Société des Sciences naturelles et archéologiques de la
Creuse, à Guéret.
Dordogne
Société Historique et Archéologique du Périgord, à Péri-
gueux.
Drôme
Bulletin d'Histoire ecclésiastique et d'Archéologie religieuse ,
dirigé par M. Tabbé Ulysse Chevalier, à Romans.
Eure
Société d'Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres df^
l'Eure, à Évreux.
Eure-et-Loir
Société Archéologique d'Eure-et-Loir, à Chartres.
Société Dunoise, à Châteaudun.
Gard
Société Archéologique d'Alais.
Garonne (Haute-)
Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres, 10,
allée des Zéphirs, à Toulouse.
Société d'Histoire naturelle, 28, rue Saint-Rome, à Tou-
louse.
Société Archéologique du Midi de la France, hôtel d'AssezaL
à Toulouse.
Société de Géographie, rue Lakanal (ancienne Faculté des
Sciences), à Toulouse.
Gironde
Société Archéologique de Bordeaux. Bibliothécaire : 17, rue
Rode.
Hérault
Société des Langues romanes, à Montpellier.
Isère
Société des Amis des Sciences naturelles de Vienne.
Landes
Société de Borda, à Dax.
— 14 -
Loire [Haute-)
Société Agricole et Scientifique de la Haute-Loire. Secré-
taire-général : M. Lascombe, au Puy-en-Velay.
Loire^Inférieure
Société Archéologique de Nantes et de la Loire-Inférieure,
à Nantes.
Société des Sciences naturelles de l'Ouest de la France
(secrétariat-général au Muséum de Nantes).
Loiret
Société Archéologique et Historique de l'Orléanais, à Or-
léans.
Lot
Société des Études Littéraires, Scientifiques et Artistiques
du département du Lot, à Cahors.
Meurthe-et-Moselle
Société de Géographie de l'Est, 24, rue des Tiercelins, à
Nancy.
Pas-de-Calais
Académie des Sciences, Lettres et Arts d'Arras.
Commission des Antiquités départementales du Pas-de-
Calais, à Arras.
Puy-de-Dôme
Académie des Sciences, Lettres et Arts, à la Bibliothèque,
Clermont-Ferrand.
Société d'Émulation d'Auvergne, à Clermont-Ferrand.
Rh^ône
Société Littéraire, Historique et Archéologique de Lyon.
Secrétaire-général : M. le Président, 6, rue de l'Hôpital,
à Lyon.
Bulletin Historique du diocèse de Lyon (M. l'abbé J.-B.
Martin, directeur), 205, rue Duguesclin, à Lyon.
SsLÔne (Haute-)
Société d'Agriculture, Sciences et Arts de Vesoul.
- 15 —
Sfirthe
Société Archéologique du Maine, au Mans.
Savoie (Haute-)
Société Florimontane d'Annecy.
Seine
Société Nationale des Antiquaires de France (Palais du
Louvre), à Paris.
Académie des Inscriptions et Belles-Lettres (Palais de Tins-
titut), à Paris.
Société Nationale d'Agriculture de France, 18, rue de Belle-
chasse, à Paris.
Revue de Géographie, 55, rue Claude-Bernard, à Parij^.
Annales du Musée Guimet, 30, avenue du TrocadérOi ri
Paris.
Feuille des Jeunes Naturalistes. Directeur : M. Dolfus, :îo,
rue Pierre-Charron, à Paris.
L'Ami des Monuments (M. Charles Normand, directeur de),
98, rue de Miromesnil, à Paris.
Revue des Études historiques. Picard, éditeur, 82, rue
Bonaparte, à Paris.
Société Française d'Archéologie (Bulletin Monumenia.1}.
Directeur : M. Lefèvre-Pontalis, 13, rue de Phalsbourg,
à Paris.
Somme
Société des Antiquaires de Picardie, à Amiens. Secrétaire
perpétuel, 6, rue Gloriette. .
Société d'Émulation d'Abbeville, 3, rue des Grandes-Kcole^^.
Tarn-et-Garonne
Société Archéologique du Tarn-et-Garonne, à Moniauban.
Vienne
Société des Antiquaires de l'Ouest, à Poitiers.
Vienne (Haute-)
Société Archéologique et Historique du Limousin, à Li-
moges.
— 16 -
Archives départementales de la Haute-Vienne (Bureaux de
la Préfecture), à Limoges.
Société Botanique du Limousin, 3, place des Carmes, à
Limoges.
Société des Amis, Sciences et Arts, à Rochechouart.
SOCIÉTÉS ETRANGERES
Angleterre
Société des Antiquaires de Londres : Burlington house
Piccadilly. W. Londres.
Belgique
Société d'Archéologie de Bruxelles. Secrétaire général, 11,
rue Ravenstein, à Bruxelles.
Société des BoUandistes. Boulevard militaire 775, à Bruxelles.
Revue Bénédictine de TAbbaye de Maredsous.
Suède
Académie royale des Belles-Lettres, d'Histoire et des Anti-
quités de Stockholm.
STATION PRÉHISTORIQUE
DE LA
OoTjLm"ba,-dLel-BoTjLïtOTJL
Près BRIVE (Corrèze)
Par les abbés L. BARDON, A. et J. BOUYSSONIE
(Suite) '
On peut répartir ceux des foyers inférieurs en deux grou-
pes, assez artificiellement, car entre eux existent bien «Jes
transitions.
Dans le premier groupe, le front est à peu près semi-
circulaire et voisin de la verticale (fig. 8, n*** 1 à 7). Certaines
pièces sont extrêmement courtes et trapues (n° 5) et arrivent
à une forme pyramidale (n°* 2, 4 et 6).
Cette dernière forme se perpétue dans les séries magda-
léniennes et devient ce que nous appelons le rabot propre-
ment dit, que la fig. Qn*' 10, grattoir caréné douDle, repn^^*.^eiite
aàsez bien. On peut aussi y rattacher les nuclei utilisés après
ooup et qui forment, à proprement parler, des grattoirs nu-
cléiformes. Mais ces pièces sortent de la série que nous étu-
dions ; elles sont atypiques.
D'autres pièces présentent une partie à peine dégrossie
qui permet de les saisir à pleine main (fig. 8, n** 1); quand
cette sorte de manche est plus large que la partie retoui^héc,
celle-ci s'en détache comme un nez ou un museau plus ou
T. XXX. / — 2
— 18 —
moins proéminent (lig. 8, n" 7). Cette forme, en s'exagérant,
donne naissance à un grattoir-museau curieux, abondant
dans ce gisement (fîg. 8 et 9, n°* 8 et 9 a) (voir plus loin).
Fig. 9. — Grattoirs carénés : 9 et 10, doubles; 11 à 19. à front elliptique et très oblique
(2/3 gr. nat.). — Coumba-del-Bouïtou (Corréze), foyers inférieurs.
— 19 —
Dans le deuxième groupe, le front est plutôt une courbe
empruntée à l'ellipse, tantôt dans sa partie large (fig. 9, n" 14,
18), tantôt dans sa partie étroite ifig. 9, n" 12 13, 19). Mais
surtout le profil de ce front est beaucoup plus oblique par
rapport à la base. Les lamelles sont en général plus régu-
lières.
Il est bien difficile de se prononcer sur l'usage ou les
usages de ces diverses pièces : les poussait-on en avant
comme un rabot (1), ou les ramenait-on à soi comme un
grattoir? peut-être l'un et l'autre. Telle pièce, comme le
n® 1 de la figure 8, ne pouvait pas être employée comme
un rabot, à moins que la face plane ne fut en avant. D'autres
sont de dimensions extrêmement réduites (fig. 9, n° 15).
Une particularité assez étrange se remarque sur un bon
nombre de pièces. La partie la plus saillante et la mieux
retouchée ne porte presque aucune trace d'usage. Mais à
côté de cette partie, le plus souvent à gauche du grattoir,
parfois des deux côtés, la pièce est fatiguée et comme
écrasée assez profondément, jusqu'à faire une encoche, vi-
sible seulement par dessous (fig. 8, n" 6 c, 8 ; fig. 9, n"" 9 6,
15 b]. Piette signale quelque chose d'analogue, et attribue
cette usure à ce que ces pièces ont servi de compresseurs
ou de retouchoirs; M. Chabas aussi, à propos de celles de
GermoUes (2). Lartet et Christy ont émis l'idée qu'elles pour-
raient être des pierres à faire du feu (3).
Nous avons parlé plus haut de retouches par lamelles;
cette belle retouche lamellaire H)^ qui parait aussi bien auri-
gnaciennef a porté aussi sur des éclats ou des bouts de lames
(1) Voir les discussions engagées sur ce point à la Sociélé préhis-
torique de France, 1905 1906.
(2) Lac. cit., p. 275; ailleurs l'auteur y voit des tarières (p. 261).
(3) Cf. Reliq. Aquitan., p. 85 et 139 de la description des planches,
et fig. 18, 19, 26 et 27.
(4) Cette retouche lamellaire arrivera à son apogée dans le Solu-
tréen. Mais il y a bien des manières, en dehors du procédé solutréen
qui est bien connu, de retailler le silex. Dans l'Âurignacien supé-
rieur, il y a des lames à dos rabattu, dont le bord a subi un écrase-
ment qui constitue un mode bien différencié. 11 y a encore la retaille
par percussion violente que nous verrons plus loin. La retouche ordi-
- 20 —
moins surélevés. On a ainsi des pièces simples ou multiples
(fig. 9, divers et fig. 10, n** 3 à 10), dans le genre de celles
qui ne portent que la retouche par écailles. On pourrait faire
des séries entièrement parallèles dans les deux catégories,
Fig. 10. — Prololypcs des grattoirs carénés : 1 et 2 ; pièces à retouche lamellaire : 3 à 10
(2[3 gr. nat.), — Coumba-del-Bouïtou (Corrèze), foyers inférieurs.
la retouche lamellaire portant surtout sur les extrémités
(comparer par ex. fig. 6, n** 8, et fig. 10, n° 5). Par l'inter-
naire ou par écaille elle-même n'est pas la même dans le Moustérien
et l'Aurignacien ou le Magdalénien, le bord d'un racloir est presque
toujours plus rugueux, la retouche plus brutale pour ainsi dire.
— 21 —
médiaire de grattoirs en ogive, on arrive insensiblement jus-
qu'aux formes circulaires que nous signalions un peu plus
haut. La plupart de ces dernières pièces ont leurs bords
assez abrupts, et leur contour est tantôt à peu près quadran-
gulaire (voisin de celui de la pierre à briquet), tantôt plus
nettement circulaire (fig. 10, n*** 7 et 8). Pour d'autres enfin
les bords sont fort aplatis, et donnent de fort jolies pièces
qui font pressentir la retouche solutréenne (fig. 9, n** 16,
et fig. 10, n'» 9).
E. Pièces à étranglement. — Nous groupons sous ce titie
des pièces diverses, en grand nombre, appartenant à toutes
les catégories que nous avons énumérées, et qui ont cette
particularité que la ligne de contour de la pièce devient en
quelque point concave ; elle présente ainsi une sorte d'étran-
glement dû à une encoche plus ou moins accentuée, et quel-
quefois à deux encoches placées symétriquement. On peut
en trouver l'origine dans certaines pièces d'allure mousté-
rienne, ou racloirs concaves (fig. 5, n*** 5 et 6).
Cet étranglement peut se trouver soit à la pointe, soit vers
le milieu, ou vers la base des lames retouchées ou des grat-
toirs. On a alors, suivant les cas, des perçoirs, des grattoirs-
museau, des lames ou grattoirs étranglés ou déjetés.
a) Perçoirs, — Ils se rencontrent déjà dans le Moustérien :
on obtient naturellement le perçoir quand la pointe présente
une double concavité latérale, symétrique. On pourrait même
se demander si, dans plusieurs cas, ces sortes d'encoches
n'avaient pas été fabriquées d'abord pour elles-mêmes (pour
servir, par ex. de grattoirs concaves); leur usage, en les
approfondissant, mettait de plus en plus en relief l'extrême
pointe, qui se trouvait à la fin tout à fait apte à servir de
perçoirs (fig. 11, n'^ 2).
Quoiqu'il en soit, les perçoirs ne sont pas rares au Bouïtou;
ils sont en général courts et assez gros (fig. 11, n*^ 3); il en
est qui sont de véritables tarauds (fig. 11, n** 5) : l'usure de
l'extrémité est là pour le démontrer. Dans plusieurs exem-
plaires dont la partie pénétrante est assez longue, la pointe
va s'infléchissant et s'incurvant curieusement (fig. 11, n' 4).
— 22 -
Souvent des perçoirs courts s'associent au grattoir (Qg. Il,
n«3)(l).
Quand la lame est assez mince les perçoirs sont plus fins
et même assez délicats. Plusieurs sont multiples (2), et se
F"ig. 11. — 1 à 9, Perçoirs, types divers — 10 à U, grattoirs-muscarix 2/3 gr. nal.).
Goumba-del-Bouitou (Corrèze), foyers infér.
présentent soit aux deux extrémités d'une même lame, soit
sur deux angles d'une même extrémité (fig. 11, n*»* 1 et 7).
(1) Comparer le n* 4 de la fig. 6 de l'article sur les Cottes {Revue de
l'École d'Anlhrnpologie, février 1906). et plusieurs pièces de la plan-
che LXXV de l'ouvrage de M. Girod.
(2) Ces formes sont signalées par M. Rivière à Cro-Magnon et à
Gorge d'Enfer. Elles abondent aussi en certains points de Laugerie-
Haute.
— 23 -
Dans d'autres cas, le perçoir provient de deux encoches
placées Tune à un bout, l'autre sur le bord de la lame : c'est
une sorte de perçoir d'angle (fig. 11, n® 7) ; mais alors Texlré-
mitéest quelquefois tronquée, et forme vaguement un ciseau
étroit (1) (fig. 11, n° 9). Enfin c'est à peine si l'on peut voir
un perçoir dans le n° 6 (fig. 11). C'est plutôt un grattoir en
creux avec bord retouché; mais jamais ce bord n'a été enlevé
par un « coup du burin », comme cela est si fréquent dans
les stations aurignaciennes supérieures et solutréennes,
en particulier à la grotte Lacoste et à Noailles (Corrèzc).
Tous ces perçoirs peuvent être associés à des grattoirs.
Plusieurs de ces derniers présentent latéralement une sorte
de bec (2), différent du perçoir ordinaire, mais qui parait
bien cependant intentionnel puisqu'il en existe quelques
exemplaires typiques (fig. 11, n^ 8).
b) Grattoirs-museaux. — Quand la double encoche symé-
trique a porté sur l'extrémité du grattoir, on a obtenu ce que
nous appelons le grattoir-museau dont l'extrémité porte,
d'ailleurs, le plus souvent, la retouche lamellaire.
Ce travail a affecté toutes les sortes de grattoirs : grattoirs
en ogive (fig. 11, n° 13 ; la pièce passe de ce côté au perçoir),
ordinaires (id., n*»» Il et 12;, ou carénés [id., n*» 10). L'avan-
cement en forme de museau est quelquefois déjeté d'un côté.
On avait là (fig. 11, n** 14) une sorte de pièce à usages mul-
tiples : encoches pouvant servir de grattoirs concaves, mu-
seau servant de grattoir étroit; sur la pièce figurée, il y a
même comme un perçoir latéral et un grattoir ordinaire. La
partie concave a certainement beaucoup servi, car elle est
souvent plus usée que l'extrémité même du museau, comme
nous l'avons signalé plus haut.
c) Lames étranglées ou incurvées, — Quand cette sorte
d'entaille rétrécit la largeur de la lame vers son milieu, on
(1) Cette forme est signalée par M. Breuil aux Cottes, mais plus
grossière. Lui comparer aussi, en beaucoup plus grand, le biseau
terminal des pièces fig. b, n** 5 et 6.
(2) Comparer le n* 6, pi. LXXl, de Gorge d'Enfer B (Girod, loc. cit.).
— 24 —
obtient la lame étranglée proprement dite, si caractéristique
de TAurignacien (1). Il y en a au Bouïtou un certain nombre
Fig. 12. — Pièces étranglées ou incurvées (2,'3 gr. nat.). — Coumba-del-Bouïlou
(Corrèxe), foyers înfér. (Le n» 4 est de la collection Vignard.)
de bien nettes (fig. 12, n* 1); d'autres où les encoches ne font
que s'esquisser; il y en a aussi de nombreux fragments
(1) Voir en particulier Tarticle de M. Breuil sur les Cottes.
%€
Fig. 13. — Grattoirs écaillés par percussion f^3 gr. nat>. - CfiumlKa-deJ-Bt^Uïlou
(Corrèze), foyers Inférieurs.
Fig- 14. — Lomes retouchées, éclats, et fraginenls ffc silex écfiUlés i\c borcl A M du n>
est retouché sur le revers). — Coumbfl*de]^BouJtou iCt^rt^Tt^X foyers iiifj^pJpurs,
— 26 —
(fig. 12, n° 7). L'extrémité est tantôt en pointe coupante ou
non, tantôt en grattoir.
Plusieurs fois Tencoche n'a porté que sur un bord, et on
obtient alors des lames (fig. 12, n** 5), ou des grattoirs curieu-
sement incurvés (td., n** 6 et 8), soit vers la droite, soit
vers la gauche, comme on en a signalé de bonne heure à
Gorge d'Enfer. Enfin plusieurs lames se terminant en pointe
ou en grattoir à une extrémité sont' rétrécies à l'autre, ce qui
forme comme une sorte de soie ou de manche ; l'ensemble a
une forme très élégante ifig. 12, n®* 2 à 4).
Une pièce a vaguement la forme d'une pointe à cran
(fig. 12, n*^ 9), mais ne présente pas du tout la retouche solu-
tréenne (I); elle est d'ailleurs très épaisee et nullement poin-
tue. Avec son double cran, elle annoncerait plutôt les pointes
à pédoncule du Solutréen primitif (comme celles de la Font-
Robert).
On peut remarquer qu'un grand nombre de ces pièces sont
en fragments, et on pourrait leur appliquer ce que nous
avons dit des longues lames retouchées; les encoches pou-
vaient servir à fixer des ligatures, si la pièce était emman-
chée. Nous n'insisterons pas davantage sur les usages de ces
pièces qui sont déjà connues; elles sont surtout intéres-
santes pour dater notre gisement.
F. Pièces écaillées par percussion, — Ce sont des pièces
qui n'avaient été signalées nulle part et que nous-mêmes
nous mettions au rebut jusqu'au jour où notre attention fut
attirée par leur grand nombre. Le hasard nous servit bien
d'ailleurs en nous amenant à en fabriquer de semblables (2).
(1) Il n*a été trouvé en place aucune pièce solutréenne, ni le moindre
fragment à retouche solutréenne. Nous devons cependant signaler un
fragment de a feuille de laurier », trouvé sur le sol, en avant et à une
distance de 25 à 30 mètres de la grotte. Quoiqu'il soit en jaspe rose et
blanc assez analogue à des échantillons trouvés en plein gisement,
nous ne croyons pas qu*il en provienne, car, dans le champ où il était,
il n'a été rencontré aucun exemplaire de l'industrie de la grotte.
D'ailleurs la vallée de Planche-Torte, qui n'est pas éloignée, a fourni
bien d'autres débris solutréens, ainsi trouvés isolément sur le sol.
(2) C'est en enfonçait une lame de silex comme un coin dans le
manche en bois d'une pioche^ que nous avons obtenu sans nons y
attendre une pièce écaillée.
- 27 —
On prenait tantôt un outil déterminé : lame retouchée ou
non, grattoir, nucleus; tantôt un éclat quelconque [\h^. 13
et 14). Plaçant ce morceau de silex debout sur une piene on
le frappait d'un coup sec avec une autre pierre. Le choc
enlevait des écailles ou esquilles plus ou moins longues et
plates (fig. 15) sur le bord heurté, parfois sur les deux faces
surtout lorsque le silex était mince. Quant au bord posé sur
la pierre il s'écaillait, lui aussi, mais d'une manière moins
franche.
On peut classer les pièces ainsi obtenues en deux groupes :
I* Les pièces non caractéristiques dont on ne peut dire
qu'une chose, c'est qu'elles sont écaillées plus uu iiioins
profondément; et les éclats informes mais dénuUiU dea per-
cussions multiples qui parfois réduisaient la pièce à des
dimensions minuscules et la rendaient peu commode â leair
entre les doigts (fig. 14, n*** 9 et 11).
2** Les pièces utilisables ou de forme déterminée et régu*
lière Ce qui rendait une pièce utilisable, c'est le irauchant
Fig. 15. — ÉcaiHes ou esquilles enlevées par percussion (S/S gr. niiL.t.
Coumba-del-Bou!tou (Corrèze), foyers inrèHeurs.
vif que laisse Tenlèvement des écailles, surtout sur cerlaîns
silex particulièrement cassants (1). Ce tranchant rectiligne à
l'extrémité d'une lame mince formait comme un ciseau à
froid (fig. 14, n*** 5 et 6) et sur le bord de la lame permettait
(1) Il est à remarquer, en effet, que les silex d'une certaine nature
ont été plus spécialement employés pour cette opératioti : ainsi sur
65 pièces ou fragments d*un silex blanc laiteux, on en compte 30 écaillas,
et 35 sur 57 d'un violet rose veiné.
— 28 -
d'en faire une scie. Sur une pièce à bord plus épais et écaillé
en son milieu, le tranchant devient curviligne comme celui
d'une gouge (fig. 16, n*** 25 à 27). Parfois l'écaillé elle-même
était assez forte, longue et coupante pour pouvoir servir de
burin (fig. 15, n" 16 et 17). D'autres pièces donnent l'impres-
sion d'avoir été amenées à une forme non seulement uliie
Fig. 16. — Pièces écaillées présentant une forme régulière ou en^forme^de cisenu
ou de gouge (2/3 gr. nat.). — Coumba-del-Bouitou (Corréze), foyers inférieurs.
mais régulière et voisine du parallélogramme (fig. 16, n®» 20
à 24). On y voit sur le bord de fines relouches postérieures à
Técaillement qui envahit la surface de la pièce.
Pourquoi ce mode de travail, et à quoi pouvaient servir
ces pièces tranchantes et régulières? On frappait aussi bien
de belles pièces bien retouchées que des éclats sans valeur.
— 29 —
Était-ce pour les enfoncer dans un manche dur? peut-être en
certains cas ; mais la chose n'est pas possible pour des grat-
toirs doubles comme celui n** 2 (figure 13). C'est peut-être en
voulant fendre des os et en prenant pour cela un silex en
guise de coin. On peut aussi y voir un mode de retouche
destiné à amincir la lame de silex et qui arrive à imiter la
retouche solutréenne, dont on aurait comme un prototype
(fig. 16, n° 24). Quant aux pièces régularisées elles pouvaient
servir d'outils tranchants, étant enchâssées dans du bois de
renne par exemple, ou même de plaques d'ornementation.
Bref, on peut faire bien des hypothèses dont aucune n'est
pleinement satisfaisante.
Il n'en reste pas moins vrai qu'on est en présence d'un
travail intentionnel, et qui ne se rencontre pas seulement au
Bouïtou, mais en bien d'autres gisements, en particulier
dans ceux de l'Aurignacien et du Solutréen. On a dû sou-
vent les mettre au rebut et ne pas y prêter une attention
suffisante; néanmoins, l'abbé Breuil a pu déjà nous en si-
gnaler des Cottes (Vienne) ( l), de Solutré (surtout aux niveaux
inférieurs), de Cro-Magnon; il y en a un grand nombre de
Brassempouy, dans la collection Piette; M. Cartailhac et
l'un d'entre nous en ont trouvé de fort beaux à Tarte. On
peut très bien en rapprocher une pièce trouvée aux Baoussé-
Roussé, et qu'à première vue on pourrait prendre pour un
fragment solutréen. M. Bourlon a trouvé au Moustier (cou-
che n^ 6) une excellente pièce esquillée, et M. l'abbé Chas-
taing en signale de la même station, fort analogues aux
nôtres (2). Il y en a, mais très rares, à Chez-Pourré.
A Germolles, certaines pièces figurées ont l'apparence des
nôtres; les auteurs y voient des scies (3).
D'autre part, on trouve quelques éclats à esquilles, mais
rares, dans les diverses stations des Pyrénées fouillées par
(1) Figurés dans notre article. Revue de l'Ecole d' Anthropologie,
mai I90G. fig. 62.
(2) Deuxième Congrès préhistorique de France. Corn pie -rendu, figu-
res 3 et 4 du tiré à part.
(3) Loc. cit., fig. 6, p. 277, et pi. !.• 6.
-- 30 —
M. Piette; et môme curieux effet de reviviscence dans les
couches les plus supérieures du Mas d^Azil, celles à galets
coloriés. Là, d'ailleurs, ils ne rappellent que le type le plus
informe du Bouïtou, et n'ont pas été fabriqués sur de belles
pièces.
Aux environs de Brive plusieurs stations contenaient de ces
pièces, surtout celles qui sont inférieures au solutréen ; citons
en particulier Bassaler, la Font-Robert et la Font-Yves (1);
les deux grottes Lacoste où nous avons fait à leur sujet des
observations intéressantes que nous publierons un jour;
Bos-del-Ser et Noailles en ont donné mais en petit nombre.
G. Pièces diverses. — a) Burins. Il y a aux niveaux infé-
rieurs un nombre très restreint de pièces se rapprochant du
type burin bien connu, tandis qu'ils abondent dans les foyers
supérieurs. Encore la plupart de ces pièces sont des burins
de fortune, obtenus sans doute par hasard, comme il était
facile quand on esquillait les pièces par percussion.
Un seul beau burin ^ur belle lame retouchée a été trouvé
au niveau du foyer inférieur, mais à la base d'une fente
entre deux rochers; il a donc pu très bien y glisser des
foyers supérieurs.
6) Lames à dos rabattu, ou à arête médiane retaillée. —
Nous n'en parlons que pour constater l'absence complète des
premières, tant des longues lames du type de la Gravette ou
de Noailles que des fines lamelles, dites lames de canif, si
nombreuses dans le Magdalénien.
Quant aux secondes, elles sont très rares.
c) Lamelles à crête ou à bord retouché. — Les petits outils
si abondants dans le Magdalénien sont ici extrêmement
rares, à peine deux ou trois exemplaires assez nets. Évi-
demment ils n'entraient pas dans l'outillage ordinaire des
premiers habitants du Bouïtou. (Ils sont plus nombreux dans
les foyers supérieurs; voir fig. 27, n*»* 1 à 5.)
Cette absence jointe à celle des burins parait suggestive;
(1) Collections de M"* la comtesse de Tbévenard, au château de
Bassaler.
— 31 —
car, en revanche, lamelles et burins se retrouvent ailleurs
toujours simultanément. Le plus souvent ces lamelles ont
dû être obtenues par le « coup du burin » porté le long d'un
bord retouché par avance. Du coup on obtenait deux instru-
ments.
d) Pièces usées. — En dehors des pièces écrasées et comme
mâchées à une extrémité, il y a un bon nombre de bouts de
grattoirs (fig. 11, n» 8) ou d'angles de lames absolument
émoussés par l'usure, jusqu'à être presque polies : on a pu
s'en servir pour racler des ocres, ou même peut-être (?) pour
graver sur des pierres.
e) Pièces à encoches. — En plus des pièces à étranglement
dont nous avons parlé, il y a quelques lames épaisses portant
des encoches plus ou moins profondes, disposées irréguliè-
rement sur les bords. Quelques grattoirs ont à la base deux
petites encoches se faisant vis-à-vis; celte double encoche
basilaire, destinée probablement à retenir une ligature, se
rencontre un peu à tous les niveaux de l'âge du renne.
g) Lames et lamelles sans retouches. — Elles sont très
peu nombreuses et ne présentent rien de particulier; par
contre, les fragments en sont nombreux.
h) Nucléi et éclats. — Nous avons déjà dit que les éclats
de taille ou de déchet étaient relativement rares (1). Les
nucléi aussi sont en petit nombre, de faibles dimensions, et
en somme mal caractérisés. Évidemment, les belles lames
et presque tout l'outillage de cette grotte ont été importés et
non taillés sur place.
H. Percuteurs. — Bien qu'il ait donné peu ou point de
nucléi, nous avons trouvé plusieurs bons percuteurs au
Bouïtou; ils présentent ceci de particulier que le piquetage,
les étoilures provenant de la percussion sont disposés symé-
triquement. Ce travail parait bien intentionnel, quoique son
but nous échappe. Ainsi un gros galet de quartz, de forme
ovoïde, porte ces traces de percussion aux deux extrémités et
(1) 50 0/0 environ, au lieu de 75 0/0 environ, comme dans la plupart
des autres stations.
— 32 —
sur le pourtour, suivant cinq points régulièrement espacés.
Un autre, en roche verte très dure et à grain très fin, de
forme prismatique triangulaire, est tout écrasé aux deux
bouts, sur les arêtes, et vers le milieu de chacune des trois
faces (fig. 17). Enfin plusieurs autres petits blots de quartz,
de granit, de gneiss ou mêm€ de grès fin, ont reçu des per-
cussions assez énergiques pour y creuser des sortes de petites
cupules, qui, d'ailleurs, se retrouvent symétriquement de
chaque côté du bloc.
Nous avons émis l'hypothèse, en ne considérant que l'al-
lure môme de ces piquetages, par exemple sur les faces du
>^-*i
Fig. 17. — Galet prismatique en roche verte dure, utilisé comme percuteur
(2/3 gr. nat.). — - Coumba-del-Bouïtou (Corrèze), foyers inférieurs.
percuteur (fig. 17), qu'ils pourraient parfois provenir des
chocs portés sur les lames écaillées. Or, justement, nous
avons vu des cupules identiques sur des galets de la collec-
tion Piette, provenant de la couche à galets coloriés, où les
pièces écaillées sont assez abondantes.
D'ailleurs les Cottes et bien d'autres gisements aurigna-
ciens ont donné des pièces analogues.
I. Pierres diverses utilisées, — Nous avons dit que les per-
cuteurs étaient en quartz, en granit, en grès, en gneiss, etc.
Ces mêmes roches se retrouvent en assez grande quantité,
— 33 —
plus ou moins brisées, ou débitées même en lames ou éclals.
D'ailleurs, il est rare que ces derniers soient retaillés ou
retouchés. Ce sont surtout des variétés de gneiss bleus ou
roses, ou des schistes à mica jaune d'or, ou verdâtres, fort
décomposés, qui abondent parmi ces pierres étrangères ; elles
ont évidemment été remarquées pour leurs rayures variées,
et ramassées de préférence, [l y a encore d'autres roches :
des meulières, et même certains blocs grisâtres et lourds
qui paraissent être d'origine volcanique. Les meulières exis-
tent sur les plateaux environnants. Toutes les autres roches
se rencontrent assez abondantes dans les alluvions de la
Corrèze, dont la vallée est voisine du Bouïtou, sauf les roches
volcaniques; mais celles-ci ne sont pas rares dans les allu-
vions de la Dordogne, à une trentaine de kilomètres au Sud.
Quant aux silex et aux jaspes dont sont fabriqués les
outils, il y en a de nombreuses et fort belles variétés; le
silex noir est peu abondant; ce sont presque toujours des
jaspes plus ou moins veinés, rubanés ou tachetés. Telle série
d'éclats ou de pièces rose veiné de blanc; telle autre, jaune
tacheté de noir; telle autre, blanche opaline, sont vraiment
remarquables.
Enfin il a été trouvé un grand nombre de fragments
d'ocrés, aux teintes variant du jaune au rouge, avec les
nuances de rouge- violacé, rouge-brun, rouge-brique. Plu-
sieurs portent des traces évidentes de sciage ou de raclage.
Quelques pièces même ont été fabriquées en limonite, entre
autres un bon grattoir caréné à museau. Il y a aussi des
fragments d'oxyde de manganèse noir, plus ou moins char-
gés en fer.
Ces ocres proviennent surtout des plateaux jurassiques
qui ne sont éloignés que de quelques kilomètres au Sud.
Les silex noirs ont dû être importés du crétacé, qui affleure
dans le département de la Dordogne, limitrophe de la Cor-
rèze. Quant aux jaspes, ils ont dû être recueillis aussi sur
les plateaux environnants, parfois, sans doute, à d'assez
grandes distances ; mais nous n'avons pu encore déterminer
de gisements auxquels on puisse attribuer d'une manière
T. XXX / - 3
certaine Torigine des jaspes du Bouïtou. Plus probablement
même, ces gisements n'existent pas : il y avait seulement
quelques blocs isolés (comme nous en avons trouvé un dans
Flg. 18. — 1 à 4. grattoirs
5 à 8, Innies retouchées (2/3 gr. nat.). — (Ioumba-<!cI-Bouïtou
((-orr(»ze), foyers supérieurs.
la vallée de la Vézère, près Varelz) et que les hommes pré-
historiques débitaient sur place, quand ils avaient la chance
de les rencontrer.
2' Outillage des foyers supérieurs.
Ces foyers ont été moins riches : les pièces sont en nom-
bre moindre, et ne sont pas aussi belles que celles des foyers
inférieurs : elles sont beaucoup moins retouchées, et d*un
aspect moins agréable aux yeux; enfin la proportion des
déchets est plus grande. Cependant, cet outillage est fort
intéressant parce qu'il diffère nettement de celui des foyers
inférieurs.
Fig. 19. — Grattoirs carénés : types divors (2/3 gr. notJ. — Coumba-del-liourloiuClorrc/o),
loyers supérieurs.
A part quelques détails secondaires, l'outillage des foyers
n*" 2, 3 et 4 est le même ; nous les confondrons pour l'étude,
et nous suivrons à peu près le même ordre que pour les
foyers inférieurs.
A. Pièces d'aspect mous térien, — On rencontre encore des
- 36 -
pointes et des racloirs tout à fait analogues aux pièces raous-
tériennes. Ils iront aussi en évoluant dans des sens diffé-
rents, suivant que Ton aura des pièces minces ou épaisses.
Ce sont surtout ces dernières dont le développement s'exa-
gérera et donnera des formes nouvelles.
B. Lames retouchées, — Au lieu d'un grand nombre de
belles lames soigneusement retouchées, le plus souvent tout
autour, nous n'avons guère ici que des éclats assez frustes,
Fig. 20.
■ Grattoirs carénés : type allongé, haut, étroit (2/3 gr. nat.). — Coumba-
del-Bouîtou (Corrèze), foyers supérieurs.
retaillés sans grand soin sur un bord, et donnant des sortes
de racloirs ou de scies (fig. 18, n" 6 et 7).
Il y a cependant deux ou trois longues lames retouchées
sur les deux bords (fig. 18, n*»* 5 et 8); la plus grande est
d'allure tout à fait nouvelle; elle se termine en pointe effilée
et la retaille des bords ressemble fort à celle des grandes
lames à dos rabattu.
— 37 —
C. Grattoirs. — Parmi les grattoirs, quelques-uns seule-
ment sont retouchés sur les bords, ou même à Tautre extré-
mité, à la manière de ceux du niveau inférieur. Mais leur
présence parait accidentelle, car ils tranchent absolument
tant par leur forme que par la nature et la patine du silex,
avec le reste de l'outillage. La plupart des grattoirs sont
fabriqués sur bouts de lames (fig. 18, n°' 2 à 4), et d'allure
très magdalénienne. Deux ou trois sont retouchés aux deux
extrémités et forment grattoirs-doubles (fig. 18, n° 1). Nous
verrons que très souvent le grattoir est associé au burin et
à ses différentes variétés.
Fig. 21. — Forte pièce carénée (2/3 gr. nat.). — Goumba-del-Bouitou (Corréze),
foyers supérieurs.
D. Pièces à étranglement. — A part quelques grattoirs
carénés dont l'extrémité s'avance en museau, deux perçoirs
ébauchés, et une ou deux lames, il n'y a rien qui ressemble
ici aux séries si curieuses que nous avons étudiées plus haut
sous ce titre.
E. Grattoirs carénés. — Les grattoirs carénés sont très
abondants; ils diffèrent un peu de ceux du niveau inférieur :
leur front est moins bien arrondi; ils sont plus hauts et
moins larges. Ils ressemblent davantage à ceux de Cro-
Magnon (fig. 19 et 20).
— 38 —
Néanmoins plusieurs rappellent encore les formes mous-
tériennes : pointes (fig. 19, n° 24), ou disques épais (fig. 19,
n° 22). Il en est de doubles (fig. 19. no 26), d'incurvés (fig. 19,
n° 25), quelques-uns sont de dimensions fort réduites
(fig. 19, no 27).
A côté nous placerons plusieurs pièces, très originales,
mais qui voisinent bien avec les grattoirs carénés : ce sont
de fortes et longues pièces, surélevées ; mais à Tinverse des
autres pièces carénées les bords seuls et l'arête médiane,
non les extrémités, portent de la retouche (et de la retouche
par écailles), et en même temps des traces évidentes d'usage.
Celle que nous figurons (fig. 21) est particulièrement « bien
en main » : on peut commodément racler soit avec le bord
droit, soit avec le bord gauche, ou trancher avec la crête, en
tenant la pièce renversée.
Le plus grand nombre est allongé, haut, étroit, et dérive
plutôt des types ovalaires (fig. 9, n" 12 et 13). C'est tout à
fait « la carène de navire renversé » (1) (fig. 19, n** 20, et
fig. 20 et 22, no* 28 à 33). Souvent, les deux extrémités por-
tent la retouche lamellaire (fig. 20, n*' 28 et 29) ; les bords
sont entaillés et comme écrasés par l'usage (fig. 19, n* 20, et
fig. 20, n*»-30 et 31).
Nous voyons dans ces pièces l'origine des burins; vues
posées sur le plat, elles deviennent de plus en plus étroites
(fig. 20, no 29 a); c'est surtout net quand on a aff'aire à de
minuscules outils (fig. 22, no 34), ou mieux à des grattoirs
carénés fabriqués sur l'épaisseur même de lames, et non
plus sur de petits blocs de silex (fig. 22, no 35).
F. Burins, — Nous classons sous ce titre plusieurs séries
de pièces fabriquées sur des lames ou éclats : elles présen-
tent toutes un biseau dont le tranchant est perpendiculaire
au plan de la lame, et a été obtenu par l'enlèvement spécial
d'une longue lamelle, ce que M. l'abbé Breuil a très heureu-
sement dénommé « coup du burin ».
(l) Type abondant à Brassempouy, à Cro-Magnon, à Tarté inférieur.
La conoparaison avec une carène est empruntée à M. Rivière, loc. cit.
— 39 —
Or, si l'on considère les grattoirs carénés de la figure 22
(il y a une nombreuse série de ce type), on voit rjifils for-
ment parfaitement la transition : vus de prolil, ils présentent
le biseau caractéristique (n°* 32 />, 34 , 35) : lune des Taces est
due aux lamelles de la retouche ; l'aiiti c est formée naturel-
lement par le méplat déjà existant sous le grattoir, ou Lien
elle a été fabriquée après coup par renlévement dit » coup
du burin » (n^ 35). Cet éclat a été d'ailleurs quelquefois
enlevé sous les grattoirs carénés eux-riiémeè.
Fig. 22. — Grattoirs carénés : 32 à 34, sur pctiU hloc^; Xi sur étiai; *^«, avL-i^
enlèvement sous le grattoir (2/3 gr. nat.)- — f-ouniha-dcl-Btuiilnii
(Corrèze), foyers supérituirs.
On arrive ainsi par une sorte de lîlialion aux instruments
que nous avons nommés : burin busqué, burin d'angle ou
burin latéral, burin ciseau et burin ordinaire ou en bec de
llûte. I/usage de ces pièces nous est d'ailleurs à peu près
inconnu, et peut-être que ces catégories que nous réunissons
étaient en réalité foncièrement différentes comme ulillsu-
tion; mais elles ont toutes le caractère commun cité plus
haut.
a) Le burin busqué, — Nous appelons ainsi la variété ori-
- 40 —
ginale de burins figurés n*»» 37 à 47 (fig. 23) (1). On voit qu'ils
dérivent directement du grattoir caréné : plats d'un côté, de
Fig. 23. — Burins busqués : 37 A 44, types divers ; 45 à 47. associés à des grattoirs
(*?/3 gr. nat.). — Coumba-del-Bouïtou (Corréze), foyers supérieurs.
(1) Cf. aussi, Compte- rendu du Congrès préhistorique de Péri-
gueux, 1905, p. 64, fig. 3.
il —
l'autre à facettes disposées en relief convexe, et recoorhées
élégamment; cette disposition rendait le burin wth robuste
et comme renforcé. En outre, le plus souveni, une sorte
d'encoche a été faite sur l'extrémité de l'arc de cercle, à
l'opposé du biseau, soit dans le but d'avoir un grailair en
creux, soit pour aider à la préhension de la pircn (pour y
appuyer le doigt, par exemple), soit plus probahlemeni pour
arrêter là l'enlèvement des lamelles. Cette relouehe se re-
trouve en effet souvent ébauchée au sommet de certains
grattoirs carénés (n** 32).
Le reste de la pièce ne présente en général rien de parti-
culier ; elle a été fabriquée sur des lames quelquefois retou-
chées (fig. 23, no* 39, 44), ou même sur des éclat!? tle forme
bizarre (n© 40). Ne sont pas rares des exemplaires où ce bu-
rin est associé au grattoir caréné (n^ 45), au burin ou au
grattoir ordinaire (n®* 46 et 47). L'encoche peut deleniiiner
Fig. 24. — Burin busqué, double (2/3 gr. nat. — Coumba-del-Bouîtou f UoircEe).
Foyers supérieurs.
une sorte de bec (n® 46). Enfin, il y a quelques burins bus*
qués doubles (fig. 24).
Nous avons trouvé au Bouïtou un si grand nomln e de ces
outils, qu'ils sont incontestablement caractérisés comme
tels ; peut-être servaient-ils à sculpter, ou à creuser des rai-
nures comme le bouvet de nos menuisiers. Il ehi intéressant
de remarquer que le grattoir -museau indiqué plus haut
(fig. 8, no 8), dont le profil est fort analogue à celui de ces
burins, pouvait servir exactement au même usage.
Le burin busqué n'a été rencontré ailleurs, aux environs
de Brive, qu'à Bos-del-Ser ; mais il existe dans bien d autres
~ 42 -
gisements. Dans un sondage au Moustier, nous en avons
trouvé dans un niveau supérieur, immédiatement super-
posé au moustérien. M. Breuil nous en signale un de la
grotte du Trilobite (niveau à pointes d'Aurignac), dans la
collection de l'abbé Parât, et nous fait savoir qu'ils sont
nombreux avec les types de transition à Pair-non-Pair. dans
la collection de M. Daleau. Nous en avons vu de Laugerie-
Haute, dans la collection de M. Bourlon, avec des grattoirs
carénés. Il y en a à la Ferrassie (fouilles Capitan et Peyrony)
et à Tarte. M. Septier en a publié un du gisement des Ro-
ches, à Pouligny (Indre^. En somme, de même que les grat-
toirs carénés, ces outils appartiennent au présolutréen, et
plus précisément aux niveaux moyens, qu'ils caractérisent
nettement (Ij. Ils disparaissent en effet complètement dans
les niveaux supérieurs de l'âge du renne, à l'inverse des bu-
rins suivants.
b). Autres burins. — Nous nommons burins d'angle ou
mieux burin latéral les burins fabriqués sur l'angle de la-
mes, dont l'extrémité tronquée (2) porte des retouches, la
ligne de cassure étant oblique ou transversale, rectiligne ou
concave (3) et la lamelle due au coup du burin étant enlevée
le long du bord.
Plusieurs grattoirs carénés, d'ailleurs bien nets, portent
une retouche sur le méplat. Si nous les disposons comme
dans la fîg. 25, n^ 48 et suiv., on voit que l'on arrive avec
toutes les transitions jusqu'au burin d'angle absolument net
(fig. 25, no 52 et suiv.), ce burin se trouvant tantôt à droite,
tantôt à gauche. Quand l'épaisseur de la lame est moindre,
le nombre des facettes va diminuant, en même temps qu'el-
(1) Brassempouy qui, cependant, comprend une série fort caracté-
ristique de grattoirs carénés et même des formes de transition, n'a
pas donné ce burin, du moins avec son encoche, mais plutôt de forts
burins-ciseaux.
(2) Nous excluons les burins de fortune sur angles de lames cassées
par hasard, qui se rencontrent assez fréquemment dans les divers ni-
veaux de l'âge du renne, mais ont moins d'intérêt.
(3) Quand la partie tronquée est convexe et que la lame est mince,
la pièce tend à devenir le bec de perroquet, forme bien connue et ca-
ractéristique des stations du magdalénien supérieur.
— 43 —
les cessent d'être disposées en saillie (fig. 25, n" 51, 53),
enfin c'est le biseau franc, obtenu d'un seul coup (fig. 25,
n» 56).
Fig. 23. — Burins latéraux sur angle de lames à troncature retouchée : 48 à 51, formes de
transition ; 52, 53 et .'.6, fonnes typiques ; 54 et 55, associés au burin et au grattoir (2/3
gr. nat.». — Coumba-del-Bouitou (Corréze), foyers inférieurs.
Ce burin se trouve encore associé au burin ordinaire (fig.
25, n* 54), au grattoir bien retouché (fig. 25, n® 55) ; Texem-
plaire n® 55 porte même nettement les traces de 3 enlève-
ments successifs de lamelles, dans le but probable d'obtenir
un nouveau tranchant vif. Nous n'insisterons pas davantage
sur la description de ce burin. Nous aurons l'occasion d'en
reparler en publiant nos stations présolutréennes des grottes
— 44 —
Lacoste, où, sous un fades un peu spécial, il abonde d'une
manière extraordinaire. II y en a aussi beaucoup à la Font-
Robert et à Noailles, et nous avons publié ici-même la va-
riété minuscule qui caractérisait cette dernière station.
Enfin, nous avons nommé le burin-ciseau et le burin ordi-
naire ; ils sont ici en petit nombre ; ils sont bien plus nets,
surtout le burin-ciseau, aux grottes Lacoste. Faisons remar-
quer cependant que pour eux aussi on arrive à établir des
pièces de transition tout à fait nettes (1). La pièce n^S? (fig.
26) se placerait à côté des burins busqués avec son encoche,
le méplat terminal entouré de facettes lamellaires ; mais les
lamelles enlevées sont plus rectilignes. Puis Tangle dièdre
Fig. 26. — 57 à 60 formes de transition vers les burins-ciseaux et les burins ordinaires ;
61 à 63 burins ordinaires divers (2/3 gr. nat.). — Coumba-del-Bouîtou (Corrèze),
foyers supérieurs.
de Textrémité devient plus aigu et plus syn^élrique (n^ 58).
(l) Les mômes formes exactement se rencontrent à Isturis.
- 45 -
Enfin, apparaît le coup du burin sur l'autre face (n« 59 c)*
Quand ce travail porte sur de fortes pièces et que Ton a des
enlèvements sur les deux faces du dièdre, on arrive au bii-
rin-ciseau. Si au contraire il porte sur des lames minces, on
aboutit avec quelques intermédiaires au burin ordinaira
typique (fig. 26, n" 60 à 63). Dans ces derniers burins Tarète
du dièdre terminal est rectiligne, au lieu d'être courbe (ou
plutôt en ligne brisée), comme celle des burins busqués.
Nous reviendrons sur les burins-ciseaux, qui semblent
plutôt appartenir aux niveaux présolutréens. Quant aux bu-
rins ordinaires, on sait qu'ils ont été remarqués de bonne
heure et existent à tous les niveaux de l'âge du renne. M. Ca-
pitan a nettement montré quel était leur usage (1). On en
trouve au Bouïtou un bon nombre d'associés au grattoir ou
au burin busqué (fig. 26, n°»61 et 62).
G. Pièces diverses. — a) Pièces écaillées. Elles soni ici
très rares (fig. 27, n* 6) et ont surtout été rencontrés (au
nombre de 6) dans le foyer n^ 4, alors que ce même foyer
n'a fourni que 4 burins et à peine un grattoir. Nous avons
donné plus haut une explication de cette anomalie.
b) Lames à dos rabattu, ou à crête médiane écrasée^ J.es
premières sont encore absentes (2) (mais nous avons vu que
la lame fig. 18, n^ 8, est voisine de ce type) ; pour les secon-
des, il y en a plusieurs de bien nettes.
c) Lamelles à crête ou à bord retouché. Elles sont a^sRz
communes (fig. 27, n"" 1 à 5), quoique leur nombre n'en i^oil
pas excessif. Le burin d'angle d'ailleurs est lui-même fni
nombre assez restreint.
Plusieurs présentent à la base (fig. 27, n" 1 et 3) une sorte
de soie ou de manche avec retouches ; ce modèle a été isi-
gnalé par l'abbé Breuil, au Mas d'Azil.
d) Lames sans retouche. Elles sont relativement plus
(1) Congrès international de Monaco^ 1905 (Cf. Anthropologie, V.^OÙ,
page 125.
(2) Les lames à dos rabattu caractérisent l'Âurignacien super., im
la base du Solutréen (la Gravette, la Font-Robert, Tarte sup.) ; uoua
u*en avons point ici, mais seulement pour ainsi dire l'ébauche.
I
- iO —
abondantes qu'aux niveaux inférieurs, mais ne sont ni ré-
gulières de forme, ni élégantes. En outre, dans les foyers
les plus supérieurs (3 et surtout 4), on peut faire remarquer
la présence de plusieurs gros éclats absolument frustes et
Fig. 27.
■ 1 à 5, lamelles à crête ou à Lord relouclié ; — G, pièce écaillée (2/3 gr. not.).
Coiimba-del-Bouïtou (Corrèze). foyers super.
sans aucun travail. C'est un fait sur lequel nous aurons sans
doute à revenir à propos d'autres gisements.
e) Pièces solutréennes et pièces usées . Nous n'avons
trouvé aucune pièce présentant la retouche solutréenne, ni
pièces usées. Cependant un grattoir du foyer n° 2 est forte-
ment mâchonné à l'extrémité.
f) Nucléi et percuteurs. Il y a plusieurs nucléi, dont un
assez volumineux, et, d'autre part, quelques blocs de quartz
ou de granit ayant servi de percuteurs. Mais les points de
percussion ne sont pas disposés symétriquement, ni creusés
en petites cupules. Un petit bloc de silex du foyer n» 4 est
fortement écrasé sur toutes ses arêtes (retouchoir?).
H. Pierres diverses utilisées, — Elles sont à peu près les
mêmes que dans les foyers inférieurs. Les quartz blancs et
calcinés sont abondants. Un petit galet plat est fortement
usé sur les bords et porte des rayures. Son usage nous est
tout à fait inconnu.
Le silex est incomparablement moins beau et moins varié ;
peu ou point de jaspes, mais surtout des silex noirs ou gris
terne, provenant vraisemblablement de la Dordogne. Le si-
— 4/ —
lex gris paraît se prêter assez mal à la retouche. Plusieurs
fragments ont été curieusement transformés : la surface
seule, patinée de blanc, est restée solide et consistante ; tout
rintérieur s'est effrité et vidé. Au premier abord, nous avons
cru que c'était de l'os.
Enfin, nous avons trouvé des ocres en assez grande abon-
dance : un éclat de silex large et plat en était tout couvert,
comme s'il avait servi de palette.
Conclusion
La station de la Coumba-del-Bouïlou n'a fourni malheu-
reusement ni faune, ni œuvre d'art proprement dite» ni
instruments d'os, d'ivoire ou de bois de renne (l). Le sol de
nos grottes ne conserve pas ces objets, il est vrai ; mais la
seule étude de son outillage en silex nous permet de con-
clure qu'elle est tout entière du vieil âge du renne, appelé
TAurignacien (2), ou plutôt de la base de ce niveau.
D'autre part, ses deux niveaux, nettement distincts, four-
(1) On sait que l'instrument qui caractérise les grottes aurignacien-
nes, là où Tos s'est conservé, est la pointe à base fendue.
(2) Rappelons que ce terme nouveau a été définitivement introduit
dans la classification du paléolithique, au Congrès international de
Monaco (1906). C'est à la suite de ses nombreuses observations, corro-
borées par celles de M. Cartailhac, que M. Breuil publia l'existence
d'une industrie spéciale, intermédiaire entre le moustérien et le solu-
tréen, et qu'il dénomma d'abord pour cela « présolutréenne » (Congrès
Préhistor. de France, Périgueux, 1905). Il en publia un gisement typi-
que : les Cottes, dans la Revue de l'Ecole d'AnthropoL (février 1906),
Puis au Congrès de Monaco, par analogie avec les autres dénomina-
tions, MM. Cartailbac. Rutot et Breuil s'entendirent pour adopter le
terme d' o Aurignacien », emprunté à la station typique d'Âurignac,
découverte par Lartet, et la plus anciennement connue de ce niveau
en France.
Au sujet du niveau auquel on doit rapporter TAurignacien, une
note discordante s'est élevée récemment. M. Girod a prétendu qu'il
était post-solutréen. Pour nous, nous avons constaté à la grotte La-
coste qu'il était présolutréen. Mais nous ne saurions mieux faire que
d'indiquer à ce sujet la magistrale étude de M. l'abbé Breuil, parue en
réponse à M. Girod, La Question Aurignacienne in Le Préhistori-
que, juillet 1907.
Nous devons d'ailleurs des remerciements à M. Breuil, qui à plu-
sieurs reprises nous a fait profiter de ses connaissances pour l'étude
du Bouïtou.
— 'i8 -
Dissent les premiers éléments d'une subdivision de cet étage.
En bas, c'est une belle industrie abondamment retouchée :
grattoirs, lames étranglées, grattoirs carénés, pièces écail-
lées. En haut, l'outillage beaucoup moins relouché n'a guère
de commun avec le précédent que les grattoirs et les grat-
toirs carénés ; mais, en revanche, il contient une quantité
de burins variés et en particulier le burin busqué. La re-
touche du silex paraît en décadence ; mais aussi des types
nouveaux et plus tranchés apparaissent, dont quelques-uns
se perpétueront à travers tout le magdalénien..
Enfin, l'ensemble de cet outillage était si remarquable, et,
par la multitude de ses formes de transition, se prêtait si
bien à un essai sur son évolution morphologique, que nous
avons cru pouvoir lui consacrer cette longue monographie et
une abondante illustration.
Note supplémentaire
A propos des outils cassés en cours d'usage, signalons une
pièce curieuse. Nous en avions trouvé un exemple à Noail-
les (Bulletin archéologique, 1905, fig. 8, n^ 1, de notre arti-
Fig. 28. — Pièce brisée et utilisée après cassure, reconstituée (2/3) gr. nat.).
Coumba-del-BouItou ; foyers inférieurs.
cle). Ici, c'est un joli grattoir qui, s'étant brisé, avait été
retouché ou utilisé sur un bord. En examinant un lot de
débris, M. l'abbé Breuil a eu la chance de rencontrer les
deux fragments et a su les reconnaître, malgré leur diffé-
rence de patine. On voit que le raccord est parfait (fig. 28).
— 49 -
Ck>inpte général des pièces provenant de la Ck>umba-del-BouXtou
(Notice collection, collerlion Vignnrd et di'iersesi (1)
Pièces moustériennes . .
Lames retouchées sur un
bord
Lames retouchées sur les
bords
Lames retouchées plus
courtes 'genres grat-
toirs doubles ou cire).
Grattoirs sur bout de
lame
Grattoirs en ogive
Grattoirs carénés et voi-
sins
Grattoirs à museau
Perçoirs
Lames étranglées ou dé-
jetées
Pièces écaillées
Burins busqués
Burins d'angle
Burins ordinaires et di-
vers (burins de fortune)
Grattoirs burins
Pièces à encoches
Lamelles à crête retou-
chée
Grandes lames sans re-
touche plus ou moins
utilisées
Nucléi
Eclats et fragments di-
vers (déchet) environ.
Totaux
Total.
FOYBUS INFÉRIEURS
(n»* 1 et 1 bis)
pièces
entières
70
64
92
152
242 I
95 I
135
127
30
35
300 eu V.
D
))
3
»
10
2
12
20
fragments
1. '89
600 env,
300 env
26
3
45
600env
»
»
10 1?)
»
6.000
7.5«^
8.973
FOYERS SUPÉRIEURS
(n»« 2. 3 et 4)
pièces
entières
16
6
12
20
72
È
230
l
1(?)
2(?)
12
140
81
240
56
1
50
62
13
1.014
fragments
60env,
37
7
10
»
»
10
»
4.000
4.132
5.146
14.119
Soit 15.000 silex (en chiffres ronds)
(1) Maintenant que notre étude est terminée, nous n'avons conservé
qu'une partie de nos récoltes. Les plus belles pièces, et en particulier
presque tomes celles qui ont été fîgurées, sont au Musée de Saint-
Gennain-en-Laye 11 y en a une série au Musée de Brive, une autre
au Musée de Toulouse, et d'autres chez des particuliers.
T. XXX.
L. Bardon, a. et J. Bouyssonie.
i — 4
JDTJ F» -Al Y s -A. a- E LIL^OXJSIlSr
PAR
JoHANNÈs PLANTADIS
(Suite el fin)
II
L'École de Crozant
Les deux Creuses et la Sédelle. — Les ruines de Crozant et George
Sand. — Maurice Rollinat à Fresselines. — Les premiers peintres
de Crozant : Parmentier, Lansyer, Donzel. — Les artistes, de 1882
à nos jours : Charles Hareux, Léon Detroy, F. Maillaud, C. Roiry.
W. Didier-Pouget, etc. — Les maîtres impressionnistes : Claude
Monety Armand Guillaumin, Allan Osterlind, les frères Delahogue,
Paul Madeline, Eugène Alluaud, etc.
Par analogie avec l'École de Barbizon — lieu de la forêt
de Fontainebleau où J. Dupré, Théodore Rousseau. Millet,
Corot, Chaigneau et autres artistes vinrent chercher l'inspi-
ration au cours du xix* siècle, — on a donné le nom d'Éco/e
de Crozant à l'ensemble des artistes, de tendances et de
tempéraments divers, qui vinrent travailler, et qui travaillent
encore dans le site merveilleux que forment le confluent de
la Creuse et de la Sédelle, les ruines d'une vieille forteresse
féodale et les hautes falaises sur lesquelles elles se dressent,
à la limite de la Marche limousine et du Berri. A Crozant,
se rattachent les sites moins tragiques de Fresselines et de
la Petite-Creuse, peu éloignés les uns des autres.
Crozant fut en quelque sorte découvert par George Sand.
Dans Le Péché de M. Antoine^ elle décrivit ses aspects mul-
tiples et farouches et appela ainsi l'attention des voyageurs
et des artistes sur lui. Fresselines dut sa notoriété à Maurice
Rollinat, le poète des Névroses et de Dans les Brandes,
qui y fit un très long séjour lorsque, las de Paris et de ses
fièvres, il vint demander aux champs le calme repos, la
douce quiétude de l'âme et du corps.
— 52 —
La vallée Noire, le Pin, Châteaubrun et Gargilesse, évo-
qués dans les romans rustiques de George Sand, avaient
attiré les peintres vers le milieu du siècle dernier. Ils ne
tardèrent pas à découvrir Crnzant et à s'y installer. Entre
1860 et 1805, Lansyer et Charles Donzel y vinrent et s'épri-
rent de sa beauté sauvage. L'Hôtel Lépinat les reçut. Il
garde le souvenir de leur passage sur les panneaux de bois
qu'ils peignirent et qui existent encore.
Ils avaient eu des précurseurs en Parmentier, un artiste
peintre qui enseignait le dessin à Guéret, dans les dernières
années du xviii* siècle et les premières du xix*, et dont on a
un tableau des ruines du château de Crozant, qui est plutôt
un document graphique — de tout premier ordre, d'ailleurs
— qu'une véritable œuvre d'art (1801), et en quelques litho-
graphes dont Langlade et Barbant.
Après la guerre, Crozant fut délaissé. Mais vers 1880, les
artistes commencèrent à s'y rendre, et d'année en année,
augmentèrent leur phalange, au point d'avoir fait de ces
lieux aujourd'hui une véritable colonie de rapins de plus en
plus épris de cette nature, à la fois tourmentée et char-
mante, qui ne cesse de les inspirer, surtout à l'automne.
M. Charles Hareux y fut fidèle depuis 1882. On connaît
de lui : Pont de la Folies à Crozant; Binage de pommes de
tervEy à Crosant; Lever de soleil, à Cro:gant; Bergère tri-
cotant (1888); Un orage aux environs de Crozant (1883);
Les bords de la Creuse, à Crozant, et Nuit d'automne, bords
de la Sédelle (1885); Le calme de la nuit, à Croisant (1893) ;
Bords de la Creuse, à Croyant (1882) ; Le passage du per-
chereau (1887); Temps d'orage, etc.
A la suite de M. Ch. Hareux s'engagèrent : M. Gaston
Vuillier — que nous retrouverons plus tard à Gimel ; — il
exécute pour le Salon : Derniers jours d'été à Confolent
(Creuse), en 1883; Un coin retiré de la Creuse (1882), etc.;
M. Emile Cagniart qui expose : Bords de la Sédelle, en 1882;
M. Pierre Galerne, de qui on voit, en 1888, Le moulin
Brigand, sur la Sédelle; M. Pierre Ballue, que séduisent
les clairs reflets de la gelée blanche; M. Léon Detroy, le
— 53 —
maître aquarelliste, que Gargilesse, Crozant et Fresselines
surtout, revirent à peu près régulièrement pendant plus de
vingt ans; M. Jules Adler; M. Eugène Alluaud, un jeune
peintre de Limoges, élève de Donzel, qui voua à Crozant
une tendresse de fils, et Henry Laurent, dont les nombreux
séjours en cette contrée et la production qu'ils provoquèrent
fut des plus heureuses.
Puis ce furent, dans ces dernières années surtout,
MM. Pierre Lampué, Charles Halle, Pailler, Charles Agard,
Joseph Rignault, Paul et Pierre Thomas, René Juste, Hum-
blot, Olivier Chéron, Henri Bossu, H. Charrier, Charles
Peccate, Nùma Gillet; M°" Palma Daillion, Stolz, Garnier,
Jones, Henri Dabaud, Gardenty, Jeannot, Noblot, R. Bour-
dier, Gaston Anglade, Henri Jamet, Joseph de La Néziére,
Gabriel Lefèvre, Léopold Serre, Octave Linet, Henri et
Gustave Coulon, Gaston Béthune, Henri Mauprat, Paul Gro-
seille, Albert Joseph. Bonnet, Lyon, Hippolytc-Jean Jobart,
Lefranc, etc., qui peignirent la douceur de Fresselines ou
Tâpreté des coteaux de Crozant, les ruines, les falaises, les
moulins, les eaux mouvantes des deux Creuses et de la
Sédelle, des coins de village, les vieux ponts en pierre on en
bois — à toutes les saisons de l'année, mais surtout à Tau-
lomne et l'hiver, les temps de neige et de gel, — dans toutes
les notes de l'art pictural, note classique ou impressionniste.
Il convient de donner une mention spéciale à deux ar-
tistes de l'École de Crozant qui travaillent dans la manière
classique, M, Fernand Maillaud et M. Didier-Pouget.
Berrichon de naissance, mais Marchois par ses attaches
de famille, M. Fernand Maillaud s'est particulièrement
épris de toute la région de Fresselines et de la vallée de la
Creuse. Les foires et les marchés, le charme heureux des
jours de fête, le profil caractéristique des .habitants des
campagnes l'ont aussi servi à souhait. M. Fernand Maillaud ^
— 54 -
qui rappelle, par endroits, le mattre paysagiste anglais,
Thomas Gainsborough, est, par excellence, le peintre de la
« douceur limousine » ou celui de la « douceur berri-
chonne », alors que d'autres ont préféré traduire le côté
tourmenté, quelque peu sauvage, de toure cette région du
centre si variée d'aspects (Ij. La Creuse à Fresselines, Le
ruisseau Martin, Le moulin du Puy-Rajot, Intérieur de
Véglise de Fresselines, Laboureurs à Fresselines, Jeune
fille de la Creuse, Intérieur k Fresselines, Pâques à Fresse-
lines, Bergère sur les côtes de Fresselines, Le meneur de
loups, Le Jour des Morts à Fresselines (au Musée de Gué-
ret), Foire à Fresselines, L'ancien évêché de Guéret, etc.,
entrent bien dans la cadre de nos recherches et font de
M. Fernand Maillaud un des jeunes maîtres du paysage
limousin lee plus intéressants.
M. Didier-Pouget, le peintre inspiré des bruyères roses
et des matins embrumés, exposa au Salon des artistes fran-
(;ais : En 1898, Le matin, vallée de la Creuse (à la ville de
Paris); en 1899, Brumes du matin, vallée de la Creuse
(Musée de Montpellier); en 1901, Ajoncs et bruyères, vallée
de la Creuse (collection de La Sota à Bilbao). Depuis lors,
cet artiste s'est presque toujours inspiré du Limousin dans
la composition de ses tableaux. Nous le rencontrerons à
nouveau dans le bas pays, où il eut une production abon-
dante.
Mentionnons encore M. Camille Boiry [Vieilles maisons,
La Creuse j Effet de soleil sur de vieux logis, Le bourg de
Fresselines, La maison de Rollinat, etc.)» ainsi que M. Ga-
briel Mathieu, que les bords escarpés de la Creuse — puis
ceux de la Vienne — retinrent souvent (2).
(1) Un autre artiste du Berry, Jean Baflfier, dont la mère était de
Fresselines, s'est presque exclusivement consacré à synthétiser, dans
son œuvre sculpturale, les divers états d'âme de sa terre natale et de
celle de ses parents. Il est, dans la plus belle et la plus large accep-
tion du mot, un « artiste paysan », gardien fidèle des traditions et
interprète de la nature nourricière.
(?) De préférence, les artistes de Grozant exposent au Salon d au-
tomne, aux Indépendants et à la Nationale.
— 55 —
Mais Crozant et Fresselines ont surtout inspiré les maîtres
de l'art impressionniste : Claude Monet et Armand Guil-
laumin, en premier lieu. Puis, en second, leurs principaux
disciples : MM. Paul Madeline, les frères Delahogue, AUan
Osterlind, Otton Friestz, Eugène AUuaud, etc.
En février et mars 1889, Claude Monet se rendit à Fres-
selines chez RoUinat, dont il fut l'hôte. Les « tragiques
paysages de la Creuse, voilés d'un si poignant et presque
biblique mystère », comme disait M. Octave Mirbeau, l'in-
téressèrent, et il en rapporta de son séjour une trentaine de
toiles qui furent exposées à la galerie Georges Petit, à
Paris, la même année. Elles y obtinrent un succès reten-
tissant avec d'autres œuvres du maître. Jamais, peut-être,
la « mise en caractère d'un terrain j^, qui est le propre de
l'art si probe et si original de Claude Monet, n'avait été
observée comme dans les œuvres suivantes :
Étude d'eau; Ravin de la Creuse, effet du soir; Pont de
Vervit (Creuse); Vieil arbre au bord de la Creuse; Village
de la Rocheblond (Creuse) ; Vervit [Creuse) ; Gelée blanche,
soleil levant; Avant le lever du soleil, gelée blanche; Les
eaux semblantes (Creuse) , effet de soleil ; Le barrage de
Vervit (Creuse); Les eaux semblantes, temps sombre; Ravin
de la Petite-Creuse; Coucher de soleil aux eaux semblantes;
La Creuse, temps sombre ; La Creuse ; Le vieil arbre (Creuse) ;
Rocher de la Creuse (appartient à M. Clemenceau), etc.
o Quel que soit le coin de nature qui l'intéresse, dit
M. Georges Lecomte dans L'Art Impressionniste, M. Claude
Monet en restitue l'ampleur. Les combes abruptes et mysté-
rieuses de la Creuse l'ont tenté : il a rendu la solitude des
cirques, le chaos géant des rochers que les déluges entas-
sèrent, les fayes profondes dont le jour perce à peine l'ombre.
Des végétations sombres vêtent les parois des gouffres. Des
taillis maigrelets ornent le bord des ravins et les brusques
escarpements. Une teinte violàtre attriste ces âpres sites
dont l'effroi est accru par la nuit lugubre des gorges.
- 56 —
t Cette nature tourmentée n'est jamais mélodramatique.
Le peintre ne corrompt pas sa simplicité austère par un vain
romantisme. La grandeur farouche du paysage suffit pour
émouvoir et l'imagination n'a point besoin d'installer là des
personnages d'allégorie, des fabulations mythologiques ou
des bandits perpétrant un attentat. Ces convulsions de la
terre, interprétée par cet art généralisateur, ont une solen-
nité grandiose. »
Il semble bien que c'est dans le cadre de la nature mar-
choise que M. Guillaumin a pu donner toute sa mesure, dit
M. Georges Lacombe dans une notice qu'il consacra à cet
artiste, et il ajoute :
a Chaque peintre a ainsi sa terre d'élection, ses paysa-
ges préférés où il travaille avec le plus de bonheur et
qui lui inspirent ses œuvres les plus belles, soit parce que
ce pays correspond le mieux avec sa vraie nature, soit qu'un
atavisme lointain le lui fasse mieux comprendre.
« La Creuse fut pour Guillaumin cette terre d'élection,
parce que son âpre caractère, plein de délicatesses éparses
et de joie intime, s'accorde à merveille avec le tempérament
fort mais délicieux de secrètes douceurs, qui est celui de
notre peintre, et aussi parce que son hérédité montagnarde
se retrouve à l'aise dans ce rude pays. Il n'y a qu'à voir
Guillaumin pour reconnaître en lui un homme du Massif
central. Sa tête puissante, renflée, volumineuse, qui tout de
suite donne le sentiment de l'énergie et de l'obstination, fait
penser aux crêtes basaltiques de là bas. Le bleu clair de son
regard fin, doux et franc, rappelle les eaux transparentes qui
dévalent des cimes en caressant les rochers moussus dont le
lit des ruisseaux s'encombre et les vieux arbres des rives.
Enfin, malgré cinquante ans de séjour à Paris, 3a démarche
reste celle d'un montagnard gravissant une côte.
« Aussi dès qu'il put reprendre possession de ce pays d'où
sa famille est originaire, comme il en saisit vite la solide
- 57 -
structure, la beauté tour à tour sévère et charmante, la
poésie tanlôt pleine de grandeur, tantôt exquise de grâce !
C'est là surlout qu'il put tout à la fois montrer ses ûom de
force et de délicatesse. C'est dans ce pays mouvementé, aux
lointaines perspectives de cimes et de plateaux enchevêtrés,
qu'il se révéla le robuste, le puissant constructeur de ter-
rains qu'il est.
a Entre tous les mérites personnels qui le distinguent,
c'est peut être son originalité la plus caractéristique, Gull-
laumin aime la majestueuse beauté des grands espaces de
montagnes et de plaines se développant à l'infini, apei'cus à
travers une gorge du premier plan, au delà du ravin dont il
représente le mystère feuillu. Il aime les vastes plateaux
étalés en pleine lumière, qui, couronnant d'étroites vallées
toutes sonores du fracas des torrents, donnent des fonds
d'une variété et d'une profondeur admirables. C'est, dans un
grand charme de lumière, dans une gamme très riche de
couleurs, une succession de plans d'un sûr équilibre et
magnifiquement raccordés. Il faut être d'un tel pays par ses
origines ou par les longues années qu'on y passa, pour en
rendre avec tant de force la structure si complexe.
« Encore cette solide ossature n'est-elle que le support
des radieuses et délicates harmonies que Guillaumin rôali&e
sans cesse d'après les aspects si divers de cette région. Que
ces crêtes, ces plateaux et ces combes se recouvrent de
neige ou scintillent sous la gelée blanche illuminée de soleil,
il en évoque la candeur radieuse, les subtiles ombres bleues
et toute la rayonnante féerie. S'il traduit avec la plus fraîche
délicatesse le charme des jeunes verdures du printemps^ la
merveille des panaches blancs et roses des arbres en fleurs
se détachant sur les rouges labours et le vert tendre des
prairies, c'est surtout le grave enchantement de l'automne,
avec sa gamme si magnifiquement nuancée d'ors, de roux,
de verts pâles, qui lui permit de rendre la plus émouvante
beauté de ce pays sévère, mais plein de grâces intimes.
« C'est dans cette région rocheuse, couverte de bois, feu-
trée de mousses et de lichens, parsemée de ruines aLtiéres
— 58 —
CQ silhouette sur le ciel où passent les plus changeantes
tapisseries de nuages, que la personnalité de Guillaumin,
tout ensemble puissante et délicate, se révéla le mieux en
A. Guillaumin : Le Pont de la Folie, a Crozant
(Musée du Luxembourg).
œuvres vigoureuses, exquisement nuancées, d'un faste lumi-
neux et rayonnant. Belles pages de notre art moderne que
nous enviera l'avenir M) ».
(1) Un grand peintre de VImpressionisme [Revue Bleue, 1906).
— 59 —
D'Armand Guillaumin, on peut citer : Neiges et gelées
blanches; Les Ruines de Croisant; Le pont de la Folie
(Musée du Luxembourg); Chemin des Gouttes; Moulin Bou-
chardon, bords de la Sédelle; Matin à Génétin: Châtai-
gniers en fleurs, au matin; Temps de brouillard, à Crojaiant;
Moulin de Jonon, Les Brousses; L'écluse du pont Char-
reau; Le pont Brigand sur la Sédelle; Moulin de la Folie;
Bords de la Creuse, etc., etc. (1).
G'st aussi à Crozant que se révéla le talent souple et
nuancé de M. Paul Madeline, le peintre des mariages har-
monieux, des tons de cuivre et d'améthyste, dénoncés par
M. Arsène Alexandre. « Nul njieux que lui, a écrit M. Octave
Uzanne, n'exprima les magistrales et sévères beautés du
pays de Crozant, les eaux torrentueuses de la Sédelle, l'or
fauve des tapis de feuilles sous les châtaigneraies en no-
vembre, les vieux moulins pittoresques au fond des vallées,
les collines couvertes de bruyères ou bien encore les pâles
soleils du matin se jouant sur le givre des prairies déco-
lorées par le gel.
a Madeline avait acquis, auprès de ceux qui aiment la
sincérité du rendu et qui ont le sentiment de la nature
décorativement interprétée et joyeusement chantée dans la
symphonie des tons, une suffisante notoriété pour pour-
suivre, avec un succès croissant, ses investigations sur
cette terre creusoise qu'illustra le poète de la nature Rol-
linat. »
a M. Madeline, dit encore M°* Marcelle Tinayre, est un
peu impressionniste, pas trop. Il peint une entrée de parc,
une grille, deux pavillons au toit pointu, des feuilles rousses
partout, un enfant et une vieille qui passent; il peint le
Pont de la Folie, un moulin, des arbres cuivrés, un ciel
de turquoise pâle, délicat, délicieux, le reflet de ce ciel
(1) Sur Clau«le Monet et A. Guillaumin, cf. Duret : Les maîtres
peintres impressionnistes (Paris, H. Floury, 1907).
— 60 —
dans la rivière, — et toute la poésie de novembre lient dans
ces deux tableaux (1j. »
Parmi les meilleurs tableaux de ce peintre, citons : Le
pont Charreau (1899) ; Le vallon (au Musée de Pau); Vallée
de la Sédelle (au Musée de Rouen); Fin de journée, La
châtaigneraie (au Musée du Petit- Palais des Champs-Ely-
sées) ; La ramasse des châtaignes^ Les châtaigniers, qui
rappellent Théodore Rousseau; La bourrasque y La Che-
vrièrcy Tournant de Creuse, Ferme limousine, Vieille
maison à Crozant, Le moulin de Génétin, Le barrage de
Génétin^ Une crue de la Sédelle, Le moulin aux foulons,
La Sédelle (Exposition particulière (1907); Le vieux charme,
Châtaigniers, Bois mort, Village limousin (1907); Soleil
d'automyie à Crozant (1906), etc.
Les frères Alexis et Eugène Delahogue ont mis dans
rinterprétation de leurs « impressions » marchoises un peu
de la lumière d'Orient dont ils emplirent leurs yeux et leurs
tableaux; les elTets qu'ils obtiennent ainsi sont des plus
heureux et les tonalités cuivrées de l'automne à Crozant
n'en sont que plus saisissantes.
M. Eugène Alluaud a surpris aussi les colorations écla-
tantes de l'arrière saison et la tristesse infinie des hivers
dans l'escarpenjent des vallées de la Creuse et de la Sédelle ;
il les traduit avec une sincérité de vision et une virtuosité
de moyens vraiment remarquables .2). Peintre et graveur, il
a fixé les jeux fuyants de la lumière, le tourbillonnement des
eaux, toute la gamme adorable des colorations automnales
ou printanières, la blancheur immaculée des champs et des
combes couverts de neige, les brumes roses et violettes, les
vapeurs légères qu'étendent sur les choses les aubes et les
crépuscules (3J.
(1) Revue de Paris (Salons de 1904).
(2) Un éinailleur de Limoges de grand talent, M. Ernest Blancher,
a traduii sur Témail certains sujets des tableaux de M. Alluaud, ins-
pirés de Crozant. de la plus tieureuse façon. Ces peintures sur émail
furent fort adtnirées au Salon d'automne (i906).
(1) M. A. Renoir — qui est un des maîtres les plus réputés du petit
- 61 —
Peupliers des ruines de Croisant, La Sédelle en mars.
L'écluse du mouliny La fusée de soleil, Faux jour au tour-
nant de la rivière, Vues de la rouie de Fresselines, Rocher
de la fileuse à Crozant, Soleil couchant, Les ruines de Cro-
zant Le chemin des chevaliers, La montagne de Caura-
dilles, Matinée d'hiver sur la rivière anglaise dans un parc
limousin. Moulin dans la Marche, etc., d'Alluaud, figurèrent
aux Salons des Indépendants et de la Société Nationale, de
1903 à 1907. Citons encore de lui : Champs de genêts. Allées
de bouleaux, Allées de chênes, La Creuse à Crojiant, Tour-
nant de la Creuse, etc.
A cette catégorie de peintres, nous devons encore ratta-
cher deux artistes étrangers, amis de Rollinat, qui ont fait
de Crozant, et surtout de Fresselines, leur séjour de prédi-
lection : Otto Friestz, le peintre des châtaigniers convulsés,
et Allan Osterlind, dont les estampes originales en cou-
leurs sont bien connues. Osterlind se plaît à rendre les
chaudes caresses du soleil sur les rouges toitures campa-
gnardes, les clartés fauves du couchant et aussi l'enveloppe-
ment brumeux des villages, à l'aube ou au soir tombant,
alors qu'un panache de fumée sort de la maison du paysan.
groupe des impressionnistes, avec Manet, Claude Monet et Degas. —
quoique né à Limoges, ne s'est pas inspiré de son pays dans ses
paysages.
III
A travers le Limousin et la Marche.
Graveurs et lithographes. — Italiens et passagers.
En Bas*Limou8in : Beaulieu et la vallée de la Dordogne (JuJ:en Le
Blant, Thaulow, Duval-Gozlan, etc.). — Brive et ses environs. Uol-
longes, Obazine (E. Rupin, A. Bertin, R. Gaspéri, Galand, Dïdî^^r-
Pouget, etc.)— Tulle et ses barris. Gimel (Gaston Vuillier. Didier-
Pouget, etc.) — Argentat. Servières et la Maronne. — LavnlhV de
la Vézère. Uzerche (Courtot, Ch. Halle, Alluaud, etc.).
Treignac et la région des Monédières (Ed. Tapissier, Paul Hallez,
P. Ranson, Gabert, etc.). — Rodolphe Bresdin dit Chien-C&illou. à
Chanteix. — Les Hauts-Plateaux de la Corrèze. — Les peintres de
Bort.
£n Haut-Limousin : Limoges ot ses vieux aspects. La valléf^ de la
Vienne (Trouillebert, Courtot, Bichet, G. Mathieu, Paul Thomas,
etc.). — Saint-Yrieix et ses environs. — Les peintres de Saint-
Junien et de la vallée de la Glane (Baudit, Jean Teillet, etcl. —
Artistes divers.
En Pays marchois : Aubusson et la Haute-Creuse. -— A Saint-Sulpîce-
les-Champs (J. Rouflfet, Desvareux-Larpenteur, etc.). — Les ppiiiLres
de la Gartempe et du Taurion. — Albert Grateyrolles- — Eng^ène
Delestre à Margnot. — Paul Rossert. — Les Osterlind. — Ça ^^t \h.
En cette dernière partie, nous allons parcourir en hais
sens la province du Limousin pour y rechercher et noter
les artistes qui ont pu y séjourner plus ou moins longtemps,
et pour signaler leurs principales œuvres.
D'un mot, nous mentionnerons tout d'abord le comédien-
dessinateur Beaumesnil, qui releva avec plus de faniaisie
que d'exactitude, au xviii® siècle, les monuments anciens
qu'il y trouva; Tripon, auteur de l'Historique monumenlal
de Vancienne province du Limousin y paru à Linioges
en 1836; les graveurs-lithographes : Albert, qui ajoula ii
sa collection des Hommes illustres du Limousin, une série
de paysages; Barbant, Langlade et autres, auteurs de VAl-
- 64 -
bum historique et pittoresque de la Creuse; Eugène Cicéri
et Ant. Roy qui donnèrent des vues prises dans la Creuse
Victor Petit, qui releva des aspects, disparus aujourd'hui,
de Tulle et du Bas-Limousin, etc , etc.
Au milieu du siècle dernier, nos campagnes, — comme
toutes celles des régions centrales et méridionales de la
France, — furent encore visitées par une foule d'artistes
italiens qui s'otfraient à remettre à neuf une fresque ou un
tableau d'église, à repeindre un rétable, à retoucher un che-
min de croix, à redorer une statue, etc. Les méfaits con-
sommés par ces nomades sont innombrables. Telle peinture
à la fresque du xiii* ou du xi\* siècle, tel tableau datant du
XVI', du xvii* ou du xviii* siècle, furent refaits de façon qu'il
ne subsistait plus rien de leur état primitif. Le châtelain, le
bourgeois cossu de campagne qui possédaient dans leurs
demeures quelques panneaux décoratifs, un peu dégradés
par les ans et le manque de soins, firent aussi appel au o ta-
lent » de ces italiens, qui s'ingénièrent à prouver qu'ils en
avaient en faisant disparaître à tout jamais, sous la couche
de leur badigeon, tout ce qui rappelait l'origine de ces pan-
neaux.
Parfois les plus habiles d'entre ces italiens, — charmés
par la nature agreste du pays, — dressaient leur chevalet en
plein air et prenaient quelques études dont ils tiraient parti
ensuite, soit en lavant des aquarelles, soit en brossant un
vrai tableau. Mais aucun d'eux n'a laissé de traces bien vives
de sa production, — à notre connaissance du moins.
Depuis quelques années, des peintres de Paris, plus ou
moins en renom, se rendent dans les plus importantes villes
du pays; ils y exposent quelques œuvres, chez un négociant
bien en vue, sur la principale voie publique et s'offrent
d'exécuter des portraits dans la « bonne société ». Entre
temps, ils notent sur la toile quelque coin de rue pittores-
que de la ville ou les aspects de paysages signalés à leur
attention.
Mais les artistes qui se sont le plus inspirés de la nature
limousine sont les professeurs de dessin qui, fixés dans le
— 65 —
pays par leur emploi ou des alliances de famille, occupent
leurs loisirs à peindre les sites familiers qui les solHcitenU
L'été venu, les artistes de Paris font leurs malles et
partent pour les régions à la mode. Il en est qui les dé-
daignent pourtant et qui s'en vont, à l'aventine, découvrir
la contrée méconnue qui leur livrera les seci els de sa heautè
inviolée. Et c'est ainsi que nombre d'entre ihix se î^endenL
en Limousin. Depuis vingt ans, leur continssent n'a fait que
s'accroître. Nous avons vu ceux de Crozani et de Fresseli-
nés. Notons à présent ceux qui ont fait ou font ent'ore de
bonnes œuvres aux quatre coins de la province.
Le site encbanteur de Beaulieu, aux contins du Bas-Li-
mousin et du Haut-Quercy, sur les bords Je la IJorilogne,
que dominent les collines d'Altillac et d'Astaillac, couvertes
de vignes et couronnées de châtaigneraies ; les vallées toutes
proches de la Gère, devaient faire de cette petite ville, toute
pleine de souvenirs historiques, le rendez-vous df^s aitistes.
Depuis une vingtaine d'années ils n'y ont pas manqué. Parmi
eux, il en est de glorieux :
M"* Martonneau, née Le Sage, Grandin, Gautrie [marquis
de Saint-Pollet), Trouillebert, Gamille Monnier, R-GaF^pêri,
Serrier, Lucien Robert, Peter Sound (dont on connaît les
très curieuses estampes en couleurs), Dclierre (le graveur) ^
Henri Martin, Pierre de Montholon, Duval-Gozlan, Julien
Le Blant, Frits Thaulow, etc.
Le talent de M. Duval-Gozlan s'apparente aux néo-impres-
sionnistes ; il suit le sillon lumineux tracé par les Claude
Monet, les Renoir et les Sisley. Il a vu Beaulieu enveloppé
d'une lumière douce, parfois, et aussi s'assoupipsant dans la
chaleur lourde des soirs d'été. On a remarqué île lui, aux
Indépendants ou à la Nationale : Beaulieu {1901], La C/ia-
pelle des Pénitents, Fin de jour à Beaulieu, Carml k Beau-
lieu, Bords de la Dordogne (1905 et 1907).
Un jour, M. Julien Le Blant, lassé de dessiner des? marins
T. XXX. i ^ 5
— 66 —
et de vieux grognards, de camper de fiers chouans pour le
roman de Balzac, et de représenter les scènes tracées par
Alfred de Vigny dans Grandeur et Servitude militaires,
alla demander au coteau de Rholan, qui domine la magnifi-
que route, tout ombragée, conduisante la gare de Bretenoux-
Biars, entre Limousin et Quercy, le calme et le repos des
champs. Là, il vit des choses différentes de celles qu'il avait
traitées jusqu'alors et en changeant de sujets d'inspiration,
il modifia sa manière. Dans une note, que les impression-
nistes ne désavoueraient pas, il nota le grouillement des foi-
res et des marchés, le déballage des marchands ambulants,
le tournoiement des chevaux de bois chers à Verlaine, le va
et vient bruyant d'une fête votive, le rythme d'un groupe de
laveuses penchées sur l'eau du Ménoire ou de la Gère, les
canaux de la Dordogne, les vieilles rues de Beaulieu et de
Bretenoux, des coins exquis de rivière, les foires de Sainte-
Catherine et de Saint-Eutrope, les cours d'auberges encom-
brées de charrettes, les marchés de la Chapelle et des Péni-
tents, la boucherie Audinet, la place Marbot, la rue de
l'Église, etc. Dans une exposition, à Paris (1905), on apprécia
vivement toute cette activité campagnarde, tout ce pittores-
que vivant, que rendait à merveille le prestigieux pinceau
de l'artiste.
M. Pierre de Montholon a éclairé d'une lumière douce, à
peine voilée, de jolis aspects bellocois, dont la perspective
merveilleuse de la Chapelle des Pénitents, sur les bords de
la Dordogne, qu'il vit dans le « Clair matin d'une belle jour-
née d'été » (1).
Trouillebert, l'émule de Corot, qui peignait dans sa ma-
nière, avec une grande virtuosité et un sentiment très per-
sonnel, a interprété des « Coins » de Dordogne du plus
séduisant effet.
C*est en 1903 que Thaulow se rendit dans le Bas-Limou-
sin. Il vit Uzerche, travailla quelque temps à Collonges, la
(1; Ce même sujet a été traité par M. Henri Polart, pour l'affiche
du Syndicat d'initiative des Gorges de la Dordogne, section de
Deaulieu (1907). •
îi\\u\'i*-\t\. ij* piiys ^:nh'n^■^^(i ;ii] |ilii- hrUK" [hjiiiI, ÏN-iidi'**
Tirvot^i Jus jiMiv^ liiiN>;iNl!-» ilr riinii r ii'nulOi% «'rj'|ttL--i'iil,jN''*;
triiip-. lies tuif- ;nu luilr- ]^jMI^^^^> mt l,i\ri»- Jr [/lllip', rr
iii;Mli'r 1*^1 iivariî Iniii un iiii'iHii[i;ti al>lij iM |»ni>satil e\tir^kh*ur
F. Tii\«t*iVi, . !.\ nr*Jil*ii<jM , A fiL.^• U -hi
Je l'ciLii, — lies GJHLV monvaulu^, fnnjiilu mm !>*■-. <innl il ^..Hl
reriflre niervirillfEr>rNit^]!i Ir ll]^M({^lrlal'^JU'nl ui Ir IiomIU, ^
lornliée ; deschfîniJn^^jun» Ih:'S(|l' IViiiïlL'^ niuiScs, fH' l'anlhiinH'
eiitiOp doo[ il sol nuitîr l'iîjilîiiiu^^^aljl»' uu^laiirolii»,
De Beaulieii, Tlmuluw rappitrla ; /-a lii}nl*fijtif [.nu I^H'I-
Bas;, r^c^s r^faïa^ij.s, sur la vituiv Ao l^Manh^Mi A lîfi^Lr-
— 68 —
DOUX (1904) ; Le Soir (1904), Soir en Corrèze (1905) (1), où
sur un ciel mauve, une étoile piquait son point lumineux, le
tout exposé au salon de la Nationale. Puis ce furent encore :
Petite Rivière de Beauliev (le Ménoire), Rue de village,
Toits rougesy La. Nuit (exposés à la galerie Georges Petit,
en 1904) ; Été à Beaulieu, Bords de la Dordogne (vente de
son atelier, après sa mort), etc.
Une des dernières œuvres du maître est une estampe en
couleurs, La Diligence, qui note, à la nuit tombante, Tarri-
vée d'un courrier, aux formes massives et désuètes, sur la
place de la Barbecane. Sur la gauche, baignée d'ombre, s'al-
longe la façade de l'hôtel du Bessol ; sur la droite, Marbot
s'érige sur son socle blanc ; au milieu, la diligence glisse,
fantomatique, dans la brume, alors que dans le fond s'es-
tompent des formes de vieux logis. L'heure est indécise,
troublante, et l'impression qui se dégage de l'œuvre est
profondément saisissante.
Brive et ses environs (Malemort, Varetz, Obazine, Meys-
sac, Collonges, etc.), ont été peints par quelques artistes,
fixés dans le pays, et par quelques autres de passage : Noël
Boudy ; M. Castex (Brive sous la neige, Église de Maie-
mort, Varetz à /'automne, Cascade de la Bouvie, Bords de
la Corrèze, La Grotte des Anglais, près de Bassaler, Cime-
tière limousin, Confluent de la Corrèze et de la Vézère,
Porche de V église de Saint-Pantaléon-de-Larche, Collines
couvertes de genêts, etc. ) ; M. Ernest Rupin, un des meil-
leurs produits de l'École de Toulouse, conservateur du Musée
(1) Collection Duverger ■ Taboureau. A ce propos, M"* Marcelle
Tinayre écrivait dans la Heoue de Paris : « M. Thaulow nous montre
une maison qui s'endort parmi les arbres rouilles, au bord de la Dor-
dogne ; le ciel est mauve ; une étoile se lève Ailleurs, une route
boueuse fuit entre les platanes ; le ciel est gris ; des vols de corbeaux
se mêlent au vol des feuilles. Paysages mouillés, frissonnante, d'une
beauté grave et douce ».
- 69 —
de Brive et historiographe de L'Œuvre de Limoges^ sachant
manier avec autant d'habileté que de compétence la plume
et le pinceau ; M. Raphaël Gasperi, né en Quercy d'un père
italien dont il fut l'élève, fusainiste et peintre (vieilles rues
de Brive, bords de la Corrèze, paysages de la banlieue :
Étoile du SoiVy sapins de Migoul, En Hiver, neige sur le
chemin de la Bouvie, La Nuit vientf étang de Glanges (au
Musée de Brive), Matinée d'Automne, Femme se rendant à
Véglise de Malemort, Derniers rayons (route de Meyssac),
U7i soir dlliver (1908), etc.) ; M. Etienne Bonnand, un des
rénovateurs des dessins de dentelle, qui n'ignore point, tant
s'en faut, comment se lait un paysage ; M. Léon Galand
(Vieille rue de Malemort^ Effet du Soir, Enfants jouant
sur les bords de la Corrèze, etc.). Citons encore : MM. Jau-
din, Alexandre Bertin (Meyssac), Delsart, Jules Vialle,
Robert (Turenne), M"« Marguerite Bernard, etc.
Nous retrouvons presque tous ces artistes à Obazine, un
des sites les plus intéressants du Bas-Limousin, avecGimel,
Beaulieu, Uzerche, etc. : Noël Boudy (Le Saut de la Ber-
gère, 1892 ; Je crois en Dieu, au Musée de Brive) ; Delierre
(Gorges de Coiroux, au Musée de Brive) ; le graveur Prunaire
(Tombeau de saint Etienne) ; Ernest Rupin (Vieux Porche
d'Obazine); l'aquarelliste David; Raphaël Gasperi (Champ
de Blé noir, 1903 ; Le Soir, Sarrazin en fleurs, 1905 ; Lever
de Lune, 1906, etc.); A. Fleuri; enfin, M. Didier-Pouget,
qui, après avoir fixé les sites de la Creuse, à Gargillesse et à
Crozant, se rendit à Obazine sur les indications de M. Gas-
peri, qu'il avait rencontré dans le Midi.
M. Didier-Pouget s'est fait une grande réputation de pein-
tre de bruyères en fleurs, dont il a fort heureusement rendu
l'intense poésie. Il en a été blâmé par les uns, loué par les
autres, ce qui n'empêche pas les imitateurs, et même les
contrefacteurs, plus ou moins adroits, de se produire en
tous temps et en tous lieux. ^ Lointains ambrés, eaux limpi-
des, chênes robustes à demi-dépouillés de leurs feuilles rous-
sies, fin de saison, déclin du jour, beaux comme la vieillesse
du sage, M. Didier- Pouget reste fidèle à la Corrèze et si les
— 70 —
splendeurs d'un couchant sur les Pyrénées le séduisent un
moment, il revient vite aux collines mauves, aux châtai-
gniers, aux bruyères roses, aux torrents qui grondent dans
les vallées vaporeuses » (1). Il est, en effet, souvent revenu
à Obazine, après même avoir visité Gimel et Argentat, où
nous allons le retrouver, car il aime les grands horizons, les
vastes étendues.
D'Obazine, on a de lui de nombreuses études et des ta-
bleaux : Soleil couchant sur la vallée de la Corrèze (exposi-
tion des peintres de montagne, 1906); Le Matin, vallée de
la Corrèze (1902), où Ton voit le clocher de Saint-Etienne
s'estompant dans la brume (à M. Kokoreff, à Saint-Péters-
bourg) ; Paysage Limousin, effet du soir (1905); Le Canal
d^Obazine, au couchant; Lever de Lune, au crépuscule,
1907, Coucher de soleil, sur la vallée de la Corrèze (1908),
Vallée de la Corrèze, bruyères en fleurs (1908), etc.
A Collonges, la Ville rouge, vint, en 1903, Fritz Thaulow,
alors qu'il séjournait à Beaulieu. II y prit des éludes et s'ins-
pira d'une de ses gentilhommières pour exécuter Le Manoir,
vu au soleil couchant, après la pluie, à l'automne, tableau
exposé à Paris en 1904.
La situation pittoresque de Tulle, avec ses vieilles rues
datant du moyen âge, ses quartiers haut perchés montant à
l'assaut des collines dans un désordre imprévu, ses maisons
à balcons de bois, festonnés de treilles ; la beauté verte de
ses environs (vallées de la Corrèze, de la Solane, de la Ce-
ronne, de la Monlane, de la Valouze, etc.), ont beaucoup plus
tenté les photographes et les amateurs aquarellistes ou aqua-
fortistes (2), que les véritables artistes ; et c'est fort dom-
mage, car la ville et la banlieue offrent une mine inépuisable
de « matière picturale '>. Il convient cependant de signaler,
parmi ces derniers :
(1) M"* Marcelle Tinayre : Reçue de Paris,
(2) Gappon, Bertin, Kessler, Mathieu Rorie.
— 7t —
Anioine Soulié, élève de Tatelier de Gleyre et de T Aca-
démie de Barcelone, et son fils, Michel Soulié, élève de son
père et de Gérôme qui, par le pinceau, le crayon, le fusain
ou la plume se sont appliqués à traduire les aspects anciens
de la ville et les sites pleins de grâce et de fraîcheur de la
banlieue ; Lacroix, qui fixa des coins curieux du cours de
la Solane, alors qu'elle coulait à ciel ouvert dans le quartier
du Trech ; Lucien Brunaud, qu'inspira le moulin des Brochs
et autres vues de caractère archaïque ; M. Alexandre Bertin,
qui vint à Tulle vers 1887 ; M. Julien Tinayre, graveur-
aquafortiste, dont la femme évoqua le Tulle du xvii* siècle
dans son roman La vie amoureuse de François Barbazan-
(jes; M" • Marie et Cécile Desliens, qui passèrent la majeure
partie de leur jeunesse à Tulle et dont on a des. intérieurs,
des vues des cloîtres, de l'ancienne Visitation ; des portraits
de vieilles femmes, etc. ; M. Théophile Bernet, de Baudot,
Gasperi, G. Vuillier, Faucher, Bœuf, Bernard, Verdiër (La-
guenne), etc., etc.
Mais la perle de la grande banlieue de Tulle est évidem-
ment Gimel, avec ses gorges profondes, ses eaux mugissan-
tes, ses cascades, le calme miroir de ses étangs et ses épais-
ses châtaigneraies. On chercherait vainement un site aussi
grandiose, aussi émouvant que celui-ci, si l'on excepte, dans
la région, Roc-Amadour et Crozant. Il a cependant peu attiré
les artistes jusqu'ici. Il était réservé à l'un des leurs de lui
rendre pleinement justix^e et de le signaler à la curiosité et à
l'admiration du public, en dehors des Limousins.
M. Gaston Vuillier, qui fut tout d'abord à Crozant et dans
la Creuse, où il brossa de nombreuses toiles vers 1882, se
prit, un jour, de passion pour les voyages. D'une plume
alerte, imagée, il fixa ses impressions, dont il accrut l'inté-
rêt en les illustrant dun crayon vraiment inspiré, à la fois
souple et précis. Il visita la Corse, la Sardaigne, les « îles
oubliées » de la Méditerranée, puis le Quercy, d'où il rap-
porta une notice sur Roc-Amadour et le Causse de Gramat.
Ayant vu le Limousin par le haut, à Crozant, il eût la cu-
riosité de le prendre cette fois à revers, par le bas, et de le
— 72 —
Gaston Vlhllier : L'Inferno, a Gimel
(Cliché du Tour du Monde).
— 73 —
pénétrer par Beaulieu, en remontant la vallée de la Dordo-
gne. Il visita Argentat, nota la silhouette des tours féodales
de Merle à la façon de Gustave Doré, gagna Tulle et dé-
couvrit Gimel !
a Le Limousin, écrivait-il. a été pour moi un attachant
sujet d'étude et, pendant plusieurs années, chaque automne
m*y a vu revenir ». En 1894, il y était à peu près définitive-
ment fixé et s'installait dans un logis, paré de mille objets
d'art curieux et précieux, sur les pentes d'une falaise qui
domine Tabîme où grondent les eaux des cascades de Gimel.
En 1893, il publia dans Le Tour du Monde sa première
relation de voyage En Limousin, qu'il conta en poète et
illustra en artiste. Telles de ses figures de paysannes sont
d'une si intense expression, qu'on les croirait prêtes à s'ani-
mer.
Entre temps, il sauve les cascades du danger d'une exploi-
tation industrielle, parcourt la Sicile, la Tunisie, Malte et
revient à Gimel qu'il ne quitte, l'hiver, que pour aller aux
Baléares et dans l'Andalousie ensoleillée et grouillante.
Observateur pénétrant, dessinateur sévère, coloriste hors
pair en ses rutilantes aquarelles, il note les faits et gestes
des gens de Majorque, des bohémiens de Grenade, ou des
paysans, sorciers et mendiants du Bas-Limousin, avec un
art subtil et somptueux de metteur en scène avisé, aux iné-
puisables ressourciîs. Voyez et lisez Chez les Magiciens et
les Sorciers de la Corrè^e (I) et Le Culte des Fontaines en
Limousin (2), c'est tout simplement merveilleux. L'écrivain
vous séJuira par son style chatoyant, tout imprégné parfois
d'une douce et tendre mélancolie ; l'artiste allumera votre
imagination et fera éclater à vos yeux les tons d'une palette
atténuée, il est vrai, mais combien vivante et vibrante!
C'est un maître à la fois réaliste et rêveur : ce qui explique
que sa conception se nuance à l'occasion d'une teinte de
romantisme (3).
(l: Tour du Monde, 1809.
lî) Ibidem, 1901.
(3) Les dessins de M. G. Vuillier ont été acquis par la ville de Tulle
pour son Musée.
-74 -
G. VUILLIKR.
(Ciïcbé du Tattr U« Mmdth
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— 75 —
Le tumulte de la Montane, roulant ses eaux écumantes à
travers les éboulis de rochers, pour les précipiter ensuîle
dans le vide, par trois fois, de hauteurs vertigineuses, n\a
pas tenté, jusqu'ici, le pinceau du peintre des bruyères
fleuries et des matins délicatement voilés de buées. Il leur a
préféré l'étage supérieur des plateaux, aux horizons étendus,
et le calme reposant, auguste, des miroirs de Diane, en l'as-
soupissement des soirs. M. Didier-Pouget est venu réguliè-
rement à Gimeldès 1901, et, au Salon de 1902, il exposait ;
Crépuscule, Étang de Ruffaud (à M. Reutlinger), qui mon-
trait une seconde manière de son talent du plus captivant
intérêt. En 1906, il répétait le même thème, Lever de Lxnie
sur Vétang, dans une note peut-être plus sévère, mais d'une
composition plus harmonieuse encore. En 1903, il exposait :
Bruyères en fleurs, hauts plateaux de la Correj^e. Ce n'est
certes pas un « portrait » de Gimel, mais M. Didier-Poiigct
s'est beaucoup inspiré de son cadre et de son caractère pour
en fixer les lignes générales (1).
On a encore de cet artiste : Chemin de Gimel (Musée de
Tulle) ; Gorge de VInferno; Haut-Plateau de la Corrè^e^ etc.
D'autres peintres se sont inspirés de Gimel dans leurs
compositions :
M. Gaston Brun, dont on peut citer : Sortie de la messe,
à Gimel, Cour de ferme en Limousin, Sous les châtaigniers,
Laceuses au moulin de Gimel, Bruyères à Gimel, la Vallte
à Gimel (1904-1905); M. G. Anglade, M. Pierre Galerne,
M. Pierre Lissac (Bords de la Montane à Gimel, Chaumiè-
res dans la Corrèze, Chemin dans la Corrèze, etc., 1908).
Argentat, coquettement assise sur les rives de la Dordo-
gne, qui s'épand alors en une belle et majestueuse nappe
d'eau, s'enorgueillit, avec raison, d'être le centre d'une
région extrêmement intéressante, au point de vue tourisii-
(1) Appartient à M. Teichmann, à Dresde.
— 76 —
que et artistique. Elle commande, en dehors de la Dordogne,
la vallée de la Maronne, aux sites insoupçonnés, comme
Merle et sa forteresse, celle de la Souvigne et les cascades
de Murel, les gorges de Servières, les hauts-plateaux de
Saint-Privat, d'où l'on découvre les monts d'Auvergne, et
où les landes de bruyères et de genêts s'étendent à perte de
vue!
La plaine d'Argentat, avec ses champs de sarrazin, dont
les blanches tleurs s'épanouissent au soleil d'août, bordée de
collines boisées où le matin accroche de longs voiles de buées
légères, a de quoi inspirer les artistes. Ils ne la visitèrent
pas cependant en grand nombre. MM. Dombrowski, Franc,
de Regagnac, Guérillot, Fournier, Alexandre Bertin, Gabert,
vinrent quelquefois y laver des aquarelles ou brosser un ta-
bleau — à Argentat même ou dans ses environs ; — mais il
était réservé jusqu'à ce jour, à M. Didier-Pouget, de rendre
toute la poésie de cette région.
En 1904, on put admirer de lui, au Salon, Matinée en Cor-
rè<5'e, qui nous donnait une interprétation tout à fait char-
mante de Servières; en 1906, Le Mafin, bruyères en fleurs ;
en 1907, Brumes du Afa(in, bruyères en fleurs, paysages
qui empruntent leurs éléments à la Dordogne et aux collines
d'Argentat qui dominent son cours.
Le petit salon des peintres de montagne donna encore de
M. Didier-Pouget : Ld route du Gibanel et la vallée de la
Dordogne ; Vallée de la Dordogne et plaine d'Argentat
(1905) ; Brugères en fleurs et Haute-Vallée de la Dordogne
(1906) ; Vallée de la Dordogne, le matin ; Haute-Vallée de
la Dordogne, bruyères en fleurs ; Vallée de la Maronne
(1907), etc.
Il visita aussi les ruines de Merle, les vallées de Spon-
tour et en rapporta des études extrêmement intéressantes. —
D'Argentat, il convient de signaler encore les aquarelles de
Thalin Meilhac, père de l'auteur de Froufrou.
ki^ Didier PoKiET : Le Matin. Bruyères en Fleurs (Vallée de la Dordogne. à Argentat)
(Cliché des Annales).
— 77 ~
Le cours de la Vézère, de sa source à son entrée dans le
plat pays, entre Allassac et Varetz, est de la plus haute cu-
riosité. Quelques-unes des villes que cette rivière arrose,
Uzerche et Treignac, entre autres, offrent au voyageur et à
Tartiste un attrait tout particulier. Elles sont peu connues,
cependant, et la Vézère est la belle ignorée !...
Nous avons vu que Jeanron habita' le manoir de Comborn
où la Vézère roule ses eaux tumultueuses, et qu'il se plut à
reproduire certains aspects de la vallée. Mais à part MM. Er-
nest Rupin, Raphaël Gasperi, au Saillant, Bourgeois et Paul
Hallez, professeur à TÉcole des Beaux-Arts de Lille, que
des relations de famille avaient attiré dans le pays, à Vi •
geois, nous avons peu de peintres à signaler dans cette
partie du bassin de la Vézère.
A Uzerche, ils vinrent plus nombreux. L'incomparable
situation de la vieille cité, en amphithéâtre sur un promon-
toire qui domine la Vézère, ses maisons qui sont des châ-
teaux avec leurs tours, leurs toits en poivrière, leurs fenêtres
ogivées, Téglise, dont le clocher roman semble sonner le
ralliement aux logis moyennâgeux qui se pressent à ses
pieds, dans un désordre de troupeau apeuré, ses tanneries
du bord de l'eau, tout cet inépuisable pittoresque, qui aurait
fait la joie de Gustave Doré, de Robida ou d'Henri Pille, ne
pouvait qu'attirer les artistes.
Léon Fleury, l'ami de Corot, celui que le maître appelait
Florigodon, y vint vers 1847. AUx Salons de 1848 et 1849,
on voyait, en effet, deux tableaux d'Uzerche signés de ce
peintre. Plus tard, bien plus tard môme, on trouve à Uzer-
che : MM. Courtot et Bichet, professeurs à Limoges; M"* Ber-
the de Neuville, dont les merveilleuses aquarelles sont très
appréciées; M"* Martin; MM. Friedlander, Pierre Prins,
Daye, Fritza David, Charles Halle, Jaudin, Albert Joseph,
Lavialle de Lameillère, Pétiniand-Dubos, Gaston Vuillier,
ArthurGué(Pe/i^ep/ace à Uzerche, Cascade de Bialé, 1906),
le jeune maître impressionniste Eugène Alluaud { Vieille
- 78 -
Gaston Vdillier : Le Saut de la Virole, a Treignac
(Cliché du Tour du Monde).
- 79 -
place à U^arche; Rue montante à Uzerchey 1905), A. Cha-
baDiân, etc. (1).
A Treignac, dans la banlieue de laquelle mugissent les
eaux du Saut de la Virole, et où s'arrondissent les ballons
des Monédières, tapissés de bruyères et d'ajoncs, les artistes
s'y sont faits plutôt rares. Nous y signalerons toutefois :
Vanginaud, MM. Mathis Picard, Louis Leinia de La Jar-
rige, dont les études servent de motifs aux fonds de ses
dessins et caricatures ; Paul Hallez, qui sut rendre le charme
suranné des rues de Treignac et les longues perspectives
qui s'encadrent dans l'ogive des vieux ponts ; Gaston Vuil-
lier, à qui la Virole rappela Gimel ; Charles Gabert (Joueur
de cartes: Fontaine des amoureux à Égletons; Vieille porte
de Treignac; Vieux pont de Treignac^ etc.). Enfin M. Ed-
mond Tapissier, un artiste lyonnais de la meilleure école,
qu'un mariage attacha au pays et qui s'en est inspiré dans
plusieurs de ses toiles : Coucher de soleil aux Monédières^
au Musée de Tulle ; Le vieux Berger (1903); La meneuse de
taureau (1904); Cour de ferme, Le gardeur de pourceaux
(1908), et dans un projet de tapisserie des Gobelins, His-
toire d'autrefois (Salon de 1905), etc.
Aux environs de Treignac, il convient de signaler un
artiste de Limoges, M. Paul Ranson, qui fut connu long-
temps comme décorateur et que la nature inspira à Lafarge,
où il exécuta des tableaux, pastels et fusains rehaussés, d'un
art nouveau et subtil que loua le critique et poète Charles
Morice : « Ranson n'a pas inventé cette atmosphère ardente,
cet aspect rude, cette coloration puissante de la Corrèze; il
copie la nature avec un soin jaloux. » De lui, nous citerons :
Châtaigneraie, Paysage et étang de Lafarge, Le Châtai-
gnier du hibou. Les Peupliers, Les monts de Chamberet,
Château de Lafarge, A Lafarge, Châtaigneraie, L'Étang de
la Sorcière, etc.
(l) Mentionnons encore M. Marc Jonchères, un décorateur de l'ate-
lier de Jambon, qui a peint de nombreux aspects uzerchois, anciens
et modernes, dans la maison Materre, à Uzerclie môme.
PriU Thaulow (1903) et M. Armand Guillaumin (1906) visitèrent
Uzerche, mais n'en rapportèrent aucun sujet de composition à notre
connaissance.
80 -
Un artiste un peu oublié, mais qui, en son temps — du
temps surtout de la bonne bohème, chère à Mûrger, — eut
son heure de célébrité, et qu'une nouvelle de Champfleury
mit en lumière, le graveur Rodolphe Bresdin, dit Chien-
CailloUj vint habiter les environs de Tulle vers 1851, où il
reçut Thospitalité chez des amis qui l'avaient connu à Paris.
Il y exerça son art, mais nous ne savons si la nature même
du pays sollicita son attention.
« Une famille amie le retira à la campagne, dit M. Emile
Fage (1), dans la commune de Chanteix, au lieu de Bellevue,
un pays de solitude, de tranquillité parfaite, orné de jolis
arbres, bien ensoleillé, avec des perspectives ravissantes à
l'horizon, vers Donzenac et Sainte-Féréole. Non loin de la
maison d'habitation, dans le fond de la vallée, s'étendait un
étang de belle dimension, en forme de coupe allongée, ré-
puté pour la transparence de ses eaux, et bordé d'un côté
par un chemin très propre qui formait promenade. Tout
auprès, sur la petite plate^forme d'un monticule, gros comme
une taupinière, et d'où l'on dominait l'étang, s'élevait, pas
bien haut au-dessus du sol, une cabane de pèche; elle était
d'aspect misérable, déjetée par le temps, couverte d'un
chaume moussu et éclairée par l'unique jour qui tombait
du tuyau de la cheminée ou que laissait passer la porte
ouverte. La vue, de ce point, était bornée, mais agréable.
« C'est dans cette cabane branlante que Bresdin installa
ses pauvres pénates et vécut quelque temps en ermite. Cet
intérieur à la Rembrandt, délabré et fantastique comme ses
propres songes, l'avait enchanté : solitude profonde, grand
silence ; nul être autour de lui si ce n'est quelques poules de
la ferme qui venaient picorer ses maigres restes; et tout
près, dans un rayon dont ses yeux percevaient aisément
toutes les formes et toutes les nuances, une exposition per-
manente de paysages d'un pittoresque achevé.
(1) Chien- Caillou, sa vie, son œuvre (Tulle, 1897).
- 81 -
« Bresdin était amoureux de son gite; il prit tout de suite
au sérieux son rôle de maître de maison ; il se mit à faire
lui-même son ménage, sa cuisine. Dieu, quelle cuisine et
quel ménage! Les galettes ou crêpes de sarrasin, fort en
usage dans la contrée, étaient de son goût; il voulut les
confectionner de sa propre main et y réussit, très grossière-
ment il est vrai. Un couvercle de marmite lui servait de
poêle. Il en sortait des galettes d'une couleur peu avenante
et d'une épaisseur qui les rendait semblables à de petites
tourtes de pain. Les paysans n'en auraient pas voulu. Lui
s'en régalait, vantait à qui voulait Tentendre Texcellence
de ses produits culinaires. Les gens de l'endroit qui pas-
saient par là jetaient un coup d'œil curieux, mais effaré, sur
cette installation primitive et sur les allures mystérieuses
du personnage qui y résidait : un être à mine rébarbative,
d'humeur fantasque, ne parlant pas et ne faisant rien comme
les autres, tantôt occupé à son ménage, tantôt travaillant à
des choses incompréhensibles, avec des bouts de crayon ou
des pointes d'acier qu'il faisait aller et venir de façon
bizarre, et leur produisant l'effet de ces apparitions fantas-
magoriques dont le récit émerveille les soirées d'hiver à la
campagne. On racontait même que, peu de temps après son
installation à Bellevue, à la seule fin d'écarter les impor-
tuns, il s'était procuré, un fusil en bois dont il se servait
pour viser les curieux au passage et leur inspirer une crainte
salutaire.
« Bresdin, au fond, n'était pas si effrayant que cela. Il y
avait du bonhomme en lui. Il avait fini par apprivoiser les
gens de son entourage. On l'accueillait avec plaisir. Il venait
familièrement prendre place à leur foyer, se mêlait à leurs
veillées; il en était même arrivé, par ses histoires et ses
drôleries, contées le soir, au coin du feu, à les intéresser et
à les égayer.
« Il frayait aussi avec le voisinage, poussait des recon-
naissances dans les villages d'alentour, excursionnait jusque
dans les communes environnantes
« Le réfractaire s'humanisait au contact d'un foyer favo-
T. xxx. i - 6
— 82 —
rable, où il trouvait des figures souriantes et Toubli de ses
misères.
ce Malgré tout, persistait en lui un fond de sauvagerie,
qu'il dépendait du seul hasard de la conversation ou des
circonstances les plus futiles, de faire tout à coup surgir. »
Peu à peu ces sautes d'humeur jetèrent un certain froid
entre Bresdin et ses amis et épuisèrent les sympathies qu'il
s'était acquises. Il dut s'éloigner, quitter Chanteix et re-
prendre la vie errante.
Les longues étendues du Plateau de Millevaches que par-
courent les grands troupeaux de moutons; l'âpre désolation
qui les enveloppe; l'intense mélancolie qu'elles dégagent,
prônée par le maître graveur Bracquemont, ont été dédai-
gnées des artistes. M. Gaston Vuillier les visita au cours
d'un voyage documentaire sur les sorciers de la Haute-
Corrèze et les fontaines miraculeuses. Il en fixa quelques
tragiques aspects. M. Bourgeois y traduisit un Lever de
lune^ qu'on voit au Musée du Petit-Palais des Champs-
Elysées. Enfin, MM. Mascré, Georges Beaume. Auguste
Barthon et François Ferrand s'en inspirèrent dans quelques
tableaux et eaux-fortes.-
L'étage inférieur de cette région d'Ussel est, d'ailleurs,
complètement délaissé des peintres, à part peut-être Bort, dont
le site enchanteur, sur la Dordogne, s'ouvre sur deux pro-
vinces : le Limousin et l'Auvergne (1). A Bort, Chaigneau
travailla, vers le milieu du siècle dernier, ainsi que Schenck,
le peintre des moutons et des oies, et Rosa Bonheur. De nos
jours, il convient d'y signaler M. Pierre Galerne, M. Char-
les Lamour , M. Didier-Pouget , qui s'y rendit pendant
l'été de 1907, et qui en rapporta : Le Mafin, vallée de la
Dordogne (Madic), au Salon de 1908.
(1) A Ussel et ses environs citons M. Forestier, peintre, aquarelliste
et fusainiste.
— 83 —
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Û.
- 84 -
En Corrèze, il convient encore de signaler çà et là :
MM. Henri Linguet {Maison de cultivateur à Cubiac, 1888) ;
Numa Gillet (Route dans la Corrèze, 1905; Temps gris en
Corrèze, 1906); Joseph Lépine {Place de village; Rivière et
coteau, 1906); Paul Méry {Cour de ferme en Corrèze; Mou-
lin abandonné en Corrèze, 1905); Gaston Vuillier (Sentier
de la Corrèze, 1890) ; Lucien Brunaud (Pêcheur d'écrevisses
dans la Solant, environs de Tulle, 1882); Alphonse Teytaut
(Lubersac) ; Auguste Barthuel (Puy-d'Arnac) ; François
Gouyon, aquafortiste (Juillac) ; M"** Bernard {En Corrèze,
1907) ; Arthur Gué (Donzenac) ; EichmûUer (Intérieur limou-
sin, à Puyjalon, 1907), etc. (1).
Limoges, par sa situation en amphithéâtre que baigne la
Vienne, par ses clochers,
Pleins de nids et d'hirondelles,
la masse imposante de sa cathédrale gothique, construite en
granit du pays, la ceinture d'émeraude que lui font les cam-
pagnes environnantes, ses logis anciens, ses rues en pentes
raides, ses vieux ponts, est une des villes les plus pitto-
resques et les plus curieuses du centre de la France. La
« matière picturale » y est innombrable, Par ses ateliers
d'émaillerie et de porcelaine, la cité de saint Martial a été,
est encore un foyer artistique intense. Il n'est pas étonnant,
dès lors, qu'elle ait donné naissance à de nombreux artistes
et qu'elle en ait attiré quelques autres, pour les retenir
même définitivement dans ses murs. Parmi ces derniers, il
convient de citer tout particulièrement M. Paul-Laurent
Courtot. Ex-artiste des Gobelins, professeur de dessin au
Lycée de Limoges, élève de Maillard et de Galland, il a
cherché, dans une abondante production, à fixer les anciens
(1) Au Salon de la Société nationale des BeauxÂrts en 1894, un
sculpteur, M. Henri Cordier, exposa pour le compte du Ministère de
l'Agriculture, Attelage de bœufs limousins, Pileuses limousines.
Chenaux du Haras de Pompadour, Laboureur^ moulages à la cire
perdue pris à Pompadour.
- 85 -
aspects litnogeois, les vieilles rues, les monuments d'autre-
fois, avant qu'ils ne disparaissent ou ne soient modifiés par
les édilités successives, enclines à faire table rase du passé,
sous prétexte de progrès modernes plus ou moins justifiés ;
il a rendu, avec conscience et sincérité, la fraîcheur des
sites de la banlieue, et noté, avec une extrême précision, les
détails de la vie limousine, à la ville comme à la campagne
(scènes d'intérieur, de la rue, des champs, etc.), et du tra-
vail limousin : La Boulangerie au couventy L'Atelier de
Léonard Limosiny Le dernier Tisserand à la main, La
Manche à pâte, Le Tourneur de gsLsette, Le Four en mar-
che. Les Retoucheuses, etc., etc. Cette œuvre constituera
une documentation picturale de tout premier ordre. Elle se
recommande, d'ailleurs, par un dessin serré, un coloris
charmant, un art de composition touchant à une vérité
absolue.
A côté de M. Courtot, il convient de citer M. Charles
Bichet, M. Aridas, professeurs à l'École nationale des Arts
décoratifs, aquarellistes et peintres de talent; Grenaud — à
qui on doit une belle eau forte : La rue de la Boucherie,
qui aurait dû tenter le pinceau truculent d'un Roybet; —
Philippe Lacoste, évocateur, en un large décor, de la vieille
Abbessaille ; Soubreny, Perdoux, etc.
Puis ce sont les artistes originaires du pays même, que
leur ville et ses environs inspirèrent : Gardel, tout imprégné
de romantisme {Vue prise en Limousin, 1845; Lecture au
bord de la Vienne, environs de Limoges, 1857, vieux quar-
tiers de Limoges, etc.); Pétiniaud-Dubos, qui eut son heure
de notoriété ; Roly ; les néo-impressionnistes Eugène Alluaud,
Pierre Thomas, Pierre Lissac, et surtout Paul Thomas, qui
a su trouver une note extrêmement originale en peignant
les arches des vieux ponts de Limoges qui répercutent la
chanson et le rythme des ponticaudas, des lavandières
grouillant sur les bords de la Vienne, alors que l'air et la
lumière qui les enveloppent rendent des vibrations que l'ar-
tiste sut voir ei fixer d'un pinceau étincelant et juste. Il est
aussi l'auteur de gravures en couleurs de haute allure.
— 86 —
Et ce sont encore : M. Bourgeois (I); M"' Villoutreix, née
Issanchou, dont les paysages sont tout à fait rennarquables
et d'un sentiment à la fois plein de mesure et d'énergie;
Paul Forestier ; M"' Gorceix ; Tixier ; Palisson ; M"* Berthe
de Neuville, une aquarelliste de grand talent, à qui l'on doit
une abondante production limousine (Ruines et Donjon de
Châlucet ; Moutons au pâturage en Limousin ; Cabane de
feuillardier; Prairie en Limousin; Automne^ etc.); Pierre
Prins, qui fut à Vicq; Louis Darey, à Châlucet; Chambeaux
(Vue prise à la Quintaine, 183^-1845) ; Granet, dont on peut
citer : Crépuscule au Palais y Clairière à Crèse, Moulin
Pinard; Effet de soleil à, V Aiguille, etc.
La grande banlieue de Limoges, les vallées de la Vienne,
de l'Aurence, de la Briance, de l'Isle, etc., offrent aux artistes
de multiples sujets d'inspiration, ainsi que Saint-Yrieix,
Eymoutiers, Saint-Léonard, Aix, etc. Nous avons signalé,
dans ces parages, Jules Dupré, Corot, Troyon, Léon Fleury,
Justin Ouvrié, dans la première moitié du xix® siècle. Nous
pouvons y ajouter : Trouillebert, qui se plut à rendre, comme
Corot, les aspects nuancés de la Vienne dans les matins où
flottent de légères brumes; Charles Donzel; M™* Amélie
Nivet-Fontaubert (la Briance) ; Paul Dalpeyrat (vallée de la
Valouène} ; Emile Beaubrun (Nieul) ; Raoul Bourdier (Saint-
Yrieix); Sardent (Saint-Léonard); Furlaud, dont on a : Les
dernières Châtaignes, des bords de la Vienne, de la Briance,
du Vincon, des coins de villages, de vieux chemins ; Payer-
meville, etc.
A Eymoutiers, la Vienne a trouvé en M. Gabriel Mathieu
un artiste inspiré. Le cours accidenté de la rivière, les ro-
chers, les échappées de ciel, la petite ville môme, Bussy-
(1) Cet artiste a exécuté pour le hall de la gare d'Orsay (Compagnie
d'Orléans), à Paris, toute une série d'aquarelles qui disent le charme
du pays aux voyageurs et touristes {Solignac ; Ckûlucet; La Vienne
à Bussy-Varache; Eymoutiers ; Vallée de la Vienne à Eymoutiers^
dans le Èaut Limousin, et Vallée de la Luzège à Ambruyeat ; Mey-
mac, le Plateau de Mîllevaches , Vieille route d'Esticaux; La
Vézère à Estivaux; La Vallée de la Vézère à Allassac; Uzerche et
la Vézère, etc., en Bas-Limousin.
— 87 —
Varache, lui ont donné l'occasion de les traduire dans une
belle pâte nuancée où les jeux de la lumière sont parfaite-
naent rendus. Il nous faut encore citer, en ces lieux,
M. Rouselle-Bardelle, peintre et sculpteur; M"* Villoutreix-
Issanchou, déjà nommée ; Léon Jouhaud, etc.
Plus au Nord, dans le haut pays, nous relevons les traces
de MM. Adler (Gorges de Baledent) ; Edouard Célerier
(Royères), Une Noce en Limousin; AUeaume (Saint-Sul-
pice-les-Feuilles) ; Grillon (Le Dorât); Arthur Gué et frère
Léon (Bellac); Olivier Chéron, qui fréquenta longtemps la
vallée de la Benaize et le site de Las Croux; M"' Eva
Alexandre (Bessines) ; M. Charles Bichet qui, après avoir
aquarellisé les ruisselets, les moulins et les vieilles chau-
mières, s'est appliqué à mettre en valeur les sites de Bes-
sines, de Châteauponsac et de la Gartempe, sur des toiles
d'une facture variée et toujours captivante : Une Rue au
soleil; L'Orage; Moulin sur VAixette; La Gartempe à Châ-
teauponsac, etc., sans oublier ses intérieurs rustiques et
d'église, d'une note un peu sévère, mais curieuse par ses
effets de lumière. Mentionnons encore, à Châteauponsac,
M. Philippe Lacoste, déjà vu parmi les peintres limogeois.
A Saint-Junien, il est un ensemble de sites, formés sur-
tout par la vallée de la Glane, qui comptent parmi les plus
beaux du Haut-Limousin. Corot fut le premier à subir leur
charme. Le maître aimait à reproduire Tun d'eux, que les
artistes appellent maintenant le « Salon de Corot ».
A la suite du grand peintre vinrent Victor Dupré, le frère
de Jules Dupré, .vers 1860, et Donzel. Puis ce fut un artiste
bordelais de beaucoup de valeur, Amédée Baudit, un peu
oublié aujourd'hui, qui fut le maître de M. Didier-Pouget.
A la vente de son atelier, on vit passer : A Saint-Junien-
Limousin; La Glane à Saint-Junien ; Pâturage à Saint-
Junien.
De nos jours, Saint-Junien et la Glane sont aussi fréquentés
par les artistes que Crozant. Chaque année, ils s'y donnent
rendez-vous, et parmi eux nous citerons : Henri Rapin, A. de
La Roca, M°*' Analy, Prieur, Lemaire, Bourgeois, Paul et
Jean Teillbt : Vallée de la Glane (Le Salon de Corot).
- 89 —
Pierre Thomas, Jacques Hast (La Glane; Intérieur limou-
sin; Collines de la Haute-Vienne); Raoul Bourdier (Le
Moulin de la'Pouge; Village de Glane; Petit pont de Glane),
Henry Mouren, A. Gué, M"' Villoutreix, Eug. Alluaud, etc.
Nous donnerons une mention spéciale à M. Jean Teillet,
un enfant du pays qui, depuis une dizaine d'années, n'a pas
cessé d'envoyer au Salon des tableaux inspirés des lieux qui
lui sont chers et dont il sait rendre la pénétrante poésie d'un
pinceau habile et délicat. On a de lui : Le Moulin Ringuet
(1897); Solitude (1898); Le Salon de Corot (1900); Solitude
(1900); Dévotions limousines (1901); Le Dormant (1907);
La Glane au Châtelard (1907); La Glane en été (1907), et
une foule d'études des plus intéressantes.
Nous ne saurions passer sous silence M. Charles Agard,
interprète du Nontronnais, de la Creuse et du Haut-Limousin,
dont le talent délicat s'apparente à l'impressionnisme de
Renoir et de Sisley dont on peut citer : Soleil levant dans le
Limousin; Le soleil quitte la vallée^ Limousin; Petit vil-
latjeen Limousin, etc ; MM. Auguin [Solitude en Limousin,
1871); Devaux [Souvenir du Limousin, 1884); Péret [Une
Vallée en Limousin; Soleil couchant, 1847); M. Lucien Gri-
veau [Le Dimanche en Limousin, Intérieur d'église, envi-
7'ons de Saint-Yrieix, dans laquelle papillonne toute une
nuée de blancs barbichets, 1894) (1).
De Crozant et de Fresselines, beaucoup d'artistes se sont
répandus dans les autres parties du pays marchois. Quel-
ques autres y ont travaillé sans se préoccuper des sites chers
à George Sand et à Maurice Rollinat.
La situation extrêmement pittoresque d'Aubusson tenta,
comme nous l'avoué vu, le pinceau du grand Corot. Il prit
une vue de la ville des hauteurs de la Chabassière, d'après
(1) En marbre de couleur, M. Constant Roux exécuta, au Salon de 1905,
Le Joug, étude de deux bovins limousins, qui fut très remarqué.
— 90 —
une tradition que nous rapporta M. J. Rouffet. Il faut aussi
signaler dans la région aubussonnaise : Alexandre de La-
lobbé (Le Soir au bord de la Creuse, 1893; Le Quartier de
La Terrade) ; Emile Bugarel (Le Pont de La Terrade) ; An-
toine Jorrand, dessinateur en tapisseries, qui sait aussi bien
brosser un paysage; Barbât; Eugène Cicéri (1847), peintre
et lithographe, qui poussa jusqu'à Crocq; Auguste Barthon
(Lavaveix), Bouligaud (Felletin), et toute une pléiade de
jeunes peintres, élèves de TÉcoIe des Arts décoratifs d'Au-
busson.
A Saint-Sulpice-les-Champs, mentionnons : M. Desvareux-
Larpenteur, qui se plaît au paissement des troupeaux, à leur
rentrée au bercail, et qui peint dans le genre de Chaigneau
et de Charles Jacques (1903), puis M. Jules Rouffet, peintre
militaire, originaire du pays, qui sut rendre toute la poésie
de la nature marchoise dans : Un sous bois, Vété (1902); Le
Soir; Vallée de Vaintenat (1905); La Brande en décembre
et Dans les Bruyères de Chansard (1906); La Clairière et
Bruyères de mars (1907), etc.
A Guéret, M. Maurice Loir, qui a dans cette ville des
relations de famille; M. F. Maillaud; MM. Martial Négret,
Perret (1869); Ant. Roy; à Auzances, MM. Pierre Thomas,
Félix Clairet; à Bourganeuf, M. Charles Agard; à Anzème,
M. Clairembault ; à Chénerailles, Bonlieu, ont planté leur
chevalet et traduit, par le pinceau ou le burin, les aspects
variés de ces villes et des campagnes environnantes.
A Chambon et dans la vallée de la Voueize, il faut signaler
le passage de M. A. de Lassuchette (Vieux pont à Chambon;
Pierres jaunâtres; Église de la Courcelle Saint-Priest, etc.),
et Marc de Lajaumont; à Lépaud, M. Allan Osterlind, un des
grands maîtres, avec Thaulow, de l'École norwégienne mo-
derne.
C'est à l'automne de 1886 que M. Osterlind arriva à Lépaud
avec sa famille. Le pays lui plut; il s'y fixa, et, l'année
d'après, un fils, Anders, qui devait être peintre, comme son
père, y naquit. Dans cette petite localité marchoise, pendant
plus d'un an, M. Osterlind ût des tableaux et des gravures
— 91 —
en couleurs dont on ne peut que vanter Tintensité de vie et
la facture originale. La Veillée d'un mort, d'une si poi-
gnante émotion, mentionnée au Salon de 1887; de vieilles
femmes d'un réalisme saisissant ; point de vue sur la route
de Boussac. en bordure du parc en temps de neige ; sapins
près le château de Lépaud; le jardin du café Martin; des
coins de la Voueize, etc.
Avec cet artiste, à la même époque, vinrent à Lépaud
deux paysagistes étrangers, amis de M. Osterlind : M. Skress-
vig Christian, dont on connait Soleil de mars: Vue prise
sur le chemin de Combraille et autres toiles; et M. Jseph-
son, auteur, en particulier, d'une Femme filant sa quenoiùlh
auprès du feu, etc. (1).
Entre temps, M. Osterlind fut l'hôte de Maurice RoUinat à
Fresselines où il fît nombre de tableaux et de gravures,
ainsi que nous l'avons vu plus haut. Lépaud, Crozant et
Fresselines, les vallées des deux Creuses, de la Sédelle et
de la Voueize furent, d'ailleurs, en pays marchoiSç le séjour
de prédilection des artistes suédois, norwégiens et améri-
cains, — sauf Thaulow, qui préféra les vallées plus riantes et
plus grasses de la Dordogne, sur les confins du Bas-Limousin
et du Haut-Quercy.
Les gorges si pittoresques du Taurion et les bordîi de la
Gartempe ont inspiré plusieurs peintres. Parmi eux ; M. La-
Gentite (Landes à Ribagnac; Vue prise à Janaiat; La Châ-
taigneraie à Fournauy 1882-1883), MM. Henry Moureni Ar-
thur Gué, Raoul Bourdier, Ch. Bichet, G. An^lade, Charles
Corcuff, Barbant, Henri Gouiliet, Karl Beugel, M"*^ Jules
Laumond, sans oublier Corot dont nous avons signalé le
passage sur les rives du Taurion, et M. Jules Adler. le puin-
tre par excellence des crépuscules limousins et des grandes
routes fuyant entre des masses d'arbres et des pacages ver-
doyants.
Un artiste marchois, M. Albert Grateyrolles, s'est aussi
distingué dans l'art du paysage. Sa manière fort conscien-
(1) Notes de MM. Aubert et Sol.
— 92 —
cîeuse lui a valu une solide réputation de dessinateur et de
coloriste. Citons de lui : Le Retour des champb ; Au bord
de VÉtang; Pacage dans la Creuse; Semailles d'au-
tomne, etc., qui disent toute la poésie intense qui se dégage
de la nature limousine et que M. Eugène Delestre a traduit
dans une manière bien différente.
Les paysages de la Creuse ont beaucoup servi la « ma-
nière » de M. Eugène Delestre et sa réputation. « Familier
des heures calmes du soir, de la solitude s'enténébrant des
futaies et des sentes, du miroir remuant des rivières, dit
M. Maurice Guillemot, il scrute la nature en ses aspects les
plus divers ». De Margnot, de Saint-Georgesla-Pouge, où il
fut en 1906, il rapporta de nombreuses toiles et aquarj^Ues
qui le classèrent en bon rang parmi les jeunes maîtres qui
savent « décrire la douceur des ciels apaisés, les brumes
flottantes des eaux, Tespace limpide des horizons, la pleine
clarté des midis, l'or des moissons blondes, les fleurs dans
les verdures, la vitalité intense des fêtes estivales ». Soli-
tude, Fin de jour. Premières teintes d'automne, le Pré
Picard, Ciel d'orage, Les genévriers, Automne à Margnot,
etc., comptent parmi les bons tableaux de M. Delestre, dont
Timpressionnisme tempéré est agréable.
M. Paul Rossert, un maître aquarelliste, peut être rangé
aussi parmi les meilleurs artistes venus dans la Creuse. Il
est surtout le peintre des brumes. « Brouillards du matin,
aériens et légers, s'envolant dans un rayon de soleil, vapeurs
du soir traînant sur les glèbes et les bois, bleuissement des
gouffres et des lointains, toutes les bulles inconsistantes de
l'atmosphère sont traités par Paul Rossert avec une surpre-
nante virtuosité ». De lui, citons : Gorge dans la Creuse,
Paysage, Une Vallée, Après Vorage, Fin d'automne, Tour^
nant de la Creuse, Soir dans la Creuse, etc., qui sont de
vrais petits chefs-d'œuvre.
Çà et là, il convient enfin de citer : MM. Surtel {Pont de
Puyguillon) ; A. Gittard (Bords de la Creuse, 1882) ; Lau-
rent Guetal {Petit vallon dans la Creuse, 1889) ; Jobard
(Vieux chemin dans la Creuse); Gumény {Bords de la
— 93 —
Creuse) ; Perret {Noce à la, ferme, 1870) ; Dardoize {Un ma
tin dans la Creuse, 1881) ; Dujardin (Le Colombier) ; Fran-
çois Millet, le fils du grand Millet, auteur de U Angélus
{Landennes) ; F. Leprat (Femmes tissant la toile, Creuse,
1895, Labourage dans la Creuse, 1898) ; M"** Dubois-Daves-
nes (Paysannes de la Creuse) ; et ce sont encore : MM. Gas-
ton Vuillier, Pierre Ballue, Gabriel Mathieu, Charles Halle,
Marcel Fournier, Granet, René Le Cler, Wûhrer. Armand
Delille, Félix Planquette. M"»« Lucy-Malfilâtre, M. Théo-
Jeulin, M"* Rabuteaux, Gaston Thiesson, etc., etc.
Arrivé au terme de notre tâche, on nous permettra de
jeter un coup d'œil d^ensemble sur l'œuvre des peintres du
Limousin, nous entendons ceux qui y trouvèrent ou qui vin-
rent y chercher, au cours du xix* siècle, et dans les premiè-
res années du xx«, des sujets d'inspiration.
C'est en Haut-Limousin, tout d'abord, que les grands
paysagistes de l'École de 1830 se rendirent. Les environs de
Limoges et de Saint-Yrieix, les vallées de la Glane, de la
Vienne et du Taurion fixèrent leur attention et leur palette.
Puis ce furent les sites marchois de Crozant et de Fresseli-
nes qui offrirent une abondante matière picturale, quoique
peu variée, aux maîtres de l'impressionnisme et à leurs jeu-
nes disciples. Le Bas-Limousin ne vint qu'ensuite, dans les
dernières années du xix* siècle. Gimel, Obazine, Argentat,
Beaulieu, Uzerche, etc., attirèrent surtout des maîtres qui
sont encore en pleine possession de leur talent, comme
MM. Gaston Vuillier, Didier Pouget, Julien Le Blant, Thau-
low — mort depuis — et tant d'autres.
« Rien n'est gai comme un printemps limousin, quand
frissonnent dans l'air limpide les frondaisons des jeunes
pousses et que les champs de colza étalent leur nappe d'or
fin, mise pour célébrer le retour des beaux jours, dit M. le
94 —
Gaston V'uilher : Le Meneur de Loups tCliciié du Tovr du Mondej.
— 95 —
sénateur Gotteron (1). On s'est plu à comparer le Limousin à
une petite Suisse. Mais la Suisse, petite ou grande, est tout
entière dans ses glaciers qui emportent les yeux et Fesprit
vers les sublimités de l'infini. Notre piédestal est plus mo-
deste. Il y a beaux temps que les glaciers ont disparu du
Limousin. Mais ils y ont laissé les traces les plus précieuses,
les sillons les plus féconds; ils y ont les plus beaux ruis-
seaux du monde et les plus nombreux. Le Limousin, c'est
vraiment le pays des ruisseaux. Le ruisseau limousin, ah !
quelle merveille ! avec ses bords escarpés, sa ceinture de
prairies, ses rochers moussus, ses fougères, ses genêts, ses
vergues et ses peupliers. Invoquons-les, ces doux gazouil-
leurs. Appelons en quelques-uns parleurs noms charmants :
TAurence, la Briance, la Maulde, TAixette, la Glane. C'est
sur les rives de ce délicieux cours d'eau que Corot a pu dire ;
Anché io sono pittoie. Les plus délicieux de ces ruisselels
sont ceux, comme dit le poète, qui non loin de leur source
vont se perdre sans nom. Voyez la fontaine du pré, toute
cachée sous l'herbe rieuse, naïade à l'œil noir et aux vertes
paupières. Elle est toujours froide comme le marbre. Et
quand vous passez le soir dans la vallée, elle se fait un ma-
lin plaisir de vous jeter sur les épaules son manleau de gaze
glacée.
« Si jamais le Limousin, comme le pays des lacs en An-
gleterre, doit avoir son école de poètes — et tant de jeunes
talents que nous voyons éclore en sont le meilleur signe
d'espérance, — ce sera l'école des ruisseaux. Nos jeunes
poètes n'auront qu'à accorder leur luth à tant d'harmonie
naturelle et ils chanteront comme eux, divinement ».
Les Maîtres du Paysage limousin ont, eux aussi, accordé
leur palette à l'harmonie naturelle des eaux, comme les
poètes y ont accordé leur luth. Dans l'œuvre purement limou-
sine de Corot, de Claude Monet, d'Armand Guillaumin, de
Thaulow, d'Eugène AUuaud, de Paul Thomas, de Jean Teil-
let, de Julien Le Blant, de Gaston Vuillier, de Didier-Pou-
(1) La Nature Limousine (Lemouxi, année 1906).
— 96 -
Gaston Vuillier : Une Femme des Hauts Plateaux
(Cliché du Tour du Monde).
r
/
I
— 97 —
get, de Gabriel Mathieu, etc., Teau chante son éternelle
chanson, tumultueuse ou calme, dans un décor de nature
tourmentée ou assagie, sous des ciels infiniment variés, dans
la lumière cuivrée des automnes ou l'enveloppement opalin
et diaphane des fêtes printanières ou estivales, — alors que
se dressent les arches des vieux ponts ou que tictaquent des
moulins dans un nid de verdure. — Et c'est aussi le châtai-
gnier, arbre de gloire du Limousin, le symbolisant tout
entier, par l'abondance de ses frondaisons et la robustesse
de son fût, qui donne à l'œuvre de « nos o peintres un grand
caractère, — que Paul Ranson dise son angoissante destinée
sous ses aspects séniles, ou que Paul Madeline en marque
l'agonie au déclin des beaux jours, dans tout l'or épars de
l'automne, ou bien encore que Corot tisse la fine dentelure
de son feuillage éployé, ou que Didier Pouget dresse son
vert panache sur un moelleux tapis de bruyères roses dans
un matin émerveillé !
Et dans ce décor, évocateur de beautés, les artistes ont vu
passer aussi les bêtes, celles qui se rendent aux foires,
comme celles qui broutent si tranquillement dans les paca-
ges et les landes; et les gens aussi. L'existence quiète eL
austère à la fois des paysans limousins, leur attachement à
la glèbe, l'intérieur modeste de leurs demeures, la simplicité
fervente de leurs dévotions, comme l'expression si intense
qui se dégage de leur visage, s'éclairant parfois si joliment
sous une pensée de joie, ont donné à plusieurs d'entre eus
l'occasion de montrer qu'ils étaient aussi pénétrants portrai-
tistes que parfaits paysagistes.
Si jusqu'ici de nombreux peintres ont traduit diflFérentes
parties du Limousin, que nous avons signalées, il reste
encore un domaine immense à défricher. Maints endroits^
vierges du pinceau ou du burin, attendent leurs interprètes,
aux quatre saisons de l'année. Les chercheurs de pays igno-
rés et d'impressions neuves y trouveront de quoi satisfaire
leur curiosité et la réalisation de leurs rêves d'art. Ce sera
l'œuvre de demain.
T. XXX. i - 7
~ 98 -
En terminant ce travail, nous devons exprimer toute notre
reconnaissance aux personnes qui ont bien voulu nous four-
nir des renseignements et en compléter d'autres. Nous
devons également adresser nos plus vifs remerciements à
MM. Etienne MoreauNélaton, le délicat artiste, glorifica-
teur de Corot, le docteur Charbonnier, directeur de Limo^
ges Illustré, M. Ad. Brisson, directeur des i4nnaies, la direc-
tion du Monde Illustré, MM. Hachette et C**, d'avoir, par le
prêt des clichés des gravures qui ont été reproduites,
rehaussé l'intérêt que peut présenter cette publication pour
nos compatriotes et le public soucieux de connaître les diffé-
rentes manifestations d'art de nos provinces françaises (1).
JOHANNÈS PlaNTADIS.
(1) En dehors des sources déjà indiquées, nous avons consulté pour
cette étude les catalogues des Salons annuels de la Société des ArtiS'
tes français, de la Société nationale des Beaux-Arts, du Salon
d'Automne, de Isl Société des Artistes indépendants, de VUnion den
femmes peintres et sculpteurs, des expositions particulières des
Galeries Georges Petit, Bernheim, Durand-Ruel, des Artistes moder-
nes, Druet, etc., le Dictionnaire des Artistes de VEcole française de
1800 jusqu'à nos jours (1885), de M. Bellier de La Ghavignerie; le
Dictionnaire des peintres, de Siret (1874) ; le Nouveau Dictionnaire
des Peintren anciens et modernes, de Guédy, les notes de MM. G.
Bertin et L. de Nussac, etc.
NOTIOE3
JETON DE CHARLES DE LÉVIS, BARON DE CHARLUS
GUILLBMETTE DE BI6ÂMËTS, Damb DE MAULD£
Dans le deuxième volume de son très intéressant
Armoriai du Jetonophile, œuvre d'une profonde éru-
dition, M. J. Florange, le savant expert parisien,
décrit ainsi un très rare et unique jeton de Charles
de Lévis, baron de Charlus, et de son épouse, Guil-
lemette de Bigamets, dame de Maulde, frappé à Toc-
casion de leur mariage : « Écu parti de Lévis (écar-
« télé au l*' de Lévis, au 2* de Poitiers, au 3* de
« Ventadour, au 4* de Layre, sur le tout Roger de
« Beaufort), et de Bigamets, entouré de rinceaux et
« accosté des lettres C et G. — R/ : Dans une cou-
« ronne formée de deux branches, écusson écartelé
« comme au parti de Lévis, à Tavers. Cuivre* Petit
« module j^. Cette pièce fait partie de notre médailler,
nous en donnons une reproduction en tête de cettç
— 100 —
courte notice (1). Charles de Lévis, baron de Charius,
fils de Jean de Lévis et de Françoise de Poitiers, fille
d'Aymar de Poitiers de Saint- Vallier et de Jeanne de
la Tour^ fut panetier des rois Henri II, François II et
Charles IX, et grand-maltre des eaux et forêts de 1554
à 1563. 11 épousa, en 1554, Guillemette de Biganiets,
dame de Maulde. D'un premier mariage avec Margue-
rite Brachet de Montaigu, il eut Claude de Lévis, qui
hérita du titre et de la baronnie de Charius (2).
On connaît plusieurs autres jetons de cette famille.
Nous citerons seulement celui d'Anne de Lévis-Venta-
dour, duc et pair de France, portant la date de 1615 ;
il est très rare (J. Florange^ Armoriai^ tome I•^ n**
857) et celui d'Anne de LéviS'Ventadour, archevêque
de Bourges, a son buste, de 1655 (J. Florange : Armo-
rialy tome V% n" 858. — Pierquin de Gembloux :
Histoire monétaire et philologique du Berry.
Planche IX, n^ 12).
Docteur G. Charvilhat.
(1) M. J. Florange a bien voulu nous prêter le cliché qui illustre ces
lignes ; nous sommes heureux de lui adresser ici tous nos remercie-
ments.
(2) J.-B. Bouillet : Nobiliaire d'A uuergne (ClermontFerrand), 1851,
tome III, article de Lévis.
HISTOIRE
DE LA
PAROISSE DE SAINT-ÉLOI
{2™* édition)
Le petit bourg de Saint Eloi (ou Saint-Eloy, selon
l'orthographe archaïque du cachet de la mairie) por-
tait primitivement le nom de « Les Farges ».
Mais à la fin du vi* siècle, naquit à Ghaptelat, aux
environs de Limoges, et dans le doyenné de Nieul
un personnage qui devait devenir illustre. L'histoire
nous le montre trésorier des rois Clotaire II et Dago-
bert P*" (...le fameux roi Dagobert...) puis, aussi,
évoque de Noyon.
Après sa mort, il fut canonisé, c'est-à-dire placé sur
les autels, comme ayant été reconnu saint. Dès lors,
ainsi que tant d'autres bienheureux, il donnera son
nom à plusieurs paroisses (1), particulièrement à la
nôtre et « Les Farges » s'appellera, désormais, Saint-
Eloi-de-Segur.
Cette adjonction : a de Ségur » aura pour but d'évi-
(t) Sant*Éloi-de-Gy (Cher); Saint-Éloi, arr. deRiom; Saint-Éloi, arr.
d'Ambert, etc., sans compter les villages qui portent Tappellation de
Saint-Ëloi dans les communes de La Rochelle, Sainte* Pragne, Ëxci-
deuil. [Il ne s'agit point ici d'Ëxcideuil, dans la Dordogne. comme on
pourrait le crojre. Car, en cette dernière paroisse, ainsi que me l'assure
M. le Curé, il n'y a point de lieu dit Saint-Ëloi.]
— 102 —
ter la confusion avec un autre Saint-Eloi, situé dans
la Creuse, arrondissement de Bourganeuf (1).
Notre petite localité qui, ainsi que Saint-Julien-
le-Vendonnais, avait été de la châtellenie de Saint-
Yrieix (car elle faisait partie du Haut-Limousin),
appartint ensuite à celle de Ségur.
C'étaient les Hautefort qui étaient vicomtes de
Ségur, ayant succédé aux Des Cars, en cette qualité.
Notre petite paroisse se trouve dans le doyenné de
Lubersac (autrefois archiprêtré) et en est éloignée de
prés de douze kilomètres.
...Saint-Eloi, tout d'abord simple prieuré [i) y est
cité dans les plus anciens documents.
Les cartulaires, c'est-à-dire les recueils de titres
relatifs aux droits temporels des églises, en font men-
tion fréquemment. Le cartulaire d'àureils (Haute-
Vienne) (3) le mentionne en Tan 1110, sous le règne
de Louis-le-Gros.
Une pièce de 1273 parle du prêtre desservant Saint-
Eloi et lui donne seulement le nom de vicaire^
tandis qu'elle appelle chapelain celui desservant
Beyssenac.
(1) Elle pouvait avoir lieu, en effet, lorsque les deux paroisses étaient
dans le môme diocèse ; mais elles sont aujourd'hui dans deux dépar-
tements différents : Saint-EIoi-Greuse est un peu plus oonsidérable
que Saint-Eloi-Gorrèze, puisque le premier compte 686 habitants, alors
que le second n'en a pas 400.
(2) Ces mots sont de ma première édition. M. Poulbrière ne les
accepte qu'avec répugnance. Qu'il en montre la fausseté et, tous deux
ensemble, nous les rejetterons.
(3) Aureils était un antique prieuré, qui jouit, de 1071 à 1598, d'une
prépondérance extraordinaire. Mais il passa des mains des Augustins
en celles des Jésuites et, dès lors, dépérit. La Révolution le tua sans
peine. — Son cartulaire est des plus intéressants, môme pour la Gor-
rèze. Le Bulletin archéologique du Haut-Limousin l'a publié avec
celui de l'Artige.
— 103 —
Cent ans plus tard, Saint-Eloi est réuni audit
Beyssenac, sous la main de Jean du Mas, de la noble
maison des du Mas, de Payzac.
Cette maison fournira plus tard à Saint-Eloi, comme
curés, deux Alaire du Mas.
La réunion de Beyssenac et de Saint-Eloi, se pro-
duira d'autres fois encore^ après différentes scissions,
puis il y aura des prêtres exclusivement destinés à
notre chère paroisse. . Ils porteront, cette fois, le titre
de « recteur », car ils seront devenus autonomes.
On sait que recteur signifie ici a curé » et, en Bre-
tagne, on ne dit guère, même aujourd'hui, que :
Monsieur le Recteur.
En 1636, le recteur était Etienne Auconsul qui
avait démêlé, pour les dîmes, avec Peyrot du Mas,
alors seigneur du lieu.
En 1723, c'était M. Peyrodie.
Cette époque est, incontestablement, la plus bril-
lante de notre petite localité. A ce moment-là, non-
seulement il aurait été difficile d'accoler au nom de
notre paroisse le qualificatif de petite que nous lui
octroyons ci-dessus, mais encore on peut dire qu'elle
avait une véritable importance.
Indépendamment de son territoire actuel, en effet,
elle comprenait plusieurs terres environnantes et,
particulièrement, une portion de Ségur.
Et puis, notre église est, à cette époque^ bien dotée
et rentée. On sait que Clovis et ses successeurs, qui
avaient concédé des fiefs à leurs hommes de guerre,
faisaient des fondations en faveur des églises (1). Les
(1) Clovis fit moins un acte de libéralité qu'un acte de justice, car
— 104 —
particuliers, au cours des siècles, augmentaient peu
à peu ces fondations.
Or, notre église paroissiale avait des biens-fonds
connus aujourd'hui sous les noms de « Bois-Curé »,
« Pré-Curé », etc...(l). Il existe aussi une terre appe-
lée en patois « La Meirilharia », c'est-à-dire La Mar-
guillerie, dont le nom indique, évidemment, une
provenance ecclésiastique. Cette terre est attenante
au cimetière actuel et appartient à M. Henri Trarieux.
Le cimetière môme fit, autrefois, partie de La Meiri-
Ihariaj et constituait^ à une époque, le jardin d'un
nommé Salamagne.
Disons, à propos de rentes, que Guillaume de Bre-
tagne, comte de Penthièvre et de Périgord, et vicomte
de Limoges, par testament du 24 août 1454, fait au
château de Ségur, donna, à chacune des églises de
Saint-Julien-le-Vendonnais et de Saint-Eloi, dix livres
à mettre en rente pour le bien de ces églises, sous la
condition, toutefois, d*un service annuel.
Enfin, la richesse relative de notre paroisse appert
encore d'une pièce qui m'a été communiquée par
M. Vigier de Gaston, un obligeant ami.
« ...Par contract du segond septembre 1723, Sa-
turnin Bossavy a recogneu au sieur Curé de.Saint-
Eloy, 3 " de rante annuelle obituelle sur une grange
qu'il possède au village de La Rivière aiant apartenu
à feu Martial Bossavy qui l'aurait fondée le 17 juil-
let 1631.
Par contract du II septembre 1666^ Jeanne Simonet
les églises de son temps avaient été, par les Barbares, dépouillées de
leurs biens.
(1) On trouve à Paris, dans le XIII* arrondissement, une rue « des
Terres-au-Curé t.
— 105 -
a fondé en ladite églize de SaintEloy la somme de
Trante sols, aussy de rante annuelle obituelle, pour
dire une messe haulte, sur un jardin appelé Chasteau-
Roucher(l) possédé par Saturnin Bossavy.
Par testament de feu Saturnin Bossavy, bourgeois,
du 23 avril 1731, il y est parlée entres autres chiefs,
le suivant :
Item, ledit Bossavy, testateur donne et lègue à
Monsieur le Curé de Saint- Eloy la somme de 80 liures
pour dire des messes pour le sallu de son ame et, avec
ce, Ta faigt son héritier particulier.
L'an 1736, et le quatorzième jour de juin, je, ser-
gent soussigné, certyfie qu'à la requeste de Messire
Martial Duverger(2) docteur en théologie, prêtre et
curé de la paroisse Saint- Eloy, habitant au bourg
d'icelle où il faigt élection de domicilie et, en outre^
en la ville de Ségur^ et en l'estude de M* Pierre
Dumas, procureur au siège dudit Ségur, qu'il y con-
(1) Situé commune de Ségur, et qu'il ne faut pas confondre avec la
c Terre du Roucher m sise au hameau de la Taissonnière et apparte-
nant à M. Pouyade.
Disons, à propos de la Taissonnière, que ce nom doit s'écrire comme
ci-avant et non de toute autre manière fantaisiste. C'était, autrefois,
en effet, un lieu plein de iaissonSy c'est-à-dire de blaireaux : de là
l'appellation. C'est donc à tort que M. Poulbrière écrit Tessonnière
dans son estimable o Dictionnaire des Paroisses i.
Seconde discussion philologique : J'ai un autre village dont le savant
auteur sus-nommé écrit le nom Quéras- fourchas. Pour moi, c'est
Caire- Fourcha; en vieux français : carre- fourc; en français mo-
derne : carrefour.
Caire-Fourcha signifie donc littéralement : pays fourchu, c'est-à-dire
en forme d'Y. C'est le « trivium » des anciens. Du reste, il n'y a qu'à
voir pour être de cet avis.
Et, après lecture de ma première édition, M. Poulbrière concède que
j'ai 0 probablement raison ». a Mais, à défaut de temps, ajoutet-il, j'ai
pris souvent, sans pouvoir les contrôler mûrement, les listes qui m'ont
été faites ou sur place ou sur atlas, a Ce qui s'explique assez avec la
vie d'enseignement continu qu'a menée M. Poulbrière.
(2) Successeur de M. Peyrodie.
— 106 —
•
stitue pour le sien, en la cour ordinaire de la vicomte
dudît Ségur, suis aie en la susdite paroisse de Saint-
Eloy distant de Ségur d'une lieue, et au logis et
domicilie de Saturnin Bossavy, où ay trouvé Pierre
de la Jante^ curateur dud. sieur Bossavy.
Et, parlant à Bossavy et à Pierre, je leur ai dhu-
ment signiffié par extrait le contract suivant : savoir,
le contract du segond septembre 1729, dessus passé,
entre feu Saturnin Bossavy^ père dudit sieur autre
Saturnin, et le S*" curé de Saint-Eloy, par lequel ledit
feu Bossavy s'obligeait de paier annuellement audit
sieur curé la somme de trois liures pour les causes
y portées,
T La rante obituelle de trante sols audit S. curé de
SaLnt-Eloy sur un jardin appelé Chasteau-Roucher.
Et, enfin, le testament dudit feu Saturnin Bossavy,
du 22 avril 1731, reçu Géraud, notaire, en dhue
forme, par lequel ledit Bossavy léga audit sieur curé
de quoy lui célébrer des messes.
En conséquence de tout, les ays assigné à compa-
roir dans trois jours par devant Messieurs les Officiers
de la Cour ordinaire de la vicomte de Ségur.
Et se, aux fins, savoir :
Ledit sieur de la Jante d'authorizer ledit S. Bossavy,
son mineur, ou pour le voir authorizer par Justisse.
Ce faict, ledit Bossavy avec ledit de la Jante^ es
qualités qu'il est pris, sis veoir condemner à paier au
requérant les sommes en dispute : trois liures, trante
aols(l) et certaines eautres encore. »
(1] II est temps d'avertir que le sou^ monnaie de cuivre, valait douze
deniers en biUon : du moins, le sou tournois, car le sou parisis en
— 107 —
A l'époque de ce document intéressant, et depuis
plusieurs siècles, nous avions une église et un ora-
toire.
L'église, que nous possédons encore, a subi, au
cours des temps^ bien des transformations. Le chœur,
qui en est la partie la plus ancienne, date vraisem-
blablement du XI* siècle. Le pignon ouest, autrefois
sans ouverture, accuse le xn*. La date qui se lit sur
rentrée : 1745, est celle de la porte qu'on y a ménagée.
La chapelle de la Sainte- Vierge en est la portion la
plus nouvelle. On y remarque, à la clef de voûte, le
blason des Lastours(l) parfaitement conservé. On re-
trouvait ce blason sur plusieurs pierres tombales fort
belles^ mais qui ont servi à faire des escaliers ou
bien le piédestal de la croix s'élevant sur notre petite
place.
La cloche, une des plus remarquables de l'arron-
dissement de Brive, porte le millésime de 1532, et
eut pour marraine Catherine de Salagnac. Cette noble
dame tirerait- elle son nom du Salagnac que nous
connaissons dans la Dordogne?... Nous ne saurions
le dire. Ce qu'il y a de certain c'est qu'elle passe dans
la contrée pour être originaire de Pompadour.
En tous cas, voici les renseignements exacts que
l'on possède sur sa personne, et, plus encore sur son
mari.
...Catherine de Salagnac avait épousé, en 1522,
valait quinze. Le sou tournois représenterait environ trois sous de notre
monnaie.
Quant à la livre (tournois aussi) elle valait 20 sous.
(1) Les Lastours sont originaires de Lastours, dans le canton de
Nexon : M. le Doyen de cette paroisse m'a montré, dans son église,
d'autres clefs de voûtes portant le même blason.
- 108 —
dix ans avant la fonte de la cloche, Jacques du Mas,
écuyer, qui fit hommage en 1541, au roi de Navarre,
vicomte de Limoges et seigneur de Ségur, pour son
hôtel noble du Mas, dans le château de ce lieu, et
pour son « repaire » du même nom, assis près de
Ségur, mais alors dans la paroisse de Saint-Eloi(l).
Aussi le roi de Navarre lui céda-t-il la haute,
moyenne et basse justice sur toute cette paroisse et
sur une partie de celle de Saint-Julien.
Un mémoire authentique dit que Jacques du Mas
mit sa litre dans le corps de Téglise de Saint-Eloi.
Dans le corps, observe M. Poulbrière à qui nous
empruntons ce détail, parce que le sanctuaire était
ordinairement réservé aux seuls seigneurs du lieu.
...Autrefois, ce sanctuaire possédait une vieille sta-
tue en bois représentant sainte Catherine. C'était un
souvenir, apparemment, de Catherine de Salagnac.
Il possède encore, mais détériorés^ une Vierge et
un Christ en biscuit de Sèvres, donnés par M. Bru-
net, en 1877.
...Mais^ pour revenir au clocher, cause de cette
digression, lequel est formé par une tour carrée d'un
très-bon effet, disons que sa charpente a place pour
une seconde cloche qui aurait même existé, jadis.
Si l'église paroissiale nous est restée, l'oratoire plus
haut désigné nous a été enlevé.
Cet oratoire, situé sur les bords de TAuvézère (ou
Haut-Vézère) était un lieu de pèlerinage excessive-
(1) Ce repaire avait été fortifié en 1427 par Jean du Mas, premier
pannetier de Jacques de Bourbon, roi de Hongrie, de Jérusalem et de
Sicile.
— 109 —
ment fréquenté. Il était dédié à saint Laurent, patron
de notre antique paroisse.
Nous fûmes dépossédés de Toratoire Saint-Laurent
vers 1749.
C'est en 1749, en effet, que Ségur était érigé en
paroisse (1) pour le dédommager, je crois, de la sup-
pression de sa a Cour des Appeaux ».
Or, pour se constituer paroissialement, Ségur pre-
nait quelques territoires environnants. Dés lors, notre
paroisse à nous perdait son oratoire^ mais non son
antique dévotion envers son céleste protecteur. Et la
fête de Saint-Laurent amène toujours une recrudes-
cence de piété envers ce glorieux martyr.
Aujourd'hui encore une vieille statuette du saint
diacre est vénérée chez nous. Elle est encastrée dans
la maçonnerie qui surmonte le puits de M. Reynaud,
ancien maire de la commune.
Ce puits^ alimenté par la « Fontaine Saint-Laurent »,
se trouve dans le bourg, entre Téglise et le cimetière.
Ladite statuette attire l'attention de plusieurs ca-
tégories de malades, mais, plus spécialement^ comme
je l'ai constaté^ de ceux qui souffrent des dents.
...Revenons à l'oratoire dont nous fûmes dépos-
sédés.
Jusqu'en 1791, il conserva une destination reli-
gieuse. A cette époque-là^ il fut désaffecté (comme
la chapelle de l'Aumônière), et transformé en salle
devant servir de corps-de-garde. Depuis 1819, le
corps-de-garde, à son tour, est converti en maison
(1) Sous le patronage de Saint-Léger, qui avait à Ségur une cha-
pelle, sur remplacement de laquelle on construisit l'église.
— 110 -
d'habitation, et occupé, aujourd'hui, par M"* Octavie
Renaudie.
Le curé de Saint-Eloi était, à l'époque où notre
paroisse fut réduite au profit de sa voisine, Martial
Duverger, déjà nommé. Et le successeur immédiat de
M. Duverger fut, probablement, M. Mousnier des
Etangs, décédé en 1779.
A la grande Révolution, la paroisse avait pour pas-
teur M. l'abbé Fournier.
Voici ce qu'en dit M. A. Lecler en rendant compte
de ma première édition dans le Bibliophile Limou-
sin de juillet 1907 :
a M. Fournier Antoine est né à Bourganeuf le
12 janvier 1748. Il fit ce qu'on appelait le quin-
quennium, ou cinq ans d'études au Séminaire d'An-
gers et prit ses grades à l'Université de cette ville.
C'est après cela, qu'étant sous-diacre, il entra au
Séminaire des Ordinands de Limoges au mois d'oc-
tobre 1771 (1).
a A l'ordination du Carême^ en 1772, il fut or-
donné prêtre^ et resta ensuite quelque temps dans
sa famille, sans emploi; mais en 1779, il fut nommé
curé de Saint-Eloi, près Ségur, aujourd'hui canton
de Lubersac (Corrèze), pour remplacer M. Mousnier
des Estangs, décédé au mois d'avril.
a Après dix ans de ministère dans cette paroisse,
la Révolution vint l'en chasser et installer à sa place
un jeune prêtre, constitutionnel et intrus^ nommé
François Bardon de Brun, né à Ségur en 1766. En
(1) Livre des examens pour la réception des Ordinands, p. 49. Aux
archives de l'Évôché.
— 111 —
effet, oc quand fat imposé au clergé de France le ser-
ment de la constitution civile du clergé, en 1790,
Tabbé Fournier refusa courageusement ce serment,
et après bien des tracasseries de la part de ses parois-
siens, il prit le chemin de Texil en 1791.
« Le pieux abbé Fournier fut imité par son con-
frère de Ségur, M. Tabbé Meynardie^ et on croit que
tous deux passèrent en Angleterre (1).
« Après la Révolution, on trouve Antoine Fournier
résidant à Bourganeuf en 1802. Il fut nommé par
Mgr Dubourg, en 1803, curé d'AUeyrat, près Au-
busson; mais il refusa ce poste, préférant rester à
Bourganeuf, où il servit de vicaire pendant quelque
temps. En 1804, il est aussi dit curé de Faux-
Mazuras, près cette dernière ville.
a II fut ensuite nommé, le 5 décembre 1805, curé
de Saint-Junien-la-Brugère, qu'il quitta aussi pour
revenir à Bourganeuf. Enfin^ nommé à Bosmoreau, il
desservit cette paroisse en résidant à Bourganeuf, où
il était aussi aumônier des Pénitents bleus.
« Le Sous-Préfet de Bourganeuf, dans un rapport
au Préfet de la Creuse le 3 mai 1818, a écrit :
« M. Fournier Antoine, âgé de soixante-dix ans, curé
de Bosmoreau, est un ecclésiastique recommandable
sous tous les rapports et dans tous les temps, i»
a II est mort au mois de décembre 1819, dans la
soixante-douzième année de son âge. 3>
Depuis la Révolution, la paroisse de Saint-Eloi
était demeurée sans pasteur, l'ancien presbytère ayant
(1) Histoire de U paroisse de Saint- Éloi^ publiée eu 1907 par
P.-J.-B. Joffre, curé de Saint-filoi.
— 112 —
été vendu par la Constituante comme propriété na-
tionale.
Il en fut ainsi longtemps, la commune ne fournis-
sant pas le local nécessaire au logement d'un titulaire.
Saint-Eloi perdit presque son titre de paroisse et
devint, en quelque sorte, annexe de Ségur. Les des-
servants de cette dernière localité furent autorisés à
signer : Curé de Ségur et de Saint-Eloi.
...En 1880, le presbytère actuel fut acheté à la
famille Villouvier, et Tévôque voulut bien donner un
curé à notre petite paroisse.
Ce fut l'abbé Lacoste.
L'abbé Guillaume Lacoste, comme veut bien me^
l'apprendre son neveu, avocat au barreau de Tulle,
fut précepteur, d'abord, du fils du marquis de Leu-
deville, à Leudeville, près Paris, et, plus tard, dans
le Gers, du fils de M. Lacase - Laplagne , ancien
ministre des finances. Après son préceptorat chez
M. Lacase-Laplagne^ il fut successivement aumônier
du Collège de Lectoure, curé de Lézian et Aussios,
dans le diocèse d'Auch, et rentra enfin^ sur ses vieux
jours, dans le diocèse de Tulle.
Mais citons M. Lacoste :
a Mon oncle a vécu et il est mort pauvre, aimant
à répandre autour de lui ce qu'il possédait.
a Je suis heureux que vous lui consacriez un sou-
venir dans votre ouvrage. C'était un cœur incompa-
rable. Ceux qui l'ont connu n'ont pu s'empêcher de
l'aimer. »
En 1882, M. Adrien Magne succéda à Tabbé La-
coste. Il resta huit ans dans la paroisse. Son suc-
— 113 -
cesseur fut M. Ouvrard, aujourd'hui aumônier de
THospice de Brive.
Après M. Ouvrard, il y eut un veuvage de deux ans
qui prit fin par la venue de M. Tabbé Lascaux, lequel
trouva dans la paroisse une mort regrettable.
Après cet incident, que l'on pensait de nature à
dégoûter tout ecclésiastique, M. Tabbé Joffre arriva
cependant.
Au cours de son ministère, ce prêtre a fait réaliser
à Téglise des réparations qui ont satisfait tous les
paroissiens. A l'occasion de Tinventaire, il a fait faire
exclusivement aux hommes une manifestation paci-
fique et noble qui a attiré sur notre petite paroisse
Tattention de tout le département; et^ enfin, il a été
spontanément honoré du secrétariat de la mairie^ ce
qui a attiré un instant sur celte commune l'attention
de toute la région!... Honneur à Saint-Eloi!...
P.-J.-B. Joffre.
T. XXX. i — 8
1 BRiïlSTE A LA G0NGIER6ERŒ
(TZIElR.A^ZDOZe. JLN II)
Le 4 thermidor an II comparaissaient devant le
tribunal révolutionnaire, première section, salle de
la Liberté, vingt-cinq prévenus, tous rattachés à la
conspiration dite de Dillon, ou conspiration des Pri-
sons. Il y avait là une octogénaire, la Maréchale de
Noailles, sa fille et sa petite-fille ; le vicomte de La
Châtre, ancien lieutenant -général ; « la veuve de
a Saint-Juire, ci-devant conseiller au Parlement » ;
la veuve Duvaugarnier ; le général de Fiers, âgé de
38 ans, ancien général en chef de Tarmée des Pyré-
nées, un des officiers de la Monarchie qui avaient
acclamé la Révolution ; le fermier général de La-
borde^ un Mécène de Tancien régime, « engraissé de
la substance du peuple », avait ajouté de sa main
Fouquier-Fiuville sur Pacte d'accusation, Pex-consti-
tuant Gossin, des domestiques et des ouvriers., eux
aussi ff complices de tous les crimes et de toutes les
ce conspirations de Capet contre la natioq française ».
Enfin, pour arrondir apparemment le chiffre un peu
faible de la fournée^ on y avait joint un jeune homme
de 17 ans, presque un enfant. Celui-là, arrêté quel-
ques jours auparavant sous un prétexte quelconque, à
Paris même où il était venu terminer ses études,
s'était présenté aux huissiers, dans les couloirs de la
prison, en entendant appeler le prévenu « Maillé ».
~ 116 -
C'était de son vrai nom Jean-Joseph Meynard de
Mellet, né à Brive le 26 décembre 1776, fils unique
de Joseph-Julien Meynard de Mellet (d'une famille
originaire de TuUe)^ et de Catherine Maledent de la
Bastille, habitants de Brive. 11 était, d'après les re-
gistres paroissiaux de Téglise Saint-Martin de Brive,
le filleul de Messire Jean-Joseph Peyrac ou de Pey-
rac, son grand-oncle, écuyer, ancien commissaire de
la marine, habitant de Paris, rue Neuve, paroisse
Saint-Eustache. Son acte de baptême porte les signa-
tures suivantes :
a La Bastille, Meynard de Lafaurie, Puymarets
d'Espagnac, du Griffolet, de Farge^ d'Arche, du Grif-
folet, de Scorailles, d'Espagnac, de Verlhac, de la
Bachellerie, le chev. de Corn^ v'* de Cosnac, du Sail-
lant du Luc, Brival, Meynard de Mellet père, de Gi-
libert, d'En val, Verlhac ».
La famille Meynard de Mellet, qui possédait des
biens à Chamboulive et la seigneurie de Mellet, en
Périgord, était dans l'aisance. Elle avait à Brive une
sépulture dans l'église des Pénitents blancs, (Saint-
Pierre).
Tou3 les accusés furent condamnés. Depuis la loi
de prairial^ il n'y avait plus de défense. Lorsqu'un
prévenu ouvrait la bouche pour donner quelque expli-
cation, le président lui coupait la parole. Le jeune
Mellet, confondu avec Maillé qui était resté en pri-
son, fut frappé de la peine capitale, sans avoir pu
dire un mot. « Il est évident, lit-on dans Tacte d'ac-
— 117 -
cusalion, qu'il tramait avec Pitt contre la République
Française ». Son homonyme Maillé s'était d'ailleurs
rendu coupable d'un crime de rébellion caractérisé.
Gomme on lui servait un poisson avarié, il l'avait,
d'après ce que rapporte M. Wallon, jeté à la tète du
traiteur ou de son garçon. A supposer que l'erreur sur
la personne de l'assigné ait été reconnue au cours de
la procédure sommaire, la justice révolutionnaire
n'aurait pas moins ordonné l'exécution ; a un peu
plus tôt, un peu plus tard qu'importe ! », telle eût
été son appréciation. Meynard de Mellet ne gardait-il
pas dans tous les cas sur son visage, suivant le mot
d'un espion des comités, ce que les ci-devant ne peu-
vent perdre de leur ancien regard ? Et n'avait-on pas
guillotiné, quelque jours auparavant, le petit Saint-
Amaranthe, un enfant qu'on appelait Lili, comme
complice de sa mère et de sa sœur dans la grande
conspiration de Cécile Renaud contre Robespierre?
a II ne leur faut, disait LoiseroUes père prenant la
« place de son fils, que leur compte de tètes ».
Barrère, au nom du comité de Salut public, venait
de proclamer, devant la Convention, la nécessité de
prendre des mesures pour l'évacuation des prisons.
L'accusateur public, courbé sous un labeur écrasant,
n'y regardait pas de si près, si bien que, dans ces
heures tragiques, elle devenait une vérité, cette spiri-
tuelle et dernière épigramme, décochée à ses juges
par le journaliste Champcenetz : « Pardon, président,
« c'est peut-être comme dans la garde nationale?
et N'y aurait-il pas des remplaçants? »
— 118 -
Et par une tiède soirée d'orage, qu'a décrite l'abbé
Carrichon, confesseur des dames de Noailles, lequel
les suivit jusqu'à Téchafaud, le pauvre Meynard de
Mellet monta dans cette sinistre charrette, dont un
contemporain a dit que c'était la bière des vivants et
que la populace parisienne appelait familièrement \
a le carrosse à trente-six portières ». Les condamnés, i
les mains liées^ serrés les uns contre les autres, caho- i
tés et se cramponnant aux ridelles, s'y tenaient avec
peine, les uns debout, les autres assis. Le lieu des !
exécutions, sur la réclamation des habitants du quar-
tier de la Madeleine, avait été transféré de la place de
la Révolution à la Barrière du Trône renversé, dans
la direction de Vincennes. Le funèbre cortège s'y
rendait par le pont au Change et le faubourg Antoine.
L'ex-constituant Gossin, un homme de six pieds, fut
exécuté le dernier ou l'un des derniers, après avoir,
d'après un témoin oculaire, examiné curieusement la
guillotine.
Le Moniteur du 10 thermidor donne, avec le dé-
tail des événements du 9 thermidor, une liste sur
laquelle figure, parmi les condamnés du 4, tous
« convaincus de s'être rendus les ennemis du Peuple
a en participant aux conspirations et complots formés
« dans la maison d'arrêt du Luxembourg^ J. Meynard-
« Mellet, âgé de 17 ans, né à Brive-la-Gaillarde, ex-
ce noble ».
Ainsi périt, guillotiné à la place d'un homonyme
et, d'après les pièces mêmes de la procédure, pour
un fait auquel il était étranger, cet autre Lesurque,
innocente victime dont les historiens de l'époque révo-
lutionnaire ont à peine retenu le nom ; ce qui n'em-
— 119 —
pécha pas d'ailleurs la condamnation et Texécution,
deux ou trois jours après, du prévenu Maillé^ que la
première citation n'avait pas touché.
Que devenaient, dans tout cela, les malheureux
parents, restés devant leur foyer désert ? Le l***" floréal
an IX, décédait à son tour, à Brive, après Tunique
héritier de son nom, Joseph-Julien Meynard de Mel-
let, qualifié propriétaire, âgé de 60 ans, époux de
Catherine Maledent de la Bastille. Le déclarant était
son neveu, Pierre Lavialle de Lameillère^ homme de
loi, habitant de Chamboulive (1).
J. DE Saint- Germain.
(1) Sources : Wallon, Histoire du Tribunal révolutionnaire;^
Archives de la Mairie de Brive ; — Gosselin-Lenôtre, Vieilles Mai-
sons, Vieux Papiers ; — Rapport sur les Papiers de Robespierre,
par le conventionnel Courtois de l'Aube.
LE MONASTÈRE DE GOIROUX
11 nous a paru intéressant de reproduire un acte
authentique du 30 janvier 1749 signé par la supé-
rieure et les religieuses bénédictines de Tabbaye de
Coiroux près Aubazine. Cette pièce originale contient
des noms très connus en Limousin.
Le verso de Tacte porte cette suscription :
Du 30 janvier Ï749.
Quittance consentie par les dames religieuses com-
posantes, la Communauté de Coiroux en faveur du
sieur Jacques Fournet de Beauclair de la somme de
300 1. en cancellation d'une rente constituée au ca-
pital de pareille somme, consentie par le sieur Fournet
au profit de laditte communauté par contrat du
26 mars 1745. Reçu par Monteil n^'* Royal et CouUé.
Laditte quittance sous seing privé.
Au recto nous lisons :
*
« Nous louise de Saulvebœuf supérieure commis-
saire de Coyroux, assistée de sœur Marguerite de
Gilibert cellerière, et autres religieuses composant la
dite communauté de Coyroux déclarons avoir ressut
du sieur Jacque fournet de beauclaire bourgeoit abi-
tant la ville de larche la somme de trois cens livres
en espèces de cours; de rante constituée due à la
communauté suivant le contract du ving et six mars
milles sept cens quarante sinq, ressut par monteil
notaire royal duëmant contreroUée par ozon, en-
— 122 —
semble tous les revenus legitimemant dûs, distraction
faite du dixième ; avancé par ledit sieur fournet la-
quelle susdite somme de trois cens livres les susdites
religieuses onst dit vouloir employer aux deptes les
plus privilégié de la dite communauté^ et le dit sieur
fournet de son chef à dit provenir des deniers de
demoiselle suzanne cabanis sont epouze^ les dites
r'gg** on remis lespecdiction dudit contract promet-
tant rédiger la présante quitance par devant notaire
et témoins a la première réquisition qui leur en seroit
faite ; fait dans le parloir de Coyroux paroisse de cor-
nil le trantieme janvier milles sept cens quarante
neuf.
S"" de Saulvebœuf supérieure commissaire.
S*" de S. leon de losse.
S*" losse.
S' de Darche.
S"" de Germain.
S*" de la bachellerie.
S^ de S** fortunade.
S"" de Flomont.
S*" de Gilibert celleriere.
S*" de Chassaing.
S"" de bertin.
Nous avons tenu à respecter la ponctuation et l'or-
thographe de cette pièce curieuse, qui nous fait con-
naître le nom de famille des religieuses de Coiroux
au milieu du xvm* siècle. Nous y voyons qu'elles
appartiennent à la noblesse du pays. Elles étaient
évidemment des religieuses de chœur.
J.-B. ESPÉRET.
ECUS D'OR
(P*ixi ci\x lM£o3rexi-^Gre)
Trouvés au Mas, près du hameau de Puy-Jarige,
COMMUNE DE BrIVE
Une intéressante trouvaille de monnaies d'or a été faite,
l'an dernier, par le sieur Mayjonade, propriétaire au Mas,
près du hameau de Puy-Jarige ; ces monnaies présentent
deux types différents :
1^ CHARLES VII (1422-1461)
D. Écu d'or, couronné, aux armes de France, accosté de
deux lys couronnés.
Lég, KAROLVS. DEI. GRACIA. FRANCORV. REX.
R. Croix cantonnée de quatre couronnelles dans un qua-
drilobe.
Lég, XPC. VINCIT. XPC. REGNAT. XPC. IMPERAT.
(Christus vincit, Christus régnât, Christus imperat).
20 DAUPHIN VIENNOIS (1440-1456)
D. Champ écartelé de France-Dauphiné.
Lég. LVDOVICUS. DALPHS. (Dalphinus) VIENENSIS(l).
R. Croix cantonnée de deux lys et de deux Dauphins.
Lég. XPC. VINCIT. XPC. REGNAT. XPC. IMPERAT.
Les Dauphins Viennois ont possédé au Moyen-Age le
droit de battre monnaie ; ils ont transmis ce droit aux fils
des Rois de France et aux Rois qui leur ont succédé dans la
souveraineté du Dauphiné.
(1) Qui fut plus tard Louis XI, à la mort de son père Charles VII.
— 124 —
Eq effet, par contrat passé au château de Vincennes le 23
avril 1343, entre le roi Philippe VI et le Dauphin de Vien-
nois, Humbert II, ce dernier fit cession du Dauphiné au roi
de France, sous condition que l'héritier de la couronne por-
terait le titre de Dauphin et moyennant une somme de
120,000 florins d'or.
Les écus d'or trouvés au Mas étaient, paraît-il, au nombre
d'une trentaine, t^lus accommodant que certains autres au-
teurs de trouvailles de ce genre, le sieur Mayjonade a cédé
deux de ces écus à M. Rupin, pour le médailler de notre
Musée. Je n'ai eu qu'à copier les légendes écrites par M. E.
Rupin sur les cartons où sont placées ces monnaies.
Leur flan est très mince, comme au surplus celui de toutes
les monnaies d'or du Moyen-Age. L'Amérique n'était pas
encore découverte et les mines d'or de l'ancien Continent
s'épuisaient !
Ph. Lalande.
BIBLIOGRAPHIE
Au mois de juillet dernier nous avons reçu de Tauteur,
M. Tabbé Martial Soullier, chanoine de Tulle, un ouvrage de
recherches sur la vie du T. R. P. Louis Soullier, son frère,
né à Meymac, qui fut troisième supérieur général de l'ordre
des Oblats, ordre fondé par Mgr de Mazenod, évêque de
Marseille.
Nous le voyons avant tout excellent prêtre, habile organi-
sateur, très courageux, chez les sauvages peaux-rouges des
rives du Saskatshewan, à Ceylan, au Texas, au Transvaal;
puis en Espagne, France, etc. Il refusa un évêché du car-
dinal Guibert.
Ce livre est très intéressant; il sort de l'imprimerie
Mazeyrie de Tulle. Nous ne pouvons que le signaler très
avantageusement, pour ceux que les missions religieuses
intéressent, les amateurs de voyages et de propagation de la
langue française.
Au mois de novembre nous avons encore un autre livre
d'un auteur presque Limousin, de M. Espéret, docteur en
droit et professeur d'histoire au Collège de Brive. C'est un
traité de haute politique internationale sur la neutralité ou
la possession riveraine et maritime des détroits au point de
vue des guerres qui peuvent surgir entre les peuples.
Le principal motif invoqué est l'état des Dardanelles et
du Bosphore, dépendant de la Turquie qui barre la sortie
dans la Méditerranée, des navires de la Russie, de la Rou-
manie et de la Bulgarie, et qui a empêché la flotte russe de
la mer Noire d'aller en Mandchourie au moment de la
guerre avec le Japon. Il est d'autres détroits dont il serait
très intéressant d'établir la neutralité, tels que Gibraltar,
Singapour, Bab-^' ^ ^^Qnnu^»
- 126 —
L'œuvre est parfaitement menée et travaillée avec le plus
grand soin, pleine de documents pris dans une foule d'ou-
vrages.
Ce livre sera évidemment sur les tables dans les Congrès
politiques à venir.
G. DE Lépinay.
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U GROÏÏE DE SAINT-GOION
Quand on renaonle le cours du ruisseau de Plan-
chetorte(i), on voit s'ouvrir, à gauche, un petit vallon
qu'encadrent des pentes assez abruptes, de fai-
ble hauteur. Un abri sous roche, dont la base est à
quelques mètres seulement du thalweg, en marque
l'entrée; il se compose d'excavations naturelles peu
profondes, dont la plus grande, de forme semi-
circulaire, ne mesure que trois mètres sur six. Au-
dessus de cette petite grotte est une anfractuosité, de
dimension encore plus restreinte, à laquelle on accède
par un escalier de quatre marches taillées de main
d'homme dans le roc. Cet escarpement est connu,
dans le pays, sous le n&tn de « lo rotro de Secoundou »,
le roc ou la grotte de Saint-Gondon.
Tout près de là, au fond du même vallon, une
maison de paysans est accrochée à la paroi rocheuse.
Maçonnée sur le devant, creusée dans le brasier (2)
sur le derrière, cette habitation, moitié grotte et moi-
tié bâtiment, ne parait pas avoir plus d'un siècle
d'existence. On y remarque, toutefois, trois chemi-
nées qui sont peut-être plus anciennes. Elle sert
actuellement de logis à une famille de cultivateurs
qui occupe deux des pièces et a installé ses bestiaux
(1) Près et commuue de Brive.
(2) Les gens du pays désignent ainsi le grès du trias.
— 128 —
dans la troisième. Une légende dit que cette maison
aurait été le siège du prieuré de Saint-Gondon (i).
Quel est le saint dont le nom reste attaché, dans les
souvenirs populaires, à la petite grotte des environs
de Brive, et qui, d'après la légende, aurait été le
patron du prieuré de Planchetorte? A Toccasion de
son étude si documentée sur le culte des fontaines
en Limousin (2), M. Louis de Nussac a fait des re-
cherches très minutieuses sur la grotte de Saint-
Gondon et a bien voulu m'en communiquer le ré-
sultat. Saint-Gandon ou Gondon serait, peut-être, le
même personnage que GondnU {sa7ictus Gondulfus)
qui^ après avoir été évêque de Milan au vi* siècle,
se serait fait ermite et serait mort près de Gien (Loi-
ret) au lieu appelé aujourd'hui Saint-Gondon. Dans
son Histoire de Brive {^)y Leymonerie dit que saint
(1) Je dois à une obligeante communication de M. Philibert Lalande
ces renseignements topographiques. Pour faciliter les touristes et les
archéologues qui voudraient visiter la grotte de Saint-Gondon, je
transcris ici ce passage très précis de «la lettre de mon aimable cor-
respondant : « L'Atlas départemental de la Corrèze (carte des cantons
de Brive et de Larche) ne fait pas mention de Saint-Gondon ; mais,
cherchez Champ, au sud de Brive; prenez le sentier (ligne verte) qui
descend de ce village au ruisseau de Planchetorte et, de là, se dirige
vers le Chastanet; quittez-le après avoir franchi le ruisseau; vous
trouverez une autre ligne verte (un autre sentier) parallèle à la rive
droite du ruisseau ; suivez-la en amont jusqu'au vallonnet que vous
verrez à gauche de ce sentier : c'est le vallon de Saint-Gondon. Le
roc est à gauche, au confluent, et l'habitation à mi-côte, au fond de ce
petit vallon, en remontant vers le troisième plateau du Chèvre-Cujol,
côte 268. »
(2j Les Fontaines en Limousin, culle, pratiques, légendes. — Voici
ce que dit M. de Nussac de la fontaine de Saint-Gondon, p. 22 : « Las
founs Sent-Gandou, sources intermittentes dans de petits creux de
rochers pratiqués dans une grotte de la vallée de Planchetorte, près
Brive ; rappelle une ancienne maison de religieuses située auprès, et
sujet d'une vieille chanson populaire satyrique, Las Menetas de Sent-
Gandou, aujourd'hui complètement perdue. Anciennement, pèlerinage
le 15 mai, pratiqué au xvi» siècle; contre les maux d'yeux. »
(3) Histoire de Brive- la-Gaillarde et de ses environs, 18t0, p. 154,
note L
- 129 -
Gondon aurait été évêque de Cahors, ce qui expli-
querait, dans une certaine mesure, le culte dont il
était Tobjet sur les confins de son diocèse; mais M. de
Nussac n'ayant pas trouvé le nom de Gondon sur les
catalogues d'évêques de Cahors, on peut douter de
Texactitudedu renseignement donné par Leymonerie.
M. Tabbé Pourradier, curé de Saint-Gondon (Loiret),
a écrit l'histoire de sa paroisse et du personnage qui
lui a donné son nom{l); il ne parle pas du séjour
que Termite aurait pu faire dans les environs de
Brive.
La question reste donc obscure et les Vies des
saints du Limousin (2) ne nous permettront pas d'y
répondre, puisqu'elles ne mentionnent ni le culte ni
le nom de ce saint. L'ermite du Berry, dans des péré-
grinations ignorées, s'est-il arrêté sous le rocher de
Planchetorte et y a-t-il laissé le souvenir de sa piété
et de ses vertus? Un religieux de Saint-Gondon (3)
a-t-il porté en ce lieu quelque relique du saint et
y a-t-il bâti un oratoire? Nous en sommes réduits à
n'émettre que des hypothèses.
Ce qui est certain, c'est que le nom de Gondon est
étranger au pays, qu'il y a été importé à une époque
déjà lointaine; qu'il est resté attaché à une grotte
solitaire, et que, dans cette grotte et sous ce vocable.
(1) Notice sur Saint-Gondon,
(2) Labiche de Reignefort. Six mois des Vies des saints du diocèse
de Limoges et de tout le Limousin. — Vies des saints du diocèse de
Tulle, par MM. les rédacteurs de la Semaine Religieuse.
(3) D'après M. l*abbé Pourradier, la bourgade de Saint Gondon (Loi-
ret) aurait été autrefois une ville forte ; elle avait un prieuré de Béné-
dictins. La fontaine d'eau minérale, qui y jaillit, était réputée au
XVII* siècle.
— 130 -
un oratoire a été construit, qui, pendant plusieurs
siècles, a attiré de nombreux pèlerins.
. Il n'existe, à ma connaissance, aucun document
permettant de dire que Saint-Gondon de Planchetorte
a été un prieuré. Leymonerie a écrit qu'un « monas-
tère ou hermitage de religieuses » avait été construit
anciennement en ce lieu. « On y voit encore, dit-il,
des restes de la chapelle adossée à un rocher escarpé. »
S'il déclare n'avoir trouvé aucune note précise sur cet
établissement, « la chanson triviale : Les Menètes de
Saint'Gondorij etc., suffirait, ajoute-t-il, pour prou-
ver son existence. Des vieillards se souviennent qu'on
allait en dévotion à Saint-Gondon, et qu'on y fi. hait
en terre de petites croix de bois(l) ».
L'usage de planter, aux abords de la grotte, des
croix de bois, s'est perpétué jusqu'à nos jours. M. de
Nussacen a remarqué un certain nombre en 1889. Il
a vu aussi, à cette époque, des traces de constructions
aux alentours, sans pouvoir y reconnaître un reste de
l'ancienne chapelle. Un bénitier sculpté, recueilli dans
ces ruines, sei'ait conservé, parait-il, par un cultiva-
teur de Ghèvre-Cujol.
La chanson Les Menètes de Saint-Gondon. est
complètement oubliée, et les ruines de l'oratoire ont
entièrement disparu. On ne saurait douter, cepen-
dant, de l'existence en ce lieu d'un vieux sanctuaire.
La tradition, qu'entretiennent encore quelques pra-
tiques pieuses, est confirmée par un document pré-
cis, conservé dans les Archives de la Haute-Vienne.
Il reste à savoir ce qu'était ce sanctuaire.
(i) Histoire de Brive-la-Gaillardet p. 254, note 1.
— 131 —
Nous devons écarter tout d'abord Thypothèse d'nn
monastère de femmes. Nos annales n'en parlent pas.
Un simple prieuré, le logis des recluses, la chapelle
conventuelle auraient laissé des traces caractéristiques.
Le site ne se prêtait pas à un établissement de ce
genre. Les vestiges de constructions, observés par
Leymonerie et M. Louis de Nussac, ne peuvent être
que d'un très modeste oratoire. Les Menèies de Saint-
Gondon étaient, sans doute^ des filles dévotes, unies
par les liens d'une congrégation séculière, qui veil-
laient à l'entretien de la petite chapelle et s'y ren-
daient, à certains jours de l'année, pour y réciter des
prières.
Le lieu était admirablement propice aux manifes-
tations de la piété populaire. Rien ne manquait au
décor qui frappe les imaginations naïves : un vallon
désert; des parois de rocs abruptes, percées de ca-
vernes qui avaient été habitées aux temps préhisto-
riques et où l'on trouve encore des vestiges de l'in-
dustrie des premiers hommes; une grotte d'un accès
difficile, dans laquelle coule une fontaine intermit-
tente; enfin, la tradition enseignant qu'un saint ermite
avait vécu sous cet abri.
Une chapelle fut construite, à une époque reculée,
au-dessus de la grotte. Ce fut, pour les habitants des
paroisses voisines, un lieu de pèlerinage. « De tout
temps et par tradition », dit l'acte que nous publions,
s'y rendaient en dévotion « ceux quy estoient tra-
vaillés de fluxions de goutte et de mal des yeux, où
ils recepvoient quelque soulagement considérable en
frottant et lavant les yeux de l'eau qui descoule dudit
rocher deux divers jours seulement de la sepmaine ».
Il n'y avait pas de chapelain spécialement attaché
à l'oratoire. Les prêtres de Brive et des paroisses limi-
trophes y célébraient la messe lorsqu'ils accompa-
gnaient des groupes de pèlerins. Le 15 mai était la
date des grandes dévotions, la fête de saint Gondon.
Ce jour-là le peuple se rendait en foule à la grotte et
se lavait à Teau de la fontaine.
La faveur dont jouissait le saint ermite dura jus-
qu'au milieu du xvii* siècle. Vers 1645 la grotte com-
mença à être délaissée ou, du moins, n'attira qu'un
nombre restreint de pèlerins. Si les paysans du voi-
sinage lui restaient fidèles, continuaient à fréquenter
la fontaine guérissante, à implorer saint Gondon^ à
planter dans le sol de petites croix formées de deux
morceaux de bois liés par un fil blanc, les habitants
de Brive et des bourgades voisines ne s'y transpor-
taient plus en masse; la chapelle n'était pas entre-
tenue, ses murs se lézardaient, sa toiture laissait
passer la pluie. On n'y disait plus la messe. Le culte
de saint Gondon était en décadence.
Cet état de chose durait depuis trente ans, quand
Pierre de Fieux, conseiller au présidial de Brive, eut
le désir de restaurer le pèlerinage. 11 était propriétaire
de la grotte et du terrain qui l'entoure (I). Par l'acte
que nous reproduisons, daté du î20 août 1675, il fonde
une vicairie dans la chapelle et donne à la dite chapelle
et au chapelain qui la desservira le sol de la grotte et
(1) Le lieu dit de Saint- Gondon (grotte et parcelles attenantes) était
une dépendance de la propriété de Marcillac, qui appartenait à la fa-
mille de Fieux de Montaunet. Au hameau de Marcillac, situé sur un
point culminant, séparé de Saint-Gondon par la vallée de Planche-
torte, on voit une maison de la fin du xv* siècle, qui doit être l'an-
cien logis des de Fieux (Renseignements donnés par M. Philibert
Lalande).
un petit enclos qui l'environne, comprenant quinze
sétérées de terrain en nature de champ labourable, de
pré et de vigne. Le produit de ce bien eût été insuf-
fisant pour la nourriture d'un homme. Aussi Pierre
de Fieux n'entendait-il pas imposer au vicaire la rési-
dence et le service exclusif de la chapellenie. La
grotte étant située dans la circonscription paroissiale
de Saint-Martin de Brive, c'est un prêtre de cette
I paroisse qui devait bénéficier de la fondation, à la
I condition de dire, dans la chapelle de Saint-Gondon,
vingt messes chaque année aux jours qui seraient
fixés par le donateur et le curé de la paroisse.
Le chanoine Jean Vielbans, curé de Saint-Martin,
est partie contractante à l'acte. C'est lui qui accepte
la donation et prend l'engagement d'en exécuter la
charge. Pierre de Fieux le nomme « premier chap-
- pellain de la dite vicairie, pour dans icelle faire
I touttes les fondations requises et nécessaires tant
pour l'honneur et gloire de Dieu et du sainct, que
soulagement de ceux qui auront dévotion au bon
sainct Gondon, pour jouir de ladite vicairie et sus-
dicts fonds pendant sa vie ». Au décès du chapelain,
le fondateur réserve pour lui et ses héritiers la dési-
gnation du successeur. Les réparations et l'entretien
de l'oratoire sont à la charge du vicaire ou de la
paroisse. De Fieux et les siens auront le droit de faire
peindre une litre avec leurs armes sur le mur de la
chapelle, d'établir un banc dans l'intérieur, et de se
faire enterrer dans le sanctuaire.
\ L'acte du 20 août 1675 a été signalé par M. J.-B.
Champeval dans un article du journal Le Concilia-
leur, en 1891. 11 me semble que cette mention ne
I
— 134 —
suffit pas et qu'il est intéressant de le publier en son
entier. Les renseignements qu'on y trouve, en effet,
sont de nature à détruire la légende, trop longtemps
accréditée, du monastère de Saint-Gondon ; ils nous
donnent, en même temps^ quelques détails précis
sur un sanctuaire peu connu et un pèlerinage du
Bas-Limousin au milieu du xvii* siècle.
René Fage.
Donation du sol et grotte de Saint-Gondox, 1675.
Dans la ville de Brive, Bas-Limosin et maison de Mons'
M® Pierre de Fieux, écuyer, sieur de Lignoyre conseiller du
roy au siège présidial de la présente ville, le vingtiesrae
jour du mois d'aoust mil six cent soixante quinze, après
midy, régnant Louis roy etc., etc., pardevant moy notaire
royal soubzsignê, présents les témoins bas nommés, s'est
personnellement constitué le dit sieur de Fieux, lequel de
son bon gré et franc vouUoir, en présence de Monsieur
M* Jean Vielbans, docteur en théologie, prêtre, chanoine et
curé de l'église collégiale St. Martin de la dite présente ville,
a dict et représenté qu'il lui appartient un domaine situé
dans le villaige de Marcilhat, parroisse du dict St. Martin et
appartenances d'icelluy, duquel dépend un certain rocher où
il y a une grotte, sive caverne creuzée, que de tout temps et
par tradition a este appellée du nom de Sainct Gondon, dans
lequel de mesme durée de temps plusieurs parroisses, tant
du voysinage que d'autres, ont eu certaine dévotion, parti-
cullièrement ceux quy estoient travaillés de lluxions de goutte
et de mal des yeux, où ils recepvoient quelque soulagement
considérable en frottant et lavant les yeux de l'eau quy des-
coule du dit rocher deux divers jours seulement de la sep-
maine, à raison de quoy et affin d'augmenter la dévotion à
ce bon saint, le dit sieur de Fieux a déclaré estre en volonté
— 135 —
et dans le pieux désir de faire quelque fondation pour un
chappelain ou vicaire affln qu'à Tadvenir on y puisse celle-
brer la saincte messe. En considération duquel desseing, le
dit sieur Defieux auroit ci devant passé contract avecq
Mons' M« Jean Verlhac, aussy docteur en théologie et pour
lors curé de la sus dite éylise St. Martin et a présent officiai
de Monseigneur l'evesque de Limoges pour le dit Bas-
Limosin, lequel a demeuré inexécuté et sans effect, à cause
de la résignation de la dite cure en faveur du dit s' Viel-
bans; en raison de quoy le dit sieur de Fieux désirant
accomplir cette dévotte et pieuse résolution, a donné comme
donne par ces présentes à la dite chappelle et à celluy quy
la desservira et à ses successeurs, premièrement : le sol
dans lequel cette saincte grotte est scituée et en outre un
fonds de terre quy consiste en quinze septerées de terre ou
environ, scitué ez environs de la chappelle, le tout tenant
ensemble, consistant en terre, boys et vigne confrontant (1).
aux debvoirs et conditions que s'ensuivent : scavoir est que
le dit s' chappelain ou vicaire quy desservira la dite vicairie
et son successeur à Tadvenir, seront tenus de dire tous les
ans vingt messes basses suivant l'intention et les jours quy
seront marqués et stipulés par le dit s' de Fieux et le dit
sieur chappelain ou vicaire, lors de la première messe quy
se cellebrera dans la sus dite chappelle; auquel temps aussy
les confrontations des sus dites quinze septerées de terre
seront remplyes et orientées. Et pourra le dit s' de Fieux et
les siens, sy bon leur semble, mettre autour de la dite chap-
pelle une littre avec leurs armes, ensemble le premier banc
et des tombeaux dans icelle comme fondation. A ces fins el
pour parvenir à son entier desseing et [attendu] que la dite
grotte se trouve dans l'estandue de la parroisse de la dite
présente ville, le dit s*" de Fieux a supplié le dit s' Vielhana
curé de donner son consantement pour la protection de ce
divin ouvraige; à quoy agréablement le dit s"" Vielbans a
donné les mains tant pour luy que pour ses successeur?!. En
(1) ici un blanc de deux lignes.
— !:m —
considération de quoy le dit s"" de Fieux a voulu et veut que
le dit sieur Vielbans soit et demeure nommé, comme il le
nomme dez à présent par ces présentes, pour premier chap-
pellain de la dite vicairie, pour dans icelle faire toutes les
fondations requises et nécessaires tant pour l'honneur et
gloire de Dieu et du sainct, que soulagement de ceux qui
auront dévotion au bon sainct Gondon, pour jouir de la dite
vicairie et sus dits fondz pendant sa vie ; après laquelle et
decedz du dit sieur Vielbans, le dit s' de Fieux se réserve et
aux siens la nomination du dit vicaire les masles prefferés
aux femelles et les héritiers aux autres, et les femelles seu-
lement à deffaut de masles, et les héritiers des uns et des
autres prestres en tout temps aux puynés. Et quoy qu'il aye
esté dict autres foys messe dans la dite chappelle et qu'on a
discontinué despuys trente ans ou environ, le dit s' Vielbans
est aussy prié d'avoir la bonté de faire approuver le tout à
mon dit seig' l'evesque de Limoges et d'obtenir le pouvoir
de bénir et reconcillier la dite chapelle le plustot quy se
pourra pour ne rettarder pas la dévotion et le service divin
de la dite chapelle ; après laquelle obtantion et cellebration
de la saincte messe le s*" curé en la dite qualité de vicaire
commencera de jouir du fondz donné à la dite chappelle
pour Tacchepvement et perfection de la bâtisse et charpanle,
a laquelle le dit s*" de Fieux ne sera obligé de contribuer
d'aulcune chose. Et pour l'entrettenement de tout ce dessus,
les partyes ont obligé tout leurs biens présents et advenir,
juré etc., renoncé etc.
Présens à ce Pierre Chastaing, bourgeois, et Jean Lemas,
marchant, habitans du dit Brive, tesmoings.
Ainsy signés à Toriginal des présentes : de Fieux contrac-
tant; Vielbans, curé de Brive, acceptant; Chastaing présent;
Le Mas présent, et moy Estienne Mayne, notaire royal du
dict Brive (I).
(1) Archives départementales de la H au te- Vienne, série 6, 769.
TITRES k DOCUMENTS
OONOH3RN-A.NT
LE LIMOUSIN & LE QUERCY
Un Épisode de l\ Guerre de Cent ans
Le Château de Roussille et les Malemort
(1365-1367)
Au cours des recherches — malheureusement trop
peu fructueuses pour moi — que j'ai faites au Public
Record office [\)j j'ai rencontré nombre de pièces
intéressant le Limousin, mais j'étais là pour le
Quercy^ un peu pressé par le temps, et je n'avais
pas d'ailleurs assez de compétence en histoire limou-
sine pour faire d'utiles découvertes intéressant nos
voisins. Pourtant au hasard de mes lectures dans les
interminables rouleaux de parchemin d'Edouard III,
j'ai rencontré le document suivant qui m'a paru
curieux et capable de figurer dans la collection du
Bulletin archéologique de Brive. C'est une supplique
de Guillaume, seigneur de Malemort et de Brive, et
de sa femme^ Galienne de Malemort, adressée au roi
d'Angleterre, alors maître et seigneur de nos régions
(1367), contre un de ses plus célèbres lieutenants, le
bâtard d'Albret, que le document appelle Bertrand de
Lebret(2). Le dit chef de bande, avec ses compagnons
Héliot Vaillan, Périnet de Senac, et Sicard de Mont-
gyon et autres, escalada pendant la nuit le château
(1) Je profite de roccasion pour remercier la Société archéologique
de Brive qui avait bien voulu contribuer par une généreuse souscrip-
tion au mérite de mes recherches.
(2) Je ne saurais dire si c'est le même que le trop fameux Bertugat
d'Albret dont il est parlé dans toutes les histoires locales.
— 138 —
de Roiissille{l) et enleva la sœur de Galienne, Blan-
che de Malemort, qu'il contraignit à Tépouser, « en
grant deshoneur » de toute sa parenté. Ce n'est pas
seulement de ce rapt que se plaignent les auteur^ de
la supplique, mais aussi de ce que le bâtard d'Albret
s'empara en même temps de Théritage de Jaubert de
Malemort, père de Blanche et de Galienne. Or le tes-
tament de messire Jaubert était formel : il faisait
Galienne sa légataire universelle et ne léguait à
Blanche que la dot nécessaire pour entrer en reli-
gion. Celle qui est devenue par force la femme du
bâtard d'Albret a devoii estre noiiayne ». C'est
contre cette spoliation, principalement^ que protes-
tent Guillaume et Galienne de Malemort. Le chef de
bande, en effet, a confisqué « les terres, biens, chas-
teaux et villes qui furent dudit mons. Jaubert, père
naturel et loyal (légal) desditz filles ». Galienne ainsi
frustrée, demande que le spoliateur soit cité devant
le Conseil royal de Londres pour répondre de ses
usurpations, attendu que pendant deux ans, par sa
puissance et ses intrigues, il a empêché d'aboutir le
procès intenté devant la Cour de Guyenne.
Le roi écrit à son fils Edouard, prince de Guyenne
et de Galles, d'évoquer l'affaire devant lui, et, après
avoir entendu les parties, de la terminer conformé-
ment à la justice.
C'est dans cette lettre otïîcielle, en latin, que se
trouve comprise la supplique, laquelle est écrite en
français et doit être en sa forme originale.
(1) Ce château de Roussille est indiqué dans le voisinage de Neuvic
en la carte féodale du Limousin de M. Champeval. Je n'ai rien trouvé
dans le DiciionnsLire de M. Poulbrière.
— 139 —
Quant à identifier soit Guillaume de Malemort(l),
soit Jaubert, père de Galienne et de Blanche, tous
deux qualifiés seigneurs de Brive et de Malemort, je
n'ai pas les éléments nécessaires et tout le monde sait
combien est difficile la généalogie des Malemort. [1
faudrait réunir des éléments très épars en espace et
en durée et encore aurait-on beaucoup de confusion
à cause du grand nombre des enfants dans une même
famille et de la similitude des prénoms. Je profiterai
seulement de Toccasion pour compléter^ en le corri-
geant un peu, un détail du fragment généalogique
que M. Clément-Simon a donné dans ce Bulletin, il
y a déjà quelques années (2).
Il fait allusion dans une note relative à Aymeric de
Malemort, fils du sénéchal du même nom, à ses pos-
sessions en Quercy. Ce n'est pas de Salvignac, mais
de Salviac, qu'Aymeric était seigneur. Salviac appar-
tenait en 1241 à Guillaume de Gourdon et c'est dans
les environs de cette ville que se trouvaient les terres
que donna ce seigneur à Obazine pour la fondation
du monastère de Tabbaye nouvelle (3). La même année
il faisait hommage au comte de Toulouse pour ses
possessions de Gourdon et pour le château de Sal-
viac (4). Or le 23 septembre 1246 nous voyons le
comte de Toulouse inféoder à Aymeric de Malemort
tout ce que ce seigneur avait acquis de Guillaume de
Gourdon à Gourdon et à Salviac (5). Comme Aymeric
est dit damoiseau, il s'agit du fils du sénéchal, et c'est
(1) Voir la note au début de la pièce justificative.
(2) Âonée 1891, page 562.
(3) Lacoste, Histoire du Quercy, II, p. 253.
(4) Histoire du Languedoc, VIII, col. 1980.
(5) Ibidem, col. 1994.
- 140 -
peut-être par alliance qu'Aymeric de Malemort eut
Salviac et certaines terres de Gourdon. En 1269 il
demandait à Alphonse de Poitiers, successeur de Ray-
mond VII, à lui faire hommage de Salviac et de ses
dépendances, comme avaient fait ses prédécesseurs
aux comtes de Toulouse (1). Plus tard dans l'acte
de 1286 par lequel le roi de France, interprétant avec
Edouard P' le traité de Paris de 1259, fait assigner
les rentes qu'il paiera au roi d'Angleterre, sur di-
verses terres et juridictions du Quercy, nous trouvons
cité le ressort de la baron nie d'Aymeric de Male-
mort (2).
Dans les premières années du xiv* siècle il cédait
ses possessions quercynoises à Pierre Ballene, varlet
du roi de France, ainsi que nous l'apprennent des
lettres patentes, autorisant ledit varlet à faire cette
acquisition de terre noble, quoique roturier (3). L'on
m'excusera d'avoir ajouté ces détails peu connus sur
ce personnage, bien qu'ils n'aient aucun rapport avec
le document que je publie ici. E. Albe.
(1) Correspondance d'A, de P., édition Molinier, t. I, n" 1438. L'acte
des olim (1272) signalé par M. Clément-Simon, porte que le seigneur
de Salviac et son oncle l'archidiacre de Limoges avaient été accusés
d'avoir donné asile à des meurtriers, tandis qu'au contraire ils avaient
bien accueilli le bayle de Salviac qui venait les arrêter et lui avaient
même promis main-forte.
(2) Item ressortum in baronia Aymerici de Malamorte in qua sunt
villa de Salviaco et ejus pertinentie, villa Sancti Âlbini et parocbia
(Saint-Aubin, canton de Dommes, Dordogne), et riparium de Lacosta,
villa de Laborda... (ces deux lieux sont de la commune de Léobard,
près de Salviac), riparium de la Fontada... de Clopiac .. de Costerausta
et ejus pertinentie (ces trois lieux sont de la commune de Gourdon).
(3) D'après les Vascon Rolls, rouleau n* 79, V parchemin de ce
rouleau. Le môme rouleau renferme plusieurs documents concernant
la ville de Limoges. Le parchemin n* 5 se rapporte à Guillaume de
Malemort, alias de Courson. damoiseau du diocèse de Limoges, qui
obtient appel du Grand-Conseil de Bordeaux, qui Ta condamné, auprès
de la Cour du Parlement de Guyenne.
- 141 -
f?ex... (Edwardus).., primogenito nostro Edwardo prin-
cipi Aquitanie et wallie, salutem.
Ex hibuerunt nobis dilectus et fidelis noster Guillelmus,
dominus d^ Malamorte et de Bryva, et Galiana de Mala-
MORTE, xixor ejuSy quandam petitionem, cujus ténor sequU
tur in hec verba :
« A nostre très excellent et très redouble seigneur le Roy,
supplient humblement les vostres humbles subgetz Guilliam
de Malemort, sire de Malemort et de Brive, et Galiane de
Malemort, sa femme, de vostre principauté de Gyene et
chescun deaux tout come chescun touche et poct toucher,
conjoinctement ou devisement que, come mons(eigneur)
Jaubert de Malemorty chevalier, jadis sire de Malemort et
de Brive, defunct, ait fait et institué sa héritière, en touz
ses biens moebles et non moebles, en tote sa universale
succession, en son dreyner testament et en toutes ses autres
ordinances par lui fêtes, sa dite file Galiane, femme dudit
Guilliam, et après la mort et deces dudit mons' Jaubert,
mons' Bertrand de Lebret bastard, estant le pais de Limosin
et de toute Gyene en vostre vraye obéissance et subjection,
se eschala de nuyt le chastel appelé de Rossile, et Heliot
Vaillan et Perinet de Senac, et Sichard de Montgyon, et
plusours autres lors complices et fautors, aveuc ledit bas-
tard de Lebret, touz habitans de vostre principauté de Gyene,
et se prisrent de fait et ravyrent par force et robberent la
soer de ladite Galiane, appelée Blanche de Malemort, fille
dudit mons. Jaubert, — quidans et pensans, ledit bastard,
Tavandite Blanche estre heritere dudit mons. Jaubert son
piere, laquele chose n'est mye, mes devoit estre nonayne et
religiouse, par la ordinance de son piere a laquele se repor-
tent les ditz supplians, — et la amena devers soi et de fait la
esposa pour femme, encontre sa volonté, et de touz ses amys
et parents, countes, viscountes et barons de tôt son linage et
en grant deshoneur d'iceux, et nient meins si prist et occupa
de fait ledit bastard tote la tere, biens et chasteux et villes,
qui feurent dudit mons. Jaubert, père naturel et loyal des
— 142 -
ditz filles Blanche et Galiane ; desqueux terre, biens, chas-
teux et villes, la dite Galiane est, de droit et de reson, droi-
turiere et vraie heritere, einsi corne plus a plain apiert par
les testamentz dudit mons' Jaubert, esqueux se rapportent
les ditz suppliantz, et lesditz biens tient de fait et occupez
ledit bastard par sa malice et par la puissance de ses amys,
en grant domage, préjudice et desheritement de ladite Ga-
liane et dudit Guilliam son mari, en tant que la dite Galiane
ne ad de quoi vivre ne meintenir son estât en aucune manere,
mes la covendra est [sic pour estre) mendiante, sinon que,
par vostre très excellente et très redoute seigneurie, roial et
accoustumee justice, ne li est pourveu de remède conve-
nable, que pour Dieux et en œuvre de charité vous pleise
asditz suppliantz otroier lettres citatories encontre ledit bas-
tard au cerfayn et compétent jour, devant vostre noble con-
seil de Loundres, pour respondre asditz suppliantz, et a
chascun deaux, tout come chescun touche ou poet toucher
conjoinctement ou devisement, a touz les choses que eaux
ou chescun d'eaux li voudront demander a requere.
« Attendu que les ditz suppliants ont pledez deuz ans
devant le conseil de notre seigneur, le prince dAquitaine,
en grantz coustages, mises et despenses, aveuc le dit bastard,
et ne ont peuz avoir droit et raison de li par sa malice et
puissance de ses amys, et si ont les dilations et perlon-
gances que eaux demandent dudit conseil, combien que nos-
tre seigneur le prince comande touziours de faire justice a
ses complaignantz, et la voille, ou que par Dieux ou par pitee
vous plese demander, comander et commettre, si mestier est,
au consail de nostre seigneur le prince, que sommairement
et de plain se enforment des toutes les choses susdites, et
apelées les parties qui serront a apeler, asditz suppliantz
facent bon et bref complément de vraie justice, tant sur la
cause principale quant sur la provision de ses alimentz et
des arrérages d'ixeaux, et totes dependences et circumstances
de la dite cause, paines commises envers nous ou la dite
partie, injures et vilenies faites à la dite Galiane par ledit
bastard, totes dilations frustratoires et en tout et pour
- 143 —
tout, reseges et ostées (?), et dudit bastard et de ses com-
plices, si par vraie information trovcnt eux avoir faicte
ladite roberye et rapt de ladite Blanche, encontre sa volonté
et expresse consentement de li, et de sa dame de meire, et de
ses autres amys de son propre lignage, facent droit, raison
et justice, corporel ou civile ou pécuniaire, selonc que droit,
raison, coustume et usage du païs ou les dites choses ave-
roient esté commises et perpétrées, oïez chescunes de les
parties en lour justes requestes et défenses sommairement
et de plain, attendues les choses susdites en tiele manière
que ces autres soit ensamble, nounobslant queicunque abso-
lution surrepticement empêtrée du nostre sire le prince
avandit. »
Supplicâfido nobis et super contentis in petitione pre^
dicta, eis de remedio congruo providere faciamus.
Nos, volentes prefatis G™* et Galiane in hac parte fieri
quod est justum, vobis mandamus quod, audita que-
rela predictorum G™* et Galiane super premissis, et vocatis
coram vobis predictis, habitaque super hiis et rationibus
utrarumque (sic) parcium predictarum coram vobis inde
proponendis informatione pleniori, eisdem G"* et Galiene
super omnibus et singulis contentis in dicta jjetitione fieri
faciatis debitum .. .. justitie complementum, prout de jure
et secundum foros et consuetudines parcium illarum, fue^
rit faciendum.
Datum ..,.in palatio nostro Westmonasteriensi, primo
die octobris, anno 40 (i. e. 1367).
T. XXX. 2-2
NOMS PATOIS OU VULGAIRES
PLANTES DE LA GORRÈZE
Gaston GODIN de LÉPINAY
Si les patois étaient perdus, il faudrait créer
une Académie spéciale pour en retrouver les
traces (Ch. Nodier, Notions de linguistique).
Nous sommes heureux de publier dans notre Bul-
letin le savant opuscule de M. Gaston Godin de
Lépinay, président de la Société d'archéologie de
BrivCj sur les noms patois des plantes de la Corrèze.
Cette nomenclature, que la Revue de Botanique a
donné en 1886, a obtenu^ en 1884, le deuxième prix
Lavallée, grande médaille d'argent. La haute récom-
pense dont elle a été l'objet suffît pour faire juger
Tœuvre de notre éminent compatriote. Elle a sa
place toute marquée dans notre revue. Elle fera con-
naître les plantes qui poussent sur notre sol limousin ;
leurs noms patois, dont Fétymologie se perd dans la
nuit des temps, indique souvent Tusage qu'on en
faisait, ou leur forme, leur couleur, ou le terrain qui
leur convenait le mieux. Quelquefois l'idiome popu-
— 146 —
laire leur attachait un symbole, telle par exemple la
gentiana lutea, appelée dans le patois d'Ussel Breya
de coucUj pantalon de coucou.
Ce travail de M. de Lépinay est précieux pour la
science et pour la linguistique. Il est l'œuvre d'un
chercheur patient et consciencieux, aussi complet
qu'on puisse le souhaiter. Il sera consulté avec fruit
par tous ceux qui aiment à s'instruire.
J. ESPÉRET.
.A.V.A.N-T.FROFOS
Il y a quelques années, en m'occupant de botanique, je
fus désireux de connaître les noms que les paysans du Bas-
Limousin donnaient aux plantes que je ramassais pour for-
mer un herbier. Je m'adressai donc à quelques vieux du
pays, qui, très étonnés d'abord de ma curiosité, se firent en-
suite un véritable plaisir de me dire ceux qu'ils savaient.
Dans cette recherche, ce qui m'a le plus surpris, c'est de
voir que les noms de beaucoup de plantes communes dans
notre contrée étaient inconnus des paysans. Je n'ai pu me
procurer ceux de la Ficaire, du Réséda, de l'Hélianthème,
de la Stellaire, de l'Oxalis, du Miroir de Vénus, de la Per-
venche, du Grémil, de la Pulmonaire, de la Clandestine, de
la Mélisse, du Sceau de Salomon, du Muguet et de tant d'au-
tres qui sont même dans leur usage. Ainsi, la Pariétaire,
qui leur sert pour guérir le choléra des poules et nettoyer
le verre, n'a pas de nom patois ; ils diront tout simplement
«•cette herbe qui vient sur les murailles dans le pays du
seigle ».
— 147 —
Dans ce travail bien incomplet, pour que la dénomination
patoise soit bien appliquée, je donne le nom latin de la
plante d'après les auteurs. Dans le lexique roman de Ray-
nouard, j'ai trouvé plusieurs noms de végétaux ; je les ai
appliqués sur la foi de cet auteur. Ensuite il me faut, à
cause de la prononciation de notre patois de Brive, faire une
courte digression sur l'usage de l'alphabet, afin de pronon-
cer à peu près les mots comme dans le Bas-Limousin ; car il
est impossible, si on n'est pas de ce pays, de prendre les
inflexions de voix qui sont presque tout dans notre langage,
avec les constructions de phrases.
A se prononce comme en français : â long, a final, son indé-
fini entre a, e, o, à peine sensible.
E muet n'existe pas ; toujours fermé ou ouvert, celui-ci in-
diqué par les accents grave ou circonflexe.
6 toujours dur.
H aspiré seulement après le C et indiqué par une apostro-
phe comme en Breton ; très rare.
I devant M ou N ne se prononce jamais ain, mais toujours
in-e,
L se prononce toujours à la fin des mots ; ex. : fusil se dit
fusil (e).
M prend le son nasal de N devant B et P, où le place l'or-
thographe française.
N son nasal très fort après E, I. Bourdonnement nasal après
ount. Terminaison de la 3' personne du pluriel des ver-
bes et dans certains noms ayant la même désinence. .
0 généralement son très léger, bien plus que dans le mot
français omelette.
S n'existe qu'à l'état de composition du TS ; la liaison de S
se fait par le J.
Les patois diffèrent à de faibles distances : le dialecte de
Tulle varie avec celui de Brive.
Lorsque l'abbé Béronie fit son dictionnaire patois au com-
mencement de ce siècle (Béronie, Dictionnaire patois du
— 148 -
Bas-Limousin et plus parliculièremeni des environs de
Tulle, in-4^, Tulle, Drappeau, imprimeur, 1826), il y ajouta
les noms de différentes plantes.
En 1845, M. le D' A. Puel fit paraître son Catalogue des
plantes qui croissent dans le département du Lot (Annuaire
du Lot, 1845-1853; tirage à part aujourd'hui fort rare,
comme les Annuaires qui le renferment). L'arrondissement
de Figeac touchant à celui de Tulle et un peu à celui de
Brive, et dans les points de contact le langage étant sensi-
blement le même, je relève dans le travail de M. Puel la
colonne portant dialecte de Figeac, sauf quelques mots que
j'ai ajoutés. On peut y voir que le C dur du Midi de la France
a pris le dessus et que le ts et le d^ sont à peu près repous-
sés.
Si je donne cette nomenclature quercynoise, c'est dans le
but de faire connaître le plus de noms patois possible, un
travail d'ensemble sur cette région étant encore à faire.
Les lecteurs, qui voudront bien me suivre, remarqueront
le nom de Matago appliqué à diverses plantes. A Brive, c'est
l'Ophioglosse ; à Tulle, c'est la Mandragore ; à Figeac, le
Drosera a cet honneur. Le Matago est pour tous la plante
inconnue, la plante merveilleuse ; si elle naît dans un pré et
qu'on la fauche, il pleuvra certainement, mais si le faucheur
à jeun vient à la fouler au pied, la fièvre est son partage.
S'il a déjeûné, il en est quitte pour des sueurs abondantes
et des tournoiements de tête. C'est une herbe à sorciers ;
elle a le renom qu'avait au moyen âge la Mandragore et c'est
pour cela sans doute, comme aussi à cause du rapport du
nom, que Béronie l'a ainsi traduit, car la vraie Mandragore
n'a jamais existé en Limousin et cette traduction n'est pour
moi qu'une fantaisie poétique.
Il est encore dans notre dialecte des noms qui n'ont aucune
signification et qui sont cependant du plus pur patois, dont
l'étymologie paraîtrait remonter à la plus haute antiquité ;
je laisse le soin de retrouver leur origine à MM. les lin-
guistes et étymologistes. Je remarque surtout :
/
— 149 —
Lurbé, Rimbé (la Ravenelle) .
Tchachtrol (la Spergule).
Aougéral. (l'Érable des champs) .
Aga, dzialadzé (l'Ajonc).
Dzardzaridzé (Ervum gracile).
Eiréchél (la Filipendule).
Arjialent (le Rosier sauvage).
Tsarpal (le Panicaut).
Vél (leGui).
Béchat (le Chamœcerisier).
Madzoourèla .* (Gallium Mollugo).
Ech'carabi (l'Armoise).
Gharaji (Garduus nutans).
Moudél (la Laitue vireuse) .
Bloou (la Molène).
Irgou (l'Amarante).
Abrél (l'Arroche).
Parpèlèdzé (la Persicaire poivrée).
Brégou (le Fragon).
Brénil (le Panic).
Péga (le Vulpin).
Paléno (la Mélique).
Clerdzo (l'Agaric à couleuvre).
Dzualéntzo (la Truffe d'été).
Les noms que je donne pour Tarrondissement de Brive,
je les ai entendu dire tous par des paysans ; aucun n'est
pour moi du français patoisé, car au lieu de 556 noms que
me livre ce dialecte, qui est le mien, j'aurais pu donner non-
seulement tous les noms de la flore française, mais encore
ceux du monde entier. Il est très facile de faire ces change-
ments, que je suis obligé d'exécuter fréquemment à la cam-
pagne pour les fleurs et arbustes de toutes provenances qui
peuplent nos jardins. Presque tous sont modifiés légèrement
suivant le génie de la langue, pour que les jardiniers limou-
sins ne parlant que le patois puissent mieux se les graver
dans la mémoire et reconnaître la plante ou l'arbuste.
Dans le dialecte de Tulle je ne donne que 269 noms. A
— 150 —
Ussel, ma récolte a été un peu moins forte, 192 noms seule-
ment. A Figeac, j'en ai relevé 175 dans Puel, et Raynouard
m'a fourni 275 noms Romans. J'ai ajouté à cela 89 noms de
fruits ou graines, ce qui me fait un total de 1,556 noms pa-
tois de toutes provenances.
Je désire vivement que mon travail serve, malgré son peu
d'éteniue, à combler un peu une lacune qui était regrettable.
Je divise mon travail en dix parties, indiquant la même
plante :
1*» Nom latin ;
2* Nom français ;
3<> Nom patois du dialecte de Brive ;
40 - «
de Tulle ;
50 - -
d'Ussel ;
60 — -
de Figeac {d'après Puel) ;
7* — roman ;
80 — des fruits ;
9^ Traduction ;
10° Observations.
On pourra remarquer que plusieurs plantes, qui n'ont rien
de commun, portent des noms semblables. Après instance,
j'ai reconnu que c'était bien ainsi que les paysans les dési-
gnaient. D'autre part, une seule dénomination existe pour
des séries entières. Ainsi, l'Orobanche venue sur le genêt
porte le même nom que celle du serpolet : c'est toujours du
tf Pain de Lièvre ». Beaucoup sont dans le même cas.
Qu'il me soit permis ici d'exprimer ma reconnaissance
aux personnes qui ont bien voulu m'aider dans ces sortes de
recherches. Je me plais à citer surtout M. le chanoine Talin,
M. l'abbé Thoumazoux, un de nos plus doctes patoisants, qui
possède si bien le dialecte d'Ussel, M. Champeval, l'un de
nos félibres corréziens, enfin, M. Marty, maréchal-ferrant
au Soulier de Chasleaux, mon voisin de campagne, qui s'oc-
cupe des plantes de notre contrée dans les rares moments
de repos que lui laisse son travail journalier.
- 151 -
Clematis vitalba, latin, Clématite des haies. — Brive, gui-
daoubo ; Tulle, vidauba ; Ussel, guidaubo ;
Figeac, biraougo.
Ranunculus repens, latin, Renoncule rampante. — Brive,
lipaouto ; Tulle, loupaouto ; Ussel, loupaleiXj
paouto-loubo.
— arvensis, latin, Renoncule des champs. — Brive,
garafol ; Figeac, auriflol ; traduction, gare*
fou (Brive).
— flammula, latin, Renoncule flammette. — Brive,
olvo ; traduction, douve.
— acris, latin. Renoncule acre. — Brive, apaouto-
loubo; traduction, couche louve.
— bulbosus, latin. Renoncule bulbeuse. — Brive,
apaoutoloubo ; traduction, couche-louve.
Nigella arvensis, latin, Nigelle des champs. — Figeac, iro-
gné ; traduction, araignée (Figeac).
Helleborus fœtidus, latin, Hellébore fétide. — Brive, m;ir-
chïoulé, aliboro ; Tulle, liboro ; Ussel, eubour ;
Figeac, fabo de lout ; Roman, ellebori ; tra-
duction, fève de loup (Figeac).
Aconitum napellus, latin, Aconit napel. — Ussel, clotchas ;
traduction, cloches (Ussel).
Aquilegia vulgaris, latin, Ancolie vulgaire. — Brive, clout-
séto ; Tulle, campana ; traduction, clochelte
(Brive, Tulle).
Papaver argemone, latin, Pavot argémone. — Brive, ander;
Figeac, pabot ; Roman, paver, papaver.
— rhœas, latin, Coquelicot. — Brive, ander ; Ussel,
coquelicaou ; Figeac, ander ; Roman, pa-ver,
papaver.
Chelidoniuro majus, latin, Chélidoine. — Brive, echclaïro,
herbo del vent, herbo de las verrudzas ; Us-
sel, herbo de las varudsas ; Roman, celidoni-
hirundinea, celidonia ; traduction, éclaire,
herbe du vent (Brive) ; herbe des verrues
(Brive, Ussel).
- 152 -
Famaria offtcinalis, latin, Fumeterre officinale. — Brive,
fumotèro ; Figeac, fumoterro ; Roman, fumi-
lerra.
Nasturtium officinale, Roman, Brive, Cresson de fontaine.
— Brive, creïchélou ; Tulle, creyssou; Ussel,
creïssou ; Figeac, creïssélou.
Barbarea vulgaris, Roman, Brive, Barbarée vulgaire. —
Brive, Tiran.
Sisymbrium alliara, Scop., Sisymbre alliaire. — Brive,
poulogracho ; traduction, poule grasse.
Brassica oleracea, latin, Chou. — Brive, tsaou ; Tulle, tsaou,
tsal ; Ussel, tchéou ; Figeac, caou, caoulé,
caoulet ; Roman, eau, chaul.
— latin. Jeune chou. — Brive, tsaoulétto ; observation,
au féminin.
— râpa, latin. Rave. — Brive. rabo ; Tulle, rabo ; Us-
sel, raba ; Figeac, rabo ; Roman, raba ; fruit,
rabat fBrive) ; observation, la graine au mas-
culin.
— napus, latin, Navet. — Brive, navet ; Tulle, navet;
Ussel, navet, navias.
Eruca sativa, Lam., Roquette. — Figeac, Rouquétto ; Ro-
man, éruca.
Raphanaus sativus, latin. Radis. — Brive, rafé ; Tulle, rafé ;
Figeac, rafé ; Roman, rabeta.
— niger, Mérat., Raifort. — Brive, rafé négré ;
Tulle, rafé.
— raphanistrum, latin. Ravenelle. — Brive, rimbé,
lurbé ; Tulle, rabezais ; Ussel, rabiola, rabe-
gros ; Figeac, robono.
Capsella bursa-pastoris, Mœnch., Bourse à pasteur. — Brive,
bourcho ; traduction, bourse (Brive).
Hesperis matronalis, latin, Julienne. — Tulle, muguet ; Fi-
geac, muguet.
Iberis amara, latin, Ibéride amère. — Brive, pébrillou blanc ;
traduction, thym blanc (Brive).
— 153 —
Thlaspi arvense, latin, Thlaspi des champs. — Brive, bra-
mo-fam ; traduction, brame-faim (Brive).
— perfoliatum, latin, Thlaspi perfolié. — Brive, herbo
de lo fèouré ; traduction, herbe de la fièvre
(Brive).
Alyssum montanum, latin, Alysson de montagne. — Brive,
pébrillou blanc ; traduction, thym blanc
(Brive).
Drosera, latin, Rossolis. — Flgeac, herbe del matago.
Viola latin (toutes), Violette. — Brive, viooulétto ; Tulle,
viouletta ; Ussel, fchur de mar ; Figeac, pim-
parèlo; Roman, violetta, viola; traduction,
fleur de mars (Ussel).
— segetalis, Jord., Pensée sauvage. — Brive, pénchado
choouvadzo.
— tricolor, latin. Pensée. — Brive, pénchado ; Ussel,
pénchado de, mai ; Figeac, pensada.
Dianthus cariophyllus, latin, Œillet (tous). — Brive, uli ;
Tulle, carafe, uli, miounetto ; Ussel, euillet ;
Figeac, ulhet.
Saponaria officinalis, latin, Saponaire officinale. — Brive,
chablounéto ; Figeac, soplounario ; traduc-
tion, savonnette (Brive, Figeac).
Silène vesicaria, Schrad., Silène vesiculeux. — Brive, péta-
rèlo ; Ussel, pétoulé ; traduction, petit pétard ;
observation, au féminin.
Lychnis githago, Lam., Nielle. — Brive, barot ; Ussel, nièlo ;
Figeac, néoula ; Roman, niéla, nigella.
Spergula arvensis, latin, Spergule des champs. — Brive,
tchachtrol.
Linum usitatissimum, latin. Lin (tous). — Brive, li ; Tulle,
li ; Roman, lin, li, lis.
Malva, latin. Mauve (toutes). — Brive, maouvo ; Tulle,
maouva ; Ussel, maouvo ; Figeac, malbré.
Althea officinalis, latin. Guimauve. — Brive, Guimaouvo ;
Ussel, guimaouvo; Figeac, guimobo; Ro-
man, althea.
- 154 —
Tilia sylvestris, Pesf., Tilleul. — Brive, tillol, tel, graïcho-
molo ; Tulle, liliau, tillol ; Ussel, tir, tiliaou ;
Figeac, tel ; Roman, telh ; traduction, graisse
molle (Brive).
Hypericum perforatum, latin, Millepertuis. — Brive, mile
boudzal, mile cros ; Tulle, chassa diable ; Fi-
geac, milo pertuit; traduction, mille trous
(Brive), chasse diable (Tulle).
Androsemum officinale, AUi., Androsème orvale. — Brive,
touto bouno ; traduction, toute bonne.
Citrus medica, Risso., Citronnier (tous). — Brive, chitrou-
nier ; fruit, chitroun.
— aurantium, Risso., Oranger (tous). — Brive, irand-
zier ; Tulle, eirandier ; fruit, irandzé.
Acer campestre, latin, Erable champêtre. — Brive, aou-
géral.
— monspessulanum, latin, Erable de Montpellier. —
Brive, aguer.
Esculus hippocastanum, latin. Marronnier d'Inde. — Brive,
tsachtanier de mar ; Figeac, marrougnè, cos-
togné d'Espagno ; fruit, tsachtanio de mar ;
traduction, châtaignier de mer (Brive), châ-
taignier d'Espagne (Figeac).
Vitis vinifera, latin, Vigne cultivée. — Brive, vigno ; Tulle,
vigno ; Ussel, vigno ; Figeac, bit, bigno ; Ro-
man, vinha, vit, vinna; fruit, rojin, raisin.
Les variétés locales sont dites :
Brive, pica.
— pica-poul ; traduction, pique-pouille.
— pè dé perdi ; traduction, pied de perdrix.
— petit pica.
— gros pica; traduction, gamet.
— ganèl blanc.
— ganèl négré ; traduction, ganel noir.
— enradza blanc ; traduction, enragé blanc, folle.
— enradza négré ; traduction, enragé noir.
— 155 —
Brive, muchca blanc ; Roman, gandres, muscadel, muscat ;
traduction, muscat blanc.
— muchca rojé ; traduction, muscat rose.
— — gris; — — gris.
— — négré ; — — noir.
— tsachélas blanc ; traduction, chasselas blanc.
— — rojé ; — — rose.
— choouviat blanc ; traduction, sauvignon blanc.
— — vert ; — — vert.
— bouillén.
— bourdalé ; traduction, bordelais.
— merlino.
— prunéla.
— clarélo ; traduction, clairette.
— fooudzieïrou ; traduction, malvoisie ; observation, pe-
tite fougère (Brive).
— téntsurier; traduction, teinturier.
— pinot.
— bruno machclo.
— branchéliou; traduction de Branceille, commune du
canton de Beaulieu.
— tsabrillou ; observation, spécial à la fabrication de la
moutarde.
— col dé bouc ; traduction, cou de bouc.
— manchél ; traduction, mancel.
Vitis vinifera, latin. Vigne sauvage. — Brive, lambrutso ;
Tulle, lombrutso ; Roman, labrusca, vayssa,
lambrusquièra ; traduction, lambrusque.
Géranium sanguineum, latin. Géranium sanguin. — Brive,
' herbo de las éïgulias ; traduction, herbe des
aiguilles.
— dissectum, latin. Géranium découpé. — Brive,
herbo del mal tséïtïou ; traduction, herbe du
mal chétif; observation, réputé mâle; doit
guérir, placé dans son béguin, le garçon at-
teint du muguet (ils meurent toujours).
- 156 —
Géranium lucidum, latin, Géranium luisant. — Brive, berbo
del mal tséïtïou ; traduction, herbe du mal
chétif; observation, réputé femelle, même
guérison. Pour les filles, on place dans la
cheminée le béguin avec le Géranium de-
dans ; quand la plante est sèche, l'enfant est
guéri ou mort.
Ruta graveolens, latin. Rue fétide. — Brive, ruïo, rudo ; Fi-
geac, rudo ; Roman, rua, ruda.
Evonymus Europaeus, latin, Fusain. — Brive, fugel, croco-
péou ; Tulle, bonnet de pestré ; Figeac, capel
de curé, craco peou; Roman, colonhet, fu-
sanh ; fruit, bonnet cara ; traduction, bonnet
de prêtre, croque pou (Brive, Tulle).
Rhamnus frangula, latin. Bourdaine (tous). — Brive, pudis,
négré-pu, punégré ; Ussel, pudin ; Figeac,
negréput ; Roman, rampne ; traduction, pu-
noir, bois puant (Brive, Figeac).
Pistacia terebinthus, latin, Térébinthe. — Brive, térébén,
lentichqué.
Rhus coriaria, latin. Sumac des corroyeurs. — Tulle, rodou ;
Figeac, rodou ; Roman, Rodor ; observation,
n'existe pas en Limousin.
Ulex Europaeus, Sm., Ajonc d'Europe.— Brive, grandodzia-
ladzo ; Tulle, désé, dosem, doseno.
— nanus, Sm., Ajonc nain. — Brive, aga, dzialadzo ;
Tulle, dégéni, derzino ; Ussel, dzodzoïou.
Sarolhamnus scoparius, Wimm., Genêt à balais. — Brive,
dzinet, dzènchou ; Tulle, bouissou ; Ussel,
bouissou ; Figeac, tsinès, tsinesto ; Roman,
genesta ; traduction (tiré de bouïssa, essuyer) ;
observation , à Brive , un balais s'appelle
dzéncho.
— purgans GG., Genêt purgatif. — Ussel, broud-
zéïrou.
Ononis repens, latin, Bugrane. — Brive, lacho-bièou ; Ussel,
aréïto-bièou ; Figeac, tauco biou ; traduction,
lasse, arrête-bœuf.
— 157 —
I Ononis natrix, latin, Bugrane gluante. — - Brive, luzerno
choouvadzo ; traduction, luzerne sauvage.
Anlhyllis vulnèraria, latin, Anthyllis vulnéraire. — Brive,
Tréflé bourru ; traduction, trèfle velu.
Medicago sativa, latin, luzerne. — Brive, luzerno ; Tulle,
lujerno ; Ussel, luziarno ; Figeac, luzerno.
Trifolium incarnatum, latin, Trèfle incarnat (féminin). —
Brive, trèflo ; Tulle, tréflé ; Ussel, tréflé ; de
Hollande, à Brive est masculin.
— sativum, Rchb., Trèfle de Hollande. — Brive, trè-
fle'; Tulle, trèfle ; Ussel, trèfle ; Figeac, trèfle ;
Roman, trefuelh ; observation, à Brive est
masculin.
— rubens, latin, Trèfle rouge. — Brive, trèfle choou-
vadzé; traduction, trèfle sauvage.
— repens, latin. Trèfle rampant. — Brive, trafouli ;
Ussel, trafouli ; observation , tous les petits
trèfles et luzernes sont dits trafouli.
— arvense, latin. Trèfle pied de lièvre. — Brive,
herbo dé Tamouroux : traduction , herbe de
l'amoureux ; observation, réputé un philtre.
Medicago lupulina, latin. Luzerne lupuline. — Brive, tra-
fouli.
— maculata, Wild., Luzerne tachée. — Brive, grand
trafouli.
Lotus corniculatus, latin, Lotier corniculé (tous). — Brive,
pè d'ooujèl ; Tulle, paoutou d'oouzèlou ; Us-
sel, pè d'oouzé ; traduction, pied d'oiseau.
Robinia pseudo-acacia, latin. Robinier faux acacia. — Brive,
acachial. Tulle, acachia.
Glycyxhiza glabra, latin. Réglisse. — Brive, régalicho ; Ro-
man, regulecia.
Goronilla scorpioïdes, K. , Coronille scorpioide. — Brive,
grand pè d'ooujèl; traduction, grand pied
d'oiseau. ,
^^l>ï"ychis sativa, lam., Sainfoin. — Brive, echparché ; tra-
duction, esparcette ; observation, masculin.
L_
— 158 -
Cicer arietinum, latin, Pois chiche. — Brive, péjel bécu,
cézé ; Tulle, titsé, pesou ; Figeac, bécut ; Ro-
man, cezer ; traduction, pois à bec.
Ervum lens, latin, Lentille. — Brive, déntillou ; Figeac,
tsentil ; Roman, lentilla.
— ervillia, latin, Ervillier. — Brive, pétarouchi, garèl ;
Roman, ers; traduction, pete roussin, boi-
teux (Brive).
— gracile, DC, Ervillier. — Brive, dzardzaridzo.
Vicia cracca, latin, Vesce cracca. — Brive, dzarouchèlo.
— sativa, latin, Vesce cultivée. — Brive, garaoubo ; Fi-
geac, besso.
Faba vulgaris, Mœnch., Fève vulgaire. — Brive, favo ; Tulle,
fava ; Figeac, fabo; Roman, fava; fruit, favo.
Pisum arvense, latin, Poids des champs. — Brive, péjel
choouvadzé ; traduction, pois sauvage.
— sativum, latin. Pois cultivé. — Brive, péjel, péjou,
cézé ; Tulle, pès, pejèou redoun ; Ussel, pesé;
Figeac, pesé ; Roman, pezé ; fruit, péjel, pois
rond.
Lalhyrus aphaca, latin. Gesse sans feuilles. — Brive, nièlo ;
traduction, nielle.
— tuberosus, latin. Gesse tubéreuse. — Brive, fava-
cholo.
— sativus, latin. Gesse culivée. — Brive, dziéïcho ;
Tulle, dieisso ; Ussel, pezelado ; Figeac,
tseïsso ; Roman, geysha ; fruit, dziéïcho.
— pratensis, latin. Gesse des prés. — Brive, fava-
cholo dzaoune ; traduction, gesse jaune.
— latifolius, latin. Gesse à larges feuilles. — Brive,
grocho favacholo ; traduction, grosse gesse.
— cicera, latin, Gesse jarousse. — Brive, dzarocho;
Tulle, dzarousso, dzarouffo ; Roman, garossa;
traduction, jarosse.
Phaseolus vulgaris, latin, Haricot commun. — Brive, péjel,
moundzéto, brétagnou ; Tulle, pejeou, mound-
zéto ; Ussel, monzettas ; Figeac, mountsils,
— 159 -
mountsettas ; Roman, faisol ; fruit, gousses :
coutelas.
Phaseolus vulgaris, latin, Haricot à rames. — Ussel, coute-
liéras.
— nanus, latin, Haricot charge bas. — Ussel, hari-
caou.
Lupinus vulgaris, latin, Lupin (tous). — Brive, lupin ; ob-
servation, n fortement nasale.
Aroygdalus communis, latin, Amandier commun. — Brive,
améllier; Tulle, ameilié ; Figeac, emellié;
Roman, amelh, amell ; fruit, amèllo, amande.
Persica vulgaris, Tourn., Pécher commun. — Brive, pré-
chédzier; Tulle, procédier, pavié ; Ussel,
peïtchia, peitcha ; Figeac, perséguié ; Ro-
man, pesseguier, presseguier; fruit, prêché
(nom générique), pavi, prêché (noyau adhé-
rent) ; fruit, prechédzo, pavillo, à noyau libre.
Prunus armeniaca, latin, Abricotier. — Brive, abricoutier ;
Tulle, abricoutier; Figeac, ooubricoutier ;
fruit, abricot.
— spinosa, latin. Prunellier. — Brive, bouichou négré,
dzarga ; Tulle, dzarga négré, épina négré ;
Ussel, spinard négré, eipina négré ; Figeac,
bouissou négré ; Roman, agrunier, pruneller ;
fruit, cacouras, cacou (Usselj.
pruna Crantz., Prunier. — Brive, prunier; Tulle,
pru, prunier ; Ussel, prenier ; Figeac, prunié ;
Roman, pruner, prunier ; fruit, pruno, prena
(Ussel).
lauro-cerasus, latin. Laurier-cerise. — Brive, loou-
rièro; Tulle, loouriè baslard ; observation,
féminin à Brive.
' cerasus, latin, Cerisier. — Brive, chireï ; Tulle,
chireï, cirey ; Ussel, sérié ; Figeac, cireï ;
Roman, cereï, sérier amarina ; fruit, chi-
réïdzo, seriéza (Ussel).
^- ^XOCX. 2-3
L
— 160 —
r Prunus juliana, Reich., Cerisier guignier-aigre. — Brive,
^y guindounier , chireï agré ; Tulle, guinier;
!f^ fruit, guindous, guina ; traduction, guigne
g_ (Brive).
> — duracina Reich., Cerisier bigareautier. — Brive,
l bigarel, bigarello ; Tulle, dourgnou ; fruit,
^ bigarèlo ; observation, masculin et féminin
jj^. (Brive).
'f, — duracina, Reich., Cerisier bigareautier. — Brive,
%. ooubier ; Tulle, douçainas ; fruit, ooubièro ;
•^ traduction, aubier (Brive). douceâtre (Tulle);
i-i observation, variété locale.
>V — duracina, Reich., Cerisier bigareautier. — Brive,
y> tsabrignadzo ; fruit tsabrignadzo ; traduction,
* de Chabrignac (Brive); observation, variété
locale. Chabrignac, commune du canton de
> Juillac.
^ — padus, latin. Cerisier à grappes. — Ussel, lilas
l .. chauvadze ; traduction, lilas sauvage.
; — mahaleb, latin, Cerisier mahaleb. — Brive, chireï
•i ^ choouvadzé ; Tulle, boutic, boutigados ; tra-
r\ duction, cerisier sauvage.
- Spirea obovata, Willd., Spirée obovale. — Brive, thé ; tra-
^^ duction, thé ; observation, pris en infusion
' par les paysans comme le thé chinois.
'^ — filipendula, latin, Spirée filipendule. — Brive, Eiré-
' chél.
'/ Rubusïdœus, latin, Framboisier. — Brive, flamboujier;
V Tulle, flamboujié ; Ussel, asnié ; Figeac,
frambousié ; fruit, flamboijo (Tulle), amou-
î^ roux (Brive), ané (Ussel).
K — cœsius, latin, Ronce bleuâtre. — Brive, âgé ; Figeac,
J^^ roumé ; Roman, sentix, ronser ; fruit, âgé ;
i traduction, âne.
I — fruticosus, latin, Ronce (toutes). — Brive, roumé;
'^;^ Tulle, roumic, roumen ; Figeac, roumégo ;
' Roman, gavarer, romé, romer, palliure, sen-
[; tix ; fruit, mouro (Brive) ; observation, mûre.
t4'^<.^. ■ .-
— 161 —
Fragaria vesca, latin. Fraisier (sauvage). — Brive, matizou-
fier; Tulle, madzouflier, maoucha ; Ussel,
madzouflier ; Figeac, fraisier; Roman, raad-
zoufo, madzoufla (Ussel, Tulle, Brive),
— vesca, latin, Fraisier cultivé. — Brive, fr(!'jier;
Tulle, fraigié ; Ussel, fraigié ; Figeac, fraisié ;
fruit, fraijo, fraija.
Potentilla vesca, latin, Potentille (toutes). — Brive* mad-
zouflier chooudvadze ; Ussel , madzoïiilier
doous agnaous ; traduction, fraisier sauvage,
fraisier des agneaux (Ussel).
Agrimonia eupatoria. latin, Aigremoine. — Brive, pélit
tsardou ; Roman, agrimen ; traduction, petit
chardon.
Poterium platylophum, Jord., Pimprenelle à large crèle, —
Brive, pimparèlo.
Rosa canina, latin, Rose de chien (tous). Brive, aï gia-
lént; Ussel, argialent; Figeac, rousié ; Ro-
man, aguilent, aguilancier; fruit, gratotioul,
grattecul ^Brive), cornotioul, cornecul (Tuîle,
Ussel) ; observation, on nomme aussi le fruit
chucho barlet, suce baril.
— canina, latin, Rosier. — Brive, rougier; Tulle, rogier;
Figeac, rousié ; Roman, rosier, roser.
Cratœgus oxyacantoïdes, Thuil., Aubépine (toutes). — Brive,
'bouïchou blanc, dzarga blanc; Tulle, d^arga
blanc, aoubrespit; Ussel, spinard blanc,
eipina blanc ; Figeac, aoubrespit ; fruit, chi-
nela (Ussel). cireï de Nostro Damo (Figeac) ;
traduction, buisson blanc.
Mespiius germanica, latin. Néflier. — Brive, nech'plié,
mich'pouliér ; Figeac, raispoulié ; fruit, nech'-
plo, mich'poulo.
rcxonia vulgaris, Tourn., Xoignassier commun. — Brive,
coudounier ; Tulle, coudounié ; Figeac, cou-
dounié ; Roman , codonher , codonhic ; fruit,
coudoun, coing (Brive).
- 162 -
Pyrus achras, Gœrt., Poirier. — Brive, périer; Tulle, pé-
riér ; Ussel, peurier ; Figeac, périé ; Roman,
périer ; fruit, péro (Brive), peuro (Ussel).
Malus commuais, Tourn., Pommier. — Brive, poumier;
Tulle , poumier ; Ussel , poumier ; Figeac,
poumié ; Roman , pomer , pomier ; fruit ,
poumo (Brive, Tulle, Ussel).
— variété locale. Pommier coujonne. — Brive, poumier
coudzou ; Tulle, saint dzermo ; fruit, coud-
zouno ; traduction, pomme de l'estre, littéral :
petite citrouille (Brive), de Saint-Germain
(Tulle) : observation , voir sur cette pomme
l'article de M. Joseph Brunet, sénateur, dans
le Bulletin archéologique de Brive (1879) ;
trouvée à Saint-Germain-les- Vergues, canton
de Tulle, vulgarisée par Turgol.
Sorbus domestica, latin, sorbier. — Brive, choulbier ; Tulle,
faodieyrou ; Figeac, soulbié; fruit, chalbo,
fîg. clolbo ; traduction, faodieyrou, petite
fougère par allusion à la feuille.
— torminalis, Crantz., Alisier. — Brive, aledzier; Us-
sel, adzélié, oludzié ; fruit, aledzo (alise).
— aria, Crantz., Aria. — Tulle, ooubari ; Ussel, olud-
zié.
— aucuparia, latin, Sorbier des oiseleurs. — Tulle,
oreillo de tsabro, drilier; Ussel, pédouzé,
oreillo de tsabro; traduction, oreille de chè-
vre.
Punica granatum, latin, Grenadier. — Brive, grenadier,
milograno ; Tulle, granadier ; Figeac, grono-
dié ; Roman, milgranier ; Fruit, poumo de
milograno (Figeac), pomme de mille graines ;
observation, grênado (Brive).
Bpilobium parviflorum, Schreb., Epilobe à petites fleurs. —
Brive, ooubarel ; traduction, hobereau ; obser-
vation, remplace la mâche.
— 163 —
Myrtus communis, latin, Myrte commun. — Brive, mirtré;
Roman, mirt, murta.
Lythrum salicaria, latin, Salicaire. — Brive, herbo roudzo ;
Ussel, quouo de rat ; traduction, herbe rouge.
Bryonia dioïca, latin, Bryoue. — Brive, coudzo choouvadzo;
Tulle, coudiéirasso ; Roman, brionia ; traduc-
tion, citrouille sauvage.
Cucurbita maxima, Duchêne, Citrouille. — Brive, coudzo ;
Tulle, coudzo; Ussel, chilrouilla; Figeac,
coutso; Roman, coia; fruit, citrouille (Brive).
— lagenaria, latin. Gourde. — Brive, coudzou, taba-
tou ; Figeac, coutsou ; fruit, tabatou, coudzou
(Brive) ; observation, la pelite variété, taba-
tou, servait jadis aux paysans pour mettre
leur tabac râpé.
Ciicumis salivus, latin, Concombre. — Brive, coucoumbré ;
Tulle, coucoumbré ; Figeac, cournissou ; Ro-
man, cogombre ; fruit, cournitsou à petit
fruit (Brive).
melo, latin. Melon. — Brive, mélou ; Tulle, mélou ;
Figeac, mélou; Roman, melo; fruit, melon
(Brive).
^^^i^ilaca oleracea, latin, Pourpier. — Brive, pouprié;
Tulle, pourprier; Ussel, pourpié ; Roman,
polprier, portulacca.
^^*^i giola littoralis, latin, Corrigiole. — Brive, herbo de las
verudzès; traduction, herbe des verrues.
"^^^^^ \iiy latin, Sédum (tous). — Brive, rajinou ; Figeac, rosin
sooubatsé; traduction, petit raisin, raisin
sauvage (Figeac).
- telephium, latin. Grand orpin reprise. — Tulle,
herbo de lo damo ; traduction, herbe de la
dame.
^^^ r>ervivu.m lectorum, latin, Joubarde. — Brive, artisaou
choouvadze, herbo de la copo ; Tulle, herbo
de la copo ; Ussel, herbo de la copo ; Figeac,
ortsitsaou sooubatsé ; Roman, barbaiol, sem-
— 164 ^
pervîva; traduction, artichaut sauvage, herbe
de la coupure ; ûbservation, cultivé ou subs-
pontané.
Umbilicus pendu linus, DC-, Ombilicaire penchée. — Brive,
emboiinil, Isapel ; Tulle, onder; traduction,
nonihrii, chapeau-
Bit>C3 uvâ crispa, latin, Groseiller épineux. — Brive, en-
grooujéloiix ï Tulle, grooujeiller grocha ; tra-
duction, petit gt oï?eiller.
— nigrum, latin, Cassis. — Brive, câchis ; Figeac, cas-
sis ; fruit, càchi.^ ; traduction, cassis.
— alpinum* lalîn* Gro?eiller des Alpes. — Brive, engroou-
jéiou choouvadze ; traduction, petit groseiller
sauvage.
— pubrum, latin, Groseiller rouge. — Brive, engroujé-
lier : Tulle, grooujeiller ; Figeac, groousillé ;
fruit, grooujeillo, grosella.
Eryngium campeslre, latin. Panicaut des champs. — Brive,
tsarpal gralotioul ; traduction, gratecul.
Cicuta virosa, latin, CigOe virense. — Brive, perchil choou-
vadze ; Tulle, coucudo ; Roman, cicuda; tra-
duction, persil sauvage.
Ffelosciadium nodiflorum, Koch», Héliosciadie nodiflore. —
Brive, berno*
Petroselinum sativum, Haiïm., Persil cultivé. — Brive, per-
chil ; Tulle» perchil, erbetta; Ussel, parchi ;
Figeac, persi» persil ; Roman, peyressilh.
x4pium dulce, latin. Céleri. - Biivo, chéleri, api ; Tulle,
chelt'ri ; Figeti*% cfléri, Uipi.
Carum hulbocas^tanum, Koch., Carvi terre-noix. — Brive,
mérigoulo ; Tulle, cacal d'asé, obernou.
Pimpinella saxrFraga, latin, Boucage saxifrage. — Brive,
petilo carotû ; traduction, petite carotte.
— anisum, latin, Anis. — Brive, ani ; Tulle, onis ;
Roman, anis ; observation, n'est pas cultivé,
on connait la graine.
/
- 165 —
Sium augustifolium, lat., Berle à feuilles étroites. — Brive,
berno.
Œthusa cynapium, latin, Ethuse, persil de chien. — Brive,
perchil choouvadzé ; traduction, persil sau-
vage.
Fœniculum officinale, Aliio., Fenouil. — Brive, fénou;
Tulle, fénoul ; Figeac, fénoul; Roman, fenolh.
Silaus pratensis, Besser, Silaûs des prés. — Brive, perchil-
liacho ; traduction, grand persil ; observation,
au féminin.
— virescens, Boiss., Silaus verdâtre. — Brive, eyréchél.
Daucus carotta, latin, Carotte commune. — Brive, caroto,
pachténadzo ; Tulle, rachina, pastenadza :
Ussel, carota, rachina ; Figeac, corotto ; Ro-
man, pastenaga, pastenagla.
Torilis anthriscus,'Gmel., Torilis des haies. — Brive, Gara-
fol ; traduction, gare-fou.
Angelica archangelica, latin, Angélique. — Brive, coucudo ;
Figeac, antselico.
Scandix pecten Veneris, latin, Peigne de Vénus. — Brive,
herbo de las agulias ; traduction, herbe des
aiguilles.
Heracleum Lecockii, Berce. — Brive, coucudo.
Anthriscus vulgaris, Pers., Anthrisque commun. — Brive,
garafol billadour ; traduction, garefou lieur.
— cerefolium, Hoffm., Cerfeuil. — Brive, chèrfèl ;
Tulle, cherfeul; Roman, sermenha.
Hedera hélix, latin. Lierre. — Brive, édro, léouno, éouno ;
Tulle, éouna, léouna; Ussel, lianeo, lièro ;
Figeac, lèouno, lèdro ; Roman, édra, leune.
Cornus sanguinea, latin, cornouiller sanguin. — Brive, pu-
dis négré ; Tulle, pudis négré ; Figeac, biro
sanguin ; traduction, bois puant noir.
mas, latin, Cornouiller mâle. — Brive, courniol ;
Tuile, courmié ; Figeac, courmié ; fruit, cour-
niole; traduction, cornouille (Brive).
': \
■■-]■
I - 166 —
,*| Viscum album, latin, Gui blanc. — Brive, vél ; Tulle, gui,
véré ; Ussel, vel.
A Sambucus ebulus, latin, Yèble. — Brive, ïoulé; Roman,
1% éboric, éval.
— nigra, latin, sureau noir. — Brive, chéïcal ; Tulle,
chéïca, séïcar; Ussel, sioucard, sécard, séï;
"3 Figeac, sùoï ; Roman, sambuc, sauc.
Viburnum opulus, latin. Viorne rnancienne. — Brive, graï-
cho molo, mate ; traduction, graisse molle
(Brive).
Lonicera pcriclyménum, latin, Chèvnî feuille des bois. —
Brive, tsabridou ; Tulle, raméla ; Ussel, cou-
rédzou, tsabrillou ; Roman, caprifuelh ; tra-
duction, petit chevreau (Brive).
— xylosteum, latin, Chemœcerisier. — Brive, béchat ;
Ussel, margier.
I Rubia peregrina, latin. Garance voyageuse. — Brive, lengo
' pi ; traduction, langue de pie (Brive).
I Galium cruciata, Scop., Gaillet croisette. — Brive, caillo-la;
•'\ ^ traduction, caille lait (Brive).
j — mollugo, latin, Gaillet blanc. — Brive, madzoourèlo.
j) — aparine, latin, Gaillet grateron. — Brive, réboulo;
\'\ traduction, qui se replie sur elle-même.
■rf Valeriana, latin, Valériane. — Figeac, bolériano. Roman,
'-i valeriana.
Valerianella olitoria, Mœnch., Mâche. — Brive, Bouché to ;
';. Tuile, douchétto; Ussel, douchéto ; Figeac,
matso, doucétto; traduction, boussette, dou-
V cette.
V; Dipsacus sylvestris, Mill., Cardère sauvage. — Brive, pentso ;
l'I traduction, peigne.
— pilosus, latin, Cardére velue. — Brive, pentsou ;
traduction, petit peigne.
r ^* Scabiosa pratensis, Jord., Scabieuse des prés. — Brive, oou-
: jl rillou de lèbré ; Figeac, escabiusa; Roman,
' //:; ^ scabiosa ; traduction, oreille de lièvre (Brive).
-. 167 —
Tussilago farfara, latin, Tus&ilage, pas d'âne. — Brive, pé-
pouli; Figeac, pépoulit; traduction, pied joli
(Brive).
Celendula officinalis, latin, Souci. — Brive, chouchi ; Tulle,
soucir ; Figeac, gaou.
Beilis perennis, latin, Pâquerette vivace. — Brive, pétito
margarito ; Tulle, pétito margorito ; Ussel,
pétito margorito ; Figeac, pimparèlo.
Inula salicina, latin, Aulnée saulière. — Brive, mentrachté
dzaouné ; Roman, énula ; traduction, menthe
jaune (Brive).
• — montana, latin, Aulnée de montagne. — Brive, escpour-
chïou bouru ; traduction, porcelle velue.
Helianthus tuberosus, latin, Topinambour. — Brive, pétam-
bour ; Tulle, toupinambour.
Aathiomis cotula, latin, Camomille fétide. — Brive, herbo
dé l'amouroux ; Tulle, omorou ; Ussel, lar-
mérou, herbo de l'amouroux ; Figeac, camo-
raillo ; Roman, camo, camomille ; traduction,
herbe de l'amoureux (Brive), petit amer
(Brive) ; observation, sert à faire rentrer les
essaims dans les ruches. Les abeilles en re-
doutent l'odeur.
Achiliea millefolium, latin, Achillée millefeuille. —'Brive,
milofélio, herbo de channo-na ; Tulle, milo-
fouli ; Figeac, milofélio; traduction, herbe
saigne-nez (Brive). Observation, les enfants
en mettent des feuilles dans le nez, frappent
légèrement dessus et le nez saigne.
^^o^,nlhemum vulgare, Lam., Grande marguerite. ■— Brive,
dzaloujio, margarito ; Ussel, margarito ; Fi-
geac, margarido ; traduction, jalousie (Brive).
^Aiohrysum stœchas, DC, Hélichryse. — Brive, roumani
choouvadzé ; traduction, romarin sauvage ;
observation, plante odorante, odeur de fenu-
grec.
L
1
- 168 —
Tenacelum vulgare, latin, Tanaisie. — Brive, herbo doous
vermés ; Tulle, herbo deï moroum ; Iraduc-
i tîon, herbe des vers (Brive), herbe des mar-
rons (Tulle).
Senecio vulgaris, latin, Séneçon commun. — Brive, chéni-
' chou ; Tulle, chanissou ; Ussel, sénéssou ;
» Figeac, sonissou.
Arnica montana, latin, Arnica. — Tulle, flour de renard ;
Ussel, boutouema; observation, fumé par
quelques pauvres montagnards.
Carlina vulgaris, latin, Carline. — Brive, echpinaro.
Centaurea jacea, latin, Centaurée jacée. — Brive, tsaval
péoulré ; Ussel, tsavaou ; Roman, centaurea ;
traduction, pâture de cheval (Brive).
— cyanus, latin. Centaurée bluet. — Brive, tsaval
péoutré bleu ; Figeac, bluet ; Roman, cluyeis ;
traduction, pâture de cheval bleue (Brive).
Carduncellus mitissimus, DC, Cardoncelle doux. — Brive,
tsarpalou ; traduction, petit chardon (Brive).
Artemisia vulgaris, latin. Armoise vulgaire. — Brive, echca-
rabi.
— abrotanum, latin, Aurone. — Brive, oourono.
— absynthium, latin. Absinthe. — Brive, apchénto ;
Roman, absinti, eyssens.
— dracunculus, latin. Estragon. — Brive, echtragou.
Cynara scolymus, latin. Artichaut. — Brive, artitsaou ;
Tulle, artitsaou; Ussel, artitsaou; Figeac,
î ortsitsaou.
! Silybum marianum, Gœrtn., Chardon Marie. — Brive, ech-
pinaro.
^ Carduus nutans, latin, chardon penché. — Brive, charaji;
sarazin.
Carduus et Onopordon, latin, Chardon (tous). — Brive, ech-
pinaro, tsardou, tsarpal ; Tulle, chardous;
Ussel, tsardous, chardous ; Roman, cardo.
Cirsium, Tournef., Cirse (tous). — Brive, tsoouchido; Tulle,
tsooucidé ; Ussel, chaucida ; Roman, caucida.
l
— 169 —
Lappaminor, DC, Bardane à petite tête. — Brive, tsaou
d'âgé; Ussel, petits tsardous; Roman, lappa ;
traduction, chou d*âne (Brive).
Cichorium intibus, latin, Chicorée sauvage. — Brive, chi-
courèio choouvadzo ; Figeac , cicurèio soou-
batzé ; traduction, chicorée sauvage.
— endivia, latin. Chicorée endive. — Brive, chi-
courèio; Tulle, chicourèio; Ussel, tchicou-
rèio ; Figeac, endébio.
Hypochaeris maculata, latin, Porcelle tachée. — Brive, ech-
pourchil, pourchïou.
Leontodon autumnalis, latin, liondent d'automne. — Brive,
pichenlié ; Tulle, pissenlit.
Tragopogon pratensis, latin. Salsifis des prés. — Brive, chal-
chéfis choouvadzé; Tulle, salchifls ; Ussel,
salsifis.
Scorzonera plantaginea, Schleicher, Scorsonnère plantain.—
Brive , corchounèlo ; Tulle , escourcimèlo,
escoursounèra ; Ussel, roucibeix ; Figeac,
escorsonèlo.
Lactiaca capitata, DC, Laitue pommée. — Brive, létudzo ;
Tulle, létudzé ; Ussel, létudzé ; Roman, la-
chuga.
sativa, latin. Laitue romaine. — Brive, tsicou ;
Tulle, tsicou ; Ussel, tsicou ; Figeac, tsicoun.
virosa, latin, Laitue vireuse. — Brive, Moudél.
scariola, latin, Laitue sauvage. — Brive, létudzo
choouvadzo.
^^^■^cîrilla juncea, latin, Chondrille effilée. — Brive, fouïto-
tsé; traduction, fouette-chien (Brive).
^^Sedium plumieri, DC, Mulgédie de plumier. — Ussel,
froumadziéra ; traduction, fromagère (Ussel).
^^^Xacum officinale, Wie;g., Pissenlit (tous). — Brive, pi-
chenlié ; Tulle, pissenlit ; Figeac, pissolet.
o^i^olîus oleraceus, latin, Laitron (tous). — Brive, alardzo ;
Figeac, lotsugo.
— 170 -
Andryala integrifolia, latin, Andriale à feuilles entières. —
Brive, ruïo choouvadzo ; traduction, rhuc
sauvage.
Hieracium pilosella, latin, Epervière piloselle. — Brive, cou-
rentino.
Campanula glomerata, latin, Carapanulle (toutes). — Brive,
cloùtsèto ; Ussel, clotchas ; traduction, clo-
chette, cloches.
Vaccinium myrtillus, latin. Airelle. — Tulle, aïré, éra; Us-
sel, aïré, aire ; Figeac, aïrès.
Calluna vulgaris, Salisb., Calluna vulgaire. — Brive, brugo.
brudzièro ; Tulle, brudzo ; Ussel, brudzièro ;
Figeac, bruyèro.
Erica cinera, latin. Bruyère cendrée. — Brive, brugo ; Tulle,
brudzo; Ussel, brudzièro; Figeac, brugo;
Roman, brus.
— scoparia, latin. Bruyère à balais. — Brive, brando ;
A Tulle, brudzo bastardo ; Figeac, brando.
y Priniula officinalis, Jacq., Primevère officinale. — Brive,
coucu ; Tulle, boubou, couioula ; Ussel, cou-
cudo ; Figeac, conçut ; Roman, primavera,
i primver ; traduction, coucou (Brive).
Lysimachia nummularia, latin, Lysimachie nummulaire. —
Brive, olvo ; traduction, douve.
! Anagallis arvensis, latin. Mouron des champs. — Brive,
^; mourèl ; Ussel, mouréou.
— caerulea, Schreb., Mouron bleu. — Brive, herbo
j del tal ; traduction, herbe du tranchant.
llex aquifolium, latin. Houx commun. — Brive, agrafèl,
agrifoul ; Tulle, agrafèl ; Ussel, agrafé, gra-
féi ; Figeac, grifoul ; Roman, agrafeix.
Fraxinus excelsior, latin. Frêne élevé. — Brive, fraîche ;
Tulle, fraiché, fraissé, cantharidier ; Ussel,
frayssé ; Figeac, frayssé ; Roman, fraisse,
fraissher, fraishe, frayshe.
Syringa vulgaris, latin, Lilas commun. — Brive, lilas ; Tulle,
lila; Figeac, lila.
- 171 -
^'gustrum vulgare, latin, Troène commun. — Brive, troïné,
pudis blanc ; Tulle, pudis blanc ; Ussel, mar-
gier ; Roman, cypri ; traduction, bois puant
blanc.
^'âsminum fruticans, latin, Jasmin jaune. — Figeac, tsant-
simio.
'incotoxicum officinale, Mœnch., Dompte-venin officinal.
— Brive, herbo de lo langogne : observation,
je ne sais si langogne est un nom patois de
maladie des porcs.
^^-hrea centaurium, Pers., Petite centaurée. — Brive,
^ chantoourèio.
*-^^na lutea, latin, Gentiane jaune. — Tulle, dzenchiano,
Ussel, gensana ; Roman, basilica gentiana.
^"'^ campestris, latin, Gentiane des champs. — Ussel,
breya de coucu ; traduction, braies de cocu
ou de coucou (Ussel).
— pneumonanthe, latin. Gentiane pneumonanthe. —
Ussel, clotchas ; traduction, cloches.
Convolvulus sepium, latin, Liseron des haies. — Brive,
grando courédzado.
— arvensis, latin. Liseron des champs. — Brive,
courédzado ; observation , courédzo signifie
lanière de cuir.
— cantabrica, latin, Liseron cantabre. — Brive,
linou ; traduction, petit lin.
Cuscuta minor, DC, Cuscute (toutes). — Brive, piaoux,
choïo, tigno, fiaux ; traduction, cheveux, soie,
teigne, fils (Brive).
Echium vulgare, latin, Vipérine. — Brive, las bouradzas ;
traduction, les bourraches.
Myosotis vulgare, latin. Myosotis (tous). — Ussel, miouti,
herbo de las estialas ; herbe des étoiles.
Borrago officinalis, latin, Bourrache officinale. — Brive,
bouradzo; Figeac, bourratso; Roman, bor-
rage.
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• ^
'1
— 172 —
Solanum nigrum, latin, Morelle. — Brive, poumo de tèro
choouvadzo ; Figeac, moourèllo; Roman, mau-
rella, morella.
— dulcamara, latin, Douce amère. — Brive, doucha-
maro ; Figeac, douç'amaro.
.^ — tuberosum, latin, Pomme de terre. — Brive, poumo
*i\ de tèro, truffo, truffo blantso ; Tulle, poumo
îj de terro, trufa ; Ussel, strufla, truffa ; Figeac,
truffo ; traduction, truffe ; observation, appe-
lée truffe dans les terrains granitiques.
— melongena, latin, Aubergine. — Figeac, biot
d'asé ; traduction, vièdaze (Figeac).
— lycopersicum, latin, Tomate. — Brive, toumato;
Tulle, toumata ; Figeac, toumato.
;J| Capsicum annuum, latin. Piment. — Brive, piman; Roman
pigment, pimen, piment.
1 Nicotiana tabacum, latin. Tabac. — Brive, tobat : Tulle, ta-
f5 bat ; Figeac, tobat.
Datura stramonium, latin, Datura. — Brive, troumpéto;
traduction, trompetto.
Mandragora officinalis, MilL, Mandragore. — Tulle, matago ;
Roman, mandragora; observation, erreur de
Béronie. Cette plante n'existe pas en France.
Verbascum thapsus, latin, Molène (toutes). — Brive, bloou ;
Tulle, bloou ; Ussel, bloou.
Linaria striata, DC, Linaire striée. — Brive, gros mourél ;
traduction, gros mouron.
Scrophularia nodosa. latin, Scrophulaire (toutes). — Brive,
herbo del chièdze ; Tulle, ossiède ; traduc-
tion, herbe du siège ; observation, souvenir
de son emploi par les Rochellais, lors du
M siège de cette ville par Richelieu.
Digitalis purpurea, latin. Digitale. — Brive, petit bloou ;
, ^H? Tulle, pétaraou ; Ussel, entounoir; traduc-
/ jj; tion, petite molène, molène pétant (Tulle);
•it-;[| observation, masculin.
'■ - î" 'fit
— m "
Veroûica beccabunga, latin, Véronique cressonnée. — Brîvej
creïchelou de Lrécizo ; Ussel, creïssou soou-
valsé; FJgeac^ b<>ronico ; traduction, cresson
de truie (Brive).
RbJnantus crista galH, latin, Rhinanle cnHe de-coq, — Brive,
L"ampanèlf>i Tulle, tartalièdzo ; traduction,
peliîe clochette (Brive) ; observation, nom de
la clochette en tôle des moutons. La graine
a la môme forme.
Oroi>anche rapum, ThuiL, Orobranche (toutes). — Brire, po
de lèbro ; Ussel, po de lébra ; iraduction,
pain de lièvre.
Uvaodula vera. DC, Lavande. — Brive, lavandré ; Figeac,
labondro ^ Roman, lerrigola, solivenca.
Wantha, latin, Menthe (toutes)* — Brive, ménlachtré ; Tulle,
mènlrasté; Usseï, amente; Figeac, menlo;
Roman, menla, mentastre.
Ori^a^num mégastachium, Link., Origan (tous). — Brive,
pébnllou choouvadzé; Roman, origani; tra-
duction ^ ihym sauvage [Brive;,
^rssopus ôfticiDalis, latin, Hyssope officinal. — Tulle, liso;
Figeac, hysop; Roman, isop.
^^jyTriusvulgaris, latin, Thym, — Brive, pébrillou ; Tulle,
thyn ; Roman, thymi ; traduction, petit poi*
vre f Brive).
serpyllum, latin, Serpolet, — Brive, cherpoulét î
Ussel, serpoulet ; Figeac, serpoulet ; Roman,
serpoL
Cal ia
- *^rninta acinos, Gaud., Caïaminthe des champs. — Brive,
herbo de lo copo ; Roman, calament ; traduc-
tion, herbe de la coupure (Brive).
**^ïïllam basilicum, latin, Basilic. — Brive, bajâli ; Tulle,
bajali ; Roman, basilisc.
^i^a offlcinalis, latin, sauge officinale. —Brive, cbaouvio;
Tulle, saouvio ; Ussel, saouvio ; Roman,
salvia.
1
— 174 —
Salvia sclarea, latin, Sauge sclarée. — Brive, herbo dé lo
copo ; Figeac, saoubio ; traduction, herbe de
la coupure (Brive).
Rosmariuus officinalis, latin, Romarin officinal. -— Brive,
roumani; Figeac, roumarin ; Roman, ro-
mani, romanin.
Glœchoma hederaceum, latin, lierre terrestre. — Brive,
léouno de tèro ; traduction, lierre de terre.
Melittis melissophyllum, latin, Mélitte à feuille de mélisse.
— Brive, chucho barlet ; traduction, suce ba-
ril ; observation, les enfants courent les bois
pour sucer le nectar des fleurs de cette plante.
Lamium album, latin, Lamier blanc. — Brive, ooutrudzo
blantso ; traduction, ortie blanche.
Galeobdolon luteum, Huds., Galéobdolon jaune. — Brive,
ooutrudzo roucho ; traduction, ortie jaune.
Marrubium vulgare, latin, Marrube vulgaire. — Brive, mén-
tachtré blanc; Figeac, maltrasté ; Roman,
marrubium ; traduction, menthe blanche.
Teucrium chamaedrys, latin, Germandrée petit chêne. —
camêdri ; Figeac, camédri.
Plantago major, latin, Plantain (tous). — Brive, herbo de
cin costas ; Tulle, herba de cin costas ; Ussel,
herba de cin costas, fouillarita; Figeac, herbo
de cinq costos ; Roman, plantage ; traduction,
herbe de cinq côtes.
— cynops, latin. Plantain des chiens. — Brive, coû-
tebêlo.
Amaranthus ascendens. Lois., Amaranthe (toutes). — Brive,
irgou.
Phytolacca decandra, latin, Phylolaque. — Brive, rajinéto ;
traduction, raisinette.
Beta vulgaris, latin. Bette vulgaire. — Brive, blédo ; Tulle,
bléda; Ussel, bléda; Roman, bleda, bleta.
— cicla, latin. Betterave. — Brive, blédo rabo ; Tulle,
blédo rabo ; Figeac, bleto rabo.
— I7r> -
Ghœnopûdium polvâpermum, latin, Ansérine [toutes}. —
Brive, abrèl choouvadze, irgou ; traduction,
arroche sauvage.
— bonus Heoricus, latin, Ansérine bon Henri.
— Brive, berba de cin coûtas ; traduction,
herbe de cinq côtes.
Atriplei borteasis, lalin, Arroche bonne dame. — Brive,
abrél ; Tulle, obrél.
Spinacia spinosai Mœncb., Epinard épineux. — Brive ^ ech-
pinard ; Tulle, espinar ; Figeac, espinard;
Romani espinar.
Rumex patientia, hitin, Patience officinale. — Brive, para-
dèlo ; Tulle, pataouno ; Ussel, pataouno, po-
dorèîe ; Figeac, porodèlo ; Roman, Japaci.
— acetosa^ latin ^ Patience oseille. — Brivei ooujillo ;
Ussel, ooseilla; Figeac, binéto.
acetûsella, lalin, Patience petite oseille. — Brive,
Oûujillou ; Tulle, osillou ; Ussel, osillou, sau-
ciliou.
f*oly^gODum amphybium^ latin, Renouée amphibie. — Brive,
berbo del peïchou ; traduction, herbe du pois-
son.
-^ persicaria, latin, Renouée pcrsicaire. — Brive,
parpél^dzé.
i- hydropiper, latin, Renouée poivre d'eau. —
Brive, parpèlèdzé.
*^ aviculare, latin. Renouée des oiseaux. — Brive,
coudotrèdïo, coudertsino ; traduction , pais
truie, herbe des coudercs; couda signifie
manger, paissant au ras de terre ; couderc
est un petit pacage très sec et ras près des
maisons*
— convoi vulus, latin, Renouée liseron, — Brive,
bla négré choouvadze; Ussel, bla nègre
soouvatïè ; traduction, blé noir sauvage (Brive,
Ussel).
^' XXX. L> " 4
L.
'i
- 176 —
Polygonum fagopyrum, latin, Sarrazin. — Brive, bla négré;
Tulle, bla négré ; Ussel, bla négré ; Figeac,
blal négré; fruit, bla négré; traduction, blé
noir.
Daphné laureola, latin, Daphné lauréole. — Ussel, herbo
déous merles; traduction, herbe des merles.
Laurus nobilis, latin, Laurier d*Apollon. — Brive, loouriè
chaoucho ; Tulle, loouriè ; Figeac, loourié ;
Roman, laur, laurel, laurier ; traduction, lau-
rier sauce.
Buxus sempervirens, latin. Buis. — Brive, bouï ; Tulle,
bouï ; Ussel, rampan, rampao ; Figeac, bouï ;
Roman, bois, boish; traduction, rameau (Us-
sel).
Mercurialis annua, latin, Mercuriale annuelle. — Brive,
mercuriol, lamberdzé ; Figeac, mercurialo.
Euphorbia helioscopia, latin, Euphorbe (toutes). — Brive,
tèto-la ; Ussel, pè de dzaou ; Roman, euforbi ;
traduction, tête lait (Brive), pied de coq (Us-
sel).
\ — peplus, latin, Euphorbe des jardins. — Brive,
' herbo de lo taoupo ; traduction, herbe de la
taupe. Observation, on dit qu'un pied dans
un jardin chasse les taupes.
— lathyris, latin, Euphorbe épurge. — Brive, herbo
de lo cago ; traduction, herbe de la diarrhée.
Observation, deux ou trois graines, dit-on,
suffisent pour la produire.
Parietaria officinalis, latin, Pariétaire officinale. — Brive,
j traouco-murs ; Figeac, ponotario ; Roman,
j paritaria ; traduction, perce murs (Brive).
Urtica urens, latin, Ortie (toutes). — Brive, ooutrudzé ;
Tulle, intrudza, éitrudze ; Ussel, eitroudzé ;
Figeac, outrigo ; Roman, urtica.
Cannabis sativa, latin. Chanvre cultivé. — Brive, tsambé ;
Tulle , tsambé ; Ussel , tchibro ; Figeac ,
combé ; Roman, canèbé ; fruit, tsanabou (chè-
nevis) Brive.
-^
- HT —
Humiilus lupuliïS!, latin, Iloiiblari grimpant, — Bi'ive, linmi-
lou. hooubérou ; Tulle, hobelo, bloou ; UsseL
houbloiin,
Fïcus carica, latin, Figuier commun, — Brive^ fidzîer ;
Tulle, fidziè ; Figear. fi.!zuié ; Romane figuier;
fruit, fidzo, figiie (Brive),
Morus alba, latin, Mûrier. — Brive^ mourier ; Tulle, amou-
rié î Roman, morier ; fruit, Tiïouro, milre
(Brive).
nigraj latin, Mûrier noir, — Brive. mourier roudzé :
fruit . inouro , mûre ; traduction t mûrier
rouge (Brive).
Vliz^ Tis major, Smith.* Orme (tous), ^ Brive, oulmè ; Tulle,
oulmé î Ussel, orniou ; Figeac, ourmé ; Ro-
man, olm, olme.
Alnxjis glutinosa, Gaertn.. Aulne. — Brive. vergné ; Tulle,
vergue; Ussel, vergna. vergnaou ; Figear,
ber, bergné ; Roman, vern, vernha,
% ti.:^ laverrucosa, Elirli., Bouleau, ~ Brive, bé, bècbot, bô-
cbat; Tulle, bé, b^it-iiol, bècho, bezhal ^ Us-
sel, bessard, bessas, bessaou.
Sa_lî 3g^ j^ijjjj^ latin, Saule blanc. — Brive, ooubar : Tulle, aou-
bar, ooubar ; Ussel, aouhar, ooubar ; Figeac,
ooubar ; Roman, al ban, alborn, al bar,
" — vitelliua, latio, Saule jaune, osier. — Brive, vimier,
vlmé ; Tulle, vimé j Ussel, vinzéî Roman,
vim,
'^ — - caprea, latin, Saule niarceau, — Brive, chalé ; Tulle,
sole, chialè ; Roman j sauïz. sauze,
"^^^ï^i^lus alba» latin, Peuplier blanc* — Brive, piboulo; Tulle,
piboul : Ussel, popilluu, brioulo ; Ftgeac, pi-
boni, piboulo. Observation, féminin,
— tremula, latin. Peuplier tremble, — Brive, trè-
moul ; Tulle, trèmoul ; Ussel, trèmou ; Ro-
man, tremble ^ ire mol, trémola.
faligiata, Poir., Peuplier d'îtalie, — Brive, pibouL
Observation, masculin.
- 178 -
Populus Digra, latin, Peuplier noir. — Brive, piboulo. Obser-
vation, féminin.
Fagus sylvatica, latia, Hêtre, — Brive, faou, fouyard, fayard ;
Tulle, faou, fayard ; Ussel, fao ; Figeac, faou,
fuyard ; Roman, fau, faya ; fruit, feïno (faine),
à Brive.
Casianea vulgaris, Lanik , Châtaignier commun. — Brive,
tchactitanier, tchachtan ; Tulle, tsostan ; Us-
sel» tehatanîer ; Figeac, costogné ; Roman,
castanher ] fruit, tchachtagno (Brive), tchata-
nia (châtaigne) ; observation, castagno, châ-
taigne à Figeac.
Noms des Variétés du pays :
Brieej Choouvadzo; traduction, sauvage.
Brive, Quarïou ; Tulle, quariva ; traduction, quarive.
Tulle, Quarieu ; traduction, quarieu.
Brive, Habourivo ; Tulle, abourivo ; traduction, précoce.
Brive, Choouvadzo do Car ; traduction, sauvage de Cars. —
Observation, lieu de la famille des Cars, Haute-
i| Vienne.
* Brive, Léoucoto blanlso ; traduction, leucote blanche.
Brive, Léoucoto roudzo^ traduction, leucote rouge.
Brivej Vermilloi blant ; traduction, vermillot blanc.
Brive, Vermillot roudié ; traduction, vermillot rouge.
Brive, Pountal ; Tulle, lioul blanc ; traduction, pontal, cul
blanc.
Brive, Bori ; traduction, borîe.
Brive, Badanl: traduction, baillant. Observation, sa peau
s*ouvre avant mAturité.
Brive, Eijalado; traduction, ésalade.
Brive, Cambéloto; traduction, cambelotte.
Brive, Dzoséquo ; iraduction. josèque.
Brive, Caïubéroiino ; traduction, camberonne.
Brive, Méouliado; traduction, pleine de moelle.
Brive, Gourchadzo ; traduction, goursage.
Brive, Rouchélo; traductionj rousselle.
— 179 —
Brîve, Bourudo ; traduction, bourrue.
Brive, Maroun négré ; traduction, marron noir.
Brive, Maroun ourdinari ; traduction, marron ordinaire.
Brive, Grocha ; Tulle, grousseau ; traduction, grosses.
Brive, Verdolo; Tulle, verdol ; traduction, verdoie.
Tulle, Rouergau ; traduction, du Rouergue.
Tulle, Juliacas; traduction, de Juillac. Observation, chef-
lieu (le canton de la Corrèze.
TuUe, Barracadas ; traduction, bariolées.
Quercus pedunculata, Ehr., Chêne. — Brive, tsachan, dzari ;
Tulle, gori, tsachan ; Ussel, dzari, tchaïne ;
Figeac, gorrit; Roman, casser, garric, coral;
fruit, glan, agland, ayan (Brive). Observation,
ayan, à Ussel ; est souvent truffier.
— tozza. Base, Chêne Tauzin. — Brive, tsachan tsoou-
jên ; traduction, chêne de causse. Observation,
se trouve surtout dans les calcaires appelés
Causses,
ilex, latin, Chêne Yeuse. — Brive, rouvet, tsachan
vert ; Roman, roire ylex ; traduction, rouvre,
chêne vert. Observation, spécial pour les
truffes.
Corylus avellana, latin. Coudrier noisetier. — Brive, ooula-
nier, ooulanièro ; Tulle, ooulanié ; Ussel,
ooulanié, oulaniëra ; Bigeac, obuglanié, abé-
lanié ; Roman, avélannier ; fruit, ooulano
(noisette). Observation, à Brive, Ussel, mas-
culin et féminin.
Carpinus betulus, latin. Charme commun. — Brive, tsaou-
pré ; Tulle, tsaoupré.
Juglans regia, latin, Noyer. — Brive, noudzier ; Tulle,
noudzier ; Ussel, noudzier ; Figeac, nouyé ;
Roman, noguier; fruit, cacal, cacau, nou ;
traduction, noix (Brive). Observation, nou
entraîne l'idée de noix fraîche avec son
brou.
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— 180 —
Variétés du pays :
Brive, Corno de moutou ; traduction, corne de mouton. Ob-
servation, tét dur.
Brive, Marbo ; traduction, Marbot; têt rond demi-dur.
Brive, Changilière ; Roman, sanzilier; traduction, des mé-
sanges. Observation, têt très tendre et faible.
Brive, de la lando ; traduction, de la lande. Observation, têt
tendre.
Brive, choouvadze ; Tulle, agraulatier; traduction, sauvage.
Observation, tôt petit, dur.
Tulle, Boumba rouyale; traduction, bombe royale.
Tulle, Sarrer; traduction, sarrer. Observation, coque dure.
Brive, Mayen ; traduction, mayen, du mois de mai. Obser-
vation, dans chaque variété il y a des mayens, ainsi
appelés parce qu'ils ne poussent qu'en mai.
Platanus orientalis, latin, Platane. — Brive, platano, apla-
tano; Ussel, plataou ; Roman, platani.
Juniperus communis, latin. Genévrier commun. — Brive,
dzanèbré, dzinèbré, dzanébrier; Tulle, dzé-
nébrié ; Ussel, dzanebrié ; Figeac, tsinèbre ;
Roman, genibre, juniert, genèbre, juniperi ;
fruit, dzanébré.
Taxus baccata, latin, If. — Brive, touno ; Tulle, ifé ; Roman,
theysh. Observation, appelé touno à cause
. des ionnelles que Ton fait avec.
Pinus sylvestris, latin. Pin (tous). — Brive, pinier, pin;
Tulle, pin, pinié ; Ussel, Pinn ; Roman, pin,
pinhe ; fruit, pino (Brive) ; traduction, pomme
de pin, comestible. Observation, le pignon,
pinou.
Abies excelsa, DC, Sapin (tous). — Brive, chapin ; Ussel,
sapin ; Roman, sap, abet.
Cupressus sempervirens, latin, Cyprès. — Brive, archipriè ;
Roman, cyprès.
Juncus, latin, Jonc (tous). — Brive, dzoun ; Tulle, jounc ;
Ussel, dzoun; Figeac, tsounc, tsounco; Ro-
man, junc, sescha, jonc.
->I^F^F
— !8I —
Luzula pilosa, WiJ^l*, Luzule (toutes), — Brîve, léngo de pi-^
catal ; traduclion, langue de pivert.
Golchicum auiumnale, latin, Colchique» — Brive, pinipa-
rèlo.
Convallaria maïaliSj latin, Muguet, — Brive, niugué ; Ussel,
mugué, mu g.
Asparagus offlcinalis, latin, Asperge* — Brive, echperdio ;
TullCj echperdza, esperga.
Ruscus acuEeatus, latin, Fragon piquant, — Brive, hrêgou,
echpino tsatto; Tulle, busqué; traductionj
épine chatte (Brive)-
Tulipa, latin, Tulipe, — Brlve. Lulipo; Figeac, tulipan.
Lulium martagon, latin, Lis niartagon, — Brîve, liri, mar-
lagou; Tuile, flourd'alys; Figeac, lis; Ro-
man, lili, liri, lis. Observation, k Figeac c'est
le lis blanc,
Aspbodelus ramosus, Duby>, Âspbocîèle rameux- — Brive^
poro î Ussel. pourredzado,
Hyacinlhus, Tournft,, Hyacinthe, — Brive, dzacbinto ; Fi-
geac, jacinthi, jacint,
Muscari comosum, Mill.i Muscari. — Brive, ignou de cher;
Figeac, oillolo ; traduction, oignon de ser-
pent (Brive).
Erylhronium dens canis, latin, Erytht'one, — Tulle, herho
de coucu ; Ussel, prenguolaSs pindzaoulas.
Observation, les enfants recherchent les but-
bes pour les manger.
Bcilla autumiialis, latin, Scitle d'automne. — Brive, ooulano
de tèro ; traduction, noisette de terre.
Allium porrum, latin. Poireau, — Brive, pourrét ; Tulle,
pourra; Ussel, poureix ; Figeac, porrè ; Ro-
man, porr, porrot,
— anipeloprasum, latin, AiL — Brive, al choouvadzé ;
traduction, ail sauvage.
— cepa, latin, oignon. — Brive, ignou, chébo ; Tulle,
cebo, cebas, sebas, ignou ; Ussel, eugnu ; Fi-
geac, cebo ; Roman, cebat, ceba, ignoû, nigno,
uîgnon.
- 18? —
m
Allium sativum, latin, Ail commun. — Drive, al, dolcho;
Tulle, daoucha, daousso ; Ussel, aïl ; Figeac,
al ; Roman, alh, aliet, aylh.
— ascalonicum, latin, Echalolte. — Brive, etsaloto,
chiboulo ; Tulle, elsalota, ciboulo ; Ussel, ail ;
Figeac, tsalotto.
— vineale, latin, ail des vignes. — Brive, al dé cher ;
traduction, ail de serpent.
— schœnoprasum , latin. Appétits. — Brive, chibou-
létto ; Tulle, pourita ; Ussel, chiboulo.
Narcissus pseudo-narcissus, latin, Narcisse faux narcisse.
— Brive, coucudo ; Tulle, berbéïdza ; Figeac,
compono.
— jonquilla, latin. Jonquille. — Figeac, tsounquillo.
— poëticus, latin, Narcisse de poète. — Brive, cou-
cudo.
Iris germanica, latin, Iris d'Allemagne. — Brive, liri, herbo
del cooutèro, chabré ; Figeac, coutelas ; Ro-
man, iris, yli, y ris ; traduction, herbe du
cautère sabre (Brive), coutelas.
Iris pseudo-acorus, latin. Iris faux acore. — Brive, gleïdzol ;
Tulle, gladze.
Gladiolus communis, latin, Glayeul. — Brive, echpajo;
Tulle, gladze ; Roman, glaï, cesca, glaviol,
glaya, glay ; traduction, épée (Brive).
Crocus sativus, latin, Safran. — Brive, chafran ; Figeac,
sofro; Roman, croci, safra, safran.
Tamus communis, latin, Tamier. — Brive, guidachière.
Observation, gui, guido, signifie pousse, jet.
Orchis, Juss., Orchis (tous). — Brive, pentécouchto ; Tulle,
coucu ; traduction, Pentecôte (Brive).
Ophrys, latin, Ophrys (tous). — Brive, pentécouchto ; tra-
duction, Pentecôte (Brive).
Scirpus lacustris, latin, Scirpe des lacs. — Brive, grand
dzoun; traduction, grand jonc.
Carex vulpina, latin, Carex, Laiche (tous). — Brive, léngo-pi,
léngo de picatal ; Roman^ lesca ; traduction,
langue de pivert.
•^-■^A^
— 183 —
Zea iDâïSj latin, Maïs. — Brive, bla roudzé ; Tulle, bla d*Ech-
pagQO, bigaro; Ussel, bla d'Espagna, biga-
raou ; Figeac, raelbla d'Espagno ; fruit, bla
roudzé ; traduction, blé rouge, blé d'Espagne
(Brive).
Big^i tsria saDguinalis, Scop., Digitaire sanguine. — Brive,
brénil pè d'ooujel ; traduction, brénil pied
d'oiseau.
Sorglr^um vulgare^ Pers., Sorgho vulgaire. — Brive, parpeï-
rolo ; fruit, parpéirolo.
Agrostis vulgaris, With., Agrostis vulgaire. — Brive, trei-
nacho, tranudzou ; Ussel, tranudjou.
Seta.ï»ia glauca, P, B., Panic glauque. — Brive, brénil ; Fi-
geaC| brondiol.
" italica^ P. B», Sétaire d'Italie. — Brive, mèl, panis ;
Tulle, mèl ; Roman, millargos, panic.
j^^nic^um miliaceum, latin, Panic millet. — Brive, panis,
brénil; Tulle, ponis; Figeac, mil menut;
fruit, mèl, millet (Brive).
— — crus ^ialH, latin, Panic pied de coq. — Brive, grand
brénil.
Alci^^(^^i.yg pratensis, latin, Vulpin des prés. — Brive, péga.
^^li c:a unillorai Retz., Mélique à une fleur. — Brive, palèno.
Observation, seule, avec le Sedum hexagonal,
résiste à la présence de la truffe dans le sol.
^^^ï>atherum elatius, Gaudin, Arénathère élevé. — Brive,
fouracha ; Figeac, froumeintal.
**^ bulbosum, Presl., Arénathère à chapelet. —
Brive, tsapéléto; traduction, chapelette.
^^Oasativa, latin, Avoine. — Brive, chivado; Tulle, si-
vadOj civado ; Ussel, sivada ; Figeac, sibado ;
Roman, avena, civada ; fruit, chivado.
'~'~*^ nuda, latin, avoine nue. — Figeac, peluca.
'^ fatua, latin, avoine folle. — Brive, chivado pïoulo,
cûuïoulo ; Tulle, civadasso, couïoulo, pioula ;
Ussel, sivada chauvatsa ; fruit, pioulo (Brive).
— 184 —
Arundo donax, latin, Roseau (grand). — Brive, canovélo ;
Tulle, canovéro ; Figeac, conobéro ; Roman,
canavéra ; traduction, cannevelle (Brive).
Phragmites communis, Trin., Roseau. — Brive, rooujèl ;
Roman, rauss, rauzél.
Poa pratensis, latin, Pâturin des prés. — Brive, chéglolo;
traduction, petit seigle.
Briza média, latin, Brize moyenne. — Brive, herbô oou ta-
mis ; Figeac, herbo de Tobut ; traduction,
herbe aux tamis (Brive). Observation, les
enfants se font avec cette plante une mau-
vaise plaisanterie : ils appellent cela appren-
dre à faire des tamis.
Festuca duriuscula, latin, Fétuque durette. — Brive, pial
de bou ; traduction, poil de bouc.
Triticum sativum, Lamk., Froment. — Brive, bla, froumént ;
Tulle, froumént; Ussel, froumént; Roman,
froment, fromental, tritico ; fruit, froumént.
— sestivum, latin. Froment d'été. — Figeac, trémil.
Agropyrum repens, P. B., Chiendent. — Brive, tranudzo ;
Tulle, tronudzé ; Ussel, tranutso ; Figeac,
tronugo, grél.
Secale céréale, latin, Seigle. — Brive, chéglé, chéglo ; Tulle,
bla; Ussel, bla; Figeac, ségol; Roman, sè-
guel, setglé ; fruit, chéglé. Observation, mas-
culin et féminin.
Hordeum vulgare, latin, Orge commun. — Brive, ordi ;
Tulle, ordi ; Ussel, erdge ; Figeac, ordi ; Ro-
man, ordi, ordy ; fruit, ordi.
— hexastichon, latin, Orge à six rangs. — Brive, ordi
quéïrat ; fruit, ordi quéïrat; traduction, orge
carré (Brive).
— dislinchon, latin, Orge distique. — Brive, bail-
lard ; Figeac, paoumoulo, boillard ; fruit,
baillard; traduction, baillarge.
— murinum, latin, Orge queue de rat. — Brive, ordi
choouvadzé ; Figeac, couèto de rat (queue de
rat.
^ 185 -
Lolium perennBj lalin, Ivraie vivace. — Brîve, viradîou;
Tulle, granous ; Lraductionp petite ivraie
• (Brive),
— temulentum» lalin. Ivraie enivrante. — Brive, vi-
radzo ; Tulle, oviracïzé, viradzé ; Roman,
abriaga, juelh, aizama, Jueyll, yraga ; fruit,
viradzo.
%ar gnium ramosum, Huds., Riibanier rameux, — Brive,
rooujèl i Roman, raus, raujèl ; traduction, ro-
seau.
Tj'ptia latirolia» latin, Massette. — Brive, macJièto, counol ;
Tulle, counol sent'anno ; traduction, que-
nouille sainte Anne (Tulle).
Lemna gibha, latin, Lenticule gonflée. — Brive, Unou.
ÀrtzTXx niaculatum, latin, tiouet taché, — Brive, GléidzoL
0(>tiiogtossum vulgalum, latin, Ophioglosse, — Brivei ma-
Lago.
Ce t^eirach officinarum, BC„ Cétérach. — Brive^ fooudzieirou ;
Roman, scolopodia ; traduction, petite fou-
gère 1 observation, masculin,
l*^lypodfum vulgare, latin, l'olypodc vulgaire, — Brive,
régal icho ; Tulle, regalissa ; Ussel, réglissa ;
Roraan, polypodi ; traduction, réglisse.
Aspii3|m^ aculcatum, S\v., Aspidion à aiguillon. — Brive,
fooudzlèro ; Ussel, feugiéra,
^ciïysticuiîi lilix mas, Roth., Fougère mâle. — Brive, fooud-
zièro mâlo ; Tulle, Tooudziéro bastardo,
Aspl^nium adiantum nigrum , latin, Doradille capillaire
noir. — Brive, fooudzieïrou ; traduction, pe-
tite fougère.
— trichomanes, latin, Doradille polytric— Brive,
copilario ; Roman, gatlitrici, polytri ; traduc-
tion, capillaire.
Scolopendriuqi officinale, Smhh., Scolopendre. — Brive,
lengo de bièou, echcolopandre ; traduction,
langue de boBuf.
^ 186 -
PLerîs aquilirin, lalîn, Piéride aquilinaire. — Brive, fooud-
ziéTo; Tulle 1 looudzièra ; Ussel, feugièro;
Figeac, fôouyèra ; Roman, falgueira.
Equiselum arvense, iatin, Prêle des champs. — Brive,
quoyarat, couo d'echcurol ; Ussel, quouo de
pouli, d echcuroQu ; traduction, queue de rat,
d'écureuil (Brive), queue de poulain (Ussel).
— lelmateia, Ehrhard., Prèle des marécages. —
Brive, couo dé renard; Ussel, dzoun pétant;
traduction, queue de renard (Brive), jonc pé-
tant (Ussel).
Hypiuim, ect-, lalin, Mousse itoutes). — Brive, moulcho;
TullCi mousso ; Ussel, moussa.
Cladonia, etc., DC, Lichens (tous). — Brive, moulcho
blantso ; Tulle, mousso doous aoubrés ; Ussel,
moussa hlantsa ; traduction, mousse blanche
(Brive, Ussel)» des arbres (Tulle).
Amaoila cesareus, Lam^^ Agaric oronge. — Brive, poutirou
roudzé ; Tulle , poutarèou roudzé , coucou ;
Ussel , oroundzo ; traduction , champignon
rouge, œuf.
Agarîcus procerus , latin, Agaric couleuvrée. — Brive,
clerdzo ; Ussel, tsampignou de brudzèira;
traduclion, champignon de bruyère (Ussel).
— pralicola, latin, Agaric des prés. — Brive, bouja-
chou ; Tulle» mouna, filliol ; traduction, ve-
nant sur les houses (Brive).
lepîdus, lalin, Agaric lépide. — Brive, peyrouno;
Tulle, poularer de serp ; traduction, champi-
^^non de serpent f Tulle).
Cantharellus ciharius, Fr., Chiuiierelle comestible.— Brive,
dzirooudèlo, oourillo de prechtré ; Tulle, gi-
routidèla, dziratidèla; traduction, oreille de
prêtre (Brive)*
Boletus œreusj BulL, Bolet bronzé. — Brive, poutirou nè-
gre ; Tulle, poutarèou nègre; Ussel, pouti-
rou ; Roman, bolet.
— 187 —
Polyponis fomentarius, latin, Polypore amadouvier. —
Brive, amadou,
ffydnum repandum, latin, Hydne sinué. — Brive, dent de
rat ; traduction, dent de rat.
C/avaria flava, latin, Clavaire jaunâtre. — Brive, bouchi
barbo ; traduction, barbe de bouc ?
Aforcliella esculenta, Pers., Morille. — Brive, mérigoulo.
Geaster hygrometricus, latin, Géastre hygrométrique. —
Brive, pét de loup.
Lyoo j>epdum caelatum, latin, Vesse de loup ciselé (toutes). —
Brive, pét de loup; Tulle, bessina de loup,
pét de loup ; Ussel, bessine de loup.
Mftla.riogaster, latin, Mélanogastre (tous). — Brive, truffé ;
observation, masculin. Les truffes de notre
pays seront traitées par M. Gillet, d*Alençon,
dans son œuvre : Les Gastéromycètes. Je
pourrais désigner en patois une quinzaine de
variétés de Tuber ou Melanogaster, mais je
ne veux pas enlever cette satisfaction à mon
collègue, qui le fera d'après des notes depuis
très longtemps envoyées. La compétence de
M. Gillet, dans cette question, lui permettra
d'utiliser mes notes bien mieux que je ne
pourrai le faire moi-même.
Taber aestivum, latin, Truffe d'été. — Brive, dzualéntso.
cibarium, Bull., Truffe comestible. — Brive, truffo ;
Tulle, truffo ; Ussel, truffo ; Figeac, truffo ;
Roman, truffa ; observation, féminin.
excavatum, latin, Truffe creuse. — Brive, truffé ; ob-
servation, masculin.
Nostoc tremella, latin, Nostoc trémelle. — Brive, echcupi
de coucu ; traduction, crachat de coucou.
^Oferva, latin, Conferve. — Brive, linou.
— 188 —
Après avoir donné les noms des plantes en patois, connues
en Bas-Limousin et dans le Quercy, je crois devoir terminer
par le report de celles que je n'ai pu placer et qui sont indi-
quées dans le lexique roman de Raynouard :
Français Roman
Verveine Berbena, verbena.
Bétoine Betonica.
Brancursine Branca orsina.
Cade Cade.
Oignon marin Ceba marina.
Cèdre Cèdre.
Coriandre Coliandre, coriandre.
Coloquinte . . . ., CoUoquintida.
Conyze Conis.
Consoude Cossouda.
Dictame Diptamni.
Héliotrope Elitropia, ely tropia.
Epeautre Espeuta.
Staphisaigre Estalizagria, estaphisagria.
Eufraize Eufrazia.
Fenugrec Fengrec, fenugrec.
Chardonnette Gamaléon.
Germandrée Germandréa.
Tournesol Giraflor.
Galéga Guarengal.
Jusquiame Jusquiam.
Lentisque Lentisc.
Marjolaine Majorana.
Mélilot Mellilot.
Moutarde Mostarda.
MiroboUandier Mirobolan.
Olivier Oliver, olivier.
Pivoine Orobi.
^ Ache Pelitre.
'^'ii
^ ^1 Pouliot Pulegi.
*t iâ Rhubarbe Reubarba.
— 189 -
Français Roman
Haponlic , Hapomic.
Riz Ris.
Sabine. ..._.<<, Sabina, savina.
Sariette •.*,».,.,. Badreia,
Sycomore • * , Sicomor,
Sisoa Bi^olis.
Squille Squilia.
Sumac Sumac,
Tamarin Taniaric,
Tormentille TormenLilla.
Touzelle ........*..,».... Tozela,
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REMPARTS DE BRIVE
M. Louis de Saint-Germain a, dans sa belle et
intéressante étude sur le Vieux- Brive, fixé le péri-
mètre de la première enceinte de la ville; il a indiqué
l'emplacement des principales portes que marquaient
encore, il y a un siècle, les porches de la rue Majour,
de la rue des Sœurs et de la rue de Puy-Blanc.
Avec une grande précision et une scrupuleuse exac-
titude, il a décrit les portes de la seconde enceinte et
il a mentionné quelques-unes des tours, qui bâties en
saillie dans les fossés formaient comme des bastions.
Qu'il nous permette de compléter son œuvre sur
ce point spécial.
La date de la construction des remparts dont nous
avons vu des restes est incertaine. Il ne semble pas
qu^on puisse la faire remonter à une année postérieure
à 1374 et antérieure à 1330.
Charles V, par les lettres de grâce qu'il nous accorda,
à la sollicitation du pape Grégoire XI, nous rendit
nos privilèges et notre administration autonome. Il
autorisa les consuls à imposer sur tous les habitants,
des tailles dont le produit serait affecté à rétablisse-
ment de nos nouvelles fortifications.
On ne saurait cependant affirmer que la configura-
tion de Brive ait été déterminée à la fin du xiv" siècle.
Alors nos pères traversaient la Corrèze sur le pont du
Bouis dont les deux arches furent démolies en 1405
T. XXX. 2-6
— 192 —
pendant les guerres que la ville soutint contre le
vicomte de Turenne. La porte de Corrèze, le pont de
treize arches et le quai qui élevait le grand chemin
au-dessus des marécages de la Guierle, paraissent
avoir été bâtis vers 1488.
Quelle que fût Timportance militaire des murailles,
qui protégeaient notre indépendance, les consuls per-
mirent en 1486 aux habitants d'appuyer sur elles leurs
maisons. Alors furent occupés les chemins de ronde,
et fut diminuée la force défensive de nos remparts
dont deux sièges malheureux démontrèrent la faiblesse
pendant le règne de Henri III.
La construction de cet ensemble imposant de forti-
fications, portes, tours, murs, éperons, boulevards,
fossés revêtus d'une contrescarpe, glacis palissades
pour ménager à Tintérieur des chemins couverts et
des places d'armes, exigerait de nos jours et en pleine
paix un temps très long.
Au XIV* siècle, pressés par la nécessité de la défense,
nos pères les construisirent trop rapidement peut-être
pour leur assurer une solidité durable. Aussi durent-
ils les réparer souvent. Des lettres patentes de 1535,
1540, 1547, 1552, 1553, 1558, 1566, 1576, autori-
sèrent l'établissement d'impôts nouveaux et d'un
octroi pour leur entretien.
Elles menaçaient ruine en 1608, leur vétusté ex-
posait même les habitants à des dangers imminents.
Les consuls adressèrent une nouvelle supplique au
Roi, qui ordonna l'inspection dont nous sommes heu-
reux d'offrir le procès- verbal aux lecteurs du Bulletin.
Il porte la signature du sieur Lacoste, consul, se
qualifiant baron et conseigneurde Brive; de M. Dumas
.;^
" 193 —
de Neuville, lîeutenant-izént'iral 1I11 prêsidial; du pré-
sident de TiilecLion et de Jl*i.ix coiumissaires désignés
par le comte de Schoinberg, gouverneur du Limousin.
Les consuls, chargés de la défense de la ville,
étaient tenus de pourvoir aux frais de la garde des
murailles et de la fourniture des armes.
On trouve dans un compte écrit en patois en
1344(1), les inscriptions suivantes :
fit Item que payen a Jean Reynal per un ser que
Œ fetz (pour fagoet) lo gach (le guet), 4 sols.
<c Item per gardar las portas per vingt quatre jor-
a nadas, 4 livres-
« Item per treis torchas que Jean baret en Tasiza
(t et can vint (pour vinguet) lo lilh del senescals,
<t 18 sols,
« Item al dînât, per gardar la porta deus fraires
« menors, entro a nadai et 10 al '25 novembre, 1 livre
« 15 sols fsicj-
« Tilharia empanada (traits empennés^ flèches),
Œ 5 dozenas. Tilhaiia petita, 22 dozenas plus 4 ca-
ft nons, 1 balîste en 2 massues, s*
Le même armement fut remis en 1349 à Huguos
Ghabrierj auquel fut confiée la défense de la tour du
Salan,
Les archives de la ville fixent la date de la destruc-
tion des portes de Corrèze et des Sœurs.
En 1662 (2)j le Consulat concéda à Jean Lidon,
maître maçon, I adjudication ;, pour la somme de
in Archiuefi de l^ ville de Briae, l^F 6.
(2) ATchwes de fa mile de Briee, DD 3*
4
-"^
V
- 194 «
3J45 livres, de la grande porte de Corrèze à trois
ouvertures dont le^ vieillards ont gardé le souvenir,
et qui disparut lorsque la rue Toulzac fut ouverte
en 1839.
Les consuls en exercice en 1662 étaient Pierre Bel-
:^-} let de TArtige, conseiller du roi au présidial de Brive;
I Pierre Rigaudie, et le sieur Rogemond, maître apo-
thicaire.
Les deux grosses tours de la porte des Sœurs exis-
taient en 1789. Leur destruction fut votée, sous la
pression du Comité de surveillance, pendant la Ter-
reur. Elle n'était pas terminée le 25 ventôse an III,
16 mars 1795, car Tagent national proposa et le Con-
seil général de la commune ordonna la démolition
a du côté restant encore des tours de la porte des
j Sœurs ^ et Tenlèvement des décombVes qui encom-
braient au même point la voie publique.
Ces travaux ne furent probablement pas exécutés
et furent repris en 1816, conformément aux termes
de la délibération du 1*' mai 1816 qui a été citée par
M. de Saint-Germain.
Les autres tours et les autres portes sont-elles tom-
bées comme la tour de Canerly? nous ne pouvons le
savoir, et aucun document ne nous permet de sup-
poser qu'elles aient été démolies par les habitants de la
ville pendant la période de tranquillité intérieure qui
succéda aux troubles de la Fronde.
Julien Lalande.
s
'5
— 195 —
VISITE IDŒS RŒl^FARTS
Procès^verbal de constat (i)
« L'an 1608 et le neuvième jour du mois de mai, en exé-
» caution de l'ordonnance de Monsieur le comte de Schom-
Jb^rg, conseiller du Roy en ses Conseils d'État et privé,
S'CDuverneur es pays de la Haute et Basse Marche, lieute-
i^>^.^nt général pour Sa Majesté des Haut et Bas pays de
ll-»imosin, estant au pied de la requeste à lui présentée par
1 ^^ s consuls, manants et habitants de Brive-la-Gaillarde, en
ci. ^:^tte du cinquième du présent mois, au cy attachée,
^ ^^ raient comparus par devant nous, François Dumas, lieu-
t^^^nant général et commissaire examinateur en la séné-
c^lmaussée et siège présidial dudit Bas-Limousin estably
^ :Kr:i ladite ville, M. Jehan Verdier, présidant en l'élection
^3. ^ ladite ville, Léonard Saige (?), receveur des tailhes en
i^::^^lle, et sieur Jehan Jofre (?), Jacques Orsel, bourgeois et
^■^■^^ ^rchands en ladite ville, consuls d'icelle la présente
^ ï^née : lesquels nous auraient requis, en présance de nobles
I> ^rsonnes Hyllaire, commissaire ordinaire de l'artillerie de
I^x*ance, sieur Gyles le Doby, secrétaire ordinaire de la
c^lrxambre du roi pour ledit seigneur comte, commis et
^ ^putés pour l'effaict cy-après, nous voulloir transporter
^^v-ec eulx et lesdicts sieurs Hyllaire et le Doby, tan pour
1^ dehors que le dedans du circuyt de ceste ville et
^■^■^csmes sur le pont et quay estant sur la rivière de
^^CDurèze, pour cognaistre les ruynes qui y sont arrivées
^ t les réparations nécessaires, affin d'en faire bon et ample
I^ï^ocès-verbal, pour l'envoyer au roy et à messeigneurs
' <i^ son conseil.
** Requis, obtempérant avec lesdicts consuls, lesdicts Hyl-
^ l^-ire et le Doby et plusieurs aultres habitans de ladicte
" "^ille, partis de nostre logis et acheminés à la porte appellée
" <iô Courèze quy est soubs une grande et grosse tour de la
t^a.ulleur de trente brasses ou environ, visant sur le pont de
^^) Archives de la ville de Brioe, EE 1.
à
— 196 —
rivière de Courrèze, au devant laquelle porte y a aultres
deux portes couvertes de bolevars, entre lesquelles deux
portes premières du coustè de ladicte ville et sur le hault
d'icelles, prenant de ladicte tour sur lesdicts bolevards, se
faisait le corps de garde pendant la nuict, et par le des-
soubs aussy entre les dictes deux portes, se faisait aussy
le corps de garde pendant le jour. Laquelle tour construite
est sur la première porte, est descouverte, fendue en deux
lieux, et tous les corps de garde entièrement ruynès et
inutiles par faulte de planchier et de couverture. Comme
aussy nous a appareu Tune des murailhes qui ferme les-
dictes deux premières portes du coustè de la main droicte,
par le dehors, visant sur les foussès, y en avoir de rompeu,
du hault en bas, de la longueur de six à sept brasses, et de
la haulteur de huict brasses, laquelle, sy elle nest prompte-
ment réparée, est à craindre que ladicte grande lour ne
tombe par terre pour aultant qu'elle est appuièe de ladicte
murailhe. A ce que regarde lesdictes trois portes et le
pont-levys quy est au derrière ledict boulevard et der-
nière porte, le tout est extrêmement gasté et en pauvre
estât.
« Passant oultre nous serions acheminés au dehors de
ladicte ville et despuys ladicte porte de Courèze, jus-
ques à la tour appellée de Santan qui faist ung carré de
ladicte ville, visant et deffandant lesdictes portes de Cou-
rèze et celle appellée des Prescheurs; despuis laquelle
porte de Courèze jusques à ladicte tour, peut avoir cent
cinquante brasses de murailhe fendue en plusieurs et
divers endroicts, et, entre ladicte porte et susdicte tour,
une granche brèche de hault en bas, jusques à ras de
terre, d'environ quinze brasses de longueur et huict bras-
ses de haulteur; et en ce que regarde ladicte tour de San-
tan, elle est entièrement descouverte.
« Despuys laquelle tour de Santan jusques a ladicte porte
des Prescheurs, peult avoir environ six vingts brasses de
murailhe fendue en î»lusieurs et divers lieux qui mérite
de la réparation.
— 197 «
« Et estant a ladicte porte des Prescheurs, serions entrés
t dans ladicte ville ou nous aurait appareu trois portes,
« lune à la suytte de Taultre. La première dlcelles sortant
« de ladicte ville entre deux grosses et grandes tours de la
« liaulteur d'environ trente brasses avec deux bolevardz ,
ff joignant, et fermant lesdictes deux portes auxdictes grosses
« tours, et entre lesdictes deux portes premières du couslé
« de ladicte ville, y avait des bastiments servant à faire les
« corps de garde pendant la nuict, ressortissans dans les-
« <3ictes tours qui sont en assès bon estât. Mais Tune des
« rn virailhes qui ferme et joinct les secondes portes avec les-
« ciictes tours et à la main gauche sortant de ladicte ville,
"il y a une bresche sur le hault d'environ trois brasses en
« ca.rré, que sy nest reparé, est à craindre que le restant
' tombe en ruyne.
^ T^ous a aussi appareu que le corps de garde quy se fai-
' sstit pendant le jour entre lesdictes deux portes est entie-
' i*oment ruyné et lesdictes trois portes fort gastées et mal
" ^ex^rées.
** Procédant au reste de nostre visite, partant de ladicte
" porte des Prescheurs, hors ladicte ville, nous serions
* acheminés vers la tour du Salan, despuys laquelle porte
* j risques a ladicte tour, peult avoir deux cents brasses de
" "ttiurailhe et une petite tour appellée du collège entre deux,
* laquelle tour du Salan est de la haulteur d'environ vingt
* cinq brasses, et à la pointe d'icelle se faisant lors des
* Suerres, ung corps de garde qui est à présant tout rompeu
* ^t dissipé, sans aucune couverture, par ce moïen du tout
" Inutile que sy nest promptement réparée, il est à crain-
•^ dre que ladicte tour ne tombe par terre.
** Partant de laquelle tour du Salan, nous serions ache-
* naines vers la porte des Cordeilhers distante de ladicte
** tour du Salan d'environ cent cinquante brasses de mu-
" ^3.ilhe; par laquelle porte nous serions rentrés dans la-
*Hcie ville ou nous aurions veu et remarqué aullros trois
i "Ortes, Ir le a ^r su\ Ue de ''ai 'ire I; pror^n'è 'e d t^'iue.'V.'S,
■^i ivïii : ' h ù'cle ille. t ^vesi e J^* deu • 2i\ î^os tours
— 198 —
et au dessus ladicle porte, ung corps de logis servant à
faire les corps de garde, lesquelles tours sont descouvertes
en plusieurs endroiçta et les corps de garde inutiles par
fauhe de planchier, au moien desquelles descouvertures,
est à craindre une grande ruyne sur lesdictes tours et
corps de garde. Et pour le regard des aultres deux portes
restans, audevant de la dernière, y a ung bolevard en forme
d'esperon, avec deux grandes murailhes prenant d'iceluy
jusques aux dictes deux tours fermant la porte du milieu,
entre deux est le corps de garde qui se soûlait faire entre
lesdictes deux portes tout rompeu et dissipé iceluy bolevard
comme aussy lesdictes tours fendeu en divers endroicts.
« Partant de laquelle porte des Cordeillhers par le dehors
de ladicte ville, nous acheminans à la porte de Puyblanc,
ou il y peut avoir environ deux cens brasses de mu-
railhe, et entre les dictes deux portes, soûlait avoir
une grande et grosse tour carrée appellée de Canerly qui
donnait bien avant dans les foussés de ladicte ville deffan-
dtint dans iceux les portes desdicts Cordeilliers et de Puy-
blanc, dans laquelle tour il se faisait corps de garde
pendant les Li'oubles, laquelle tour dès ce jourd'huy, envi-
ron rheure de raid y est entièrement chusté jusques à
ras de terre, et par ce moïen faict une grande bresche
d environ vin^'t cinq brasses, laquelle sy n'est réparée,
est a craindre qu'a suytte de ladicte ruyne, le reste de
ladicte muraiUie ne se démolisse.
iï Estant à laquelle porte de Puyblanc , nous serions
encore catrt^s dans ladicte ville ou nous aurions veu et
remarqué trois portes Tune à la suytte de l'autre; les deux
premières du cousté de ladicte ville, couvertes d'ung corps
de logis en forme de tour carrée où l'on faisait pendant
les sriierres le corps de garde durant la nuit et au dessoubs
pendant le jour, lequel corps de logis est à présent la
plus grande partie descouvert el sans aucung planchier et
par le moïen du tout inutile, comme pareillement les deux
premières porte;^ fort vieilles, fort gastées et mal ferrées,
et quand au bolevard est sans aucune porte.
— 199 -
« Sortant de laquelle porte de Puyblanc et nous ache-
r minans par le dehors vers la porte des Sœurs, entre les-
quelles deux portes y peut avoir trois cents brasses de
rxiâ iirailhe et entre deux y a deux tours appellées des Vau-
fi^ns et de Lianno et ung grand éperon appelé éperon des
E^oiriers (mot presque illisible) qui est dans les foussés,
Isi-cïuelle tour des Vauriens est entièrement descouverte;
o t pour le regard de la tour de Lianno ou il se faisait ung
oorps de garde, icelluy corps de garde est à présent du
tout inutile à cause qu'il n'y a aucung planchier et quy
o^t descouvert comme nous avons remarqué ainsin qu'il
s^ra après dict.
« Quand aux murailhes desdictes deux dernières portes,
sont en assés bon estât; tout contre ledict esperon, qu'il y
3- xme grand fente quy traverse toute l'espaisseur de ladicle
ï^^ tirailhe despuis le hault jusques en bas.
^ Estant à la porte des Sœurs, nous serions encore ren-
^i-^^s dans ladicte ville ou nous aurions veu et remarqué
^-vxltres trois portes, l'une à la suytte de l'aultre, revestues,
s^^oir, la première porte de deux grosses tours, entre
1^ squelles tours et par le dessus de ladicte porte, y a forme
^^ corps de logis servant à faire le corps de garde pendant
^^ nuict, visant sur ledit esperon, tout lequel corps de
S^.rde est entièrement ruyné et inutil à faulte de pian-
ota ier. Despuys lequel esperon qui est audevant lesdictes
t>ortes, y a deux murailhes joignant ledict esperon avec
^^sdictes portes, lequel esperon est aussi inutil par deflfault
^ *estre en bonne et dhue forme et lesdictes portes vieilhes,
^c>rt uses, rompues et mal ferrées, aussy le corps de garde
^3tant entre lesdictes deux premières portes, l'aultre bole-
"^^rd et la seconde porte, fort fendeu et le pont levys
^c>rapeu et assable [sic).
^ Sortant de laquelle porte des Sœurs, nous serions ache-
^^ï^înés vers ladicte porte de Courèze ou il y peut avoir
environ trois cens cinquante brasses de murailhe. Entre
A^^quelles deux portes, y a deux tours, Tune desquelles
a.ppellée la Barbequane (sic) qu'est une grosse tour ronde
— 300 —
ei TauUre la tour carrée de Courèze, dans laquelle tour de
Barbecaûe se faisait ung corps de garde, quy à présent à
faulte de planchier est du tout inutil, et voir la tour est
fendue par le dehors, car sy n*est réparée, est à craindre
que tout yra par terre.
« Et pour le regard de Jadicte tour carrée de Courèze,
servant ez temps de guerre à faire la sentinelle de jour et
de nuicl, visant sur la rivière de Courèze, et en aultres
divers lieux a cause de sa haulteur, laquelle tour tombe
extrêmement en niyne, estant toute descouverte, fendue
en div^ers endroicts, n*estant possible d'y apporter aulcune
ri^paration, sans la mettre entièrement à bas.
« Et estant à ladicte porte de Courèze, nous serions ache-
minés sur le pont de ladicte rivière de Courèze, soubslenu
de treize arceaulx de pierres de tailhe, ledict pont de la
longueur île et de la largeur de (1); les cinq prin-
cipaux arceaulx duquel po[iL sont grandement fendus au
moïen de la furye de ladicte rivière lorsqu'elle vient à
eslre inondée: sy bien que lesdicts arceaulx et pilhers qui
souhstiennent iceuh ne sont réparés et cramponnés de
fer, il est à craindre que ausdicts endroicts, lesdicts ar-
ceaulx ne viennent à rompre ; et par le dessus dudict
pont, les murailles qui sont au -bord d'ycelluy sont quasy
toutes ruyoées, sy bien que ny ayant aucung empesche-
ment en divers endroicts, il est à craindre qu'il n'en
advienne aucung accident à ceux qui passent sur ledict
pont,
* Duquel pont serions acheminés le long d'un grand quay
de l;i longueur de.,.., {'2) prenant du bout dudict pont, le
long de la dicte rivière de Courèze. Mais à faulte que la
murailhe d'icelluy quay est basse d'une demye brasse
tout le long d'icelhiy, il arrive par les inondations des
eaux, que les grands chemins venans de Limoges et
d'Auvergne, allant à Toulouse et à Bourdeaux, le grand
clieniia ubordanl ledict poni demeure couvert d'eau, sy
— 201 —
* bien que pendanf ladîcte inondation et quelquefois du*
« rant sept à huict Jours, le peuple ne peult aller ny venir
« en cest endmict, ains contraint de séjourner deçà ou delà
« ledicl pont, lequel pont sll venait à se ruyner, ne se fai*
^ rail refaire pour quinze mil livres, sy bien qu'il est néces-
f t-"aire y appoiter des répaialions, comme aussy aussy (?)
le dict quay pour empescher lesdictes inondations-
« Et tout incontinent serions rentrés dans ladicte ville,
fait le tour d'icelle par le dedans, montés ausdictes tours
^t corps de garde et remarquant les ruynes sus alléguées,
niesmc ez la tour de Lianno, une grande ruyne despuis le
faapiilL jusque s en ba^^, et près la porte des Gordeiiliers
«^riTiron diï brasses de la moytié de l'espesseur de la
xxiurailhe entièrement rompue et en danger sy n'est
ï*é parée d'appeller à ruyne plus de vingt brasses de ladicte
miirailbe. La plus grande partie de toutes les guérites
^t guabionnades estant sui- les dictes murailhes rompues
^l descouvertes et en plusieurs des marchepieds du tour
<ie la dicte ville t servant à passer tout le tour desdictes
^'ïiiirailhes et faire les rondes en temps de guerre, les
<iegrès pour monter auxdictes tours et sur ladicte murailhe-
csn plusieurs et divers endroicts, le tout rompeu et disî?ipé
Sans aulcune barre ni parefent (deux mots presque illi-
sibles], sy bien qu'il est impossible de passer sur ladicte
ïïiurailhe d'une tour à aullre, à cause, comme dict est»
le marchepied desdictes murailhes est tout rompeu et dis-
sipé. Les foussés de ladicte ville tous comblés,
" De laquelle susdite viEite, ruyne et détérioremeiU, nous
certifions Sa Majesté et Messieurs de son Conseil, eslre
<^er tains, nothoires et véritables et quy méritent une
prompte réparation, à faulte de laquelle toutes les dictes
niiirailhes. tours et gabionnades, fortifications et susdicl
Poiu menassent d'une grande et inévitable ruy[ie dont
^ïous avons dressé notre procès verbail auxdicls ronsuls et
habitants aûn de se pourvoir par ladicte Majesté, ainsin
'lu'ils verront esTre affaire par icelle, estre au tout pour-
vr*u ,jij elio ju^Tra esl 'e requis et nécessaire,
J'-ïï
'm
-B
-;i-?
:i--i
202 —
a A Brive la Gaillarde, le neuviesme jour du moys de
« may mil six cens huit.
<c Dumas, lieutenant général et commissaire examinateur;
« Moiret; Hylaire; Le Doby.
^ a Lacoste, consul baron et conseigneur de ladicte ville en
a ladicte année, approuvant ce que le roy ordonnera pour
r;v^^ « lesdictes réparations.
a Lacoste, ù
Extrait des Registres du Conseil d'État {\)
N^ Sur la requeste présentée au Roy en son Conseil par les
" consuls, manans et habitants de la ville de Brive, capitale
du Bas-Limousin, contenant que, ez années dernières, il se-
rait tombé une grande partie des murailles de ladite ville,
Qu'ils n'ont moïen de faire réédifier pour n'avoir aucuns
deniers courans ny aucune réserve.
Requerrons Sa Majesté leur vouloir permettre, imposer et
faire lever sur tous les habitants de ladite ville de Brive
taillables et cotisables en icelle, la somme de quinze cents
livres pour être employée à la réfection desdictes murailles.
Vu le procès-verbal desdites réparations et consentement
desdils consuls et habitants des dixième et douzième de
mars dernier.
i^^^'î Le roy, en son conseil, a permis et permet auxdicts con-
r>Kj suis et habitants, d'imposer et lever sur tous les contri-
^ 'ï * buables et cotisables de ladicte ville la somme de quinze
Afj cents livres, en la forme et manière accoutumée, pour être
^;k^ employée aux susdites réparations et non ailleurs, sans que
:::;*:: la levée des deniers de Sa Majesté en soit pour ce retardée
ny diminuée.
Fait au Conseil d'État du roy tenu à Paris le 24 avril 4610.
Signé : Baudouyn.
• *|>â| (l) Archives de la ville de Brive, EE 1.
— 203 —
Ordonnance royale (\)
Henri, par la grâce de Dieu, roy de France et de Navarre,
A nos amés et féaux conseillers les trésoriers de France
et généraux de nos finances etably à Limoges,
Nous, suivant Tarrét cy-attaché sous le contre-scel de
notre chancellerie ce jourd'hui donné en notre Conseil,
Sur la requête présentée en iceluy par nos bien amés les
consuls, manants et habitants de la ville de Brive, capitale
du Bas-Limousin,
Vous mandons et enjoignons que, par les élus en Télection
dudit Brive, faites asseoir, imposer et lever en la présente
année, sur tous les contribuables et cotisables en ladite ville,
le fort portant le faible, le plus justement et également que
faire se pourra et en la manière accoutumée, la somme de
quinze cents livres, et soixante livres à laquelle somme nous
avons taxé les fraix de l'obtention des présantes, pour, par
ladite somme cueillie et levée ainsy qu'il est accoutumé et
mise es mains du receveur de nos tailles en ladite ville et
employée aux effets auxquels elle est destinée par notre
arrêt et non ailleurs ;
A la charge d'en rendre compte par celui qui en fera la recette :
Et ou aucuns des cottisés seraient refusant de payer ladite
taxe, nous voulons qu'ils y soient contraints par toutes voies
dues et raisonnables comme pour nos propres deniers ; pourvu
toutes fois que la levée de nos deniers n'y soit autrement re-
tardée ny diminuée.
De ce faire nous avons donné pouvoir commission et man-
dement spécial.
Mandons à tous qu'il appartiendra à vous obéir en ce fai-
sant et au premier notre huissier ou sergent sur ce requis,
faire pour l'exécution des présentes toutes contraintes re-
quises et nécessaires, car tel est nostre plaisir.
Donné à Paris le 24* jour d'avril, Tan de grâce 1610, de
notre règne le 21*.
Signé : Par le Roy en son Conseil, Baudouyn et scellé.
(1} Archives de la ville de Brtue, £E 1.
l
— tQ\ —
OrdnnnRTice dês tré^ôrien â(> France au bureau
de Limoges (1)
Les trésoriers généraux de France à Limoges, aux prési-
dent, lieutenant, élus et cuntj'ôieurs des tailles en l'élection
de Brive, saiut.
Vu par nous TarriH du Conseil d'État du roy du vingt
qnatriesnie avi'il dernier signé Haudouyn et commission
par iceluy h nouB adreasanl^ des susdits jour et an, signé
par le Roy en son Conseil, Baudouyn,
Par lequel SiT Majesté nous mande que, par vous nous
ayons à faire asseoir, iiuposer et lever la présente année,
sur tous les contribuLibles et coUsables en la ville de Brive,
la i:omme de quinze cents livres et soixante livres pour les
frais d'obtention des susdit arr^t et commission,
Pour iMre ladite somme cueillie et levée, mise es mains du
receveur des tailles en ïadite élection et employée aux répa-
rations des murailles de ladite ville, comme il est porté par
le procès-verbal de la visite d'icelles et consentement des
consuls et babitants des onze et douze mars dernier, comme
il est plus au long porté par ledit arrêt et commission, sui-
vant lesquels nous vous mandons et ordonnons la faire asseoir
et imposer sur les manants et habitants de ladite ville
de Brive, ladite somme de quinze cents livres d'un côté
et soixante livres l'autre, ensemble la somme de dix livres
pour les droits du sieur de Maupte (?) l'un de nous,
Revevant les dites sommes h celle de quinze cent soixante
dix livres, laquelle vous fairés cueillir et lever par les collec-
teurs des tailles de ladite ville dans les trois quartiers de
la présante année pour être mise es main du receveur des
tailles et employée aux réparations desdites murailles,
A la charge d'en rendre compte pardevant nous et que
les deniers du Roy n'en soient pas retardés.
Ce faisant, contraindre les cotisés au paiement de ladite
taxe comme pour deniers royaux.
Fait au bureau des finances» a Limoges, le 22* mai 1610.
(l) Archiver de /a ville de Bfwe^ EE l.
J PROPOS D'UN VIEIL ACTE DE BAPTÊME
On des anciens registres de la paroisse Saint-Martin
(Je Eiive contient Tacte ei-après transcrit ;
*« Mare-François-Charle-Jean de Salés fils naturel et légi-
* t-iïiie à messire Franc^ois de Salés chevallier de Tardre
* *^oyal et militaire de S* Louis cydevant capilaine au régi-
* ïir^ eat des dragons de la Reine et à dame Suzanne de
* *^^ miibert ses père et mère habi*' de lîi ville de Brive y est
" 1^ ^ le vingt huit du mois de septembre mil sept cent
* ^<::>iïante trois et a été baptizé le mCme jour dans la mai-
* ^c^n paternelle à cause du danger de mort par nous sous-
* Sî ^ni Guilhaume de Gilibert prieur commendaLaire de
' ^^M uzi chanoine curé de Brive : a été porté A Téglise pour
' s xji^pléer aux cérémonies de sacrement de baptême le second
* *3. \j2 mois de décembre de la même année. A été parain
* ^^ arc- Pierre Dévoyer du Poulmy comte d'Argenson mi-
' *^ i stre d'État grand croix de Tordre Royal et militaire de
" S^ Louis qui a adressé procuration pour tenir à sa place à
' ï^i^cssire Gharle de S^ Viance chevailler mousquetaire de
' ^ a- seconde compagnie de la garde du roy, et maraine
* ^ a.me Charlole Huguet de Semonville comtesse d'Estrade
* qiat a donné sa procuration à demoiselle Jeanne-Marie de
" ^^lès damoiselle cousine germaine au d. baptiïsé qui ont
lignés avec nous et nombre de parents et amys qui ont
assistés au d. baptême.
^ De Salés S' Viance Guibert de Salés mère au baptisé
^ c:tjev' de Cbateauvert commandeur de S* Georges de Gili-
fa^rl Ërnault de Brusly Dameiin de la Salle du Saillant
S^pientis Lavarde La Bacbelerie Dubois de la Chabroulie
" *ie Guibert Lasterrie du Saillant Merigonde S' Ililaire
l
a Roche Laroche S' liîlaire de Gilibert prévôt général de
a Marsac Puymaiga Maleden de Labastille de Corn la Cha-
ft broulie Maillard Lanier de Lavaletle Milhiac La Bache-
« lerie de Bedoch de la Salle S* Bon Gilibert prieur com-
« meiidataire de Mtizi, chanoine curé de Brive de Salés,
w oncle paternel du baptisé pour avoir fait le baptême à la
tt prière et du consentement de M"" le Curé. »
A divers points ije vue, cet acte mérite de retenir Tat-
tenlion.
Il convient d'abortl de le rapprocher d'un passage assez
curieux des Mémoires de Marmonne/, édition de 1804,
tome IL qui se rapporte (*■ la fois au parrain et à la mar-
raine [l)i et sur la portée duquel certaines réserves sont
faites, bien entendu, étant donné l'esprit mordant de son
auteur :
Le médecin yuesnay, d'aprt^s ce que rappelle Marmontel,
avait été placé auprès de la marquise de Pompadour par le
vieux duc de Villeroy » et par une comtesse d'Estrades,
amie et complaisante de M"*' d'Étiolés (2) qui, ne croyant pas
rt^chauiï'er un serpent dans son sein, l'avait tirée de la
misère et amenée à la Cour. Quesnay était donc attaché à
M'"* d'Estrades par la reconnaissance, lorsque cette intri-
gante abandonna &a bienfaitrice pour se livrer au comte
d'Argenson et conspirer avec lui contre elle.
Il est difficile de concevoir qu'une aussi vilaine femme,
dans tous les sens, eût malgré la laideur de son âme et de
sa flgure, séduit un homme du caractère, de l'esprit et de
làge de M. d'Ar^enson. Mais elle avait à ses yeux le mérite
de lui sacriller une personne à qui elle devait tout et d'être,
pour Tamour de lui, la plus ingrate des créatures.
(î) Chai'tolte lluguet de Sem on ville, dame d'atours de M"" de France,
filles du roi Louis XV, avait épousé Charles Jean, comte d^Estrades,
qui fut tué à Dettiiigen sur le Mein le 19 juillet 1743).
fLa Gheriaye-Desbois, 2"* édition, tome VI.)
{^) Jeanne- ÂnLoineitf; Poisson, qui devint marquise de Pompadour,
avait épousé le Fermiergénérai Lenormand d'Éiioles. C'est donc la
métne personne que Marmoniel appelle tantôt M"* d*Étioles et tantôt
M"' de Pompadour,
— 207 —
Cependant Owesna\\ sans s'émouvoir de ces passions enne^
mies, était, d^un côté, TincorrupLible serviteur de M"" de
Pompadour, et, de l'autre, le fidèle obligé de M°^ d'Estrades,
laquelle répondait de lui à M. d'Argenson; et quoique, sans
mystère, il allât les voir quelquefois. M*"' de Fonipydour
n'en avait aucune inquiétude. De leur côté, ils avaient en
lui autant de confiance que s'il n'avait tenu» par aucun lien,
à M»' de Pompadour.
Or, voici ce qu*après Tesil de M. d'Argenson, me raconla
Dubois qui avait été son secrétaire. C'est îui-mérae qui va
parler; son récit m'est présent, et vous pouvez croire Ten-
tendre*
Pour supplanter M*"" de Pompadour, me dit-il, M, d'Ar-
genson et M™" d'Estrades avaicnl fait ins=pirer au roi le dé&ir
d'avoir les faveurs de la jeune et belle M"" de Choiseuï,
femme du Menin. l/intrigue avait fait de? progrès; elle en
était au dénouement. Le j-cnde^-vous était donné: la jeune
dame y êtatt allée; elle y était dans le moment même où
M, d'Argenson, M™*d*Estrades, Quesnay et moi, nous étions
ensemble dans le cabinet du ministre. Nous deux, témoins
muets, mais M* d'Argenson et M"* d'Estrades très occupés,
très inquiets de ce qui se serait passé. Après une aî^sez
longue a lien te, arrive NJ""*^ de Choiseuli cchcvclée et dans le
désordre qui élaii la marque de son triomphe. M™* d'Es-
trades court au devant d'elle, les bras ouverts, et lui de-
mande si c'en est fait. « Oui, c'en est fnit, rêpondit-eHe, je
suis aimée; il est heureux; elle va être renvoyée; il m'en a
donné sa parole- * A ces mots, ce fut un grand éclat de joie
dans le cabinet. Quesnay seul ne fut point ému, « Docteur,
lui dit M. d'Ârgenson, rien ne change pour vous, et nous
espérons bien que vous nous resterez. — Moi, Monsieur le
comte, répondit froidement Quesnay en se levant, j'ai été
attaché à M"'" de Pompadour dans sa prospérité, je le serai
dans sa disgrâce. » Et il s'en alla sur*le-champ. Nous res-
tâmes pélriliès, mais on ne ptit de lui aucune méfiance, 't Je
le connais, dit M"*"* d'Estrades, il n'est pas homme à nous
tralur. * El en effet, ce ne fut point par lui que le sect^ct fut
T, XXX. '2 - G
— 208 —
découvert, et que la marquise de Pompadour fut délivrée de
sa rivale. Voilà le récit de Dubois. »
On voit, par ce passage des Mémoires de Marmontel,
qu'il existait entre M. d'Argenson et la comtesse d'Estrades
une alliance d'une nature particulière, antérieure à l'alliance
purement spirituelle qui devait résulter dq leur commune
intervention au baptême du jeune Marc de Salés.
La famille de Salés s'bonorait d'ailleurs dans la circon-
stance par sa fidélité à un puissant protecteur, tombé dans
la disgrâce.
Marc-Pierre de Voyer de Paulmy, comte d'Argenson, né
le 16 août 1696, avait été lieutenant général de police dés
l'année 1720. « On n'avait jamais ouï parler, dit Saint-
« Simon, d'un lieutenant de police encore si jeune. Il était
« insinuant, bien en Cour, occupé à percer et à plaire. » En
août 1742, il avait remplacé M. de Breteuil comme ministre
secrétaire d'Élat au département de la Guerre. C'était le
moment de la fameuse retraite de Prague. Secondé par le
maréchal de Saxe, il avait mis sur pied trois armées qui
entrèrent en Piémont, en Allemagne et en Flandre. En 1745,
l'armée de Flandre remportait la victoire de Fontenoy. Il y
assistait. On le retrouve aux côtés du maréchal de Saxe à
Law^feld en 1747. En 1751, il avait créé l'École militaire.
C'était l'ami et le protectetir des philosophes. Il fit pensionner
Voltaire. En 1751, Diderot et d'Alembert lui dédièrent TEn-
cyclopédie. Quoique brouillé avec M°*' de Pompadour, il
avait gardé la faveur de Louis XV, lorsque, le !•' février
1757, à la suite de l'attentat de Damiens, le roi le congédia.
La guerre de Sept-Ans commençait. « En arrivant en place,
dit Bernis, le comte d'Argenson avait pour ainsi dire créé
des armées au roi. Pour sa propre réputation, il aurait bien
conduit la nouvelle guerre et en aurait imposé à la licence
et à l'insubordination qui régnèrent dans nos armées. » Quoi
qu'il en soit, sa disgrâce le frappa profondémet. Il devait
mourir en 1764, retiré dans sa terre des Ormes-Saint-Martin,
— 209 -
près Saumur. Sa fin était bien proche lorsqu^il iigurait
comme parraio, avec sa vieille amie M""* d^Eslrades, dans
Tacte de baptême dressé à Brive le 2 décembre 1763.
Il existe, aux archives départe m en taies ^ une volumineuse
correspondance échangée au sujet des affaires publiques
entre MM. de Salés d une part, et, d'autre part, MM* Turgot
et de Lamillière, intendants, Tun à Limoges, Tautre à Mon-
tau ban.
La famille de Salés détenait en effet à Brive, au xvui* siè-
cle, la charge de subdélégué de Tintcndance. Les intendants
placés à la tète de Tadministration des provinces avaient
délégué leurs pouvoirs dans les principales viUes de leurs
circonscriptions. Leurs repràsenlanls, agissant au nom du
pouvoir centrais exer(;aient les fonctions auxquelles coiTes-
pondent aujourd'hui celles des sous-prélets. Vers J750, ces
fonctions furent érigées en office. On trouve successivement
comme subdélêgnés à Brive :
l" Etienne- Joseph' François de âalès, époux de Marie-
Pascale du Verdier, decédée à Brive en 1758 à Tàge de
80 ans. Son cousin François du Verdie r est mort évêque
d^Angoulênie (Cab. des litres. Nouveau triiozier, tome 298).
2"" Pierre de Salés (169r*-l7o6), éponx de Marie de Giguet
de Milhac, lequel a été chargé de toutes les opérations rela-
tives à l'acquisition de la vicomte de Turenne où il a tra-
vaillé plusieurs années, avec des dépenses indispensables
dont il n'a jamais demandé aucune indemnité (même source)*
3* Joseph-Etienne François de Salés (1717-1753), marié le
19 juillet 1745 à Jeanne-Marie Dulmet de la Borie,
4^ Antoine-Louis de Salés de Ray monde» frère du précè-
dent, chanoine de Saint-Martin de Brive» subdèlégué de
rintendant, lequel assiste, le 8 aoiU 1778, au contrat de
mariage à Paris chez M. de la Rochefoucauld-Cou sages, rue
Cassette, paroisse Saini-Sulpice, de son neveu Raymond de
Salés et Tinsiilue son héritier universel,
Le 12 février 1751, l'énigmalique personnage qui, sous le
- 210 -
nom de chevalier Binet, habitait Hrive et n'était autre que
le noble loj'd HamîUon, l'un des principaux réfugiés jaco-
hiles, fait donation de tous ses meubles meublants à M. Pierre
de SalèB-
Le îi) août 1756. Pierre de Sales vend à Jean Algay, avo-
cat à Yssandon* la charge spéciale d'avocat du roi à Brive
possédée depuis fort longtemps par sa famille.
En 17G3, c'est l'abbé de Sab^s, subdélégué, qui traite,
d'accord avec les ofliciers municipaux, pour la captation des
sources des coteaux voisins de Brive.
Au sujet de ce dernier, voici ce que rapporte le livre de
raison de maître Pierre Maigne de Sarrazac, fils de Jean-
Baptiste Maigne de Sarrazac et de Marie de Salés, qui fut
conseiller du roy es siège sénéchal et présidial de Brive :
# ÎjC 14 de juillet 1800, au point dîi Jour, est mort au château
de Croze, paroisse de Sarrazac en Quercy, âgé de 78 ans ou
environ, M Anloine-Louis de Sales de Raymonde, cy devant
chanoine honoraire et prêtre du chapitre Saint-Martin de
la ville de Brive, oncle de M'"^ de Marquessac et mon cousin
germain, et a *ilé enterré dans le cimetière de Sarrazac le
53 de ce mois. Il avait exercé longtemps, comme son père,
la charge de subdélégué de rintendance de Limoges et
Montauban avec la plus grande probité. Ce monsieur a tou-
jours mené la vie d'un véritable ecclésiastique et emporte
les regrets de tous ceux qui l'ont connu. Il était doué d'une
douceur angélique et lui des beaux hommes, soit pour la
figure, soit pour le corps, qull y eût en France. Il est véri-
tablement mort en prédestiné, après un malaise de trois ou
quatre jours. Il a servi de tuteur et de vrai père aux enfants
de ses deux frères, à ceux de Millac, et à nous. Que Dieu lui
fasse pais et que tous ceux qui liront ici prient Dieu pour
le repos de son âme. »
Marc de Salés, le lilleul du comte d'Argenson, était le
neveu de Tabbé de Salés. Son père, le capitaine de dragons
François de Salés, avait été commandant de la place de
Brouâge, cette morne citadelle dont Richelieu avait voulu,
sur les marais de Saintonge, faire un grand port de guerre,
— 211 —
et 011 se retrouvent encore les mélancoliques souvenirs de
l'exil de Marie Mancini, la belle nièce de Mazarin, qui eut
les premières amours de Louis XïV. Suzanne de Guibert,
femme de François de Saïès et mère de Marc, était fille du
comte Benoît de Guibert qui fut lieutenant générai et gou-
verneur des Invalides en I78i
Marc de Salés était donc^ par sa mère, neveu de ce sédui-
sant comte Hippolyte de Guibert, littérateur et écrivain
militaire, qui, jeune colonel, inspira la plus folle passion
h la compagne de d'Âleml)erl, M^'* de Lespinasse,
M, de Guibert, ami de Voltaire et de Frédéric IL auteur
de l'ordonnance de 1776 sur les manœuvres de l'Infanierie,
de divers ouvrages de tactique et de littérature, membre de
l'Académie française en 1786, secrétaire du Conseil supé-
rieur de la Guerre en 1787, protégea sans doute les débuts
de son neveu Marc de Salès, car nous retrouvons ce dernier
jeune capitaine au célèbre régiment des bouzards de Cham-
borant en 1788. Les certificats de ses services ont malheu-
reusement disparu dans Tincendie du château de Gieurac.
Mais, en 1789, il est à Brive avec son cousin-germain Ray-
mond de Salés (Ij, ancien capitaine de cavalerie au régiment
du Roi. Tous deux avec vingtdeux citoyens de Brive, se
portent au secours de M, de Lamaze assiégé le 24 janvier
179U ii Allassac par les paysans ameutés. Tous deux prennent
part au combat rapporté par M. de Seilhac dans son ouvrage :
La Révolution en Bas- Limousin. Le 16 mars 1790, par acte
au rapport de Delpeuch, notaire a Brive, en réponse aux
allégations du journal de Mercier ils protestent " que le
« peuple était armé et qu'il a fait feu plusieurs fois avant
« qu'on cherchât à repousser la force par la force. » C'est
Marc qui, dans les divers documents concernant cette affaire,
signe « le chevalier de Salés n. Son cousin, plus âgé et iils
d'un aîné, signe simplement « Salés a.
{1} Pîerre-Jeaii'Raymoîid de Sales, né à Brive en Limosin le 20 aoi'U
1749, mousquetaire le 8 mai 17(56, capitaine le '29 mai 1774, capiiaine à
la suite dans Royal -Cav alêne le 6 avril L778. (Waraquîep. Tabïeau do
la ûoblesse militaire.)
— 2\'l —
Le souvenir de leur énergique *]éfenï?e à AUassac persis-
tera dans le pays. Le 18 messidor an II, à Tulle, les patriotes
du Trecli écrivent ; « A AUassac^ les Salés fusillèrent les
cultivateurs, »
En 17Ï13, Mîirc de Salés figure sur la liste des émigrés. Il
Il sert â Tarmée des Princes. U avait alors trente ans. Il
eîisle de lui un porti^aiL un peu antérieur à cette époque,
qui est au château de Gieurac (Lot). La physionomie de
rétnigré est Une et expressive. Le menton carré atteste
Tentétement loyaliste. La bouche est spirituelle. Les yeux
gris ont une expression indétinissahle, quelque peu ironique,
n^excluant d'ailleurs nullement, on le sent hien, la manière
courtoise ei élégante. On dirait que l'homme de l'ancien
régime, sans se dépaitir de Turhanité native, jette un regard
légèrement railleur et non dépourvu de scepticisme sur les
temps nouveaux. L ombre de d'Ârgenson, l'ami et le protec-
teur de Voltaire j n'est pai? loin.
Retraité comme colonel par la Restauration, chevalier de
Saint-Louis» oïïicier de la Légion d'honneur, Marc de Salés
se tixa à Paris, rue Neuve-des-Petits-Champs, n* 77. Là,
d'après une tradition de famille, admis à la Cour et honoré
de la confiance de Charles X, il aurait reçu le comman-
dement d'un des bataillons de la garde nationale. Il vint
mourir au château de Cieurac, propriété de sa famille, le
30 décembre 1831, à Tâge de 61 ans. Il était le dernier re-.
présentant du nom. Avant lui était décédé, le 29 septembre
1855, son cousin -germain Raymond de Salés, également
retraité comme colonel et chevalier de Saint-Louiè, veuf sans
enfants de Jeanne de la Barre-Duvernois, morte à l'âge de
22 ans. Marc ne s'était pas marié. Les deux cousins, qui
ensemble avaient servi et ensemble avaient subi les épreuves
de rémigration, reposent l'un près de l'autre dans le petit
cimetière de Cieurac, non loin de leur neveu, le vice-amiral
de Marquessac.
Et seul subsiste encore à Brivei avec ses deux ailes déla-
brées, sa porte charretière et son grand jardin, le vieux
logis qui fut Thûtel du subdèlégué de l'intendance et qui
ï
— 213 —
sert aujour^ï'hut d'école maternelle, rue Blaise-Reynal, an-
cienoe rue des Frères, Du décor vieillot où habitaient éga-
lement les familles de SahugueL, de Gilibert, de Chamaillard
et des Bruslys^ il reste de remarquables balcons ea fer
forgé, d'un fort beau stjle, appelés à disparaître prochai-
nement comme tant d'autres vestiges du passé. C'est dans
rh6t€l de Salés qu'au soir de la monarchie, un bal fut offert
à la duchesse de Berry de passage à Brive, Sur la cour
d'entrée, au-dessus de la fenêtre centrale, s'effrite un écus-
son où apparaissent encore, à demi-rougîes par les intem-
péries et la vétusté, les armoiries que maintenait en dé-
cembre 1754, en faveur de Pierre de SSalès, une lettre royale
de coniirmation conservée au Cabinet des titres, nouveau
d'Hozier, tome 298 :
De gueules, aux trois tou7'S d'argent posées 2 et i, au
chef d^a^ur chargé de trois étoiles d'or.
Encore un peu de temps, et comme le nom, comme la
race, comme le souvenir même» les pierres, eUcs aussi,
uuront vécu-
J, DE Saint-Geïimatn.
Le Tombeau de la famille Cabanis
-A.VI Oiraetière d'-A^viteviil <'>
Ici reposent dans le même cercueil
Charlotte-Félicité GROUCHY, V^b CABANIS
DÉCÉDÉE LE XXIX OCTOBRE MDCCCXLIV DANS SA 77* ANNÉE
ET LE COEUR DE SON ÉPOUX Pierre-Jean-Georges CABANIS
Membre de l'Institut de France et du Sénat
DONT LE corps EST DÉPOSÉ AU PaNTHÉON
ET QUI DÉCÉDA LE VI MAI MDCCCVIII A l'aGE DE 51 ANS
Anette {sic) Paméla CABANIS
Veuve en premières noces de C. MERCIER DU PATY
EN deuxièmes noces DE N. R. JOUBERT
NÉE A AUTEUIL LE 25 MARS 1800 ET DÉCÉDÉE A PaRIS
LE 6 FÉVRIER 1880
Sur cette froide pierre en vain le regard tombe.
O vertu ! son aspect est plus fort que la tombe
Et plus évident que la mort.
Lamartine.
A la fois médecin, homme de lettres et philosophe,
Cabanis est né à Cosnac, près Brive, comme en té-
(1) Nous extrayons cet article sur le tombeau de la famille Cabanis
(immatriculé C. 26), au cimetière d'Auteuil, de l'Historique que
M. Georges Bertin va publier sur ce cimetière. Les lignes qu'il veut
bien nous communiquer ont leur place tout indiquée dans notre Bul-
letin, où ont paru déjà plusieurs études sur le médecin philosophe :
Cf. Docteur François Labrousse, Quelques notes sur un médecin
philosophe, P.-J.-G. Cabanis (1903), et Docteur G. Hervé. Un trans-
formiste oublié, P.- J, 'Cabanis (1905).
Ajoutons que l'ouvrage de M. Georges Bertin contient encore une
autre notice sur un tombeau d'une famille limousine, la famille
Champseix (pp. 53*54), qui repose aussi à Auteuil. M"* Champseix,
sous le pseudonyme û* André' Léo, a écrit un volume connu de : Lé-
gendes Corréziennes.
— 216 —
moïgne son acte de baptême, conservé au greffe du
Tribunal civil de la Sous-Préfecture de la Corrèze :
û Pierre -Jean -Georges Cabanis, fils de Monsieur
Cabanis, bourgeois, et de demoiselle Marie-Hélène
d'Escarole de Souleyrac, son épouse, demeurant
actuel liment au Heu de Salagnac et habitants de la
ville de Brive, né le cinq du mois de juin mil sept
cent cinquante-sept, a été baptisé par nous, curé sous-
signe j en l'église paroissiale de Cosnac. A été parrain,
M' Jean-lieorges Lois, avocat au parlement de la ville
de Sarlat, en Périgord, au nom et place duquel a
tenu sur les fouis baptismaux M* Pierre Conchard
de Vemieit, aussi avocat, habitant de la ville de Brive,
et marraine, deraoiselle Françoise de Cabanis, épouse
de sieur Antoine de Bosredon^ lieutenant de la juri-
diction de Varetz et y habitant, ladite marraine tante
maternelle du baptisé... ».
Dés sa plus tendre enfance, Cabanis montra une
grande indépendance de caractère et une volonté peu
commune. Il commença ses études chez les Doctri-
naires de Brive ; mais, à peine âgé de quatorze ans,
il ne pouvait plus se plier à leur discipline et son père
dut renvoyer à Paris pour y achever son éducation.
Rappelé par ses parents au bout de deux ans, notre
jeune Corrézien ne revint pas au foyer paternel, mais
préféra suivre à Varsovie, en qualité de secrétaire, le
prince Massalski, évèque de Wilna (1). Brouillé peu
après avec son nouveau maître, Cabanis regagna Pa-
ris el Brive, puis revint à Paris pour s'adonner à
(l) Mort pendu à Varsovie, le 27 juin 1794.
— 217 -
rêtude des lettres. II abandonna bientôt après les let-
tres pour commencer la médecine. Placé sous la
direction du célèbre Dubrenil, Cabanis eut Theureuse
fortune de recevoir, durant cinq ans^ les conseils
éclairés de cet illustre maître*
Contraint par une santé débile et la surexcitation
de ses nerfs à vivre à la campagne, le jeune Cabanis
jeta son dévolu sur Auteuil et s'y fixa. C'est à A^uteuil
qu'il se lia avec M'"* flelvètius et la plupart des
hommes remarquables qui fréquentaient le salon de
celte femme supérieure, tels que Benjamin Franklin,
qui lui légua son épée, Daunou^ Condoi-cet, Tabbé La
Roche, Destutt de Ti acy, Volney » Garât, Laromiguière,
Ginguené^ le poète Roucheret le grand orateur Mira-
beau, qu'il soigna^ et dont il a retracé les derniers
moments dans : Le Joiwnal de la maladie et de
la mort de Mirabeait.
De son côté. M™* Helvétius se prit d'une telle
affection pour le « défenseur des Encyclopédistes »
que^ le considérant comme un fils adoplif, elle l'en-
gagea à venir habiter chez elle. A sa mort, M'"' Helvé-
tius lui légua la jouissance de sa maison.
Nommé professeur d'hygiène aux Ecoles normales,
en 1796, Cabanis, déjà juré du Tribunal révolution-
naire, fut élu député au Conseil des Cinq Cents^ en
Tan VI. Malgré son aversion pour les idéologues,
Napoléon le nomma sénateur le 3 frimaire an VJIl,
comte de l'Empire par lettres patentes du 26 avril
1808^ membre de la Légion d'honneur (9 vendé-
miaire an XII) et commandant de Tordre (25 prai-
rial).
Peu après son entrée à Tlnstitut, Cabanis s'était
{
(»«ï
— 218 —
uni à la sœur de M"* Gondorcet et du futur maréchal
de Grouchy :
« Registre des actes de mariage de la commune de
Paris^ X* arrondissement, section de la Fontaine de
Grenelle :
« Du vingt-cinq Floréal an quatre — Samedi 14
mai 1796 — acte de mariage de Pierre-Jean-Georges
Cabanis, officier de santé, âgé de trente-neuf ans, né
à Cosnac, département de la Corrèze, le cinq juin mil
sept cent cinquante- sept, domicilié à Auteuil, près
j Paris, fils de Jean-Baptiste Cabanis et de Marie-Hélène
) Descarole, tous deux décédés, avec Charlotte-Félicité
Grouchy, âgée de vingt-huit ans, née à Condecourt^
département de Seine-et-Oise, le 2 avril mil sept cent
soixante-huit, domiciliée à Paris rue de Lille n** 505,
fille de François-Jacques Grouchy, demeurant à Vil-
lette, susdit département, et de Marie-Gilberte-Hen-
I riette Fréteau, décédée.
! a Les- témoins furent : Dominique-Joseph Garât,
' ainé^ âgé de 45 ans, homme de lettres, demeurant à
Auverneau, département de Seine-et-Oise; Pierre-
Antoine Benoit, ami, âgé de 53 ans, agent municipal
de la commune d'Auteuil, près Paris; Alexis Boyer,
ami, âgé de 36 ans, chirurgien, demeurant rue des
Pères n" 43 , hospice de TUnité ; Jacques-Joseph
' Mailla-Garat, ami, âgé de 28 ans, homme de lettres,
demeurant à Auteuil... »
Ces quatre témoins sont connus. Le comte Domini-
que Joseph Garât fut ministre de la justice et de Tin-
térieur, ambassadeur, sénateur et membre de Tlns-
titut ; Pierre-Antoine Benoit (voir l'article qui lui est
>
— 219 —
consacré) ; le baron Alexis Boyer, premier chirurgien
de Tempereur et des rois Louis XV III, Charles X et
Louis- Philippe» était compatriote de Cabanis; Jac-
ques-Joseph Maill\-Garat, qui fut^ dit-on^ Tamant
de M™" de Condorcet, la quitta pour Aimée de Coigny,
ia jeune captive d'André Chénier. Né le 9 février
1767, il habiLait Auteuil dès 1796. Il fut membre du
Tnbanat et, à ce propos, on fit circuler les vers sui-
vants :
Pourquoi ce petit homme est-il au Tribunal?
C'est que ce petit homme a son oDcle au Sénat.
La fille unique de Cabanis, Annette-Paméla^ née
à Auteuil le 4 germinal an VIII, Grande-Rue, n*" 24,
époLisa^ en 1823, son cousin Louis- Charles -Henri
-ï/KFtcïEH DU Patv, sculpteur, élève de Lemot, prix
de Romej professeur à TÉcole des Beaux- Arts» mem-
"1 e de rinstitut, officier de la Légion d'honneur.
Ni3 à Bordeaux le 29 septembre 1771, mort le 22
novexxibre 1825^ laissant un fils, Georges-Emmanuel,
^é et décédé en 1826, du Paty était fils aîné de
Charles- Margueiite-Jean- Baptiste Mercier du Paty,
^^grieur de Bussac, avocat général au Parlement de
HorcJeaux, jurisconsulte et littérateur^ auteur des
^ Lettres sur Pltalie » (La Rochelle, 9 mai 1746
» 1 a ris, 18 septembre 1788), et de dame Marie-
L-ouise Frêteau du Peny et Samt-Just (mariage 7
^^Ptembre 1769), décédée le 12 mars 1826.
Le mari de la fille de Cabanis était Toncle du gé-
^^ï'al Mercier du Paty^ autorisé^ par décret du 25
^ctobre 18B2, à ajouter à son nom celui de Clam^ né
^ Paris le 18 février 1813 et décédé à Toulouse le
^ ^ai 1887.
— 220 —
M"** Mercier du Paty se remaria, le 10 mai 1836, à
la Mairie de Passy (elle demeurait alors Grande-Rue
de Passy, n** 56), avec Nicolas-Roch Joubert, direc-
teur de rOctroi de Paris, né à Paris et y demeurant,
rue Saint-Lazare^ n" 44, fils de Pierre-Mathieu Jou-
bert, né à Angoulème et décédé le 26 avril 1815,
conseiller de préfecture du département de la Seine.
Voici le signalement de Cabanis à son entrée au
Sénat : 1 mètre 78 ; cheveux et sourcils châtains ;
front large ; nez ordinaire ; yeux bleus ; bouche pe-
tite ; menton allongé ; visage long.
Georges Bertin.
LETTRES INEDITES
DXT l^ARQXJIS IDE 1*^IR-A.BEAXJ
A SA BELLE-FILLE M«- DE MARIGNANE
N"ous sommes heureux de faire connaître quelques
lettres inédites du célèbre marquis de Mirabeau à sa
teUo- fille Emilie de Marignane, qui épousa en 1772,
le fameux orateur de la Constituante, Gabriel-Honoré
Iliïixelli, comte de Mirabeau. La première lettre est
^^ S 1 juillet 1772, quelque temps après le mariage,
^ *^oi.igueux marquis s'y peint avec son tempérament
"^ gt^and seigneur, de féodal^ et sa philanthropie pas-
sionoée, dans un style prolixe, dur, difficile. Le plus
ancî^i^ gt^ l3 pi^jg fervent disciple de Quesnay est en
niàrQe temps un brutal, un orgueilleux. Il s'appelle
lui^rnêrae un moulin d écriture ^ il conseille et com-
ma-nde, mais il prêche la fraternité civile, provin-
CKtl^ ^ nationale, universelle enfin. Cette lettre jette
^^^ Jour très curieux sur 1 état d esprit d'une partie de
1^ noblesse gagnée aux nouvelles idées économiques
et soeialesj la veille de la Révolution.
J, ESPÉREÏ.
— 2-22 —
De Paris, le 21 juillet 1112.
il Vaut mieux lard que jamais », ma chère fille, dirait un
Tort raisonneur de ma connaissance en parlant de la mort;
mais moy ji3 vous le dis pour le p*" souvenir dont vous m'ho-
norez. Je ne vous nieray pas que je n'aye été touché de ce
premier courrier; votre beau père est un fort bon homme,
à ce qu'on dit, lotijaurs prêt à avoir la larme à Tceil et
l'etoufoir à la gorge quand il pense à ses enfants et qui ne
demanderoit pas mieux que d'en avoir de bien gentils; or
on lui disoit tant de bien de vous, qu'independemment de
touLs auLres motifs, son cœur était fort épanoui d'avance;
or ma fiUe vous conooissez la charité romaine, imaginez le
vieillard attendant sa fille et attendant depuis le 22 juin
jusques au 21 juillet, vous n'auriez pas admis la phrase de
dêriingemeni dr $ani6 et de tracas de nouvel établissement
et d'exécution impossible. Ma chère fille vous apartenez
maintenant au plus grand prêcheur de l'Europe, mais ses
leçons n'ont fait fuir personne; retenez de moy de ne jamais
mettre de ces phrases parasites dans vos lettres; mieux vaut
cent fois la sécheresse du fait, et jamais avocat de mauvaises
causes; vous avez une réputation excellente et toute faite;
vous apartenez aux gens les plus aimés de notre pays, et
aimés et considérés pour une race est la même chose; vous
! venez enfin de prendre un nom qui ne fut jamais médiocre
j et je vois avec la phxs vive joye que vous le soutiendrez, et
• le perpétuerez dignement, regardez désormais tout ce que
j dit votre beau père comme l'acte du pélican. Tout ce que
! Tétude, la réflexion, et l'expérience m'ont acquis je voudrois
le verser, et moy même dani^ le sein de ma nichée; touts
les devoirs sont doux à la longue, mais celui-là Test au
l*"" moment. Cela dit» vous n'y êtes pas et il faut que je
finisse ma râtelée sur I article de Vexécution impossible,
Jauray selon les apareuces si rarement l'occasion de vous
' gronder qu'il faut puisque je la tiens, j'en profite pour plu-
} sieurs années. Le cœur a la fin replié et justice faite de
' moy même; Je vous dirois seulement in petto ma fille dans
— 223 -
le bonheur nous ne pouvons avoir recours qu'à Dieu pour
qu'il dure ; dans le malheur, qu'à Dieu pour trouver la force
de le porter, La vraye, la hautt^ piété donc est la compagne
nécessaire de toute notre vie, dans tout du moins ce qui
n'est pas yvresse et emportement, le rite réel de ce genre
de culte, c'est le devoir or quel objet peut devancer sur cette
voye le respect filial. Un père est pour ses enfants le vray
représentant de la divinité icy bas; grande leçon pour luy,
mais pour eux dans tous les cas obligation la plus solennelle
et la plus stricte. C'est d'ailleurs le plus puissant lien social,
le fondement des états et par conséquent celuy des familles;
les devoirs respectifs entre les frères et les parents, le res-
pect pour l'autorité dans tous ses grades, la fraternité civile,
provinciale, nationale, universelle enfin, et se résumant en
un point le père universel, autheur, moteur et conservateur
de touts les êtres, tout enfin ce qui peut faire le bonheur et
constituer la vertu de l'espèce humaine dérive de là: jamais
la race des bons fils ne périra; jugez ma fille si je désire
pour le bonheur de la votre que l'exemple de celle qui la fait
renaitre dans ma patrie y établisse la superstition même de
ce genre de mœurs. Il est vray que ma fille a sous ses yeux
son véritable père et bien d'autres dignes objets de ce culte
naturel ; aussy n'a-t-elle pas à leur écrire, et moy aussy je
seray grand père de ses enfants, mais grâces à la toilette
qui sera désormais pour moy ce que sa cassette était à
l'avare, tout est dit ne répondez point ma fille à cet article,
il est déjà bien loin.
A l'égard de mon portrait, mon enfant, vous savez que
dans l'ordre des bienséances, les lettres doivent précéder ce
genre de faveur là; d'ailleurs vous en avez déjà pour les
deux bras et pour ma part je vous ay donné de bracelet tout
ce que j'en avois. Vous trouverez à Mirabeau force grands
portraits à l'huile, cela est beau et en vérité c'est tout ce
que je veux, si vous en voulez davantage lisez Vamy des
hommes dans vos moments de loisir, personne au monde ne
scavoit qu'il fut de moy et chacun me reconnut au langage
et à la manière.
T. XXX. 2 - 7
— 224 —
}
Quand au mobilier ma !îlle il est à vous; il a bien besoin
(l'être cousuj doubUs toui'Qé, changé. Il serabloit que mon
camr vous desiroil quand levant les yeux de dessus mon
bureau je voyois cetîe indienne de ma mère toute en loques.
Tout ce que sa main a Louché m*est sacré ; ne jettez rien. Je
lui ay souvent ouy dire que de grands bahus de noyer qui
sont dans la grand dépense (on vous apprendra toute cette
géographie là) elle avoit tiré des trésors, attendu que cela
serroît louts les chîfons et coupons, Le lieu est effroyable
ma chère fille vu Télègance actuelle et toujours battu des
vents. Tel qu'il est la plus belle femme de son temps et la
plus chérie y passa le 1" hyvcr après son mariage, le
terrible h y ver de 1709 et seule entre ses paravants à faire
dégeler son vin auprès de feu. Ma belle et bonne enfant
logez dans votre tète et dans votre cœur que ceux même qui
vous ont fait el qui jouissent chaque jour de vos vertus et de
vos succès ne désirent pas plus vivement que moy votre
bonlieur et tenex pour assuré d'après moy qui croiroit faire
un sacrilège de vous tromper que toutes les peines qu'on
s'est données dans la jeunesse sont autant de semences de
bonheur ou de consolation pour l'avenir; or chaque jour est
jeunesse pour le lendemain.
Je ne veux point finir sans vous dire un mot sur un ar-
ticle de votre antique lettre qui me toucha, c'est celui ou
vous me faites une sorte de compliment sur votre peu de
bien, cet article ne pouvait être inspiré, car il eut été
étrange pour quelqu'un qui aurait eu de l'expérience. On
vous a donc fait penser que j'étais bien cupide et ma fille
si vous êtes telle qu'an vous dit je vous aurois acheté bien
cher. Ma vénérable, mon auguste mère n'eut rien de ce qu'on
peut chifrer, mille témoins encor déposeraient si elle fut
honorée. Je n'ay voulu répondre de mon fils en rien ni
pour rien^ mais je serois sa caution. Que des déchets dans
votre fortune, le contiendraient plutôt dans ses manquements
naturels, qu'ils ne seraient capables de l'y porter. Quand à
moy qui revois le père de votre aimable père qui toujours
vieux de bonne heure u ay jamais scu jouir à la mode ordi-
^T
— 225 ^
naire du présent ou donc prendrois*je la convoitise pour
Tavenir? Le devoir de pï'^re et chef m'a fait marcher d'un
pas réservé dans le déDut des arrangements relatifs à un
BQgagement le plus sérieux de la vie; à cela près ma fille
ceuï qui ont suivy ma manière de traiter cette afTaire peu-
vent me rendre justice que je ne l'ay pas plus faite qu'au-
cune autre comme un vilain. L*avenir prouvera si nous mé-
ritions la préférence que vous nous aviez donnée. Je dis
NOUS car quand au persoonel c'est vous ma fille qui vous
J*êtes donné j mais la famille vous la trouverez honnête, equi-
table et facile autant qu'aucune autre et toujours sensible
au bonheur et à Thonneur de vous avoir acquis.
Af on lils et quelques autres ont pu vous dire que j'étais
Lin moulin d'écriture, et cette le lire cy ne vous en dissua-
der^apas; croyez cependant que depuis le temps que j'écris
sans relâche cette fantaisie si c'en élait une pourrait être
feTnoussée ; que d'ailleurs je suis accablé de correspondances
^t d'affaires et qu'outre j'ay de la besogne toute prête sans
celîer ià^ mais J'ay cru devoir vous mettre en confiance pour
oioo début et le meilleur moyen d'inspirer un sentiment
quelconque c'est de le sentir.
^oo frère est party avant hyer sans avoir la consolation
ûe voir votre lettre qui luy auroit fait plaisir; je le luy
mind^ray* votre tante, votre sœur et toute la famille vous
ïeaxercient et vous embrassent, faites mes honneurs je vous
prie à. toute votre maison. Adieu ma chère fille, je vous
Mirabeau.
Du Bignon, Ib 28 juillet 1118,
*'aî reçn ma chère fille votre lettre du 13 : en vérité ai
TOUS aviez un peu moins de peine à écrire, ce serait pour-
tot domage de se rapprocher, car nous nous entendons fort
"i^ïi par lettres; vous avez un caractère d'esprit égal, suivi
^^t^nu obligeant, ingénu plein d'âme et de sentiment;
— 226 —
enfin nous nous enti^ndons très bien, au lieu qu'en présence
vous ne me dites rien, et qug,nd j'ay voulu vous mettre à
mon courant, vous faire des ouvertures, au lieu d'y mettre
de la suitte et d'en raisonner avec moy qui ne suis que trop
facile, ce n'est que par antruy que j'ay pu scavoir vos idées
et vos rtVHexions, Je scay bien que la vieillesse a beau faire
pour mériter la confiance intime de la jeunesse, elle effa-
rouche toujours: je scay bien aussy que mieux vaudroit
pour cela polissonner et faire des niches qu'une amitié sui-
vie attentive, protectrice je scay cela; mais outre que ce
n'est pas mon allure qwi ne polissonne jamais que de la
parole et que Tâne de la fable n'eut de tort que celuy de
vouloir changer son naturel — dailleurs cela ne seroit pas
décent. Ma belle sœur avoit trente ans moins que moy et je
me livrois avec elle à mon caractère caressant et elle le
trou voit très bon malgré sa roideur et sécheresse naturelles,
parcequ elle scavoit que je l'aimais; mais je suis devenu
dangereux depuis, et les honnêtes gens à qui j'ay eu affaire,
ont bien débité dans Paris que vous vous étiez enfuy de
chez moy parce que j'avois voulu vous faire violence, et
comme j'embellis et deviens violent touts les jours davan-
tage, ii faut du moins que je cache mon jeu avec terreur.
Quoyqull en soit tout est dit à ce sujet ma chère fille et
mon cœur est soulagé de son sentiment et de l'acquit de
mon devoir ; vous en userez comme vous voudrés et quand
vous voudrés. J'ay toujours pensé que puisque l'on envoyoit
touts les enfants de la province élever à paris, M' votre père
pense roi t que son enfant et le notre n'en doit pas être
excepté, mais comme je vous l'ay dit, je m'en vais le plus
lentement que je peux, nmis pourtant comme tout le monde,
car je serois fâché d'être singulier à un certain point; vous
lui demeurez; et son principal intérêt est ou vous êtes, et
par ma foy d'ailleurs ma première couvée m'a reussy de
manière à ne me pas donner beaucoup de confiance en mes
almananaks de propagateur. Je vous diray seulement ou
rediray pour Tacquit de ma conscience que vous devres le
faire inoculer dés que les grandes chaleurs seront passées.
— 227
A ce propos le bon bailly (1), sur la simple réponse que
je lui fie que quand vous voudriez venir chez moy, vous y
avie^ votre droit, m'a fait un plaidoyer ou il met le plus de
raisons qu'il peut et il finit par me dire que le changement
àfxit occasionner la petite vérole. Je reponds comme la pre-
^ïiière fuie. Au reste ma chère fille, j'espère n'avoir pas
Wsoin de vous répéter ce que je vous ay déjà dit qu'il faut
cecju^ cecy soit absolument entre nous, quand un tiers est
(îan s un pareil secret oi\ ne scait plus qui le tient, or je serais
le plias ingrat et par conséquent le plus malheureux des
bomïXies, si je donnais jamais à mon digne frère occasion
*le ponser que j'ai fait quelque chose d'important pour la
famille en cachette de luy.
U^ri article de votre lettre qui me fâche par exemple et
fceauooup c'est celuy ou vous me dites que vous êtes incom-
moda^ ; je n'a vois ou y parler que de votre belle santé et du
bien cjue vous avait fait l'air de provence. Or comme cette
Corel ^ là n'est pas votre fort, je vous prie qu'il n'y ait rien à
dire eii de m'en donner des nouvelles par quatre mots, fina-
lein^ ra t sans communiquer à personne rien de tout cecy,
quarni et si vous jugez à propos de venir dans notre maison,
voa^ nae marquiez le temps et moy je vous serviray à mettre
lepx-c>pos en avant simplement, exactement qu'il seroit temps
^^^ ï~^I> rocher Victor de moyens d'une éducation complète et
smvi^ _ ^gig yQ^g servira de texte et j'y ajouteray tout ce
qus v^ous voudrez ; alors vous prendrez la volonté de M" votre
W^ qui n'en a au fond que de raisonables.
*-^^^st d'après cette conviction là, ma chère fille, et de plus
fortes encore puisqu'elles portent sur son honnêteté et res-
pect pour les volontés ou réelles ou même supposées de ses
ascerxtjants, sentiment dont il a donné les véritables mar-
^^^ par sa facilité sur les droits de M" ses sœurs et sa
^^^ï^osité à cet égard, peut-être même poussée trop loin,
*1^^ je n'ay pu croire et ne croiray point que ce qui peut
accuser leurs dispositions luy paroisse devoir le blesser. Et
^ ' Le frèro du marquis de Mirabeau qui résidait en Provence.
— 228 —
moy aussy, ma fitle. je crois être noble dans les affaires et
très noble ; j'en ay eu avec tant de gens que j'ay bien des
témoins, et si je Tétois moins je n'aurais pas le bonheur de
vous avoir. A cet égard comme il n'est pas réciproque, ce
n'est pas à vous que je m'en vanterois; mais M' votre père
doit connoitre comme un autre ma manière de traiter pour
peu donc qu'il m'eut lémoigné le moindre mécontentement
ou soupçon sur ce que je fais, aujourd'huy, je l'en aurois
fait juge luy-m^me ; si le respectant, comme je me suis res-
pecté, si le traitant comme je me suis traité, assurant les
volontés de nos pères et les apuyant de la sanction de la loy
contre la fougue et les emportements dont nous avons eu
que trop d'exemples présents; contre Tincurie seule de
pupilles la tare, ou m^me contre leur délicatesse mal en-
tendue qui pourroit vouloir le faire et embrasser plus de
devoir que leur fortune et ses accidents n'en pouvoient por-
ter, si accomplissant enfin des volontés respectables je puis
être soupçonné de vouloir gêner leur héritier naturel et
privilégié dont une réputation générale atteste les mœurs
les sentiments et la probité. Et si M' votre père avoit voulu
manger son bien auroit-il attendu d'avoir eu d'autres droits
sur les siens poui' en faire cet abusif usage. Quand il ne
seroit pas hors de tout soupçon à cet égard seroit ce moy qui
arriverois dans la maison d'autruy pour en troubler le pro-
pri*^taire? est-ce à mon âge qu'on commence de telles ma-
nœuvres quand a vint ans on fut le maitre de ses droicts et
actions. M' votre père ne niera point qu'il m'a trouvé facile
a tout; comme assurément je luy rends bien la même jus-
tice et je l'ay imprimé lians mon mémoire; il ne discon-
viendra pas non plus que souvent il ne fut fort aise d'avoir
un honnête homme pour consort dans les soins qu'exigent
de propres affaires. Il pourroit dire qu'il ne veut pas que ce
soit dofïice qu'on voudroit le servir, a quoy je reponds
qulcy j'ay mon droit et mon devoir attendu que j'ay fourny
et l'exemple et les fonds.
Au reste ma chère fille, M' Quinier m'écrit et je lui ré-
ponde et vous serez contente si vous l'êtes de la raison!
— 229 —
mais je persiste à vous dire que vous ne devez point vous
mêler de cette affaire : vous devez laisser vos deux pères se
démêler et soyez sûre que quelques malentandus de détail
qui puissent se rencontrer, ils finniront par s'entendre parce
qu'ils sont gens de bien l'un et l'autre et pas plus querel-
leurs l'un que l'autre et également incapables de mauvais
procédés.
Adieu ma chère fille. Votre sœur du Saillant (1) vous re-
mercie et vous embrasse et son mari vous baise la main
avec les grâces que vous lui connaissez. Si le mémoire de
Beaumarchais est gaillard nous vous en serons bien obligés,
mais adressez la pour la 2* envelope en cachant bien la pre-
mière à mon adresse, à M' de S' Pau/, premier commis de
la guerre; s'il n'est que méchant; bon pour Aixe. Adieu je
vous embrasse tendrement.
Mirabeau.
Du Bignoriy le 5 août 1118.
Il y a longtemps ma chère fille que vous scavez a quoi
vous en tenir sur mon exactitude a vous repondre. Elle est
générale dailleurs pour tous et j'ai toujours regardé cela
comme un devoir ; ce n'est pas que les lettres ne commen-
cent a me peser parce qu'a la fin tout s'use et que d'ailleurs
les affaires redoublent et se multiplient avec l'âge quand on
est comme moi sans secour, et ces dernières années m'ont
obligé à tant de prévoyance de raports et a parer de tant de
cotés qu'on seroit lassé à moins ; mais ce ne sera jamais
d'un coté si cher que portera ma fatigue en ce genre.
Je vous remercie de m'avoir donné de meilleures nou-
velles de votre santé. Je scay combien vous revenez vite;
mais aussy combien vous soufrez longtemps sans en avertir
de manière qu'on vous trouve tout a coup morte et c'est
grand domage. On dit qu'il meurt beaucoup de gens de
bêtise et cela est vray ; il n'y a pas d'aparence que vous
(1) M"* de Lasteyrie, sœur du comte de Mirabeau.
— 230 —
soyiez de si tôt attaquée de cette maladie là : mais je ne
scay combien de jeunes femmes qui ont bien de Tesprit se
tuent néanmoins parce qu'elles ne mettent pas leur esprit
a vaquer à cette misère qu'on apele santé, et quelles y
mettent autre chose qu'on apele fantaisie, opinion, dédain
de cette gaucherie qu'on apele prévoyance et préoccupation
du moment joint à la conflance naturelle de la jeunesse. Si
jamais ma chère fille vous connoissez quelqu'une de ces
dames là qui soit très intéressante d'elle-même, dites lui de
ma part qu'il ne faut mourir que quand on est désabusé de
toutes les illusions de la vie, chose qui ne vient a notre
secours que tard et qu'il ne faut point prématurer; 2® qu'en
ceci faut-il pour cela n'aimer rien ce qui équivaut a dire
n'être aimé de personne, n'avoir plus de devoir et n'être plus
le devoir de personne ; 3** que mourir n'est rien comme dit
le déserteur mais qu'avoir une santé délabrée est une chose
contre nature et que quoy qu'en disent les médecins et les
malades, on ne l'a point quand résolument on ne veut pas
l'avoir; j'ay beaucoup vécu et je scais cela; 4° que qui ne
parvient pas a mener sa personne ne mène pas mieux tout
le reste car comme bonne ou mauvaise santé fait notre phi-
losophie elle fait aussy notre capacité. Je vous dirois bien
d'autres raisons si je ne croignois de les ennuyer car je suis
plus habile encor a en cathégoriser que ne l'est M"" Pined ;
quand a moy un des plus grands mérites que je connoisse
c'est d'avoir une bonne santé.
J'aime bien aussy un bon cœur et il me paroit que
M* Victor emanuel aura celui de ses grands pères. Il en
souffrira beaucoup, mais beaucoup, je scais ce que c'est,
je le scais toute ma vie, mais ce soufrir là est le courage
non nécessaire d'espérer et espérer c'est vivre^ c'est être
heureux auprès du total des indifférents. On n'est jamais
sage je scais au dire de notre prudence, mais on est bon et
je crois que cela dit mieux, du moins on dit toujours que
Dieu est bon et l'on ne s'avisera jamais de dire qu'il est
sage. Point de génie, point de grand homme même qui n'ait
le cœur tendre et chaud. L'éloge de Catinat tout sage mais
— 231 —
tout froid nous en impose, mais nous sèche, il meurt seul
comme il s'était promené toute sa vie. On fait une perte,
mais on n'est point troublé, tandis que Henry 4 si foible,
que Turenne toujours si susceptible d'attachement nous
arrachent des larmes encore. Mais voilà un drôle de cha-
pitre à traiter de la part d'un vieillard parlant à une jolie
femme. Quoy qu'il en soit je ne diray pas cela a Victor,
quoique je ne le luy nieray pas non plus, mais je suis
charmé de luy voir un bon cœur parce que c'est la racine
de tout bien. Il s'agira de l'élever ce cœur, de luy dire que
je luy laisseray une tâche à remplir pour ne pas déchoir,
qu'il faut qu'il mérite ma grand croix qui est peut-être le
plus beau titre qu'il puisse perpétuer dans maison, attendu
l'objet de l'ordre en soy et de l'exception qui me l'a donnée :
il faut enfin l'occuper de bonne heure d'objets qui élèvent
l'âme et abaissent l'orgueil qui n'est lui-même qu'une eva-
poration d'un esprit vuide et vague qui exigeroit tout préci-
sément parce qu'il n'ambitionne rien, le travail au contraire
est une excellente sauvegarde pour la vertu, un préservatif
journalier contre les fumées de l'amour propre débile ; mais
il faut qu'il ait un objet. On ne scauroit croire où peut aller
l'homme à qui l'on donne de bonne heure un objet un point
de vue solide et qui lui plait ; et qui s'y tient constamment.
Quand k, moy je me défends de l'idée de cet enfant comme
je me defifendrois de devenir amoureux à mon âge ; et avec
cela je suis tout rajeuny quand on m'en parle, et je me
surprends souvent prêt à voir couler une larme chaude en
pensant à lui.
Adieu ma chère fille votre sœur du Saillant m'a parlé de
votre lettre et de son objet; je luy ay dit que j'avois répondu.
Adieu ma chère fille, conservés votre santé, votre enfant et
tout est cher et souvenir de moy qui vous aime et honore
tendrement.
Mirabeau.
Nous avons jugé à propos de publier ces premiers
autographes qui serviront en quelque sorte de préam-
— 232 —
bule au dossier du procès en séparation du comte de
Mirabeau avec M"*' de Marignane.
Mirabeau se rattache à notre Limousin par sa sœur
qui avait épousé M. de Lasteyrie du Saillant de Com-
born. Elle était la grand'mère de notre compatriote
M. Robert de Lasteyrie, professeur à l'Ecole des
Chartes^ membre de l'Institut.
J. ESPÉRET,
Docteur en Droit.
TITRES & DOCUMENTS
Abbaye d'Uzepche
Nous avons pensé qu'il serait intéressant de pu-
blier un docnmeat faisant connaître les revenus de
labbaye d^Uzerche de 1737 à 1745,
LIEVE DES REVENUS DE l'aBBAYE D'USERCHE DEPUIS 1737
JUSQUES ET COMPRIS 1745
C'eêt la liève des Rentes et autre» revenus Dûs
au menbre appelle le menbre de l'abbatiale, dé^
pendant et faisant partie de V abbaye d'Userchet
non compris les tenements de rentes unis à la
prévôté de Vitract et qui dêpendoient cy devant
dud. menbre de labbatialy
Sç avoir en rentes :
Seigle sept cent soixante quatorze sestiers.
Froment deux cent trente neuf setiers.
Avoine quatre cent soixante deux setiers.
Argent cent cinq livres quatre sols.
Journaux quatre vingt cinq.
Gèlines cent trente.
Taille vicomtalle.
Anguilles vingt.
Cire trois livres.
Les dîmes en grains par communes années affermées de
liuit cent à huit cent cinquante setiers de seigle.
— 234 —
Les Petites Dimes ou amassures affermées par communes
années deux cent cinquante livres.
Les Prés affermés par communes années de cent trente à
cent quarante livres.
Le four de pied Chammars payé annuellement cent sols
et deux chapons.
Le four du pont payé annuellement trois livres.
Plus est dû et ce paye annuellement aud. menbre de
labbatiale le droit de chasse qui est d'une charge de vin
par chaque hobergiste, cabaretier ou tavernier et qui est
pour chacun deux une charge de vin à chaque jour de
dimanche de quasimodo.
Plus est dû et se paye annuellement aud. membre de
Tabbatiale vingt deux charges de vin par plusieurs prévôts
et prieurs commendataires.
Sçavoir :
Par M. le prévôt De S* Salvadour quatre charges.
M. le prévôt de S' Ybars quatre charges.
M. le prévôt de Champsat quatre charges.
M. le prieur de S' Angel quatre charges.
M. le prieur de Margoutière trois charges.
M. le prieur de S' Viance trois charges.
M. le prieur de Condat trente deux setiers de vin.
C'est la Liève détaillée des rentes dues au menbre de
l'abbatial d'Userche sans y comprendre les tenements de
ce même menbre qui sont unis au menbre de Vitract.
Sçavoir :
Chammards par" de notre dame d'Userche.
Froment quatre setiers.
Seigle vingt quatre sestiers.
Avoine douze setiers.
Argent deux livres.
Gélines trois.
Journaux trois.
Laquelle rente a été payée par M* Gabriel Clédat, le
— 235 —
s' Bleynie, le s' Samuel Grivel, la veuve du s' Clédat, An-
toine Bos, Léonard Batier, les héritiers du feu s' Jean
Parrical des Ghammards, le s' Antoine Touzat, les héritiers
de Léonard Monds, Jean ReyroUe dit Boulot, le nommé
Pierre Durant dit Quercy; le total de lad. rente due soli-
dairement par tous les tenantiers.
Las Bordas, paroisse Notre-Dame d'Userche, rente
solidaire.
Froment cinq sestîers.
Seigle quinze sestiers.
Avoine quatre sestiers.
Argent quarante sols.
Gèlines deux.
Journaux deux.
Laquelle rente a été payée par M. Guyon Des bordes,
lequel doit l'entière rente.
La Belletts Lavai et Puychouries, rente solidaire.
Froment un sestier.
Seigle trente six setiers.
Avoine quinze sestiers.
Argent deux livres.
Gélines deux.
Journaux deux.
Laquelle rente a été payée par le s' Jean Nebout arpen-
teur, les héritiers du feu s' Léonard Peyroudie, Estienne
Benoist, le nommé Boueyssinet, M« Gabriel Clédat proC du
roy, dem^"* Antoinette de Personne veuve, le s* Héhe Delort,
le 9' Guilhen de Confolent, les héritiers du feu. s' Pierre
Goudrias médecin, M. François Laforge de Fargeas, le s' An-
toine Combet de las Bordas, les héritiers du feu s' Henry
Victor de Cha vaille.
Bourzaguety paroisse de Saint-Nicolas d'Userche,
rente solidaire.
Froment cinq sesliers.
— ne —
Seigle quinze seliers.
Avoine cinq setiers.
Argent deux livres.
Gélines deux.
Journaux deux.
Laquelle rente a été payée par (ïem"« Antoinette de Per-
sonne veuve du s^ Nayne, M. François Laforge de Fargeas,
lieulenant général de police,
Bourjraf, paroisse Saint-NicoUn d'Userche, rente solidaire.
Froment onze setiers.
Seigle quatorze setiers.
Avoine seize setiers.
Argent sii livres*
Gélines six.
Journaux trois.
Laquelle rente a été payée par M. François Laforge de
Fargeas, M, Charles Pradel de Lamaze lieutenant général,
les héritiers du s^ Couchengeas chirurgien, les héritiers du
s^ Léonard Peyroudie, les héritiers du s' Gabriel Clédat de
Charliaguetj Pierre Boonel, Pierre Macary, Gabriel Champ-
siaux, te nommé Bourzacar, le meunier d*Anglards, dem"* An-
toinette de Personne veuve.
Las Bordas Cangouillê, paraisse Notre-Dame d'Userche,
rente solidaire.
Seigle dix neuf sestierSi
Argent dix sols.
Laquelle a été payée par le s' Jean Nebout, les héritiers
du s' Léonard Peyroudie» le s' Gabriel Clédat procureur
du roy, le s^ François Laforge de Fargeas, le s' Antoine
Combet de Lasbordas» Léonard Boussal, les héritiers de
M, Victor de Chavaille,
Rûupeyroux, paroisse de Saint-Nicolas d'Userche,
rente sofidaire.
Seigle un setier.
- m —
Laquelle rente a été payée par le 3^ Gabriel Glédat, pro-
cureur du roy, lequel doit toute lad. rente.
La Borie'BUnche, paroisse de Noire-Dame d'Uzerche,
renie solidaire.
Seigle sept se tiers.
Avoine sept setiers.
Argent une livre.
Gélines deux.
Journaux un-
Laquelle rente a été payée par le s' Gabriel Glédat» procu-
reur du roy, le s' Jean Nebout arpenteur.
Puygrolier^ paroisse de Savit-Nieola$ d*Userche,
renie solidaire.
Froment trois éniines.
Seigle trois émines.
Avoine six ras.
Laquelle rente a été payée par le s"" Estienne Reyx, lequel
doit toute lad. rente.
Le Masgoutier^ paroisse de Saint-Yb&rs, rente solidaire.
Froment trois setiers.
Laquelle rente a été payée par le s^ Besse^ conseiller,
lequel doit toute lad. rente*
Le Moulin de Sauvageat, paroisse de Saint^Nicolas
d'Vserche.
Froment douze ses tiers six coupes.
Seigle vingt sesliers.
Laquelle rente a été payée par les sindics de rhôpilal
d'Uierche.
Le Moulin Rogier, paroisse de Noire-Dame d'Userche.
Seigle douze seliers.
Laquelle rente a été payée par M. Gabriel Glédat, procu-
reur du rov.
— 238 —
Fuï/boucou, paroisse de Suinte-Eulàlie d'Userche,
renie solidaire.
Seigle quatre seliers.
Laquelle rente a été payée par les héritiers de feu s' Pon-
tieTi avocaL
Choulengeas, paroisse de Notre-Dame d'Userche,
rente solidaire.
Froment huit setiers*
Seigle vingt sept se tiers.
Avoine quinze setiers.
Argent quatre livres*
Gélines douze.
Journaux six.
Laquelle reute a été payée par Pierre Saignes, Mad"* de
Vayne, le s^ Delort bourgeoix, Jean Choulengeas, le s' Com-
bet las Bordas, Pierre Choulengeas, le nommé Guynouty,
le s' Pierre Pontier, bourgeoix, et M. de la Mothe.
Pieux, paroisse de Sainte-Eulalie, et la Renoufie, paroisse
de Ssiint-Nicolas d'Usûrche, rente solidaire.
Froment quatre setiers.
Seigle dix neulsetiers.
Avoine hait setierë.
Argent une livre.
Gélines deux.
Journaux deux.
Laquelle rente a été payée par Jean Goudrias, mazelier,
Pierre Cbastanet» s^ Hélie Delort, le s' Gautier médecin,
Pierre Rogier, Jean Juge marchand, Mathieu Bonhillion,
Pierre Belot sergent.
La Rue C/iassami, paroisse de Sainte-Eulalie d'Userche,
renie solidaire.
Froment deux sestiers.
Seigle deui sestiers.
Avoine dix émiaaux.
^ 239 —
Argent dix sols.
Gèlines deujc,
JourDaux deux.
Laquelle renie a été payée par le s^ Pierre Besse» de
Lubersat.
La Chapelotte, paroisse de Sainte-Eulaiit d'Userche^
renie solidaire.
Froment six coupes.
Seigle trois seliers six coupes.
Avoine cinq ëminaux.
Argent quatorze sols.
Anguilles six,
I^aquelle renie a été payée par le s' Pierre Besse, de
^diiet-sat.
'îfc^-
''Va
'£ et Jacouiet, paroisse de S^inie-Eulalie d'UsercliBi
rente solidaire.
^ ïnent deux setiers.
ï uelle rente a été payée par par le s^ Teyxier, des
• Vergnias de Fargeas, paroisse de Sainia-Eulalie
d't/serche, rente s&olidaire,
^KTient deux sestiers.
t ^elle renie a Hé payée par led. s' Teyxier des Farges,
^^— ûjnbe Rose^ paroisse de Sainte -Eulalie d^Userche,
renie solidaire.
&^i ^le une èmine*
^^*5 uelle rente a été payée par led, s^ Teyxier, des Farges.
I.^ Clia^ip /^a Roche, paroisse de Sainte- Eulalie d'Userche,
rente solidaire.
froment quatre setiers.
Seigle dix huit se tiers.
Avoine sept betiers,
T XXX. S - S
- 240 —
Argent vingt sois.
GéUnes quatre.
Journaux trois.
Taille vicomtalle six sols.
Laquelle rente a été payée par le s' Estienne Rey, M. le
vicaire de Vitract, les héritiers du s' Chouchengeas chirur-
gien, les héritiers du s' Derse, le s' Antoine Lagrave, Pey-
rounevilîe, Léonard Boussac, Jean Chapot, le nommé Lam-
birèSp le s' Pierre Gautier médecin.
Sadarna^ pa^roisse de Saint- Y6ars, rente solidaire.
Froment douze setiers.
Seigle quarante trois setiers.
Avoine vingt cinq setiers.
Argent cinq livres dix sols.
Gëlines huit.
Journaux quatre.
Cire une livre.
Laquelle reJiie a été payée par M" Jean Dalesme de Ri-
goulesne, le seigneur Descars, M* Pierre Maret avocat,
M* Pierre Besse conseiller, Marie Baleix, François Juge,
Pierre Bouchiat, Léonard Bourdarias, le s' Pierre Parrical,
Jean Lafon dit Taîou, Annet Borde, Jean Babinodie, Char-
les LaleUj Grepin Malevialle, Martial Bouchiat, Pierre Pru-
neau, Estienne Lacroix, Peyvalette, Guilhen Chabel, Guil-
haume Chassaini, Pierre Baleix, la nommée Peterassonne,
le s' Lagrave Laisné, Le Saligner.
Za Borde ru rey et Neuvialle, paroisse de Sainte-Eulalie
tVUserche^ rente solidaire. Mesure de Masseret.
Froment trois setiers.
8eigle vingt un setiers.
Avoine vingt setiers.
Argent ou taille vicomtalle quarante-deux sols.
Gélines quatre.
Journaux trois.
Laquelle rente a été payée par Pierre Borde dit Chou-
- 241 -
massou, le s' Pierre Besse de la Borde, Pierre Borde, Jean
Bellette, Jean Soulet dit le Minou, le s' Pierre Besse de
Lubersat, Bernard Borfle aveugle, François Juge cordon-
nier, Jean Bellette, Antoine Dûment.
La BessB Peyrat, paroisse de Sainte-Eulalie d'Userche^
rente solidaire,
Froment huit setters.
Seigle quarante un setiers»
Avoine vingt un se tiers*
Argent quatre livres six sols.
Taille vicomtalle treiz^e sols.
Gélines six.
Journaux cinq.
Laquelle rente a Ht payée par Halem Besse dit le Galant,
le s^ Jean Gautier, le s'' Martial Besse du Peyrat, le s"^ Joseph
Besse procureur ^ Antoine Coulombet, Catherine Dersse, le
nommé Jantillioux,
Ch&mbouXf paroisse de Sainte*Eulâlie d'Userche^
rente solidaire.
Froment huit seliers.
Seigle quarante setiers.
Avoine douze se tiers.
Argent cinquante-six sols.
Géliaes quatre.
Journaux quatre»
Laquelle rente a été payée par le s' Teyxier des Farges, le
s' Bleynie, Etienne Monteil, le s"^ Lagrave, Antoine Cou-
lombetf Pierre Fourie, Léonard Crouchet, Clément Chas-
lanet, Pierre Chaslanet, Jean Charbonnel dit Lorange ,
François Veillaud, le s' Richard Delort, Pierre Charliat,
Pierre Nontron, Jeanne Leignat, Guiîhen Veysscix, M. le
marquis du Verdier, François Bonnel, M. Bru net, Robert
Fayolle-
L&vâlladet paroisse de Saint Ybars, rente solidaire.
Fromentj un selier six coupes.
L
— «42 —
i
i
I
Seigle huit setîers.
Avoine deux setiers.
Argent vingl*qualre sols.
Gélînês deux.
Jouroauî deux.
Laquelle rente a été payée par Pierre Terasse, Martial
Oaude, Jean Bouchiat, M. Lavai, Pey Borde, Martial La-
TTiarche, le s' Cbameyrat, Estîenae Ducay, Pierre Surget,
Mariotte Vallade, Estienne Borde, Martial Brachet, Léonard
Marrigne.
MoussouXt paroisse de Sainie-Eutatie d'Userche,
rente solidaire.
Froment vingt seiiers.
Seigle vingt-deux setiers.
Avoine vingt selîers.
Argent quatre livres.
Oeline six.
Journaux deux.
Cire une livre.
Taille vicomplalle treize sois*
Laquelle rente a élé payée par le s' Pierre Chaput, Pierre
Ghastanet, Jean Cronchet, le s' Bleynie, Debonchat, Jean
Juste, Jean Guindre, Pierre Lagrave, le s' Dersse, le s' An-
toine Lagrave, m* Pierre Besse conseiller, le s' Lagrave
laine, les héritiers de la Tronche t, Robert FayoUe.
La Goumendie, paroisse de Sàinte^Eulalie d'UJierche,
rente solidaire.
Froment cinq setiers.
Seigle vingt-sept seiiers*
Avoine dix setiers.
Argent cinquante sola.
Geiines quatre.
Journaux deux.
Laquelle rente a été payée par le s'Teyxier des Farges,
Antoine Coulombet, les héritiers du s' Pontier avocat, les
— 243 —
héritiers de Fougcrias, Jean Pieytille barîcoutier, le s"^ An*
toine Bleynie bote, le s"^ Bleynie de Bouchât, le s^ Lagrave,
Jean Chassai ng dit Léger, les héritiers du s' Bordes, Léonard
Bourzat. Catherine Dersse, M. le curé de S*» Eulalîe, le s'
Delort.
* Faucon, psiroisse de Notre-Dame d'Uzerchê^
rente solida^ire.
Seigle dii setiers.
Argent dix sols.
Laquelle rente a été payée par le s" Bru ne t.
Le Moulin et Coniour d'Espartignac^ rente solidaire.
Froment deux setiers.
Seigle dix setiers.
Argent dix sols.
Laquelle rente a été payée par les héritiers du s' Che-
naîlle d'Uzerche.
La TeT^asse, paroi&se de S^loUt rente solidaire.
Froment deux setiers.
Seigle cinq setiers.
Avoine sept setiers.
Argent trente un sols un denier.
Geliues deux.
Laquelle rente a été payée par Antoine Arnaud^ George
Bayard^ Léonard Mouri, et Jean Bourdet.
Chameyratj paroisse de Salon , rente solidaire.
Mesure de Masseret.
Froment trois setiers.
Seigle treize setiers.
Avoine sept setiers.
Argent deux livres.
Laquelle rente a été payée par Jean Batizou, Biaise
Moury, Gabriel Coste, Martial Daude, JeanChoussade, Léo-
nard Sadarnat, Neymard Bertrand, le s' Laval, Pey Borde ,
- 244 -
Jean Renaudie, Léonard Fayolle, Pierre Brachet, le s' Vi-
cière, Thony Jalibon. Antoine Gorsse.
Le Mas su Peuah, paroisse de Sa/on, rente solidaire.
Froment deux setiers.
Seigle deux setiers.
Avoine deux seliers.
Argent quatorze sois.
Gélîne une.
Laquelle rente a été payée par Estienne Gorsse, François
Besse, Léonard Sirieyi, Estienne , Léonard Beys-
sac, Ânnet Manlegoux, Jacques Pignolet, Pierre Bachelerie,
Thony PignoIeL, Madem"* Fougieras, M. le marquis de la
Capelle.
Senriâdiras^ paroisse de Saint-Ybars, rente solidaire.
Seigle six se tiers.
Avoine trois setîers.
Argent quatre sols.
Laquelle rente a été payée par le s' Gabriel Besse du
Pouget,
Le Pouget, paroisse de Condatt rente solidaire.
Froment quatre setiers.
Seigle quarante six setiers.
Avoine cinquante setiers.
Argent quatre livres dix sols.
Taille vicomptalle huit sols.
Gelines six.
Journaux trois»
Laquelle rente a été payée par le s' Gabriel Besse du Pou-
get, Léonard Farge. Antoine Langelie, Jean Goudrias, Jean
FayoUe, le s^ Dersse, M. le marquis du Verdier, Antoine
Juge, le s'^ Jean Gautier, Antoinette Ferrier, le s' Martial
Besse du Peyrat, Majie Bourzat, Jeanne Dumond, Annet
Mantigoux, le nommé Matane, le nommé Jeantillou, le s*"
Combet, Pierre Besse dit le Galant, la veuve de Cranqualiou,
Jean Gondrias fîb, et le s' Besse procureur d'offices.
— 245 —
Le Chadail, paroisse de Conda,t, rente solidRire.
Froment vingt trois seliers.
Seigle vingt cinq seliers.
Avoine quarante sept setiers.
Argent dou7,e livres neuf sols*
Gelioes neuf.
Journaux trois.
Laquelle rente a été payée par s^ Gabriel Charpenet, Ber-
nard Valleton, François Renard^ Jean Nonlron. Bernard
Renard, Pierre Jouchère, Pierre Baudinet, Gabriel Bourzat,
Jean Merigot, Jeanne BoSt Jean de Veuyx, Pierre Bachele-
rie, Jean Goudrias dit Joannès, Sébastien Pignolet, le s'
Gabriel Besse du Pouget , Bernard Vallelon, Sebastien
Brousse, Jean Renard, Etienne Borde.
Vernéjoiix et la Rue, paroisse de Condat, renie solidaire-
Froment deux setiers.
Seigle quatre setiers.
Avoine dix setiers.
Argent dix sols*
Gelines oincj.
Journaux quatre.
Laquelle rente a été payée parles Lascauxet ses métayers.
La Peytourie, paroisse de Condat, rente solidaire.
Froment huit setiers.
Seigle dix setiers.
Avoine douie setiers.
Argent deux livres.
Laquelle rente a été payée par le s' Richard Delort, le s'
Martial Besse du Peyrat, Antoine Coulombel, M. le marquis
du Verdier, les héritiers de M, Che vaille*
Miel, paroisse de Condat ^ renie solidaire.
Froment cinq setiers.
Seigle dix setiers.
Avoine cinq setiers.
246
Argent cinq livres dix sols.
Gelines trois.
Journaux deux.
Laquelle renie a éit payée par le s' Pradel de La vaux,
Gabriel Buge, Joseph Coudert, Antoine Gorsse, Thomas
Hilaire, Estienne Borie, Gabriel Marguinal, Léonard Mage,
Martial Guyot, Gabriel Lavaud, Pierre Mazalaigue.
Philix^ pitroisse d'Eyburie, rente solidaire.
Fromenl cinq setiers.
Seigle vingt cinq setiers.
Avoine cent ras.
Argent quatre livres,
Gelines quatre.
Laquelle rente a été payée par le s* Teyxier des Farges,
les héritiers du s"" Chousengeas, les héritiers de Pierre
Cha&tanet^ la veuve de Gabriel Dessus, les héritiers de
Mad*" Rdfaillat, Lt^onard Dumont, Antoine Coulombet, Jean
Gronchet, LéonarJ Monieil, Léonard Pradaleix, Jeanne Ma-
dère, M, Personne de la Farge, Etienne Monteil, Antoine
Marguinal, Pierre Fourie, M. Touzat, M* Pierre Besse con-
seiller, Jeao Borde, Pierre Charliat, le s' Bleynie, Léonarde
Anglard, M. Brunetn François Veillaud, Jean Charbonnel,
Clément Chastanel, Victoire Soudrie, François Bonnel, Jean
Nontron,
Le Puy de Quinquelounye, paroisse d'Eyburie,
rente solidaire.
Avoine vingt cinq ras.
Argent deux sols six deniers.
Laquelle rente a été payée par le s' Bleynie.
C/iaîeix, paroisse d'Eyburie, rente solidaire.
Froment deux setiers.
Seigle sei^e setiers.
Avoine trois setiers.
Argent deux sols six deniers.
Laquelle rente a été payée par Antoine Pradaux, Pierre
— m —
Dumas, Eslienne Borie, Antoine Marguinal, Martial Guyot,
la veuve de Barthélémy Dufour, Jean Pouget. Gabriel Plan-
UdiSi le s' Estienne Jarrige, Jean Lagrange, le &' Pierre
Perinne de la Farge, Pierre Lornat, Antoine Marguinal,
Jean Jarrige, les héritiers de Mad^^* Raf aillât, Pierre Breta-
gniolle, le s' Antoine Touiat, Barthélémy Jarrige. M.
Teyiier Desfarges, Jean Crouchet, Léonard Monteih
Le Coudert, paroisse d'Eijburie, renie solida.ire.
Froment trois se tiers-
Seigle siï setiers.
Avoine quarante ras.
Argent ou taille quinze sols.
Gelines quatre.
Journaux deux.
Laquelle rente a été payée par Mathieu Bardi, Antoine
Pradaux, le nommé Buge, Pierre Dumas, Antoine Gorse,
Estienne Borie^ le nommé Vaysse, Antoine Marguinal, Mar-
tial Guyot, Thomas Doumeyron, Jean Condachou, Mad^^*
David, Martial Guyot, le s' Pierre Personne de la Farge»
Gabriel Condachou, Joseph Coudert^ Gabriel Marguioal,
Jean Queyrat,
Le CheyrôUy paroisse d'EyburiBt rente solidaire-
Froment quatre se tiers.
Seigle huit setiers.
Avoine quatre se tiers.
Argent cinq sols,
Gelines deux.
Journaux deux.
Laquelle rente a été payée par Léonard Fourie* Jean Jar-
rigei le s' Estienne Jarrige, le s^ Pierre Personne de la
Farge, François Chassaigne, M. Régis, François Brousse,
Antoine Vaysse, Léonard Maze, le s' Dupuy, Jean Balodie,
La Mazière, paroisse Deyburie, rente solidaire.
Seigle trois sestiers.
L
— 248 —
Argent une livre.
Avoine trente ras.
Laquelle rente a été payée par Léonard Bureau, Jean Jar-
rige, Jean Vernéjoux, Gabriel Pradaux, M. de Vernéjoux,
Joseph Maziére, le s'Dupuy, Jean Mazière, Thomas Bardi,
Ghamboux.
La Jarrige, paroisse d'Eyburie, rente solidaire.
Froment quatre setiers.
Seigle dix setiers.
Avoine dix setiers.
Gelines deux.
Journaux deux.
Argent cinquante sols.
Laquelle rente a été payée par le s' Pierre Personne de la
Farge, le nommé Veyriras, Jean Jarrige, le s' Estienne Jar-
rige, Barthélémy Jarrige.
Le Chamboux, paroisse Deyburie, rente solidaire.
Froment cinq setiers.
Seigle huit setiers.
Avoine vingt cinq ras.
Argent vingt sept sols.
Gelines deux.
Journaux deux.
Taille cinq sols.
Anguilles vingt.
Laquelle rente a été payée par le s' Pierre Personne de
la Farge.
Le Bourgt d' Espar tignac, rente solidaire.
Froment treize setiers six coupes.
Seigle dix huit setiers.
Avoine quinze setiers.
Argent sept livres quatre sols.
Gelines six.
Journaux six.
-^ ^ : ^
— 249 -
Laquelle vente a été payée par Jean Brousse dit Bigou,
Gabriel David, le s' Chammars, Antoine Desaguillier, Mad"»
Dersse, Léonard Bouchiat, Jean Brousse^ Etiene Brela-
gnoUe, M* Gabriel Clédat procur^ du roy» les héritiers de M'
Léonard Peyroudie, Gabriel Courbeix, Antoine Lofficial,
Jean Fageardie, le s' Chammars de Chammards, Antoine
Mourie, le s' Lafarge de Puyroger, Guillaume Venléjoui,
Jean Brousse, le nommé Perillou.
Surget, paroisse d'EspartignaCt rente solidaire.
Froment dix setiers.
Seigle trente six setiers.
Avoine dix setiers.
Argent quatre livres dix sols.
Gelines neuf.
Journaux trois.
Cire une livre.
Laquelle rente a été payée par Jean Bouillaguet, M. La-
farge médecin, Laurens Chouzas, le s^ Bleynie, Pierre Rey-
rolle, dem"« Anna Besse, Jean Fageardie,
Vialeneuve et Gumonti paroisse d'Esparligiiao^
rente solidaire.
Froment quatorze setiers neuf coupes.
Seigle vingt sept setiers.
Avoine cent cinq ras.
Argent quatre livres douze sols.
Gelines quatre.
Journaux sept.
Laquelle rente a été payée par M. Reymond de Lagarde,
les héritiers du s' Chabessier, Antoine Brousse, le s' Gour-
saud, Jean Simond, Pierre Fajardie» Jean Pajardie, Jean
Brousse dit Bigou, Jean Brousse^ M. Clédat procur^ du roy^
Jean Chapol, Martial Boyer et Léonard Besse.
#
Puymaret et Fage, paroisses d'Espartignac^
rente solidaire.
Froment quatre setiers.
I
il
— 250 ^
Seigle six setiers*
Argent vingt sols.
Laquelle renie a été payée par Jeanne Dersse veuve, Jean
Fajardie dit le Grand, M ad'" de Nayne, Jean Fajardie dit
Paliou, le s' Chammâr, le s' Reyrolle, Jean Mourie, M.
Châvaille, le s^ Chaput et Jeaû Lafon.
Le Ciaux Fage, paroisse de S^-Yh^rs, rente requénble.
Seigle dix huit seliers.
Avoine neuf setiers.
Argent trente sols,
Gelioe une.
Laquelle renie a été payée par François Montagnac,
François Real, Estienne Sardene, Catherine Sèrmadiras,
M. Combet, Jean Malevialle, François Poumier, autre Fran-
çûis Poumier, François Lacroix, Léonard Sardenne, le s'
Dupuy de la Grilière,
Le Cla.ux de Rogier, p&roisse de Voutezatt rente solidaire.
Celte rente consiste dans les dixmes et rentes en vin
dues au seigneur abbé Duserche sur led. tenement appelle
le Claux de Rogier, situé dans les appartenances du bourgt
de Voute^aL On ne peut dénommer ici tous les tenanciers
de ce mesme tenement, attandu que le sieur Pommepuy
dud. .Bourgt de Youtezal qui en est le principal tenancier
jouissait cy devant par conventions desd. dixmes et rente
en vin, et en payait de ferme par chacune année huit paires
de Deindons, celuy qui donnera le mémoire et état desd.
dixmes et rente en vin et les noms des débiteurs et tenan-
ciers.
Par devant Jean Besse not" royal de la ville Duserche
bas-limousin et témoins soussignés ; a été présente Dem"*
Dauphine Peyrichon veuve du feu M* Joseph Vergue not"
royal demeurante en lad. ville Duserche par se S' Nicolas et
cy devant tant led. feu s^ Vergne que lad. dem'* Peyrichon
sa veuve fermiers des Revenus du menbre appelle le menbre
de Tabbatiale dépendant de Tabbaie de cette ville Duserche
- 251 -
à rexception des teDemeots qui autres fois en dépendaient
et qui ont été unis depuis plusieurs années à la prévoté et
menbre de Vitrât dépendant de la mesme, depuis Tannée
mille sept cent trente sept jusques et compris Tannée der*
nière mille sept cent quarante cinq^ laquelle a certifié que
la Lièue cy dessus et des autres parla contenant onze feuil-
lets sur les quels est séparément détaillé les tenements des
rentes dixmes, prés et autres redevances dont elle et led, feu
s' son mary ont jouit comme fermiers, est sincère et vérita-
ble, sans préjudice à lad. Dera*' Vergue de se pourvoir pour
le payement des restes darrérages qui peuvent luy être Dus
dont elle nous a requis acte que nous luy avons octroyé
pour servir et valoir ce que de raison* Fait et passé en lad.
ville d'Userche le premier avril raille sept cent quarante
six avant midy en présence de s^ Jean Pasquet cavalier de
la Mareschaussé à la résidence Duserche et M* Pierre Juge
procur* en la jurisdiction ordinaire de cette ville lesmoins
demeurants en lad. ville qui ont signé avec lad* de m"* Pey-
richon.
Signé : D. Peyrichon, Pasquet, Jugr,
Bbssb, notaire royal.
Controllé à U^erche le premier avril 1746. Reçu douze
sols. — Clédat*
ijtïîà^SsÉà
LES NOMS DE NOS RIVIERES
L'origine et la signification des noms de rivières,
voilà une question d'érudition qui présente plus de
difficultés qu'on ne pourrait le supposer,
Avec tout le souci de la critique la plus rigoureuse,
M, Raoul de Félice, professeur agrégé d'histoire et
de géographie au lycée de Chartres, vient de publier
à ce sujet, dans une savante brochure (Paris, Cham-
pion^ 1907)j un certain nombre de données d'une
réelle valeur-
Il a réussi à déterminer l'origine des noms de ri-
vières appartenant soit à la période pré-celtique» ibé-
rique et ante-celtique (ligure), avec la colonisation
grecque, soit k la période romaine, médiévale et mo-
derne^ c'est-à-dire depuis les temps les plus reculés
jusqu'à nos jours.
Dans lenquète qu'il poursuit de cette façon, M* de
Félice rencontre un certain nombre de noms portés
par des cours d'eau du Limousin.
Et la particularité intéressante à noter, c*est que
plusieurs conservent le souvenir des Ligures dont no-
tre pays a dû être pour ainsi dire le centre.
L'auteur utilise d'aitleurs les travaux de nos émî-
nents compatriotes» MM* Maximin Deloche et Antoine
Thomas, qui lui servent de guides, comme ceux de
MM. Alexandre Bertrand, d'Arbois de Jubainville et
Auguste Longnon.
— 254 -
En relevant les articles qui concernent nos rivières
limousïneSj nous pourrons remarquer sa science et
sa méthode.
On sera petit-ètje étonné que la récolle ne soit pas
plus abondante, relativement au grand nombre de
ces cours d'eau ; mais la critique prudente n'a pas
permis de faire une plus ample moisson.
Et nous mêmes, nous n'essaierons pas à la tâche
facile des déductions, pour indiquer d'autres origines
ou d'autres significations. Il faut se défier des étymo-
logistes a-prioristes et bien connaître les formes
antérieures qu'avaient les termes soit en bas-latin,
soit en roman, pour les expliquer.
Voici donc l'onomastique qu'établit M. Raoul de
Félîce; nous nous permettrons seulement quelques
notes personnelles complémentaires pour la localisa-
tion et la vulgarisation de ces renseignements :
VAiœette. — La jolie rivière si poissonneuse, af-
fluent de la Vienne et qui passe à Aixe-sur-Vienne,
près Limoges, tire son nom à'Aquœ^ les eaux, avec
un diminutif; ce mot^ d'origine latine, désigne en-
core une autre localité : Aix-la-Marsalouse (Corrèze).
UArdouTj affluent de la Gartempe (Creuse et
Haute-Vienne). — Ce nom peut s'expliquer par le
terme celtique ardUj ardvOj « haut, élevé », ou
bien par Tadjectif latin arduuSy qui se rattache à la
même racine, alors qu'il semblerait à première vue
composé de l'article armoricain ar et du mot douVy
de dubrvm . Mais les auteurs du Dictionnaire
archéologique [verbis Ardèche, Ardrère, Ardour) font
— 255 —
remarquer que dans le centre de la Gaule le celtique
dour est devenu dor et doive.
VAurancey — aux rives si intéressantes, près de
Chaptelat (Haute- Vienne) : — son nom semble venir
de aureusy à cause de ses anciennes sablières exploi-
tées par les tamiseurs d'or ; il vient en réalité d'une
origine ligure ; il est apparenté avec Alzou, nom d'un
affluent de TOuysse (Lot).
UAuvézèrey qui passe à Ségur (Corrèze), avant de
se réunir à Tlsle (Dordogne), et qu'on appelle parfois
à tort V Haute- VézèrCy porte un nom qui pourrait
résulter de la combinaison du mot Vézère avec A7%
particule intensive de la langue celtique. Elle est ap-
pelée Flumen Alvesera en 1185 {Dict. topographù
que du département de la Dordogne).
LAuzellej affluent de la Roselie (Haûte-Vienjie),
UAuzettey affluent de la Vienne (même département)^
et la Roselie^ elle-même, ont des noms qui peuvent
être dérivés à^AlisOj aune, en ligure et en germa-
nique, thème qui se retrouverait dans Aurance^ ainsi
que dans les noms de localités Auxances (Creuse),
Auziat et Auzillac (Haute- Vienne).
Le Cher y qui est creusois par sa source et son cours
supérieur, appelé Carus au Moyen-Age^ proviendrait
d'un mot à la fois celtique et ligure, kar^ signifiant
rocher j écueil ; — cherous ou cheirouSy veut dire en
limousin : tas de cailloux.
La Creuse^ affluent de la Vienne, est appelée
Crosa dans la Chronique de V Anonyme de Ra-
venue ; il semble que ce nom ait la même origine
T. XXX. 2-9
— 256 —
que notre adjectif creux, dont on ignore la véritable
étymologie.
L'étymologie carrosum^ creux, est inadmissible^
d'après iVL Antoine Thomas.
La Dordogne^ qui traverse une partie du départe-
ment de la Gonèze, est formée, comme chacun sait,
de la Dore et de la Dogne ; elle a cependant porté
les formes anciennes de Duranius et de Domonia,
composées de dui\ eau, ou doUj source, et annouUy
profond, diaprés Bullet.
Il semblerait alors plus vraisemblable que les géo-
graphes aient coupé le nom de Dordogne pour appli-
quer chacune de ses parties à Tune et à Tautre des
deux sources*
La DouXj que des ignorants orthographient VAdotujCf
désigne une jolie petite rivière de Saint-Cernin-de-
Larche (Gorrèze), alimentant la ville de Brive ; c'est le
nom celtique d'une source qui fut autrefois divinisée.
Nous retrouvons ce nom dans la Dordogne et dans
le Lot ; c'est d'ailleurs un terme générique désignant
les sources dans Tidiome limousin marchois.
Il correspond à celui de Dhuis, dans le Nord.
La Dromie, chantée par le poète Edouard Michaud,
naît dans le département de la Haute-Vienne et coule
dans celui de la Dordogne, à travers le Nontronnais
limousin, pour se jeter dans Tlsle. Elle fut dénommée
Druna^ comme d'ailleurs la Drôme, affluent du
Rhùne, par Papire Masson ; ce terme viendrait d'une
racine indo-earopéerine pré-celtique, rf?n^, qui signi-
fie couler^ courir. Le Drot (Dordogne), autre affluent
de risle^ aurait même origine et même signification.
La GlanSf désigne dans notre région : un ruisseau
près de Guéret (affluent de la Creuse) ; un second près
de Saint-Junien (Haute- Vienne), affluent de la Vienne ;
un troisième, affluent de Tlsle (Dordogne); un qua-
trième, celui de Saint-Privat, affluent de la Maronne,
et un cinquième, celui de Glény, affluent de la Dor-
dogne (Gorrèze). Glane^ en celtique, équivaut à pura,
pure^ limpide.
Ulssoircy affluent de la Vienne (Haute Vienne), a
pu emprunter son nom à une forteresse naturelle ou
artificielle, Tancienne Iccio-Durus, forteresse d'Ic-
cius. a Le torrent arrive à la Vienne, dit Cantillon
de Trament, après avoir^ dans une tranchée colos-
sale, séparé en deux murs à pic les rochers graniti-
ques qui bordent cette rivière, sur la trouée du Sud
se dressent les ruines du château-fort du xv' siècle ».
Il ne faut pas faire un grand elîort d'imagination pour
supposer que ce château du xv' siècle a pu en rem-
placer un autre plus ancien, ou que ces rochers à
pic ont frappé Tesprit populaire qui a pu en faire
« la forteresse d'Iccius ».
La Ligourej affluent de la Brîance (Haute- Vienne),
Liguria ou Ligora, au Moyen-Age, comme le ha-
meau de Ligoure, commune du Vigen, Sainl-Priest-
Ligoure et Saint-Jean^Ligoure (département de la
Haute-Vienne), rappellent directement le nom des
Ligures, peuple qui habitait notre contrée avant les
Celtes et les Gaulois.
La Loyre^ soit celle d'Objat, affluent de laVézère,
soit celle de Malemort, affluent de la Gorrèze, con-
serve aussi le souvenir des Ligures comme le grand
— 258 —
fleuve la Loire, de Nantes, Tancien Ligery qui dérive-
rait, selon M. d'Arbois de Jubain ville, de la mênie
racine que le latin rigare^ arroser.
La Souvigney en limousin la Sumenay la jolie
rivière chantée par Joseph Roux, appelée aussi Su-
menna au Moyen-Age, est un affluent de la Dordo-
gne, qui se jette dans cette rivière à Argentat (Cor-
rèze); son nom provient aussi d'une racine ante-cel-
tique 8Uy indiquant le sens de source.
La Vézè7'e, — Visera aux ix* et x* siècles, — qui
traverse le département de la Corréze et celui de la
Dordogne : nom qui dérive de la racine vis, veiSj
qui veut dire couler.
Louis de Nussac.
^^^^tiii^^mî
r
TITRES ET DOCUMENTS
Le document que voici, et dont la Société a décidé
la publication au cours de sa séance du 7 mai 1908»
concerne i'hùtel de /a Labencke (plus tard le Petit-
Séminaire de Brive), alors habité par une demoiselle
de Puymaretz; il a été copié aux archives de THôtel'
de- Ville par M. Julien Lalande^ et cette copie a été
présentée au cours de la séance mentionnée ci-dessus
par le 1'' vice- président, M, Philibert Lalande.
EXTRAIT d'un PROGÈS-VERBAL DE LA PERMANENCE DU
CONSEIL GÉNÉRAL DE LA COMMUNE DE BRÏVE^ DATE
DU 29 AOUT 1792.
i*'h, M&lepeyre (de Corrèze], officier municipal ienant
la permanence-
a A dix heures du malin, la servante de M"' de Pny-
■ marets est venue avertir la municlpalilé qull se faisait
« chès Ja dite demoiselle un rassemblement de volontaires
■ nationaux du bataillon de la Corrèze» qui prétendaient
*r abattre divers ornements d'architecture attachés aux murs
« de la façade intérieure de la maison donnanl sur la cour,
■ quoique dans ces divers ornements il n'y ait aucunes
« armoiries, ny aucun qui ait rapport à la féodalité. Il a
t été fait une réquisition au commandant du dit bataillon
— V60 —
pour qu'il se transportât sur les lieux pour empêcher les
désordres et empêcher les dégâts.
a M. Lalande (Libéral-Martin), officier municipal, a pris
son écharpe; accompagné d'un sergent de ville, s'est
rendu chès la dite demoiselle de Puymarets et a rapporté
que le sieur premier capitaine de grenadiers du 2« ba-
taillon s'était transporté avec quatre fusiliers sur les lieux
et qu'il avait fait retirer les volontaires nationaux.
« A onze heures, la servante de M"« de Puymarets est
venue avertir la municipalité qu'il se faisait un nouveau
rassemblement dans la susdite maison. M. Marmande,
sergent commandant le poste établi à la maison commune
de la commune de Brive n<* 6, a été requis de s'y tran-
sporter avec le garde, d'arrêter les plus mutins et de les
conduire à la maison commune. Il a conduit le nommé
(nom illisible) de la commune de Brive qui a dit qu'ayant
été averti que leur capitaine avait été précédemment chès
la dite demoiselle de Puymarets pour empêcher les dégra-
dations projetées, il se retirait lorsqu'il a été rencontré
par la garde, ce qui a été confirmé au sieur Marmande
commandant le poste par le s' Yerlhac neveu de la dite
demoiselle de Puymarets. »
*-Tiiigih
AUTRES VÉNÉRABLES DOCUMENTS MONASTIQUES
SUR
TULLE ET ROCAMADOUR
ÉDITÉS AVEC NOTES
PAR
J.-B. OHAl^FEVA^I-i
I
ViDiMUS DU Livre-Terrier, appelé : Terarium Elemosinarï^
Sequuntur loci in quibus eleemosinarius Tutellensis ha-
bet decimam pro décima de Salhiaco et qua? ad eleemosina-
riam pertinent : (1)
In la teinguda aux Sabaux, medielatem dêcim^^ hoc est
in parochia Sancti démentis.
A Brudiou (2), la meytat de la dema en V. maSp eus pro-
ferens.
Tota la dema de jij (3) mas et de un champmas et de una
(1) Ces authentiques copies de pièces nous proviennent de Ja collec-
tion du chanoine Talin, par courtoise communicalion de son neveu>
M. Louis Talin. Des additions judiciaires, en interligne^ y ont redressé
les inattentions du copiste.
(2) Ce patois limousin, mêlé de latin, doit remonter vers 1300. Il est
précieux pour la linguistique et la topographie tuMoise-
Voici ceux des villages susnommés qu'on retrouve en la paroiîï^o de
Seilhac : Brudieu, 70 âmes ; La Vergne, 35 ; Ferrières, G4, où je place
le Chastang et la Blanche, par interprétation du texte, comme Le
Ponget dans Monjauze, l'ex-mas-Jauze, par l'intermédiaire maù. La*
fon est signalé partition de Brudieu en 1553.
(3)et(l) Traduisons : pro décima, pour tenir lieu de la dima de
Seilhac, Entendez au paragraphe IV, pris pour spécimen : raumônicr
T. XXX. 3 - 1
L
^ 36^ -
bordaria da La VergnîR, ens proferens, fors de la seigle
qu'Ji est la ineytat da Navas.
Tota la dénia del Mas al Bru (al Bric V) et del Msls Lafon,
el |>roferen£î, fors de la seigle quae est la meytat de Navas.
ToÈa la dema del mas del Chastans et del Mas la Blancha
et del mas /as Ferrieifras, el proferens, fors la seigle quae
est la meytaL d'à Navas,
La meytat de la dema del mas d'al Pougetj el proferens.
Tota la dema d'aus 4 mae d'à Bouieige?) et de la Borda-
rU,
Tota la dema en las Comhas de La Loubaria (1).
Tota la dema el Mas et e/ champmas d'à Colomis ; el pro-
fère qs.
Tota la dema d eujt doujt nias d'à Gottas,
Tota la dema d aiis 2 mas da. Chantamilia.
Tota ia dema d aus 2 mas da Freychmgeas et d'à las treis
bordarias.
Tota la dema deus doux Mas aux optes et de ia Gorssa,
Tota la dema del Mas CoBia.nii et del Mas Rotgier, fors le
quartier que est a L'ort de Chammars.
Tota la dema de Tayssionieijras.
Tota la dema del mas <i a S arasât, et deus dous la profe-
rens.
A Beuna, la meytat de la dema, el proferens.
Tota la deina del mas del Chastang.
a droit de dime ^n seul sur trois tnanses et un capmanse et un des
borde ragea, le tout ais dans le village de ia Vergne, y compris les profé-
vents (nadfînux traditioiuie]s en prémices), sauf la dîme du seigle qui
est dans le lot du moine prévôt de Naves, et quoique ces localités
soient eti l'enceinte parôiasialle de Seilhac.
(t] l.ea Combes, gros village ayant eu chapelle; Coularay, 29 hab. ;
Gouttes. 17; Gorse, 20, seigneurie: Constantin et Mas-Rougier, avec
l'HorL'de^Chamars. furent dans }*^a Fourches. Marsac, 13 hab., fief
ainsi que Meygia), 24. — Mouliii de Sabot (Seilhac), 1788 et an V.
Foujanet et 3'->fi voisin La Charnère. 90 çt 26 hab (Chamboulive).
Autres villages Seilhacois ; Berre. 79 hab., ex-repaire; la Valette,
haute et ba?5e, H hab-, d'où le mas soubre susdit. — La Resse sou-
brane et soutraue — Maguenr, aujourd'hui Seilhacois, 48 hab; Bus-
sières, actuellement de 5ainiUl(^ment, 80 habitants, avec son Mas-
Cbaulet.
k
/
; _ .26â —
h
)
Tota la dema deus .doux mas daJ Meygial (1).
Tota la dema da Lagorssa et da Marsac, el proferens.
A las Fourchas tota la dema eus quatre mas et en un
Chammas et in una Bordaria ; fors la meytat deus 2 mas
que est à L'ort de Chammars.
El mas d'à Fogeanet et de La Charrieyra, la meytat del
dème. Ayce es en la peroffia de Chambouliva.
En la Bordaria de Ruthmels (2), la meytat de la dema,
el proferens, e es en la parroffla de Saint JaL
D'à Serra, la meytat dei dème, e de tôt lo proferens.
A La Valeta, en V. mas e en V. bordarias, tôt lo dème,
el proferens.
A La Bessay en 2 mas, tôt lo dème, el proferens.
En treis mas damagor [d'à Magor], tôt lo dème ; el profe-
rens. Hoc est in parrochia Sancti démentis.
En la vialla d'à Sailhac, tôt lo deme, fors lo mas La BO"
ria.
El Mas Fagenc d'à Bussieyras, la quarta part del dème.
El Mas Chaulet, la meytat del deme.
El mas de Bussieyras^ 1/2 del deme.
A La Mauria, la dema, el proferens ; tota la dema, el pro-
ferens.
Sequitur lo proferens
^4 %jco es lo proferens d'à Salhiac, quod semper debetur
^l^^rmosinario Tutellensi :
>V Brudieu, quinque sextaria et eyminam frumenti et
qiii T^ que gallinas et miéga.
A^ Serra, 3 sext. et 1/2 et 3 gallinas et 1/2.
A. Maussanas, eyminam frumenti et miegam gallinam.
C *> Blonjauze soubre et soutre, 5t hab., est passé à Naves. SeiJhac
».^ï4oore La Mauric, 34 hab.; Le Mons, 76; Ventéjoux. fief, 58; Le
^*^^-3sou, 19. — Sérejtat, 20 hab., est de Saint- Salvadour, comme la
J^tit ^, 47 hab., castel. qui n'a jamais dû être en la paroisse de Seilhac.
^i ^umel et Sabaux durent être sur les confins Seilhacois.
P^*^ voit combien furent nombreuses les localités de Champmas,
^ *^^riiard), terme générique. Maurie=r obscurus et TeyFsonnières ac-
^"^^^^t terrain boisé.
- m -
A La VâletB, *3 sett. eyminam frum. et V galli. et 1/2.
A La Bouygea, 1 f^ext. from. et 1 gallin.
El Mas sabra. d\ la Valeta, débet 1 sext. frum. et 1 gallin.
A Las Forchas, 4 sext. eyminam frum. et 4 gallin. et 1/2.
Aij Meyrjial, 2 sext. frum. et 2 gallin.
Al ChasUn, 1 sext, frum. et 1 gallin.
El mas d'à Beuna, 1 sext. frum. et 1 gallin.
El mas d'à La Gors*sa, 1 sext. frum. et 1 gallin.
Al Mont, 3 sext. frum. et 3 galliiias.
A Serazaft 2 sext. frum. et 2 gallin.
A Teyssounietjrs.s, t sext. fr. et 1 gallin.
A Veniegot, 4 sext, fr. et 4 gallin.
A Ootas, 2 sext. h. et 2 gallin. '
A La Mauriky 2 sexL fr. et 2 gallin.
A Cùlomis, 2 sext. fr, eyminam et 2 gallin. et miega.
A BonnoQol, 3 sext. fr. et 3 gallin.
A Mas Jauze?% 1 sext. fr. et 1 gallina d'ei Poget.
Lhi Mazoia elh [ah?] Afar»ac, 1 sext. fr. et 1 gallina.
Al Rivasso, 2 sext. fr. et 2 gallinas.
A La Janla, 1 sexL, fr. et 1 gallin.
A La BesssL, 2 sext. fr. et 2 gallinas.
El mas d'al Teii, 1 sext. fr. et 1 gallina.
G, Margauho, eyminam fr. et 1/2 gallina pro La Riculia,
A Magors, 2 sext* fr. et 2 gallinas.
Lhi Rigals, 1 sext. fr. et 1 gallina del mas de Marsat juxta
La Gorssa,
De La Borddria d A Freyssingeas, eyminam fr. et 1/2
gallina.
P,[elrus] GoQtiers eymin. fr. et 1/2 gallina.
G. Liîdjugia eymin. fr. et 1/2 gallina d'ey Mas BocvemhiL
Verniax, 1 sext, fr, et 1 gallina, del mas d'à Lavernia.
Al MaigiaL t sext. fro. et 1 gall., qui est juxta Lauemia.
A La Vernia, 2 sext. fro. eyminam et 2 gallin. et 1/2.
EL Chammas d'à La Vernia, 1 sext. fro. et 1 gallina.
A La Brunia, 2 sext. fro. et 2 gallin.
Et in ta Bordaria d'à La Chapblia, eyminam fro. et 1/2
galUiia.
— 265 —
A Las Ferrieyras, 3 sext. fr. et 3 gai.
P.|etrus] Chautars, 1 sext. fr. et 1 gai. del Mas d'à Laver-
nia.
G. Sendos, 1 sext. fro. et 1 gai. per l'or Bouyssel d'à La
Valeta.
(sic) Summa proferentii, sexaginta octo sextaria
fruraenti cum eymina.
Et tôt gallinsB, videlicet 68 cum 1/2.
Item a Neufvic (I), sobre les forts, moulis, peatge, et so-
bre tots autres bés d'aquela cecta et jurisdictiou vint sols
tournois, chacun an et pot gatgar de sa propria auchoritat
l'almornier per tôt, ave son servent.
Fuit facta recognitio apud Capellam Lespinassa, per ma-
gistrum Joannem Sostre, procuratorem domini dicti loci de
NovovicOf anno millesimo trecentesimo nonagesimo primo.
Suit l'achat de dime de Seilhac, etc., par moi édité nu-
méro 620, mais qu'on date ici de 1267.
Puis vient ici : copia littera; de 12 marquas argenti situa-
tas super signalibus Rupis amatoris, avec même préambule
qu'au 620 de ma page 374 ; mais après : Chauzer d'à crossac,
le ms. Talin porte : 1° quem acquisivimus a Petro Coqui, et
duodecim sextarios siliginis et avenae quos acquisivimus a
Petro del Hur in manso del viga [des de Lur, près de Mon-
tintin (Haute-Vienne), plus tard seigneurs de Longua, etc.],
2* Après la 1/2 geline sur Sauzès, le passage relatif aux
maisons de la fagette, comme aux boucheries, est remplacé
par : et 1/2 gallinam et 12 marchas argenti, annui redditus,
quas acquisivimus a Guilielmo Darnesii (2) quondam pâtre
Pontii et Pétri Darnesii et ab ipsis filiis super signalibus
Rupis Amatoris, firmiter statuentes, etc., comme en ma page
375. Jusqu'à testimonium praesentes litteras sigillo nostro
(1) La cité de Neuvic-d'Ussel, ses fours^ etc , et il peut prendre
gage partout, saisir par sergent.
(2) Darnis, nom de deux villages es communes de Gramat, Loubres-
sac (Lot), plus Amis (Cahors). Virevialle, près l'Echalade et Maure.
— 266 —
fecimus consignai]. Dalum decimo quarto calendas februa-
rii, aiiDO Domini niillesimoducenlesirao septuagesimo primo.
Suit mon numéro 631, variantes : Tosat ; Geraudia; Gua-
ridû; ileni 3 sexlar. frum. ad bonam mensuram a Petro de
Veterivilla assignatos in bonis suis de Veterivilla, puis
Charabouliva ; Avalle.
Suit : mon numéro 632, auquel on ajoute, en titre : vica-
riread pra^sentationem Eleemosinarii ; et après eleemosina-
rius Tut. de ma page 392 : eraerat et acquisiverat de con-
sensu ipsius Geraldi ac conventus nostri Tutellensis eleemo-
sinariae nostni^ Tutellensis perpetuo duximus; avec date
de t'266.
Suit mon numéro 630. Après quoi je transcris l'acte sui-
vant^ quoique bifTè :
Nota quod die vigesiraa prima mensis augusti, anno do-
mini millesimo ijuadringentesimo nono, testibqs prœsenti-
bus : domino J^ïcobo de Materra(l), presbitero, Joanne de
Vallibus Inferioribus et Joanne de Ganhabé pro testibus, etc.
(èic) uxore de Vielbans, cum licentia et authoritate
viri sui, ut bières uoiversalis mediante persona
matris suée, recognovit se tenere in feodum, sub simplici
recoguitione et juramenlo fldelitatis, ab Eleemosinario Tu-
tellensi, quatuorJecim eyminalia avense quae habetde reditu
in mansû de La Borgada et 3 sext. siliginis et 1 sext. avenae,
ad parvam mensuram, in manso de La Clercia, etiam de
redditu, prout ibidem homines etiam tenentiarii dictorum
mansorum reeognoverunt ; et prœstitit juramentum fldelita-
tis magistro Geraldo prolunc eleemosinario tutellensi, ut
domino Ssincti Hylarii ; et dominus Joannes de (sic)
notarius regius (*2) r. (recepit) instrumentum.
Suit même texte qu'en mon numéro 176 : ici B. Argen, au
(1) Materrç, 30 hab. (Chanac), vaux-soubraqe et soutrane, indiqué
par acié de Î281 comnie étant du Saint-Hilaire-Foissac en cause, près
je Peuch-à la-Hoche- Ctagnebé, 20 hab. (Marcillac-Croisille), La Cler-
cie, aicurie, 38 hab., en la dite paroisse Saint-ililaire, comme la
Bourgeadc, haute ûi b^sse, 143 âmes. L'Echalade (Tulle Saint-Julien),
est devenue La Salade, 18 hab.
(3) 8oystre, semble-t-il.
- ?67 -
lieu de Augerii ; erit 2 modii et 2 sextarii ; infirmariae ; facta ;
Chazarinc ; Rochapelhuc; Guillelmo ; Longmontet ; d'Eschas-
lada; alius P.jetrus] de Faugeyras.
Suit la bulle de ma page 694 ; enfin, l'inédit suivant re-
prend :
Actutn apud capellam Lespinassa, Lemovicensis diœcesis,
die 8 mensis septembris, anno domini 1391. Praesentibus
Joanne Labrua, aliàs diclo lou Portier, et Petro de Chonet,
ejusdem loci Capellœ, et pluribus aliis testibus, etc. (sic)
fuit ipsa die facta recognitio per magistrum Joannem Sous-
tre, notarium de Novovico, se gerentem pro procuratore et
nomine procuratoris Anthonii de Belhan (Velhan, très pro-
bablement) dicti domini proprietarii dicti loci de Novovico,
habentem, ut asserebat, ad hoc spéciale mandatum à dicto
Anthonio, quod capitulum Tutellense in Communi habet et
consuevit levare a6 antiquo in dicto loco de Novovico quin-
quaginta solidos monetae uzualis annis singulis, et eleemo^
sinarius tutellensis etiam pro se vicjinli solidos ejusdem
monetae et prior dictse Capellœ quinque solidos dictae mo-
netae, de redditu sive annua pensione et quod possit gad-
giare etc. (sic) et super furnum et molendina et pedadgia et
alia bona (sic). De prsemissis dominus Martialis
Brassio (I), praesbiter de Glotonibus recepit, authoritate do-
mini officialis Lemovicensis litteras cum mel. etc. renun-
ciaverunt etc. ... in meliori forma, (sic).
Suivent les redevances levées par I'aumonier sur les Pré-
vôt de Naves et Prieur des Angles. Ayant publié ces deux
dernières, page 696, je ne prends qu'à Seilhac.
Item quicumque tenent affarium d'à Seilhac debent 23
sextaria (2) siliginis ad parvam mensuram, quod bladum de-
(!) Nom tiré de Brach (Saint-Priest-de-Gimel), Egletons. — Formu-
les omises.
(2) Pour abréger, je mets eu chiffre les sexliers ; sil. = seigle ; ad
par. mens, ou ad bonam signifiera à mesure pauche ou à bonne me-
sure ; sex. sextarius ; sol. solidum ; fr. frumenti ; eym. eymina; den.
denarii ; Tut. Tutellensis ; rend, rendualis ; it. item.
P. est à coup sûr pour Petrus.
— 268 —
bet de l'en i ad propriat? expensas suas in horreo eleemosi-
narii Tut.
Sequitur parrochiB Sancti Juliani Tutellensis.
D'à Breyga \\j, debeol 4 sext. silig. ad bonam et 4 dena-
rios renduales et cliaus et porls [sic, pour choux et poireaux]
et unura bonus de palya et de cloix, semel in anno quolibet.
Item debent de La Malaurià Datario (sic) unum sext. fru.
comble ad parv. mens,
Uem debent d'à Lr Da,uradia da Neuviala, pro Bordaria
da La Pradarîa, 6 sexl. sili. ad par. et 3 sext. avenae ad par.
et 10 septem denar. B- Jales (Jalis?) tenet et solvit 1/2 par-
lera de Neuviala.
Item in horio P, La Vila quem tenent da La Chapoulia
1 sext. silig. ad paj-v.
Uem in bordaria da La EstivisL, quam tenet P. Latreille,
1res eym, fru, ad parv. Item Stephanus Estivse débet 1 eym.
I fru* ad parv* ratione ejusdem bordariae da TEstivia quam
tenet in parte.
Item d'à La Clmut^rdia debent 1 sext. fru. ad bon. et 1
sext. frum. ad par, et de horto d'à la Garenia 4 den., quod
tenet magisler Guido La Chapolia.
Item Guiltelmus Febriers débet 5 den. de prato del Cha-
lars. Peirus Fahri, bui-gensis Tutel. solvit.
Item inChastaneto de Vieillavialla (2) quod tenet Joannes
de Pandrinia» 3 eym. silig. ad bon., débet Petrus Dona-
reL
(1) Breyge, ex-villa, fiet, entre Garinet et Materre, haut et bas, 1431.
— Malaurie, 25 hab. ; la Garônie et la Cbautardie, contigus, 1260. —
Neuvialte fm près Souillac,
i'I) Virevialle^ VJ hab. ; Saumières, près Poissac. — Le Bois-manger
de Saiiïte-Leçûn, 1761, fieL — Fontaine d'Aymar-le-dom des Echelles.
— Le pont Charlai. --Lavergne, vers le Mazet. — En regard du texte
des Chalars oa Charlat et de Vervialle, on a écrit Longmontel, qui
est de Saint-Pierre près les Arènes et La Léune, le confondant à tort
avec 1 haut-Monteil, voisin de Souiliac. Adémar. ici nommé del Chas-
lars au lieu de dt^s Echolles, scalarum, inviterait à se demander, sauf
graves objections, si scalas n'aurait pas été une première latinisation
erronnée pour Charlar, Cfiaslas? — Bré (Coussac-Bonneval).
— 269 —
liera in chastaneto d*eus Febriers, in riperia d'al Chas-
lars, quod tenet Guillelmus Guipa, 1 sext. sil. ad par.
II. in chastaneto dal gua supra villam, quod tenet Petrus
CoDstans de Riperia, 3 den. — It. Mazieyra 2 den.
It. Lhi Chaslars tenent quamdam terram de eleemos. Tut.
sitam inter Fontem domini Ademari del Chaslars et Nemus
Domanger, de qua reddunt 4 den. obolum. — It. Lhi Chas-
lars et da La Treylia tenent quamdam aliam terram de
eodem feodo, quœ est supradictum fontem ; de qua debent
1 den.
It. in manso da Lavernia, debent 2 sext. sil. ad par. et 2
sext. avense ad par.
It. in domo Garido (Gaudo?) tenet Guillelmus La Sala,
presbiter, 2 sext. fru. ad bon., Joannes Besso tenet.
Item P. d'al Sac, deu, per lo bos que te el territori dé
Vieliaviala, josta lo bos de mo[ssen) P. Gorsa, 1 eym. sil. ad
bon. — It. de manso de Vieillia villa, debent 15 sext. sil.
ad bon. et 7 sext. fru. ad bo. et 18 sol. 4 den. et 1 gallinam.
— It. P. de Vieillia vila débet 1 sext. fru. et 1 sext. sil. ad
bo. ratione hsereditatis quam tenebat Petrus Magnas, pres-
biter, quam haereditatem assensavit dictus Petrus ab Hotone
de Breno, Tut. eleemosinario. Dictus mansus est cum mero
et mixto imperio et jurisdictione alla et bassa, et etiam
debent servitia et explectamenta tenentiarii dicti mansi.
— It. débet Joannes de Veteri villa 2 den. rend, de quodam
prato et nemore ipsi prato contiguo vocato al Vignaly con-
frontato cum prato et nemore quondam de Veteri villa.
It. de manso de Saunieyras debent octo sextaria sil. ad
bo. et 8 sext. fru. ad bo. et 1 modium avenœ ad bo. et 10 sol.;
et in dicto manso hominibus qui sunt dicti eleemosinarii,
dictus eleem. habet jurisdictionem altam et bassam, merum
et mixtum imperium et etiam servitia et explectamenta.
It. débet Stephanus Guitars 1 den. de quodam castaneto
quod tenet de feodo nostro in riperia d'al Chaslars,
II. débet Durandus Thomas 6 sol. ratione cujusdam horti
siti in bordaria da La Pradaria, quos sol vit Joannes Ber-
nardola. — It. débet Hugo Barrata 9 sol. ratione cujusdam
l
— 270 —
praLi siLi iu eadem boidaria; Joannes Bernardola solvit. —
It* débet Jacobus Daurat 6 den. cum obolo, de quodam ne-
more ejusdem bordari^e.
It. dicta La Beronescha débet 5 den. pro quodam nemore
de pertînentiis raansi de Veteri vill&, juxta quoddam pra-
dellum et nemus Pétri La Fagardia, subtus furcas de Sau-
neriis; movet de feodo ei dominio eleemosinariae idem
mansus.
It. débet GuilielmuB Clarix, clericus, 12 denarios de quo-
dam horto et prato qui ïiiunt apud lo Chaslars. — It. débet
Hugo Guittars I sexl, fru. ab bo. de quodam horto qui est in
ripera cIr SoldiiSL.
U. débet G, Macaiis 1 gallin. de atturamento de la levada
d'à Lus Ayras. Mathaîus d'à Lespissier solvit modo illara
galL ratione dictai levad;p. — It. débet dictus Math, da Lesp.
7 sol. annuatim in festo beati Michaelis, ratione nemoris
de Las AyvBLS et ynotejidini sui quod renduavit ab Othone de
Bretio. eleemos. monaslerii Tut. — It. débet P. Boshoni
i eym. fru. ad. bon. de quodam horto ejusdem riperise de
Solana.
It, débet Bernardus Lespinas, alio nomine vocatus Benad
das Chaslars, ^2 den- et 2 den. d'à achapto, de nemore da La
Pradaria(l). Dui-andus à La Boyga, aliàs Bassot, débet ista
quia tenet*
It. P. de Materra, clericus, et frater suus debent octo
solid. 2 den. et 2 den, d'acapto, de terris de Maurandescha,
cum dominio et mero et mixto imperio.
Sequitur Parrochia Sanxti Pétri Tutellensis.
In domo Petri Fraychieng debetur 1 sext. sil. ad bo. cum
2 den . de acaptamento . VV. de Tuna solvit quia tenet
dooïum istam* — It* in Uomo Petri d'Aygiac debetur 1 sext.
siL ad bo. Joâones d'Empeut tenet nunc istam. — It. in
([) Cette Pra4erie fut U. Thaut-Monteil, comme Neuvialle. Tuna,
voy. mon numéro lî&L Auipfau (Tulle Saint-P.). — La Labenche,
dans Brive. — Le texte, députa dal mon jusqu'à Bondo, provient d'une
additioQ en manchette. — Lespicier, notables tullois.
— 271 —
donio Pétri dal Prac debetur I sext. sil. a bona [meyzura],
Petrus Passari (Passan?) tenet istas 2 domos. Leodegarius
d'al Mon solvit; tenet enim J. de Brossas.
It. in domo Pétri Moniers debetur 1 sext. sil. ad bo. et
2 den. de acapmento. Domina de la Banchia (Canchia?) sol-
vit. It. in domo Pétri Bondo debetur 1 sext. sili. ab bo.
Omnes ista? domus prsenominatae, sunt de feudo eleemos.
Tut. cum 2 den. de accaptamento.
It. Joonnes de Faugeyras débet de molendinis da la, Ray-
nia i den. et 2 den. de acap. et de terris quas acquisivit à
Petro d'à Giac circa praedictum molendinum 2 den. et 2 de
acap.
Sequitur Parrochia d'à Seilhac.
D'à Colorais debent 8 sext. sil. ad par. et 2 sext. sil. ad
mensuram de Briva (sic),
It. debent d'à Bonojol 5 sext. sil. ad par. It. debent à la
^irunia d'à Seilhac 1 modium silig. ad par. — It. debent
d'al Mayzil 8 sext. sil. ad par. It. debent d'à Boussaguet
i sext. silig. ad par.
Stquiiur Parrochia' de Navis.
In manso d'Olhiac quod lenent homines de Faugeyras (1)
et de Bach 1 modium silig, ad par.
It. debent d'à Soleliavolp 24 sext. sil. ad par. Item debent
d'à Cero d'à Navas 7 sext. eymin. sili. ad bo; 2 sext. eymin.
fru. ad bon. 5 sext. avenœ ad bo. et 5 den.
Sequitur Parrochia Sancti Clementis.
U. debent d'à Bussieyras (2) d'à Saint Clemens 4 sext. sil.
ad par. et 4 sext. avenae ad. par. et 12 den. de la teinguda de
Osaboncos, It. de la teinguda Marti Agrilho? (Agulho) et
fratrum suorum, debent 12 den.
It. d'à la Anglada d'à Las Bordas debent 2 sol.
(!) Fougères, 57 hab.; Bach, fief, 39; Brunie haute et basse. 67;
Meygial. Boussaguet, 51; Soleilhavoup, 100; Cerou, 88, soubre et
soutre.
(2) Bussières, 80; Sabeau (?), en lisant o sabouc. Bordes Soubrane
et Soutrane, 48. Ghadebec, 30 habitants, terre noble.
1
— 272 —
SêquHur parrochia Sancti Germani las Vernhas.
Id molendlno d a Chadabec d'à Sent Germa 8 sext. silig,
ad parv. quos solvimt in hospitio domini Eliae d'à Sent
Sensiperi (!1 [sic] militis. It. in bordaria d'à Rofiniac quam
teiient Ihi Riol t sexi. sili. ad. bon. et 9den.
Seqititiir parrochia de Chameyrac.
lu d'à la Brunia d'à Chameyrac debent 4 sext. silig. ad
parv. et 4 sext. fru. ad par. et 3 solidos.
Sequitur parrochia Sanxti Salvatoris.
ït. del mas d'à La Gloria d'à Sent Salvador 2 sext. silig.
ad par>
Sequitur parrochia Sanct^e FoRTUNAXiE.
Da Faya da Sencta Fortunada debent 3 eym. sil. ad par.
lu d a Noailliac debent 12 den. It. d'à Floyrac debent 7 sext.
sil. ad pai\ ot 8 sext. avenae ad par. et 1 gallin. et 1 trossam
de fé.
Tu d'à Bossiniac. debent 7 sext. sil. ad par. et 8 sext.
avenap ad par, et 1 gallin. et 1 trossam de fé.
Sequitur parrochia d'à Chanac.
Ademarus Laurelia et Rossigniols debent 2 sext. eym.
sili. ad parv. et 3 sext. avense ad parv. et 13 den. et 1 gallin.
ratione 1/2 bordariae d'à las Ayras. Petrus, filius Pétri Ar-
naldi de Alvernia solvit 6 den. obolo pro Rossigniol, ratione
cujiisdam prali de afario d'à Las Ayras. De Ademaro Lau-
relia superiûs scripto, intus invenielis ea quae débet pro
dicto afario da las Ayras. It. in horto Pétri Las Ayras eymi.
fru. ad bon. Como solvit.
It* in manso d'à ia Bachalaria (2) (nom exponctué et point
(1) De SarntEïupéry, famille encore représentée au Fraysse (Ter
rasson)* HoufigEiac, es seigneurie aux de Ruffignac. — Brunie, 53 âmes,
Glorîe, Kl hahirjmts, ici différencié de la Gloire (Sainte-Fortunade),
Kouailiac, î&, Kurat haut et bas, fief. Boussignac, 8. L'aureillier, 65.
(2) Mainl^ue/ Uachelerie (Chanac), près Cendriat, 1760; Jos; Ri
- 273 -
remplacé) debent 4 sext. fru. ad par. et 3 sext. sili. ad par. et
3 sext. avenae ad par. et 4 soli. Item debent pro 1/2 afParii de
las Ayras 3 sext. eyminam silig. ad par. et 3 sext. aven, ad
par. et 13 den. et 1 gallin. et merum et mixtum imperium et
jurisd. ait. et bassam et etiam servitia et explectamenta.
It. in manso d'à Seyniac debent 7 sext. silig. cum emi. ad
par. et 6 sext. fru. cum eymi. ad parv. et 7 sext. ave. ad par.
et 5 sol. et merum, etc. {ut suprà).
It. in manso d'à Laurelia debent 8 sext. eymi. sil. ad
parv. et 4 sext. eymi. ave. ad par. et 3 sol et 10 den. et 1/2
onus fœni et mealhiatam ooorura. It. debent pro afifario
d'à las Ayras, 1 sext. et 1 quartam sil. ad par. et 3 eymi.
ave. ad par. et 6 den. et obolum et 1/2 gallin. et etiam
merum {ut supra), Petrus d'al Cher, junior, solvit 3 den. et
pictam, ratione cujusdam prati d'à las Ayras, quos denarios
debebat Petrus las Ayras.
Item d'à la Rigaudia et d'à Gos {sic) debent, ratione
affarii d'à Mangenest, 6 sext. eymi. silig. ad par. et eymi.
avenae ad par. et 3 den. et mealatam ovorum et 1/2 onus
fœni. It. d'à Gos debent ratione cujusdam terrse quae est
juxta lo codert quam tenent de eleemos. Tut. 2 sext. sili. ad
par. et 2 den.; et de 2 mansis d'a{ Trech, debent 1 sext. sili.
et 1 sext. ave. ad par. et 8 den. et denariatam ovorum et
1 onus fœni.
It. d'à la Rigaudia debent eymi. sili. ad par. et eymi. ave.
ad par. et mealatam ovorum et 1/2 oneris fœni et 4 den. —
It. in bordaria de La Comtia debent 3 sext. fru. ad par.
It. d'à Vedrenas (1) (en marge est écrit : Materra) debent
2 sext. de manso d'à Lastrada et de la Costa d'al Sauyier
1 den.
gaudie, membre de l*Aureiller et près Maugenet. Trech, 12 habitants.
Seyniac est apparemment erroné pour Senriac, Cendriat. Voyez
Clergoux.
(1) Vedrènes. 69 hab., Peuch auxFerrans, 1444, près Chanac et La
Rigaudie. — Mézinges, 63; Sieurie; comme Bouysse, 130 hab, et
Maleyre, 25 hab. — Pradeaux, 6 hab.; des nobles Avalène. Pimont,
49 hab. — Breuil, 12 hab.^ fief. Thouzac, bis, près les Biards et Chan-
teloube, provenant de Tonsus, bois tondus.
]U d'al Poitch Auferrans debent eyrai. sil. ad par. et
eymin. avericï* ad par. et 4 den. et mealatam ovorum et
1/2 onuiï fœnL
I Item in maiiso d'à ta Faurga debent eyrai. silig. ad par.
el eymi, ave. ad par. et 4 den. et meal. ovorum et 1/2 onus
'r lœni. Uem in manso d'à (a Boi^^a debent eyrai. sili. ad par.
X el eym. ave, ad parv. et 4 den. et (comme dessus).
I
r
S^quitur Sanxti Augustini parrochia.
D'à MêygSLJijas debent 7 sext. sil. ad par.
Sequitur parrochia d'à Correza.
D'à Bohjssa d'à Correua debent 4 sext. sili. ad par.
Sequiixir parrochia Sancti Martialis.
D'à Maleyra d'à Sen Marsal. debent 4 sext. sili. ad par. et
4 sexl. ave. ad par. Item in décima Sancti Martialis 3 sext.
siti. ad par. qtios solvit Ebolus de Plas, miles, in domo sua
quam habet apud diclinn locum S. Martialis.
It* mansus de Tozat aux Pradeux (en marge : aliks de
Pradeux), in parrochia S. Martialis, fuit acquisitus a Petro
Durandij de Gimelto, *lomicello. in quo manso dictus elee-
mos. Tutel. percipiL 2 niodia sili. et 6 sext. silig; totum ad
mensuram de Gimello.
ïl. 50 solidos turonenses talibus terminis solvendig; vide-
licet in tnense augusti 15 sol. turon. in festo S. Andreae
oppostoU; 25 sol. turon. in mense martii, 10 sol. tur. quos
recipit ille qui distribuit anniversaria eclesiae Tutel. pro
anima Bernardi Avalez; item in pascha ova; et in ascen-
siooe Domini ova el caseos ; in nativitate Beati Joannis
BaptistcE idem. It. in augusto gallos; it. in natale Domini
gallinas; it. alla servitia hominum et bouum et fœni et
palete el aliarum rerum. Mansus iste acquisitus fuit cum
omnibus pertînentiis siuis, et cum terra illa quœ vulgariter
dicilur lo l'ignal de Pigmon et cum omni dominio ac juris-
dictione-
- 275 -
Sequitur parrochia de Clergor.
Prsepositus d'à Clergor débet 46 sext. silig. et 5 sext. fru. !
totum ad mensuram de Clergor.
It. d'al Brol de Clergor debent 2 sext. silig. ad par, et
4 den. — D'à Laurelia et d'à Senriac et d'à la Bachaiaria
debent deferri dictum bladum d'à Clergor et d'al BroL
Sequitur parrochia de Gimel.
Duminus d'Auriac débet 1 sext. silig. ad par. It. iVa la
Ferleyria(\) debent 1 sext. fru. ad par. homines de manso
d'à la Teulieyra solvunt. It. in manso d'à la Bemardia tViï
Ëspaniac debent 3 eymi. silig. ad par. quas solvit la Jona
d'à la Charrieyra d'à Gimel, ratione bonorum d'à la Char-
rieyra quae sunt obligata.
It. Guilielmus Botiers, miles de Gimel, 2 sext. sili. ad par*
in décima d'à Roi/eyra, quos solvit in domo sua d'à Gimel,
Sequitur parrochia d'AsPAiGNHAC.
D'à Bey88as(2) debent 2 sext. sil. ad par. Item P. Almois,
Sequitur parrochia Sancti Boneti Avaloza.
Li Giobers de Aquina debent 3 eymi. silig. ad par* et
3 eym. fru. ad par. propter quamdam terram quae est in
manso d'à Bussieyras, quem bladum debent solvere Li Gir-
bers in dicto manso da Bnssieyras. It. d'à Bushieyras debent
12 sext. fru. ad par. et 5 sext. silig. ad parv. et 6 den,
ratione jutziae, et scilicet dictos sex den. ratione mansi
d'Amalric et mansi d'à La Bernardia et affarii de La Rua
et mansi Rotgeyres, quae loca tenent homines mansi stipra-
dicti.
It. in manso d'à VAgraffol debent eymi. sili. ad par. et
eym. ave. ad par. et 1/2 onus fœni et 4 den. et maleatam
(1) Farleyrie, près la Teulière, et de plus nom d'un quartier dans
tïimel. Boutier, d'où la Bouteyrie (Bar), 15 hab.: Royère(Eyren), 58 hab.
(2) La Uesse, 23 hab.; Bussiéres, 47; L'Agrafeuil, 11; Puy-à- Vieille-
^'gne, Aubech, 133; La Roche-Canillac, Croussac, 67. — Jobertie nu
Barry de Miège-SoUe, à Laguenne, 1562.
I
- m —
ovonim et 3 obolop, ratione mansi à'al Verts. It. d'à Roc/ia-
peiuc (en marge, aiiàs Bragieyras) debent eymi. sili. ad
par. et eymi. ave, ad par. et 4 den. et dimidium onus fœni
et mealatam ovorum : d'à/ Poch et d'à Mommago solvunt.
It. de manso d alpoch (en manchette, de Veieri vinea) 1 den.
de Tort de Ne y rai et 3 obolos pro jutzia.
ïtein in manso de Vielia Vinia debent 3 obolos pro jutzia.
It, d'^u6ès debent 4 sext. sil. ad par. et 4 sext. fru. ad par.
et 4 sext. ave. ad par. et 3 sol. et 2 gallin.
Sequitur parrochia de Larocha.
Dominiis de Rupe débet de loco de Rupe suo, 13 sext. sili.
ad parv* quos assignavit in et super décima de Ladiniaco.
In casîiu vero quod de hujusmodi décima non possit levari
summa totaiis^ hahelur recursus ad castrum de Rupe et ad
alia bona castellaniae ad supplemenlum. Sic refertur in ins-
irumento recepto per Eymericum de L'Aymerigia.
Soquitur parrochia de Ladinhac.
In bordaria d'à Tremolias debent 12 den. It. in manso d'à
La Vedrina debent 1 sext. fru. ad par. D'à Montesergue
[Selgue ?) solvunt.
Sequliur parrochia d'à Orliac.
In manso d*a Chauzier d'à Crossac debent 25 sext. silig.
ad par, et 15 den. de acaptamento, ratione mansi du Chau-
ziere. It. in manso d'à Crossac debent 10 sext. avenae et
3 sext. silig. ad parv. ut est scriptum infra, quoniam isti
sunt de pertinentiis ad terram Sancti Hilarii de Fouissaco.
Nota quod die ultima mensis octobris anno Domini
M^CCCC.XXIJ (1422) fuit facta gratia per domnum Mar-
tioum de Sancto Salvatore, eleemosinarium Tut. et de con-
sensu dominorum de capitulo, quod de redditibus ad eccle-
siam pra?(iictorïim mansorum de Crossac et de Chauser de
Crossac debitis et superiùs expressatis, defalcavit a cœtero
Dunc et in perpetuum et de facto fuerunt defalcati 6 sext.
ailig* et % averuT* ad dictam mensuram, prout latiùs constat
L_
- 277 —
per instrumentum super hoc per magistrum Geraldum de
Cueilla receptum. G. de Cueilha vieux r[ecepit].
Sequitur pârrochia d'ALBussAC.
In manso d'af Vigâ debent 2 sext. sili. ad bon. et 2 sext.
arenae ad bon
Sequitur pârrochia, d'à Lagarda.
In iDordaria d'à SsLusès debent 3 sext. eymi. sil. ad par. et
^sext . avenae ad par. et dimidiam trossam fœni et 1/2 gallin.
Sequitur pârrochia de Chambouliva.
E)'£i. La Jaubertia debent 5 sext. sili. ad par. et 7 sext. ave
ad psi^x*. et 1 sext. avenae ras et 11 dena. obolo.
Sie^'^ima siliginis ad parvam (mensuram) istius terrœ Tu
tellerasis, est 51 njodiorum et 2 sextar; compulatis 3 sextar
dera<Et.iiso d'aCrossacqui sunt de facto S. Hilarii d'à Foyssat
St«.-»->ima siliginis ad bonam (mensuram) est 47 sextar
excep^ t.is 3 modiis silig. ad b.on. quœ débet dominus épis-
(^opu^ et 3 modiis mixtura» ad mensuram de Curamenta, quœ
P^*I>Ositus de Veyrac ad opus charitatis domini Pétri débet.
^ ^^'^"^ima frumenti ad bonam est 42 sextar. ey minae. Summa
iru- ^ ci pan;, est 47 sext. eymi.
^'^^'9^>ima avenœ ad bo, est 21 sexlariorum. Summa avenœ
ai r>^^j.^^ egt 104 sextar.
^*^*>ïma denariorum est 109 solidorum, et ultra islam
suitixxxam débet dominus episcopus 25 libras turonenses,
piovxf, scriptum est in principio libri.
^- débet S^hephanus Lachepolia 25 libr. turon. It. d'à
'^^^^G debent 50 sol. tur.
^'^rnma universalis est 58 librarum, minus 12 denariis.
^-^^ ista qua» sequuntur, ultra summas superiùs scriptas,
^^^ipiuntur de terra S. Hilarii d'à Fouissac per bajulum
^^^lr\im in terra Tutell. videlicet d'ai Feyt, 20 sextar. silig.
^^ par. chauchat et eyminam pisorum et 8 sextar. aven* ad
par. et 21 solidos.
T. XXX. 3-2
- 278 —
Tt, da Crossac iO gext. avenae ad par. et 3 sext. sili. ad par.
It, d'à La Chiùia. d'à PoiysssLC 10 sol. It. d'à Vaurs 35 sol.
IL û'Augieyra 24 sol.
Summa den&riorum 4 libr. 10 solidorum.
Sequitur parrochia de Novovico.
II. apud Novumvicum, supra emolumenta pedatgii, fur-
norum et molendioorum 20 solid. turon. parvorum, et potest
gadgiare ibidem serdens eleemosinarii Tutell. propria au-
tliorilate.
Seqiiuntur census et redditus.
J.-B. Champeval.
(A Suivre.)
jl) Curemonte, bourg; Veyrac (Lot). Âugèros, 44 habitants (Rosiers-
d'Egleions), Poissac (Cbameyrat), castel; Jaubertie, sise à Dignac. Le
Fcyi de CliampagnacJa Noaille, probablement. Plusieurs Vaurs con-
currents, savoir : Vaar& de Saint-Germain-les-Vergnes ou Sainte-
Fortunade, etc., si ce n'est Vaux du dit Saint-Hilaire.
1
GÉNÉRAL DE BRICHE
Grand-Officier de la Légion d'Iionneur
COMMANDEUR DE l'ORDRE ROYAL ET MILITAIRE DE SAINT-LOUIS
et de
l'ordre royal du MÉRITE MILITAIRE DE WURTEMBERG
ETC., ETC.
(•l'7'7a--lSSï5)
Le général de Briche n'est pas originaire de Brive ni du
Bas-Limousin, mais sa famille s'y rattache par une alliance
avec les Dubousquet et dans le cours de ses nombreuses
campagnes il passa plusieurs fois à Brive et même y sé-
journa, notamment après la deuxième campagne d'Italie.
Il y fut soigné à cette époque d'une blessure de guerre, et
à ces différents titres, nous avons pensé qu'il ne serait pas
sans intérêt de faire revivre cette figure de soldat qui fut un
des acteurs de la grande épopée de vingt-trois ans.
Antoine Dubousquet (1), ancien conseiller au Grand-Conseil,
épousa M"« de Briche, sœur du général, en 1792, comme
l'établit la pièce suivante :
Extrait des registres de baptêmes, mariages et sépultures de
la paroisse de Sainte-Croix de Saint-Denis^ en France.
« L'an mil sept cent quatre-vingt-douze, le vingt-et-un
« février, vu les dispenses des bans et la permission de
« fiancer le même jour que la célébration du mariage et de
« célébrer le présent mariage, accordées en bonnes et dues
« formes, vu aussi le consentement de la mère de l'époux au
(1) Grand-père du docteur Louis Dubousquet et d'Henri Dubous-
quet, de Vayrac, auteurs de ces lignes.
— 280 —
iJÛ TïiariagG : Ic^ fiançailles célébrées le même jour, ont
ûlè mariés par nous curé soussigné et ont reçu de nous
la bénédicton nupliale, après nous être muni de leur
consentemenl mutuel, M' Antoine Delbos Dubousquet,
ancien conseiller au Grand-Conseil, fils de dèffunt Antoine
Delbos Dubousquet et de d""* Louise Laroche, ses père et
mère^ de la paroisse de S*-Roch à Paris d'une part; et
d*"* Marie Françoise Anne de Briche, fille mineure de
B^ Jean Nicola^s de Briche, aide-major des troupes Boulon-
noises el contr6leur des fermes du Roy, et de Marie Anne
Isnard, ses père et mère de droit et de fait, de la paroisse
de S'-Denis de Ûugny d'autre part. L'époux âgé de trente
sept ans ei cinq mois et assisté de s*" Jean Baptiste de
Ltibersac^ maistre de camp de cavalerie, décoré de la
Croix de S^-Louis, de la Paroisse de S^-Roch à Paris, et
d'Antoine Dumont, ancien Directeur de la Régie générale,
de Li Paroisse de S*-Martin de Noyon, l'épouse âgée de
vingt-quiiire ans et deux mois et assistée de ses père et
mère* de Jacques François Troussel, ancien directeur de
Correspondance de la Régie générale et d'André Paul
Bastide, preslre, tous denx de la paroisse de S* Roch de
Paris qui tous ont signé avec nous.
<= Cûllationné à l'original et délivré par nous soussigné
prestre. curé de la Paroisse de S**-Croix le 21 février mil
sept cent quatre-vingt-douze.
« Marais,
a Curé de S^-Croix. »
I
La biographie du général a été rédigée d'après les dossiers i
du Ministère de la Guerre, et d'après son oraison funèbre !
prononcée sur sa tombe à Marseille, le 22 mai 1825, par son ;
aide-de camp, Fallot de Broignard, lieutenant d'état-major, j
chevalier de l'ordre royal de Charles IIL Nous avons aussi |
lu presque tous les mémoires laissés par les généraux et les \
personnages de Tèpoque et nous avons trouvé des indica- 1
tiôDB dans plusieurs d'entre eux {général Thiébault, duchesse \
d'Abrantès, comte de Ségur, etc.); les quatre volumes si I
- 281 -
documentés d'Henry Houssaye {iSii et 1815) nous ont élé
particulièrement utiles.
André- Louis-Élisabelh Marie de Briche naquit le 12 août
1772 au Château, chef lieu d'un fief noble possédé par ses
parents dans le diocèse de Beauvais. Son père, après avoir
servi comme officier major dans le régiment du Boulonnois,
était alors directeur général des fermes générales de Bre-
tagne. Le jeune de Briche voulut être militaire et entra à
14 ans, comme cadet, au régiment des chasseurs d'Alsace.
Il passa en 1789 dans le régiment de Royal-Cavalerie en
qualité de sous-lieutenant. Ce fut trois ans après sa nomi-
nation au grade de sous-lieutenant que commença contre i
l'Europe et les rois qui s'étaient coalisés moins pour dé- •
fendre le trône de Louis XVI, que pour arrêter les germes
de la Révolution dont ils se sentaient menacés, cette guerre
mémorable de 23 ans qui exalta jusqu'à l'héroïsme chefs et
soldats. La France, entourée d'un cercle de fer, va s'efforcer
de le rompre et le briser, et pendant plus de 20 ans les
batailles que livrèrent ses généraux ne furent qu'une série
presque ininterrompue de victoires à bon nombre desquelles
Briche fut présent. Nous ne le verrons remettre l'épée au
fourreau que lorsque la France, trahie et épuisée, tombera
amoindrie et que toute tentative de résistance sera devenue
inutile. D'avril 1792 jusqu'à la fin de la même année, c'est-
à dire de Quiévrain à Mayence, ce n'est pour notre armée
qu une période d'essai, pendant laquelle les jeunes troupes
amalgamées aux anciens soldats de l'armée royale, pren-
nent souvent contact avec l'ennemi et s'aguerrissent. Ce fut
pendant cette période d'essais et de tâtonnements que les
officiers et sous-officiers de l'ancien régime, comme Briche,
donnèrent la mesure de leur valeur, de leurs connaissances
militaires et de leur courage en instruisant les volontaires,
en leur communiquant leurs solides et brillantes qualités et
en les menant victorieusement au feu.
On ne peut nier que ce fut parmi eux que se trouva prin-
cipalement cette pépinière d'officiers et de généraux qui
sauvèrent la France et formèrent d'incomparables troupes.
- 28-2 -
La mort de Louis XVI ne fit qu'aggraver la situation de
notre pays en faisant se liguer contre lui tous les États qui
avaient hésité jusqu'alors. Dès le commencement de 1793,
la France est menacée, sur toutes ses frontières terrestres et
maritimes, pendant que ses forces, réduites à trente dépar-
tements qui sont restés fidèles, ont encore à combattre à
l'intérieur tous les autres départements révoltés, Lyon, la
Vendée et les Bretons. A ces périls qui auraient pu anéantir
la France, la Convention opposa des mesures de défense
d'une énergie surprenante, et si elle fut farouche elle fut
libératrice. Tout le pays est mis en état de siège et quatorze
armées (1,20.0,000 hommes), dès mars 1793, assurent la
défense à l'intérieur et aux frontières. C'est que, heureu-
sement, aux mesures d'énergie antique de la Convention,
avaient répondu l'enthousiasme, la vaillance et l'entrain des
chefs et des soldats.
Dès les premières campagnes, Briche s'était fait remar-
quer de ses chefs et fut quelque temps sous les ordres du
général Thouvenot, aide- de-camp de Dumouriez, dont le nom
sera inscrit plus tard sur l'Arc-de-Triomphe, à côté du sien.
Nous n'avons pu trouver à quel moment il fut nommé lieu-
tenant, mais en 1796 il est promu capitaine. En 1799 il était
chef d'escadron au 11* hussards, qui faisait alors partie de
l'armée envoyée en Italie pour arrêter Souvarow dans sa
marche vers notre frontière. A la fin de la sanglante bataille
de la Trebbia (17, 18 et 19 juin) la défaite se changeait
presque en déroute, lorsque Briche rallie 600 soldats de
toutes armes, couvre la retraite avec cette poignée d'hommes
et malgré les efforts d'un ennemi furieux et victorieux, par-
vient à Modène sans avoir été entamé. Le général en chef
Macdonald le cite avec éloge dans son rapport au Directoire.
L'année suivante, le 14 juin 1800, Briche contribua puis-
samment, par la vigueur de ses charges brillantes et multi-
pliées, au gain de la bataille de Marengo. Il fit partie ce
jour-là de ces 400 cavaliers commandés par Kellermann, qui
se précipitèrent contre la fameuse colonne des 8,000 grena-
diers hongrois, la rompirent et lui firent déposer les armes.
— 283 —
La même année, le 25 décembre, sous les ordres de notre
compatriote le général Brune, il assistait à la bataille de
Pozzolo (Pont du Mincio), victoire de l'armée dltalie sur le
général en chef autrichien Bellegarde, successeur de Molas.
Son ardeur et son courage le portaient à joindre l'ennemi
des premiers, et après cette bataille, au passage du Mincio,
il fit prisonniers de sa main un major autrichien et plusieurs
cavaliers. Actif, résolu, infatigable, il excellait dans cet art
de la cavalerie légère qui consiste à pousser des reconnais
sances, surprendre et inquiéter Tennemi et conduire des
partis. Dans ces sortes d'expéditions les soldats avaient en
lui une entière confiance et briguaient l'honneur de le
suivre Avec un tel guide ils se croyaient à l'avance assu-
rés du succès et jamais il ne trompa leur attente. Ses opi-
nions royalistes, qu'il ne dissimulait pas et pour lesquelles
il fut plusieurs fois inquiété, expliquent son retard à l'avan-
cément malgré de superbes états de service. Il ne fut nommé
colonel qu'au début de la campagne d'Allemagne de 1806.
Le 10 octobre il assiste, à la tête du 10* hussards, au combat
de Saalfeld, victoire de Lannes sur le corps du prince Louis
de Prusse. Ce jour-là le 9* régiment de hussards, arrêté à la
vue d'une batterie de 32 pièces de canons, s'étonne, hésite
et tourne bride devant la cavalerie prussienne. De Briche
s'indigne en entendant l'ennemi pousser des cris de victoire,
il communique son ardeur aux braves qu'il commande, il
s'élance à leur tête, atteint la cavalerie prussienne, l'arrête,
l'étonné à son tour, et la poussant devant lui, il marche
audacieusement sur la batterie et l'infanterie qui la défend.
En quelques minutes 4,000 Saxo-Prussiens sont sabrés, faits
prisonniers, et la batterie de 32 canons prise ! ! C'est dans ce
brillant combat que le prince Louis de Prusse, engagé corps
à corps avec un maréchal-des-logis, fut tué d'un coup de
pointe après avoir refusé quartier : Cuindé était le nom de
ce sous-ofQcier du 10" hussards commandé par notre grand-
oncle.
Nous ne voulons pas insister sur tous les combats et
batailles où le nom de Briche est cité avec éloge : léna,
— 284 —
Schalitz, Ticoczim, les coteaux de la Saxe, les plaines de la
Pologne virent de Briche à la télé de ses cavaliers.
En 1808, des bords du Niémen, il fut envoyé sur les bords
de la Sègre en Catalogne, et c'est dans cette rude et meur-
trière campagne d'Espagne qu'il va continuer sa chevauchée
et conquérir un nouveau grade. Il assiste au siège de Sarra-
gosse où Lannes le cite dans ses rapports. Envoyé par le
maréchal Lannes, avec 2 bataillons, 600 hussards et 4 pièces
de canon, pour établir les communications avec l'armée de
Catalogne commandée par Gouvion-Saint-Cyr, il prouva
encore par son succès inespéj'é que rien n'était impossible
à ses soldats. Enveloppé dans les gorges du Mont-Serrat
par l'armée de Reding qui comptait 30,000 hommes, il sut
par des prodiges de valeur et d'endurance, se dégager et
remplir sa mission en passant sur le ventre de l'ennemi.
Tant d'audace étonna même le 7* corps, auquel cependant
le général Gouvion-Saint Cyr avait appris à trouver peu de
choses difficiles. Ce général retint six mois auprès de lui ce
détachement qui avait donné des preuves d'une si rare in-
trépidité. Les obstacles qu'il avait surmontés parurent si
grands, que le ministre ordonna au colonel Briche de reve-
nir en France lui rendre compte de sa mission. Après son
voyage en France il revint en Espagne et contribua grande-
ment, par son intrépidité, à la victoire de Soult à Occana,
sur l'armée espagnole d'Arezaga, ce qui lui valut le grade
de général de brigade (19 nov. 1809). Ses états de service
portent encore le nom de batailles ou combats de Merida,
Albuquerque, Talavera, Badajoz, Albufeira, passage de
Fuentès, Cantos, la Gebora.
En 1813, il est rappelé en Saxe où il sut toujours commu-
niquer son ardeur aux troupes qu'il commanda, qu'elles
soient françaises ou wurtembergeoises. Les charges de sa
brigade contribuèrent aux victoires de Lutzen et Baulzen,
et c'est après Bautzen qu'il fut nommé général de division.
Le roi de Wurtemberg, flatté des éloges qu'avait obtenus sa
cavalerie légère commandée par Briche, lui envoya la croix
de commandeur de Tordre royal du Mérite militaire, dislinc-
— 285 —
tion rare à cette époque. Pendant toute la durée de cette
campagne de Saxe, le général de Briche se multiplia, et par
son activité et les bonnes dispositions qu'il fit prendre à ses
régiments, s'efiforça de suppléer au manque de cavalerie.
On sait en effet que manquant de cavalerie, Napoléon ne
put compléter ses victoires de Lutzen et de Bautzen en pour-
suivant et dispersant l'ennemi.
Notre grand-oncle ne se distingua pas moins dans la cam-
pagne de France, soit en défendant les défilés des Vosges
contre les Cosaques, soit à l'attaque du pont de Clerci près
Troyes, soit à Brienne et Rambervilliers. Le 28 janvier, les
collines du Val de l'Aube, près de Brienne, venaient d'être
occupées par une très forte avant garde des coalisés, et de
Briche se trouvait à ce moment assez éloigné de sa division
de vieux dragons, accompagné seulement de quelques cava-
liers et de ses ordonnances. Il rassemble ce qu'il peut de
monde et n'hésite pas à charger l'ennemi, qui fut mis en
déroute.
Après cette longue période de guerre, Briche ne déposa
les armes qu'au retour des Bourbons, pour qui il n'avait
jamais caché ses sympathies. Ils le nommèrent chevalier de
Saint-Louis le 19 juillet 1814. Il leur avait juré fidélité et
prouva peu après comment il savait tenir son serment.
A cette époque malheureuse, l'armée justement flère de sa
gloire, ne voulut pas se soumettre au nouvel ordre de choses
et en nombre de villes la population partagea les sentiments
des militaires. Louis XVIII avait confié au général Briche
le commandement du Gard, et c'est à Nîmes que les Cenl-
Jours vinrent le surprendre. A la nouvelle du retour de
Napoléon les troupes se soulèvent, le surprennent désarmé
et elles osent penser que la crainte de la moi^t pourra plus
sur leur général que les séductions et les promesses. Abreuvé
d'outrages, traîné sur la place publique par une soldatesque
effrénée que seconde une populace furieuse, on le menace
de mort s'il ne crie pas : Vive l'Empereur ! Dans ce moment,
un des plus critiques de sa vie, il impose aux factieux par
sa fermeté et son courage : « Vous pouvejg, leur dit-il d'une
— 286 —
voix très assurée, frapper de mort le général qui vous con-
duisit si souvent à la victoire, mais vous ne pour re;sf jamais
le forcer à se déshonorer. » Et jetant son chapeau à terre, il
crie de sa voix de commandement : Vive le Roi ! Son attitude
produisit parmi les soldats un de ces revirements subits
auxquels les foules sont sujettes, et les soldats se mirent à
protéger contre la populace l'homme qu'un instant avant ils
menaçaient de mort.
Le Dictionnaire de Biographie universelle de Feller, dont
la publication date de 1836, époque rapprochée des événe-
ments dont nous parlons, rapporte qu'il ne « put réprimer
iinsurrection de ses soldats en faveur do Bonaparte, et
que, conduit par eux prisonnier à Paris, il eût été mis en
jugement, si sa femme n'eût obtenu qu'on se bornerait à le
rayer de la liste des officiers généraux ». Nous ne trouvons
confirmation du fait dans aucun autre document, malgré nos
recherches, mais s'il ne fut pas mis en jugement pendant
les Cent-Jours, il fut sûrement destitué et exilé à Melun.
En même temps que lui furent aussi destitués le colonel
d'Ambrugeac, du 10* de ligne; les généraux d'Aultanne,
Ernouf, Monnier, Loverdo, et les préfets du Var, Bouches-
du-Rhône, Basses- Alpes , Vaucluse, Gard (Henry Hous-
saye, 1815).
A la seconde Restauration, le titre de vicomte et la croix
de commandeur de Saint-Louis furent la récompense de sa
fidélité. Le lieutenant-général de Briche commanda succes-
sivement les 9*, 4* et 8' divisions militaires (1). Il pacifia le
Languedoc et éteignit en Touraine les germes de la guerre
civile. En 1816 il présida, malgré les démarches les plus
actives qu'il fit pour s'y soustraire, la Commission militaire
qui condamna à mort à l'unanimité le général Mouton-
Duvernet qui avait été compris dans l'ordonnance royale du
24 juillet 1815. Cette ordonnance livrait aux tribunaux mili-
taires dix-huit généraux, sous l'inculpation d'avoir trahi le
(1) Rapports du général Briche, Nimes, 20 et 28 août et 23 septembre
(Arch. de la Guerre). Rapports du général Briche, Montpellier, 16 sep-
tembre et 28 novembre (Arch. de U Guerre).
— 287 —
Roi. Jusqu'à sa mort il ne cessa de dire que ce fut le plus
douloureux épisode de sa vie militaire, et historiens sin-
cères, nous ne pouvions en passer sous silence cette phase
terrible et malheureuse.
Mis par les faits et les circonstances dans l'obligation de
condamner un compagnon d'armes avec qui il avait fait la
guerre d'Espagne, il ne négligea rien pour obtenir une com-
mutation de peine ; mais tous ses efforts se brisèrent devant
la volonté formelle de Louis XVIII.
Il commandait la 8" division militaire lorsqu'il mourut à
Marseille le 21 mai 1825, après une maladie de quelques
semaines. Il vit arriver la mort qu'il avait bravée tant de
fois avec le courage du soldat et la confiance du chrétien.
Son nom est inscrit à l'intérieur de l'Arc-deTriomphe,
entre ceux des généraux Meunier C. et Thouvenot.
Connaissant l'homme de guerre, il nous faut aussi con-
naître l'homme privé. Vivant depuis l'âge de 14 ans dans les
régiments et les camps, il n'avait pas eu le temps d'ap-
prendre le beau langage qu'on parle dans les salons et il
avait conservé une franchise toute militaire parfois un peu
rude. Ses expressions n'étaient pas toujours académiques,
comme écrit le général Thiébault : « Briche commandait
pour h roi très chrétien la division de Tours, et ayant à
dîner le duc de Duras et voulant lui faire boire du Madère
que celui-ci refusait, lui dit devant vingt convives : Avalez
ce muy duc, ou je vous le f... en lavement. »
C'était cependant un lettré, comme le montrent ses nom-
breux rapports et sa correspondance, et on ne s'explique pas
comment ces hommes, toujours en campagne, ont pu cul-
tiver les belles-lettres. Ses connaissances étaient très éten-
dues et il avait de l'esprit. Son premier abord était froid,
raais il était bon et serviable. Il eut pu exercer de terribles
vengeances contre ceux mêmes qui avaient menacé sa vie
pendant les troubles de Nimes, et il n'usa de son influence
que pour arrêter l'effusion de sang et sauver ses ennemis.
Il ne se servit de son crédit auprès du roi et des ministres
que pour faire donner des places à de vieux soldats qui
— 288 -
avaient été parmi les révoltés de Niraes. Il fut bon, même
pour ceux qui insultèrent à sa fidélité. Intègre, le vicomte
de Briche, au lieu d'accroître sa fortune comme beaucoup
de généraux de l'Empire, dépensa une partie de la sienne
au service de son pays et de ses amis et ne laissa à sa femme
et ses enfants qu'une très modeste situation. En 1812, il
avait épousé la fille du général Harty de Pierrebourg(l);
de ce mariage naquirent deux garçons et deux filles, et
Tainé des fils fut tenu sur les fonts baptismaux par le Dau-
phin.
Dans le cours de ses campagnes, Briche séjourna plusieurs
fois à Brive chez son beau-frère, Antoine Dubousquet, où il
fut même soigné d'une blessure dont il avait été atteint à la
fin de la deuxième campagne d'Italie, comme nous l'avons
déjà dit au commencement de cette biographie. Il avait été
blessé plusieurs fois sans grande gravité. A un de ses re-
tours d'Espagne il fit présent à son neveu Dubousquet (2)
d'une paire de pistolets d'arçon que Tun de nous (3) possède
encore et avec lesquels il s'est exercé à tirer dans sa jeu-
nesse.
Si nous avons tenté de faire revivre celte figure militaire,
ce n*est pas par vanité familiale, notre but est plus élevé.
Nous sommes en effet de ceux qui pensent, comme Bourget,
que les œuvres des morts ne doivent pas disparaître avec
eux, mais se prolonger dans les générations suivantes. Nous
devons les enseigner à nos enfants, car une nation pour qui
les générations futures ne compteraient pas, ne serait pas
plus une nation que celle où toute solidarité serait brisée
entre les ancêtres et leurs descendants. Il faut dire avec
Bourget (4) que la force traditionnelle doit faire équilibre à
la force contemporaine, et les nations qui ont brillé dans le
(1) Lun de nous. Henri Dubousquet, a été souvenl reçu à Paris,
vers 1848. chez la vicomtesse de Briche, qui était encore une femme
superbe et charmante.
(2) Père d'Henri et Louis Dubousquet, sous-préfet de Brive et re-
présentant du peuple en 1848.
(3) Le docteur Dubousquet.
(4) La crise du Parlementarisme {Revue Hebdomadaire, 1908).
— 289 -
inonde ont été toutes des traditionalistes. Il n'est pas jusqu'à
nos idées, nos sentiments dont nous ne soyons redevables
à ceux qui ont disparu et aux milliers d'ouvriers qui ont
travaillé à faire la France et la civilisation dont nous pro-
fitons, il y a des solidarités qui s'imposent et qu'on ne peut
rompre sans grand dommage. Il y a enfin, au plus intime
de nous, des morts qui parlent (De Vogué).
Docteur Louis Dubousquet. Henri Dubousquet,
de V&yraa.
SAIT-JDLKME-ÏEIONNAIS
(1)
C'est à TEglise qu'un nombre incalculable de vil-
les, bourgs et villages de France doivent leur nais-
sance ou leur épanouissement.
Et si la paroisse de Saint-Julien ne doit au bienheu-
reux dont elle porte le nom ni son origine ni sa
prospérité, du moins, en se plaçant sous sa céleste
protection^ elle a témoigné envers lui d'une religion
véritable, et qui nous invite à placer ici cette courte
biographie.
(1) C'est bien à tort, comme nous l'avons observé ailleurs, que la
Compagnie d'Orléans écrit : le Vendômois. — A l'époque où nous
faisions nos études, le Vendômois était un ancien petit pays réparti
entre les départements actuels de Loir-et-Cher et de Sartbe.
N'en serait-il plus ainsi ?...
Le Vendonnais est un territoire très restreint, renommé pour ses
excellents moutons. Si j'en croyois une histoire qui m'a été racontée,
à la veillée, dans une ferme de la commune, l'illustre Mgr Beriaud,
lui-même, aurait célébré, dans la chaire de Lubersac, au cours d'une
tournée pastorale, la gloire de ces moutons.
Ceux qui ont lu la chronique du monastère de Vigeois (bonheur qui
ne nous est jamais arrivé) assurent que la terre du Vendonnais fut
rançonnée par les pillards de la fin du xii" siècle. Cela est très malheu-
reux, mais c'est aussi très possible.
Quelqu'un qui a de l'imagination m'a dit que l'étymologie du nom
que porte ce petit « pagus » se déduirait de cette phrase : « Le vent
donnait » ...x)u ... « Le vent donne... »
Et ceci est un peu moins calamiteux, mais quelque peu moins
certain.
— ?92 -
Saint Julien naquit à Vienne, dans les Gaules,
vers le m" siècle. La persécution sévissant contre les
chrétiens, Julien partit pour l'Auvergne^ afin de
Téviter. Ce n'était point par lâcheté^ nous le verrons
tout à rheure ; c'était simplement pour obéir au con-
seil de prudence que donne TEvangile : Cum aitlem
persequentur vos in civiiate ista^ fugite in aliam
(Matt. c. tO, V. 23).
A Brioude, le saint-fut caché par une veuve. Mais il
ne put se résoudre à rester dissimulé bien longtemps.
Il sortit donc de sa cachette^ fut immédiatement
appréhendé par les ennemi.^ de sa foi, et reçut un
coup de hache meurtrier qui lui trancha la tête.
Ses bourreaux firent trois tronçons du reste de
son corps.
Le chef de saint Julien fut porté à Vienne. Ses
membres furent ensevelis à Brioude même, où ils
opérèrent des miracles. Grégoire de Tours a composé
deux livres relatant les faits merveilleux dûs aux re-
liques du saint.
Dès sa canonisation, plusieurs églises furent dédiées
à ce confesseur de la foi : deux de ces églises, au
moins, dans le diocèse actuel de Tulle. Il y en avait
une à Tulle même.
La seconde est celle du Vendonnais. Celle-ci a pos-
sédé quelques reliques du bienheureux martyr. M. le
chanoine Poulbrière croit, à tort, qu'elles existent
encore.
Sur la prière de mon pieux confrère^ M. la curé de
Saint- Julien, j'ai suffisaniment officié dans cette
église pour la connaître bien et pouvoir opposer hum-
blement mon assertion à celle de M. Poulbrière.
— 293 —
Connaissez-vous Saint-Julien ?.. .
Si vous avez jamais voyagé sur la ligne de Brive à
Limoges, par Saint-Yrieix et Nexon, vous avez, au
moins, aperçu cette station, la dernière de la Cor-
rèze.
Et, si au lieu de pousser plus loin^ vous êtes des-
cendu à Saint -Julien même, vous avez eu, tout
d'abord, en sortant de la gare, la perspective char-
mante d'une avenue bordée de peupliers dont les
feuilles, là-haut, bruissent dans la lumière!... Vous
avez franchi délicieusement les sept ou huit cents
mètres de cette avenue intéressante, puis vous vous
êtes trouvé, soudainement, sur la place publique.
Cette place affecte, à peu près, la forme d'un
triangle. Sur le côté de droite.... un côté brisé... se
trouvent les hôtels, parmi lesquels celui a du Ven-
donnais » (1). Dans ces hôtels vous trouverez bon
accueil et il ne tiendra qu'à vous d'y manger d'excel-
lente cuisine. Demandez-y seulement des goujons de
Ségur ou des truites de Saint- Eloi. Vous m'en direz
des nouvelles ! . . .
Sur le côté de gauche vous apercevrez le presbytère,
puis l'église^ qui, par son gentil clocher, domine la
bourgade et semble veiller avec sollicitude sur les
maisons d'alentour.
Cette église a des restes romans, dit M. Poulbrière,
(1) Un bon point à MM. Lachaud, pour avoir orthoj^raphié comme
il faut.
T. XXX. d — 3
— 294 —
déjà cité, mais appartient à la troisième période de
l'ogive par ses chapelles latérales et son sanctuaire à
nervures.
Elle fut restaurée en 1776-77, et les belles boise-
* ries du chœur datent de ce temps-là. De nouvelles
réparations y ont été effectuées, il y a bientôt treize
ans.
Sur la base du triangle que forme notre petite
place existent quelques maisons et ateliers, parmi
lesquels Thabitation du <r tambour de ville », lequel
est, en même temps, un musicien réputé.
Comment ne le serait-il pas, à la façon peu com-
mune dont il souffle dans le « pifre »?...
La mairie et quelques autres constructions se dissi-
mulent discrètement derrière celles que nous venons
de mentionner, ou s'en éloignent un peu, comme
pour chercher plus de calme.
Car sous les tilleuls de la place, s'érige la fontaine
municipale ; c'est là que les ménagères, venant cher-
cher de Teau pour « monter la soupe y>, se passent la
chronique du jour^ et que^ semblables à des poulains
échappés, les enfants sortant de classe vont boire, pa-
tauger et s'arroser mutuellement en criant.
Mais, déjà, voici le soir ! Les clameurs s'apaisent
peu à peu ; le recueillement règne maintenant sur la
place. Seule^ une vieille femme attardée se presse de
rentrer, et, passant devant la croix de la Mission
qu'enveloppent déjà les ténèbres^ elle esquisse le si-
gne du chrétien, tandis que sa bouche édentée mur-
mure une prière
— 295 —
Malgré les sept trains de voyageurs qui passent tous
les jours à leur petite gare et semblent les exciter par
les appels stridents des locomotives, les habitants de
Saint-Julien restent tranquillement chez eux.
C'est^ sans doute, très intéressant de s^entasser dans
des wagons surchauffés, de déjeuner en dix minutes
dans un buffet encombré de clients soufflant comme
des Tritons sur un potage qui ne veut pas froidir....
Mais admire qui voudra.
Ces braves gens vivent, quant à eux, de cette bonne
façon d'autrefois où Ton ne brûlait pas la vie en qou-
rant, mais où la vie, exempte de fièvre, ne vous
brûlait pas non plus.
Alors que beaucoup de contemporains n'ont pas le
loisir de manger, ils ont^ eux, après le travail, celui
de se distraire en famille, de boire même une roquille
à Tauberge et de repasser, en devisant, Thistoire du
pays.
C'est ce que, succinctement, nous allons faire avec
eux.
Saint-Jûlien avait été de la châtellenie de Saint-
Yrieix, car il faisait partie du Haut-Limousin.
M. Clément-Simon nous rappelle (à moins qu'il ne
nous l'apprenne, comme il est arrivé pour moi-même)
que notre paroisse fut désignée sous le nom de : Pré-
vôté de^la Basse-Marche.
Il est parlé de Saint-Julien dans de très vieux do-
— 296 -
cuments : on y voit, en particulier, que cette paroisse
embrassait une partie de Ségur, comme faisait^ do
son côté, Saint-Eloi.
Guillaume de Bretagne, comte de Penthièvre et de
Périgord, par testament du 24 août 1454, fait au châ-
teau dudit Ségur^ constitua une rente au profit de
cette église et de Téglise de Saint-Eloi, sous la con-
dition d'une messe annuelle.
Près de cent ans ensuite, un certain Jacques du
Mas reçoit du roi de Navarre^ qui était seigneur de
Ségur, Tadministration de la justice sur une partie de
Saint-Julien.
Le chapitre collégial de Saint- Yrieix eut à s'occu-
per de notre paroisse relativement au temporel.
C'est ainsi que la Cellèrerie (1) se rattacha aux
possessions de ce chapitre.
(1) On dit souvent Cellèlerie et le propriétaire de ce domaine em-
ploie cette orthographe. Le tout, croyons-nous, par abus. Car ce nom
est incontestablement tiré du vocabulaire monastique. On appelait
a Cellèrerie » l'habitation ou les magasins du Cellérier. Et le Gellé-
rier était celui qui pourvoyait à la nourriture des religieux d'un cou-
vent. Or, on comprendra que la susdite Cellèlerie ait été une cellère-
rie et que c'est l'appellation qu'il faut lui restituer, quand on saura
qu'indépendamment du nom que l'on sait et du fait que nous avons
rapporté, lesquels fixent incontestablement la probabilité, existent des
preuves morales qui donnent une quasi* certitude.
Ainsi :
1* Non loin de là, il y a un endroit dit « Les Dames ». J'avoue
n'être pas documenté, mais ne pouvait-il pas y exister un couvent de
religieuses, de Dames, dont le magasin de vivres aurait été à La
Cellèlerie^ qui en aurait gardé le nom légèrement altéré ?
2* Dans la commune de Saint-Eloi, mais tout près également, car
cette commune est limitrophe de Saint-Julien, à un petit terroir qu'on
appelle « Les Buis » et qui est, en efifet, une buissière, il y a l'em-
placement et même quelques ruines d'une ancienne et vaste construc-
i
— 297 —
La Penchènerie et la Forêt furent des domaines
dont le revenu était perçu par ce même chapitre.
J'ai eu en mains plusieurs quittances délivrées aux
fermiers de ces terres par un chanoine Bayle, délégué
pour ce faire par ses confrères arédiens (1).
Le premier curé que nous voyons mentionné est
M. Tabbé Dupuy, 1602. Ensuite viennent : M. Du-
tion. Pour le vulgaire, ce fut un château. Quelques personnes érudi-
tes m'ont assuré que ce fut un monastère.
N'est-ce pas une présomption de plus en faveur de la Cellèrerie ?
Et puis ce n'est pas tout : ce que l'on s'obstine à nommer celièlerie
ayant été une véritable cellèrerie, en a conservé à peu près l'appella-
tien, comme nous le voyons ; mais, surtout, en a gardé les attitudes
de maison d'abondance qui rappellent son passé : je veux dire des ha-
bitudes d'hospitalité qui sont sa marque distinctive.
Quel est le visiteur ou le commissionnaire qui soit jamais revenu
de la Cellèrerie, à laquelle nous restituons définitivement son vérita-
ble nom, sans « casser une croûte et boire un petit coup » ?...
(1) Etymologie :
Penchènerie = carderie, lieu où l'on sérance la filasse. La Penchè-
nerie fut, précédemment, quelque construction féodale : château, re-
paire, etc Les débris de cette construction servirent à l'édification
de la maison actuelle de la Penchènerie.
Nous parlons, on le comprend, de la Penchènerie-Basse. Car depuis
une vingtaine d'années il y a une Penchènerie Hante. — Bien que
nous ayons dans cette maison de bons amis, nous ne pouvons leur
conférer une antiquité qu'ils ne possèdent pas.
La Forêt fournit une etymologie sur laquelle il est inutile d'insis-
ter. Mais rien de sauvage, là-dedans. Nous y avons reçu, plusieurs
fois, une hospitalité des plus aimables. Et nous y avons entendu tou-
cher du piano comme on a de la peine à le faire dans les milieux les
plus artistes.
Indépendamment de la Penchènerie et de la Forêt, il y a, dans la
commune, un autre grand domaine : c'est celui du Verdier, apparte-
nant à M. Hougier. Cette propriété-là doit avoir son histoire. Mais
on nous pardonnera de ne pas la raconter : nous ne la savons pas !...
— 298 —
mas, 1723; M. Champalimard, 1761 ; M. de Gay de
Vernon, 1782.
A répoque de la Révolution, le curé était M. de
la Morélie des Biards (1), qui fut^ après la Tourmente,
curé de Saint- Yrieix-la-Perche, sa ville natale, où il
mourut en 1817.
A cette même Révolution, le presbytère fut vendu
comme bien national. 11 fut acheté par un M. Rey-
naud, ascendant du propriétaire actuel de la Cellè-
rerie, et mis à la disposition de Tévêque pour y loger
le desservant.
Ce presbytère est, aujourd'hui, par suite de la loi
sur la séparation de TEglise et de TEtat, l'objet d'une
contestation entre la commune de Saint-Julien et les
héritiers de l'acquéreur.
En 1803, M. Tabbé de Beaune-Larivière prit pos-
session, sous le régime du Concordat, de cette maison
presbytérale ; elle passa, en 1812, à M. Gouyon; en
1825, à M. Dubaï. Ce M. Dubaï, que Mgr Bertaud
appelait le <r Chrysostôme champêtre », s'y trouvait
encore à la Révolution de 1848 ; il eut considérable-
ment à souffrir de la part de quelques paroissiens.
Mais laissons ce souvenir
Nous trouvons après M. Dubaï, qui fut l'oncle par
alliance de M. le Maire actuel, les abbés Treil, Roux,
Teillol, Prochasson, Margerie.
Vers 1886, le curé de la paroisse était M. Magne^
docteur en théologie, et frère d'un autre abbé Magne,
au même moment curé de Saint-Eloi.
(t) Il y a, dans la région, les ruines et les souterrains d'un château
de la Morélie, lequel était, au Moyen-Age, un fief de la seigneurie de
Payzac.
— 299 —
En i 893-94, le curé, M. Gayon^ était bineur de ce
même Saint-Eloi, qui n'avait pas, alors, de titulaire.
Le prêtre qui a vu, à Saint-Julien, la fin du régime
concordataire, est le curé actuel, M. Tabbé Jean Va-
lette, anciennement vicaire à Turenne.
Cet ecclésiastique saura organiser intelligemment,
pour ce qui le concerne, le nouveau régime du culte.
Et les historiens de l'avenir n'auront à noter, quand
il s'agira de cette paroisse, que des choses avanta-
geuses et des événements heureux.
C'est notre vœu le plus sincère.
P.-J.-B. JOFFRE.
TITRES & DOCUMENTS
LE LIMOUSIN & LE QUERCY
Les Abbés limousins de l'Abbaye nouvelle
en gourdonnais
L'Abbaye Nouvelle (1), entre Gourdon et Salviac, fut
fondée en 1242 (n. st.) par les religieux d'Obazine sur
des terres qui leur furent données par Guillaume de
Gourdon, seigneur de Salviac (2), à qui devait succé-
der dans cette seigneurie Aymeric de Malemort. Fille
d'une abbaye limousine^ il n'est pas étonnant qu'elle
ait eu à sa tête assez souvent des abbés limousins.
Le premier abbé semble avoir été Odo de Ventadour.
Nous ne le connaissons que par l'ancienne Gallia. .
Les auteurs de la nouvelle Gallia le rejettent pour
cette raison que dom Boyer ne l'a pas trouvé dans
les archives du monastère (3). La raison n'est guère
(1) Commune de Léobard, canton de Salviac, autrefois en l'archi-
prêtré de Gourdon, ce qui la fait appeler quelquefois Notre-Dame-la-
Nouvelle en Gourdonnais, ou môme Notre-Dame de Gourdon, ce qui
a causé de nombreuses confusions.
(2) Gallia I, col. 187. On y trouve le texte de la fondation. Si le tra-
ducteur de la Vie de saint Etienne (Tulle, 1881) l'avait parcouru, il
n'aurait peut-être pas écrit, p. 214, que Guillaume de Gondon, sei-
gneur de Sauviat, avait donné en 1241 Aubecbassaigne, alors que
Boiran de Prevayras donnait Groscaires, etc. C'est Guillaume de
Gourdon, seigneur de Salviac, qui donne tout à la fois Albecassagne.
la Borie de las Prevayries, Groscayrou, etc. Les lieux nommés par la
Gallia se retrouvent encore dans les communes de Léobard et de
Salviac. A la suite de cette donation, mais assez loin pour qu'il ne
s'agisse pas de la même fondation, Guillaume de Gourdon cède ses
droits sur la fontaine de Meyraguet et sur Blanzaguet. C'est sans
doute en qualité de coseigneur de Belcastel qu'il fait cette donation,
laquelle se rattache aux possessions d'Obazine aux environs de Roca-
madour.
(3) l\ suffit de lire le journal de voyage de dom Boyer (publié par
M. Ant. Verrière, Clermont-Ferrand, 1886), pour se rendre compte
que ce savant bénédictin faisait parfois un peu vite ses recherches
dans les archives.
— 302 —
péremptoire puisque j'ai trouvé une bonne dizaine
d^abbés que dom Boyer n'a pas connus, mais qui sont
pourtant nommés dans les documents les plus sérieux.
Les premiers successeurs d'Odo de Ventadour furent
peut-être aussi des Limousins, mais les documents
ne nous permettent pas de Taffirmer.
Il nous faut aller jusque vers la fin du xv* siècle
pour donner des affirmations précises, mais alors les
abbés limousins abondent, malgré la médiocrité des
revenus de TAbbaye Nouvelle (1).
C'est d'abord Jean Loubaudi ou Lebaudy, nommé
dans la Gallia. La bulle de Sixte IV, du 12 octobre
1477, adressée à Tabbé de Meymac (Limoges) pour
lui faire subir Texamen canonique, car il n'avait que
24 ans, avant de lui donner l'investiture au nom du
Pape^ nous apprend qu'il était moine de Bonaigues
(Limoges). La bulle nous fait connaître également
qu'il succédait à Jean de la Grange (abbé inconnu à
la Gallia et sans doute des La Grange de La Vercan-
tière). A cette date le monastère n'avait qu'un seul
religieux et son revenu ne dépassait pas 80 livres
petits tournois. L'abbé pourra recevoir la bénédiction
abbatiale du prélat de son choix (2). Jean Loubaudi fai-
sait un arrentement en 1479 (d'après une pièce du
XVII* siècle).
Il eut pour successeur, nous ne savons pas préci-
sément à quelle date, Jean de Ventadour^ abbé
d'Obazine depuis 1476 et protonotaire du Saint-Siège.
(1) L'abbaye est moins taxée sur les listes de décimes, même au
xiv* siècle, que l'abbaye séculière du Vigan ou Téglise de Gourdon»
dans le même archiprêtré^
(2) Pièces justificatives, q* I.
— 303 —
Celui-ci est bien connu de tous les auteurs conime
ayant eu à la fois les deux abbayes en commende.
A la date du 23 juin 1494 il payait en cour de Rome
pour le commun service — ce qui me parait indi-
quer une nomination toute récente — la somme de
15 ducats d'or et de 68 bolonais. Nous avons à son
sujet une bulle du 7 juillet 1502. Le peu de ressources
de la mense ne permettait pas à Tabbé d'augmenter
le nombre des religieux et de relever la partie dé-
truite des bâtiments claustraux. Mais le visiteur de
Citeaux, Jean, abbé de la Faise au diocèse de Bor-
deaux, voulait l'obliger sous peine des censures ecclé-
siastiques, à entretenir six religieux de plus et à
réparer ou à reconstruire à ses frais les cloîtres, le
réfectoire, le dortoir et l'église, fixant pour cela un
terme assez court, et nommant lui-même un prieur
claustral. Il exigeait aussi que l'abbé fit chanter tous
les jours deux messes dans l'église du moustier, ce
qui n'avait jamais été inséré dans les statuts* Ce
nouveau règlement avait l'inconvénient de trop exi-
ger d'une seule fois et de léser grièvement Jean de
Ventadour qui aurait peut-être fait quelque chose et
qui d'ailleurs ne fut pas cité ni convoqué par le visi-
teur. Il fit appel au Pape en demandant une enquête.
Le Pape écrivit au prévôt de Brivazac^ aux officiaux
de Tulle et de Limoges de faire cette enquête en
présence des deux personnages intéressés (2). Nous ne
connaissons pas le résultat de cette enquête; nous
savons seulement qu'il n'y eut jamais après cette
époque plus d'un ou de deux religieux à l'abbaye de
(1) Arch. Vat. Introitus et ExUua (Livres de comptes), 526, f. 79 v*.
(2) Voir pièce justificative, n* 11.
— 304 —
Gourdon, et que les bâtiments claustraux furent tou-
jours en mauvais état. Au xviii* siècle il n'y avait de
bonnes que deux chambres servant de presbytère au
curé de la paroisse, ef la moitié de Téglise abbatiale
seule était en bon état.
Le 15 septembre 1518 un autre Limousin succédait
à Jean de Ventadour. C'était maître Jean des PlaSy
Tainé, familier et commensal du cardinal Julien de
Médicis, le futur Clément VII. La date de 1518 étant
celle de la mort de Jean de Ventadour, pourrait faire
croire que la vacance avait cette mort pour cause^
mais la bulle nous apprend que Tabbaye était vacante
depuis assez longtemps pour que la collation en revînt
au Pape. Il faut croire que Jean de Ventadour avait
résigné peu après 1504, où il assiste au chapitre
général de Citeaux comme abbé d'Obasine et de la
Nouvelle. La même bulle nous apprend que Jean des
Plas était recteur de Meyssac(l). Il ne tarda pas à
résigner les deux bénéfices en même temps (3 juillet
1519), en se réservant toutefois une petite pension (?).
Sans tarder d'ailleurs^ son protecteur, devenu pape,
le nommait (15?4) à Tévêché de Périgueux. La famille
des Plas, de Curemonte, possédait à cette date le
château de Salgues, près Rocamadour, c'est ce qui
explique qu'on ait pu les dire d'origine quercynoise,
lui et son frère Annet qui le remplaça comme évèque
de Bazas, (voir Gallia, I, col. 1209, et II, col. 1483).
Après lui, et peut-être déjà de son temps, ce qui
expliquerait sa résignation si tôt effectuée^ l'Abbaye
(1) Arch. Vat. Reg. Valic, 1129, f. 257.
{%) Ibid., vol. 1137, f. 73. — Je n*ai relevé aux Archives Vaticanes que
l'analyse de cette bulle et de la précédente.
— 305 —
Nouvelle était disputée entre divers compétiteurs.
L'année où le Pape la confère à François de Lévis
de VentadouTj neveu de Jean de Ventadour, nous
trouvons avec le titre d'abbés Jean Vilaris (la Gallia
met Vialard), moine de Lagarde-Dieu qui obtint dis-
pense pour avoir d'autres bénéfices afin de soutenir
les frais du procès occasionné par celui-là (1)^ et Jean
Vernoujol ou Vernojoul, que la bulle de François
de Lévis nous montre résignant en sa faveur, sous
réserve d'une petite pension de 10 ducats d'or. Cette
bulle du 5 novembre 1529(2) nous fait connaître les
bénéfices du nouveau titulaire à cette date : il est
évêque de Tulle, abbé d'Obazine, prieur de Saint-
Ange de Saint-Angel, chanoine du Puy, archidiacre
de Viviers avec canonicat et prébende et prieur de
Saint-Michel de Charaix(3). Il fut également^ mais
plus tard^ on va le voir^ abbé de Valette. M. Niel,
dans son Histoire des Évêques de Tulley a soutenu
le contraire. Malheureusement, en l'absence de docu-
ments, il a soutenu son opinion négative par des
arguments qui n'ont aucune valeur en histoire et qui
peuvent avoir les plus graves inconvénients^ c'est-
à-dire par des arguments a priori^ des arguments
de sentiment (4). Il fait mieux loucher du doigt ainsi
par ses observations les abus trop réels des com-
(1) Arch. Vat. Re.g, du Latran, 1511, f. 239 v.
(2) Voir pièces justificatives, n" III.
(3) Commune de Privas (Ardèche), prieuré de Chanoines Réguliers
de Saint-Augustin dont il ne reste rien. (Docteur Francus, Autour de
Privas, 1882, ch. vuu\
(4) Bulletin de la Société archéologique de Brive, t. XI, p. 109, sqq.
Pour M. Niel, supposer que François de Lévis avait pu garder tant de
bénéfices, c ce serait supposer gratuitement sans doute cet homme,
ce prêtre, cet évoque bien rapace », etc.
— 306 —
mendes; mais qui songe à excuser ces abus? II a
d'ailleurs fait deux abbayes de la Nouvelle et de
Gourdon, ce qui chargeait encore davantage le béné-
ficier. Je donne la bulle de François de Lévis de
Ventadour aux Pièces justificatives, n*" III.
Deux ans après avoir été investi de l'Abbaye Nou-
velle, François permuta ce bénéfice contre Tabbaye
de Valette avec son frère Charles de LéviSj notaire
apostolique du Saint-Siège^ chanoine de Viviers (peut-
être en remplacement de François). Charles, présenté
pour l'Abbaye Nouvelle par le roi de France, était
autorisé par le Pape à garder le prieuré de Saint-
Priest (0. S. B.) au diocèse de Limoges. Par bulles
du même jour (2 mars 1531), François recevait l'ab-
baye de Valette. Je n'ai pas fait copier les bulles des
deux investitures, mais l'analyse ci-dessus en donne
l'essentiel (1).
On^peut encore citer parmi les abbés limousins de
l'Abbaye Nouvelle^ Hugues de Lostanges^ fils pos-
thume de Jean-Louis de Lostanges, marquis de Saint-
Alvère, qui posséda l'abbaye vers 1650, et F. Baillotj
curé de Saint-Michel de Limoges, abbé vers 1726^
mort en 1739; mais je ne possède aucun document
inédit' sur ces personnages.
Les notes ci-dessus, tout en complétant ce qui con-
cerne l'histoire de l'abbaye nouvelle, auront l'avan-
tage de préciser un peu ce que l'on savait déjà et
d'apprendre quelque chose de nouveau sur les Li-
mousins qui possédèrent ce bénéfice^ et j'ai pensé que
(1) Arch. Vat. Reg. du V&L, 1351, ff. 34 (bulle de François) et ff. 192
(bulle de Charles).
— 307 —
la Société archéologique de Brive leur donnerait la
gracieuse hospitalité de son Bulletin,
Ed. Albe.
PIÈCES JUSTIFICATIVES
I
Bulle au sujet de la nomination de Jean Loubaudy,
moine de Bonaigue 6 octobre i477(l).
Siztus etc. dilecto filio abbati monasterii de Meymaco,
Lemovicen. diocesis, salutem etc. Solicite considerationis
etc.. Dudum siquidem provisiones ecclesiarum et monaste-
riorum omnium etc. Cum itaque postmodum monasterium
Béate Marie, Abbatia nova nuncupatum, Cisterciensis Or-
dinis, Caturcensis diocesis, ex eo quod dilectus filius Johan-
nes de la Grangia, nuper ipsius monasterii abbas, regimini
et administrationi dicti monasterii, cui tune preerat, per
dilectum filium Jacobum Carpentarii, canonicum Leonen-
sem, procuratorem suum ad hoc ab eo specialiter consti-
tutum, hodie in manibus nostris sponte et libère cessit,
nosque cessionem ipsam duximus admittendam, apud sedem
ipsam vacaverit et vacet ad presens ; Nos, cupientes eidem
monasterio, de cujus provisione nullus prêter nos, hac vice,
se intromittere potuit sive potest, reservatione et decreto
obsistentibus supradictis (2), ne longe vacationis eiponatur
incommodis, de persona utili et idonea, per quam circum-
specte régi et salubriter dirigi valeat, providere, ac de
meritis et idoneitate dilecti ûlii Johannis Loubaudi, mona-
chi monasterii Boneaque, dicti ordinis, Lemovicensis dio-
cesis, apud nos de religionis zelo, vite mundicia, honestate
(1) Archives du Vatican. Reg, du Latran, 744, f. GXXI.
(2) Le décret réservant au Pape la collation des bénéfices résignés
entre ses mains est cité au commencement de la bulle.
I
(
— 308 —
morum, spiritualium providentia et temporalium circum-
spectione aliisque virtutum donis multipliciter commendati,
certam noticiam non habentes, ipsumque Johannem Lou-
baudi a quibusvis excommunicationis etc.. censentes, dis-
crétion! tue per apostolica scripta mandamus quatenus de
meritis et ydoneilate dicti Johannis Loubaudi, qui, ut
asserit, ipsura ordinem expresse professus, et in vicesimo-
I quarto sue etatis anno constilutus existit, te diligenter in-
{ formes, et si per informationem hujusmodi ipsum Johannem
* Loubaudi ad regimen et administrationem dicti monasterii
* Béate Marie utilem et idoneum fore reppereris, super quo
, tuam conscientiam oneramus, de persona sua prefato monas-
terio Béate Marie, quod licet habitu monasticum sit, numéro
tamen monachorum dempto uno (ut etiam asseritur) earet,
, et a monasterio de Albasina (sic), Ordinis et Lemovicensis
diocesis predictorum, dependet, cujus fructus redditus et
proventus octuaginta librarum turonensium parvorum, se-
» cundum coramunem extimationem , valorem annuum (ut
. similiter asseritur) non excedunt, sive ut premittilur, sive
f • alias quovis modo, aut ex alterius cujuscunque persona vacet,
et ex quavis causa ejus dispositio ad sedem predictam spe-
I cialiter vel generaliter pertineat, auctoritate nostra provi-
deas, ipsumque illi preficias in abbatem, curam, regimen et
! administrationem dicti monasterii Béate Marie sibi in spi-
ritualibus et temporalibus plenarie committendo, ac faciendo
ei a conventu, si inibi esse contigerit, obedientiam et réve-
il rentiam et a dilectis filiis vasallis et aliis subditis dicti
* monasterii Béate Marie consueta jura et servitia ei débita
intègre exhiberi etc.. Nos enim, si provisionem et prefec-
tionem hujusmodi per te vigore presentium fieri contigerit,
ut prefertur, eidem Johanni Loubaudi ut a quocunque ma-
luerit catholico antistite, gratiam et communionem dicte
sedis habente, munus benedictionis suscipere, ac eidem
antistiti, ut illud sibi impendere licite possit, concedimus,
ac cum eodem Johanne Loubaudi, ut predicto monasterio
Béate Marie preesse ac illius curam, regimen et adminis-
trationem hujusmodi suscipere, illudque in spiritualibus et
- 309 —
temporalibus gerere libère liciteque valeat, defectu etatis
prémisse, quem ad id patitur in illius anno predicto consti-
lutus ut prefertur, ac Lateranensis Concilii et aliis aposto-
liciscoxislitulionibus, etc.. ceterisque contrariis nequaquam
obstantibus, auctoritale aposlolica tenore presentium de
speciali gratia dispensamus. Volentes quod idem antistes
qui prefato Johanni Loubaudi munus hujusmodi impendet
posquam illud sibi impenderit, ab eo, nostro et Romane
ecclesie nomine, fidelitatis débite solitum recipiat juramen-
tum etc.. Datum Rome, apud Sanctum Petrum, anno Incar-
nationis Dominice millesimo quadringcntesimo sepluagesimo
septimo, quarto Non. Octobris, anno quarto — N. Gravil-
iiati(l).
H
Enquête demandée par Jean de Ventadour contre un
règlement du visiteur de Citeaux (2) (1 juillet 1502),
Alexander etc. Dilectis filiis Preposito prepositure de Bri-
vasaco, Lemovicensis diocesis, et Tutellensi ac Lemovicensi
officialibus salutem etc. Humilibus etc. Exhibita siquidem
nobis nuper pro parte dilecti filii magistri Johannis de Ven-
thadoro, notarii nostriy qui, ut asserit, monaslerium Béate
Marie de Gordonio, alias de Abbatia nova, Cisterciensis
ordinis, Caturcensis diocesis, ex concessione et dispensa-
tione apostolica, obtinet in commendam, petitio continebat
quod, licet idem Johannes in eodem monasterio religiosos
recipere, et edificia ejusdem, ultra quod illius ad hoc se
extendant facultates, reparare non tenealur, necnon depula-
tio prioris claustralis dicti monasterii ad abbatem seu com-
mendatarium ipsius monasterii, pro tempore existentem, de
an tiqua et approbala hactenusque pacifice observata consue-
tudine légitime pertineat, lamen dilectus Illius Johannes,
abbjs monasterii Béate Marie de Feysia, dicti ordinis, Bur-
(1) Au haut de la copie, en marge, Ja. Bigneti
(2) Arch. Vat., reg. du Lalran, 1103, f. 6 v.
T. XXX. 3-4
— 310 —
degalensis diocesis, qui pro coraraissario ad hoc per certos
difflnitores ejusdera ordinis deputato se gerebat, dictum mo-
nasterium de Gordonio, ut dicebat, visitando, quod idem
Johannes commendatarius sex religiosos ultra inibi existen-
tes recipere, ac eis vite necessaria ministrare, necnon claus-
tra, refectorium, dormitorium ac ecclesiam ejusdem monas-
terii de Gordonio suis impensis, infra certos tune expressos
notorie nimis brèves terminos, restaurare seu de iiovo cons-
trui facere, quamvis ad hoc ipsius monasterii de Gordonio
fructvs^ redditus et proventus non suppetant^ quodque
singulis diebus duas missas alta voce in ecclesia hujusmodi
celebrare facere teneretur, quamvis juxta slatuta et consue-
tudines dicti monasterii de Gordonio ad id minime astringa-
tur, inter alia eodem Johanne commendatario ad hoc non
vocato nec citato, et quod idem Johannes commendatarius
premissa adimplere sub certis censuris ecclesiasticis de
facto decrevit et ordinavit, ac in eodem monasterio de Gor-
donio certum priorem pro suo libito voluntalis, etiam de
facto, deputavit. Unde, pro parte ejusdem Johannis com-
mendatarii, quamprimum premissa, ad ejus notitiam deve-
nerunt, sentientis exinde indebite se gravari, ad sedem fuit
apostolicam appellatum, et deinde nobis humiliter supplica-
tum ut eum ab excommunicationis ac quibusvis aliis sen-
tentiis, censuris et pénis ecclesiasticis in eum per dictum
Johannem abbatem, ac alias, premissorum occasione, quali-
tercumque inflictis, ad cautelam absolvi mandarc, nec non
appellationis predicte ac post et contra eum forsan aitemp-
tatorum et innovatorum quorumcumque, nullitatis ordina-
tionis et decreti ac deputationis et censurarum ac penarum
hujusmodi aliorumque omnium et singulorum per dictum
Johannem abbatem et quosvis alios in ipsorum Johannis
commendalarii et monasterii de Gordonio prejudicium circa
premissa gestorum, negotiique principalis hujusmodi causas
aliquibus probis vivis in partibus illis commiltere aliasque
in premissis ei oportune providere de benignitate apostôlica
dignaremur. Nos igitur, hujusmodi supplicationibus incli-
nati, discretioni vestre per aposlolica scripta mandamus
- 311 —
quatenus vos vel duo aut unus vestrum, vocatis prefato
Johanne abbate et aliis qui fuerint evocaadi, eidem Johanni
commendalario, si hoc humiliter petierit, recepta tamen
prius ab eo cautione ydonea super eo quo excommunicatus
ac aliis sententiis censuris et pénis prediclis irretilus habe-
tur, quod si excommunicationis et alias sententias, censuras
et penas hujusmodi in eum fuisse juste latas vobis constite-
rit, vestrisque et ecclesie mandatis parebil, ab excommuni-
cationis ac aliis sententiis, censuris et pénis predictis, abso-
lutionis beneficium ad cautelam, si et prout justum fuerit,
auctoritate nostra, hac vice dumtaxat, impendatis ; super
aliis vero, auditis hinc inde proposilis, etiam de negotio
principali hujusmodi cognoscentes légitime, quod juslum
fuerit, appellatione remota, decernatis, facientes quod decre-
veritis per censuram ecclesiasticam fîrmiter observari. Tes-
tes etc. Non obstantibus etc. Datum Rome, apud Sanctum
Petrum, anno incarnationis Dominice millesimo quingente-
simo secundo, Non. Julii, anno decimo.
B. BoLis (1).
III
Collation de VAbbaye Nouvelle à F^" Lévis de Ventadour^
év. de Tulle et abbé d'0bazlne(2] (5 novembre 1529)
Clemens etc. Venerabili fratri Francisco de Levis episcopo
Tutellensi salutem etc. Romani Pontiricisetc....Sanemonas-
terio Novo nuncupato Béate Marie de Gordonio, Cistercien-
sis ordinis, Caturcensis diocesis, prius per nos privilegiis et
indultis apostolicis eidem ordini concessis, quibus inter alia
cavetur expresse quod nuUus abbas dicti ordinis regimini
monasterii cui preest, absque licenlia et consensu capituli
generalis ipsius ordinis, cedere quoquo modo possit, sub
excommunicationis late sententie pena précédente, et cum
(1) Et en marge, en haut de la copie : Jo. Ortega.
(2) Arch. Var., rey. du Vatican, 1341, f. 25.
- 31? -
de cujus persona dicto raonasterio per cessionem eandem
tune vacante provisum fuerit eo ipso incurrenda, nisi hujus-
modi cessio in manibus Romani Pontificis pro tempore
existentis facta et per eum in suo consislorio secretoadmissa
fuerit derogando, ex eo quod dileclus filius Johannes Ver-
I noujol, nuper ipsius monasterii abbas, regimini et admini-
strationi illius cui tune preerat, per dilectum filium Fran-
' ciscum Chabaudi, clericum Lugdunensis diocesis, proeura-
I torem suum ad hoc ab eo specialiter constitutum, in manibus
nostris in tui favorem etcommodum (pensione tamen annua
decem ducatorum auri de Cameva, super fructibus reddi-
tibus et proventibus ejusdem monasterii, eidem Johanni
per te et tuos in dicto monaslerio Béate Marie successores
annis singulis persolvenda, reservata, constituta et assi-
gnata, et non alias, aliter, née alio modo) sponte et libère
eessit, nosque cessionem ipsam duximus admit<endam ,
abbatis regimine destituto ; Nos tam eidem monasterio de
I gubernatore utili et ydoneo per quem circumspecte régi et
salubriter dirigi valeat quam tibi . quem Carissimus in
Christo filius noster Franciscus, Francorum rex Christia-
nissimus, pretexlu concordatorum inler eum et sedem
apostolicam super promotione personarum , certis inibi
expressis modis, qualificatarum ad ecclesias et monasteria
regni Francie, et certorura aliorum locorum eidem régi sub-
jectorum. pro tempore vacantia lacienda, dudum initorura,
nobis ad hoc per suas litteras nominavitseu pro quoscripsil,
quique, ut asseris, de nobili eliam comitum et baronum
génère ex utroque parente procreatus existis, ac Vivarien.
et Anicien. canonicatus et piebendas, nec non que inibi
dignitas, non tamen post pontificalem major, existit archi-
diaconatum ejusdem Vivariensisecclesie, ac Sancti Michael-
lis (sic) de Chariussio et Sancti Angeli de Sancto Angelo
prioratusconventuales, necnon monasterium Obasine, Sancti
Benedicti et Sancti Augustini, ac predieti Cistercien. (1)
ordinum, Vivariensis et Lemovicensis dioeesum, in tituiuna
(1) Ordre de saint Benoit : saint Angel ;
Ordre de saint Augustin : Charaix ;
— 313 —
et commendam ex dispensatione et concessione apostolica
obtines, ac quod dictus Johannes et certi ejus adversarii co-
ram certis judiciDus secularibus partiutn illarum super pos-
sessione seu quasi regiminis ipsius monasterii Béate Marie
diutius se molestarunt, et forsan ad hue molestabant, ut sta-
tum tuum juxla pontificalis dignilatis cxigenliam decenlius
tenere valeas, de alicujus subventionis auxilio (I) providere
volentes, teque aquibusvis excommunicalionis etc cen-
sentes necnon canonicatum et prebendarum ac archidiaco-
natus et prioratuum, necnon monasterii Obasine predicto-
rum, frucluum, reddituum et proventuum veros annuos
valores presentibus pro expressis habenles, monasterium
Béate Marie predictum, de quo consistorialiter disponi non
consuevit et quod a dicto monasterio Obasine dependet. ac
cujus fructus, redditus et proventus vigintiquatuor ducato-
rum auri de Caniera secundum communem extimationem
valorem annuum ut etiam asseris non excedunt, sive pre-
misso etc dummodo, tempore date presentium eidem
monasterio Béate Marie de abbate provisum aut illud alteri
commendatum canonice non existât, cum omnibus juribus
et pertinentiis suis tibi per te quoad vixeris, etiam una cum
ecclesia Tutellensi, cui preesse dinosceris, ac canonicatibus
et prebendis necnon archidiaconatui ac prioratibus et mo-
nasterio de Obasina prediclis tenendum, regendum et guber-
nandum, ita quod liceat tibi, debitis et consuetis ipsius mo-
nasterii Béate Marie ac dilectoriim filiorum illius conventus
supportatis oneribus, àc quarta, si abbatialis separata et
seorsum ac conventuali, si vero communis mensa inibi
fuerit tertia parte omnium fructuum, reddituum et proven-
tuum monasterii Béate Marie hujusmodi in restaurationem
illius Fabrice seu ornamentorum, emptionem vel fulcimen-
tum, aut pauperum alimoniam, prout in anno exegerit et
suaserit nécessitas, omnibus aliis deductis oneribus, annis
Ordre de Cileaux : Obasine, — prœdicti, parce que déjà l'ordre de
Citeaux a été nommé à propos de Notre-Dame de Gourdon.
(1) Les revenus de l'évêché de Tulle étant trop peu importants pour
que François de Lévis pût vivre selon les convenances de sa situa-
tion.
— 314 -
singulis impartita, de rcsiduis illius fruclibus, redditibue et
proventibus disponere et ordinare sicuti ipsius monasterii
Béate Marie abbates qui pro tempore fuerunt de illis dispo-
nere et ordinare potuerunt seu etiam debuerunt, alienatione
tamen quorumcunque bonorum immobilium et pretiosorum
mobilium dicti monasterii Béate Marie tibi penitus inter-
dicta, auctoritate apostolica commendamus. Et quatenus
dictum monasterium Béate Marie litigiosum sit, ut prefer-
tur, te dummodo in illius regimine et administratione pre-
fatis intrusus non fueris, in omni jure et ad omne jus quod
ipsi Johanni in eisdem regimine et administratione vel ad
illa quomodolibet competebat aut competere poterat. aucto-
ritate predicta surrogamus, dictumque jus tibi concedimus,
teque ad hujusmodi jus necnon ejus ac litis et cause predic-
tarum prosecutionem et defensionem in eo statu in quo ipse
Johannes tempore cessionis hujusmodi eHt et si illam non
fecisset, posset et deberet adraitti etiam ad possessionem
eorundem regiminis et administrationis, seu quasi, in qua
idem Johannes forsan existebat eadem auctoritate admitti-
mus et admittendum fore, necnon si per eventum litis hu-
jusmodi judici seu judicibus, coram quibus pendet, consti-
terit neutri seu nulli Johannis et aliorum coUitigantium
hujusmodi, seu etiam tui, postquam lis ipsa etiam quoad te
coram eis légitime introducta fuerit jus in regimine et admi-
nistratione prefatis seu ad illa competisse aut competere re-
gimen et administrationem hujusmodi pcr eosdera judices
tibi. admittenda fore et adjudicari débere decernimus. Quo-
circa dilectis filiis archidiacono Fesensaguelli in ecclesia
Lodoven. et Vivarien. ac Sarlatensi officialibus (1) etc
Datum Bononie, anno etc. millesimo quingentesimo vige-
simo nono Nonis Novembris, pontificatus nostri anno sexto.
A. DE Castillo. F. Bernardus.
M. DE Braciis, pro computatore*
Collât. B. DE Alexandrie (2).
(1) Ce sont les exécuteurs de la bulle.
(2) Et en haut de la copie, en marge : E. Sgutarius.
GROTTE DE LA FONT-ROBERT
Près BRIVE (Corhèze)
PAR LES
Abbés L. BARDON, A. et J. BOUYSSONiE
Il y a déjà longtemps, M. Louis de Nussac qui nous gui-
dait dans nos promenades de reconnaissance des gisements
préhistoriques, aux environs de Brive, nous avait conduits
au lieu dit, Les Sablières, dans la vallée de Planche-Torte,
à 1.500 mètres environ en aval du viaduc de la ligne de
Brive à Cahors. Le champ qui porte ce nom s'étend juste au
pied du versant méridional du plateau de Bassaler : on y
ramassait de nombreux silex. Cette circonstance nous amena
à chercher s'il n'y aurait pas quelque grotte préhistorique
cachée par les taillis, sur la pente rapide qui descend du
plateau. Les recherches furent entreprises de concert avec
M. le comte et M"*" la comtesse de Thévenard, propriétaires
du terrain, dont le château s'élève sur le plateau lui-même
dominant la riante et large vallée de la Corrèze, au Nord, le
vallon plus agreste de Planche-Torte, au Midi.
Trois stations jusqu'ici ont été découvertes, et deux sont
entièrement explorées, que nous avons nommées la Font-
Robert et la Font- Yves. Les fouilles ont été menées avec
grand soin ; elles étaient faites par le vieux domestique de
la maison, Pierre, sous le contrôle constant de nous-mêmes
et de M"' de Thévenard. Enûn, les séries recueillies sont
conservées au château de Bassaler, où nous avons pu les
— 316 —
classer et les étudier à loisir. Nous sommes heureux de
publier le résultat très fructueux de ces recherches.
Nous ne parlerons aujourd'hui que de la Font-Robert, la
première station trouvée et terminée. Nous Tavons présentée
au Congrès Préhistorique International de Monaco (1906),
et lei séries qui en provenaient ont fort intéressé par leur
nouveauté un grand nombre de préhistoriens les plus con-
naisseurs, comme MM. Cartailhac, Rutot et Breuil. Le
compte rendu du Congrès (2" vol.) contiendra une monogra-
phie, dont cet article n'est qu'une reproduction légèrement
modifiée et complétée sur quelques points par suite de récen-
tes découvertes. De plus, nous donnons une série complète
de pièces dessinées, dont une partie seulement figure au
compte rendu du Congrès (1).
La Font-Robert est un abri long de 22 mètres, dont la
hauteur (au-dessus du sol primitif) varie entre 3 et 4 mètres
au bord de la voûte et diminue assez rapidement dans, l'in-
térieur de la grotte : elle forme une double salle, l'une plus
petite à gauche en regardant l'abri, dont la largeur et la
profondeur sont de 4 mètres environ ; l'autre, qui atteint
9 mètres 20 de profondeur, a son plafond soutenu vers son
milieu en avant par un gros pilier naturel, dont le pourtour
atteint une dizaine de mètres. Il n'y a pas apparence d'ébou-
lement, mais devant l'abri règne une terrasse naturelle dont
la largeur varie entre 7 mètres 50 et 3 mètres, et dont l'accès
est assez difficile. Le gisement ne présentait pas de niveaux
stratigraphiques, mais seulement de la terre végétale d'épais-
seur très variable, contenant quelques silex, et, au-dessous,
la couche archéologique, qui s'étendait sur toute la terrasse
(1) Déjà, au Congrès Préhistorique de Périgueux (1905), nous avions
porté quelques pièces de la Font Robert, à peine entamée alors, il y
avait en particulier une pointe à pédoncuîed'un joli travail qu*on a fort
remarquée ; si bien, même, que quoiqu'un de l'assemblée où elle cir-
culait, a oublié, dans son admiration, de lui faire continuer son che-
min. Malgré la réclamation du Président, la pièce n'a jamais été re-
trouvée. C'est celle qui est figurée dans le compte rendu du Congrès
(fig. 4) ; nous avions heureusement une esquisse au crayon, qui nous
a permis d'en faire un dessin d'une exactitude suffisante.
— 317 —
et pénétrait peu dans la grotte. Son épaisseur moyenne était
de 20 centimètres, avec quelques variations dues aux déni-
vellemcnts du sol.
Straiiqraphie, — En fait de foyer, il n'y en avait qu'un à
cendre noire vers le milieu ; encore n'élail-il pas gras au
toucher comme ceux de la Coumbadel-Bouïtou. Ailleurs,
c'étaient des masses de terre blanchâtre, non calcaire, très
dures dans les parties sèches, et qui paraissent bien être
dues à de la cendre de bois. Enfin, vers le milieu de la ter-
rasse, le sol était fait, sur plusieurs mètres carrés, d'un
pavage de galets roulés cassés, la face arrondie en haut et
cimentés de cendres grises.
Faune et mobilier, — Cette grotte, étant creusée dans les
grès, n'a pas conservé la faune.
Il n'a été trouvé ni gravure, ni sculpture et cependant
nous avons examiné avec grand soin de nombreux galets,
de formes variées, et en particulier des plaques de pierres
dures tout à fait propres à recevoir des dessins au burin.
Fig. 1 — Pendeloque en quartz. — La Font-Robert (Corrèze;, gr. nat.
En revanche, on a rencontré une fort jolie pendeloque
faite d'un petit galet de quartz blanc (fig. I), percé artificiel-
lement d'un trou incomplètement fermé, et une autre où le
trou est à peine ébauché ; puis de petites pierres plates na-
turellement arrondies, mais trouvées ensemble et réunies
ainsi évidemment d'une manière intentionnelle. Enfin,
comme d'habitude, des fragments d'ocrés aux couleurs va-
riées et très vives.
— 318 —
Nous arrivons à l'outillage qui vaut la peine, croyons-
nous, d'être étudié en détail.
Outillage. — Un bel instrument amygdaloïde, assez roulé,
en quartz de la région, a été découvert au premier coup de
pioche sur le bord même de la terrasse. Sa présence paraît
toute accidentelle ; la pièce a dû tomber là du plateau, dont
le bord surplombe légèrement ; on sait d'ailleurs que le pla-
teau de Bassaler a donné une riche industrie acheuléo-
moustérienne.
En dehors de cet instrument hors série, l'outillage com-
prend d'abord les pièces ordinaires de l'époque glyptique,
puis d'autres plus particulières et caractéristiques.
Fig. 2. — Grattoirs et burins divers. — La Font-Robert (Corréze). i/2 gr. nat.
.— 319 -
Grattoirs. — On en compte 268 de complets. Les deux tiers
sont sur bout de lames non retouchées et n'ont aucun carac-
tère particulier. L'autre tiers est plus différencié et com-
prend des grattoirs doubles (fig. 2, n» 1), ou associés avec le
burin (fig. 2, n°' 7, 8, 14), des grattoirs à retouches latérales
(fig. 2, DO* 2 et 5), d'autres circulaires (fig. 2, n° 6), ou obli-
ques (fig. 2, n° 4).
Il n'y a que 4 ou 5 grattoirs incurvés rappelant ceux de
Gorge d'Enfer, ou nucléiformes comme ceux de Brassem-
pouy (fig. 8, n° 22).
Burins, — Le nombre en est bien plus considérable : en-
viron 587. 11 faut dire que nous comptons dans ce total 167
burins de fortune, c'est-à-dire des pièces portant un biseau
intentionnel sur angle de lame tronquée, sans aucune retou-
che. Le reste, soit 420, se divise en deux groupes :
t** Les burins en biseau (150). Dans notre article du Con-
grès de Monaco nous avons glissé rapidement sur ces pièces,
notre attention étant plutôt attirée vers les outils caracté-
ristiques de cette grotte. Un examen plus attentif, venant
après notre étude approfondie de la grotte Lacoste, nous y
fait reconnaître tous les types de burins qui se rencontrent
dans cette dernière station, à savoir : les burins à facettes
dérivant du burin busqué (13) (fig. 2, n^ 9j, les burins pris-
matiques (5) et polyédriques (32), enfin, les burins ordinaires
en bec de flûte (t 10) (fig. 2, n° 1 1), toutefois ces derniers sont
notablement plus nombreux ; et, parmi les autres, un petit
nombre seulement sont nets, mais le sont parfaitement.
Les pièces sont assez souvent de grande dimension ; 30
sont doubles, ou associées à d'autres burins ou à des grat-
toirs (fig. 2, n" 8 à 10).
2° Les burins sur bord de lames à troncature retouchée
(270). Une cinquantaine sont du type fin et délicat, si abon-
dant à Noailles (fig. 2, no» 12 à 17) ; vingt sont au contraire
très forts et épais, comme aux Morts (fig. 2, n** 13). Le reste
est de taille moyenne : parmi eux, une centaine sont sim-
ples (les deux tiers ont leur burin à gauche) ; cinquante sont
— 320 —
doubles, c'est-à-dire présentent un burin latéral aux deux
extrémités (fig. 2, n*" 12 et 17).
Fig. 3. — Grattoirs-rabots divers. — La Font-Robert (Corrêze), 1/2 gr. nat.
Nucléi et Rabots, — Les nucléi sont relativement nom-
breux : une centaine. A côté de ces blocs de silex qui ne
paraissent pas avoir été autrement utilisés, il en est plus de
30 qui, par les retouches ou les traces d'usage qu'ils portent,
indiquent une utilisation ultérieure : ce sont de véritables
rabots, différents des grattoirs nucléiformes proprement
dits. Les uns sont longs, d'autres courts, d'autres en pyra-
mides (fig. 3, n° 21). Le bord est rectiligne (iig. 3, n° 19), ou
courbe (fig. 3, n° 20).
Une série de 27 plus étroits, à crête élevée, arrivent à être
des sortes de burins-ciseaux, et font transition avec les bu-
rins très épais.
D'autres, au contraire, très aplatis et fort utilisés, amènent
aux pièces écaillées ou esquillées.
Pièces écaillées, — On en compte plus de 100 (fig. 4, n©' 41
et 42], parmi lesquelles plusieurs grattoirs et plusieurs
fragments bien retouchés. Il y a une quarantaine de débris
qu'on pourrait nommer esquilles ou écailles. Nous n'insis-
terons pas sur ces sortes d'outils, étudiés longuement à pro-
pos du Bouïtou.
Lames sans retouches, — Elles sont au nombre de plu-
— 321 —
t
sieurs centaines, de longueur variant entre 3 et 15 centimè-
tres. Plus de 200, à section triangulaire, ont l'arête médiane
écrasée (voir la lame fig. 2, n° 1, transformée en grattoir)
plutôt que retouchée : étaii-ce là le résultat d'une utilisa-
tion, une retaille voulue, la crête du nucléus primitif, il est
Fig. 4. - 23 à 29. 38 à 0 et 43, lames relouchéês diverses ; 30 à 37. lamelles à crête retouchée ;
41 et 4?, pièces csquillées. — La Font-Robert (Corréze). 1/2 gr. nat.
- 322 —
•
bien difficile de se prononcer. En tout cas ces lames sont
particulièrement nombreuses.
On les retrouve dans bien d'autres gisements, qui par ail-
leurs auront aussi d'autres pièces fort analogues, par exem-
ple Reilbac (Lot), Puy-de-Lacam et Noailles (Corrèze), etc.
Lames retouchées. — Signalons d'abord 2 ou 3 lames por-
tant des sortes de coches ou dentelures profondes (fig. 4,
no 39), assez régulières, fort semblables aux fragments qui,
mis bouta bout, formaient les faucilles égyptiennes; et une
autre dont l'extrémité est très usée par frottement.
Les belles lames retouchées à la manière aurignacienne
sont relativement peu nombreuses : 25, à peu près complè-
tes, retouchées sur les deux bords, se terminent en pointe
plus ou moins aiguë (fig. 4, n"23, 25, 27 à 29;. D'autres n'ont
été retouchées que sur un bord (fig. 4, n°» 24, 26, 38).
A côté, et avec toutes les transitions, se place une série
de 28 éclats ou lames de forme pseudo-moustérienne, poin-
tes et racloirs (fig. 4, n° 43), dont un en quartz.
Une douzaine de lames ont été retouchées le long d'un
bord, sur le revers de la lame, ce qui est assez rare (lig. 4,
n* 40) ; la chose cependant est signalée à Reilhac.
Il y a plus de 250 lamelles étroites et allongées (atteignant
11 centimètres], généralement recourbées, à pointe souvent
fort aiguë et dont la croie est retaillée, mais n'est pas en
général très coupante (fig. 4, n^' 30 à 37). Ce sont le plus
souvent des bords de lames préalableme^it retouchées et ha-
bilement enlevés. Rarement elles paraissent avoir été retou-
chées après coup dans le but d'obtenir une sorte de manche
ou soie aplatie, comme dans la fig. 4. n° 36.
Il est difficile de dire dans quel but on fabriquait en si
grand nombre de ces lamelles, et quel était leur usage. La
chose est plus claire pour les pointes dont nous allons par-
ler et qui forment la portion la plus originale de l'outillage.
Pointes. — H y a d'abord une série de pointes à pédon-
cule (fig. 5 et 6). Ce sont des lanmes dont la moitié inférieure,
fortement rabattue sur les deux bords, a été transformée en
— 323 —
pédoncule. L'autre extrémité, au contraire, restée large et
aplatie, se termine en pointe dont le contour est celui d'un
arc brisé d'ogive plus ou moins ouvert. On en compte 31 de
complètes, dont les dimensions vont de 3 à 10 centimètres
de long, et plus de 40 fragments (1), Leur examen permet de
conclure, d'une manière presque certaine, que ce sont des
pointes de traits à double cran.
f52 SI ^^^W ^ s* l^ XiW *5'H /^
Fig. 5. - Pointes h pédoncule. — La Fonl-Roberl (Corréze). 1/2 gr. nal.
(1) Plusieurs fragments, trouvés à des mois de distance, se sont
parfaitement raccordés.
— 324 —
Le pédoncule formait la soie de Temmanchure. Il est
généralement assez gros et son extrémité, le plus souvent
obtuse (fig. 5 n°» 48, 49), ne pouvait servir de perçoir ou de
taraud, sauf peut-être en certains cas (fig. 5, n°* 47, 55). Ce
que l'on a pris pour taraud en queue de rat pourrait n'avoir
été parfois qu'un pédoncule d'emmanchure.
L'autre extrémité formait la partie pénétrante. Elle est
restée quelquefois lelle qu'elle était, sans retouche (fig. 5,
n*»» 52, 53) ; quelquefois elle a été un peu retouchée par des-
sus, de manière à régulariser la pointe (fig. 5, n®» 44, 46,
54) ; mais le plus souvent elle a subi, sur le revers de la
lame, une relouche particulière tout à fait. analogue à celle
des pièces solutréennes, quoique moins habile (fig. 5, n*» 44
à 51 et 54, et fig. 6, n''* 1 et 2). Le but en paraît évident;
pour que le pédoncule fut assez résistant, il était nécessaire
de prendre des lames d'épaisseur notable, en même temps
la pointe naturelle pouvait aller en se recourbant un peu
(fig. 5, n° 52) ; il fallait cependant obtenir une pointe aiguë,
à bords tranchants, pour la pénétration, et dont l'axe fut à
peu près rectiligne pour la justesse du tir ; ces résultats
étaient atteints d'une façon remarquable par ces retouches,
dues vraisemblablement à des compressions latérales (voir
en particulier fig. 5, n" 45 et 50 ; fig. 6, n°» 1 et 2).
Fig. 6. — Pointes à pédoncule. — La Font-Robert (Corrèze), 2/3 gr. nat.
Nous devons ajouter que deux pièces, au lieu de pointe,
portent à l'extrémité un petit burin latéral à un grattoir
— :^25 —
carré (flg. 5, n* 56). Enfin, un éclat informe a été curieuse-
ment retouché, de manière à obtenir une pointe aigué et
une sorte de cran à la base (fig. 5, n® 57) ; il pourrait égale-
ment être rapproché des lamelles à dos rabattu avec cran.
La présence d'un si grand nombre de pointes à pédoncule
dans un gisement paléolithique est jusqu'ici des plus rares.
En France, M. Cartailhac en a publié une de Reilhac ;
M. Breuil nous en signale plusieurs de Solutré, venant de
la surface du magma à chevaux, sous le Solutréen ; M. Ca-
pitan en possède une ou deux de Laugerie-Haute ; on en a
trouvé dans plusieurs fouilles récentes, à des niveaux inter-
médiaires entre TAurignacien et le Solutréen, et plutôt tout
à fait à la base de celui ci (La Ferrassie, fouilles Peyron^ ;
Combe-Capelle , fouilles de Villeréal et Chastaing, etc.).
Nous mêmes en avons trouvé deux ou trois à Noailles, in-
complètes, et que, pour ce motif, nous n'avions pas remar-
quées (1).
En Belgique, on sait que ces pointes ne sont pas très ra-
res, surtout celles du type n^* 45 et 46 (fig. 5), comme M. Ru-
tot a bien voulu nous l'indiquer; elles y caractérisent un
niveau que les historiens belges considèrent comme syn-
chronique du Solutréen français (type du Pont-à-Lesse :
trou Magritey et qui se superpose en effet immédiatement à
une industrie analogue à celle des gisements les plus anciens
de Tépoque glyptique de France, appelés actuellement auri-
gnaciens.
A côté de ces pointes à pédoncule se rangent une quinzaine
d'éclats, dont une extrémité est retouchée par dessous,
comme la plupart des pointes à pédoncule, c'est-à-dire à la
manière solutréenne , encore assez maladroitement , mais
avec soin (fig. 8, n°" 59 à 63). L'autre extrémité est restée
brute, en général ; mais sur deux exemplaires elle est retail-
(1) Il existe aussi des pièces à pédoncule dans le Magdalénien, mais
elles n'ont pas du tout la môme allure que celles de Font-Robert.
Comparez par exemple celles de Teyjat, grotte de la Mairie (Aeui/e de
VÉc. d'Anthr., 1908, fig. 82).
T. XXX. 5-5
— 326 —
lée en pointe amincie, symétrique de la première (fig. 7, n*2,
et fig. 8, n*» 60) ; sur d'autres, il y a comme des encoches
pour une ligature ; sur un exemplaire, enfin, trouvé récem-
ment, la pièce, chose inattendue si Ton a affaire à des pointes
de traits, se termine en un fort beau grattoir (fig. 7, n* 1).
Fig. 7. — Pièces à retouche d'allure solutréenne. — La Font-Robert (Corréze).
2/3 gr. nat.
Une douzaine de fragments de fortes lames, en silex blan-
châtre hydraté, ont été frappés latéralement à une des
extrémités, qui a été comme mâchonnée, écrasée ; ce gros-
sier travail paraît inachevé le plus souvent (fig. 8, n* 58) ;
peut-être est-il le tout premier essai, encore très fruste,
d'une retouche à la solutréenne.
Vient enfin une série de plus de 90 lamelles de faible
épaisseur, dont la longueur s'écarte peu de 4 à 5 centimèt.
et la largeur de 10 à 15 millimèt. (fig. 8, n^» 64 à 68).
Elles ont été retouchées à peine, ou plutôt 'raclées pour
ainsi dire sur les bords de manière à appointir la pièce, à
régulariser ses contours et à lui donner la forme de feuille
de laurier ; mais il n'y a plus ici de retouche solutréenne.
Sur ces 90, 55 sont appointies aux deux bouts et le reste
seulement à l'extrémité opposée au bulbe.
Il est difficile de voir, dans cette curieuse série, autre
chose que des pointes d'armes de jet. A Noailles nous avons
— 327 —
trouvé des pointes analogues, mais en petit nojnbre (fig. 3
lie notre tirage à part). Une longue lamelle, bien effilée, aux
bords légèrement ébréchés, a sans doute servi pour le même
usage.
Fig. 8. —58 à 63 : pièces à retouche d*allure solutréenne. — 64 à 68 : pièces lancéolées A fine retou-
che. — 60 à 74, pièces h encoches ou tronquées. — 75 A 81 : perçoirs ; le n» 80 est A relouche solu-
tréenne. — La Font-Robert (Corrèze), 1/2 gr. nat.
PointeS'Perçoirs. — On en compte seulement une douzaine
(fig. 8, n*« 78 et 79) ; deux ou trois sont recourbées (fig. 8,
n** 81) ; l'une d'elles ressemble à un pédoncule de flèche dont
l'autre bout n'aurait pas été taillé (fig. 8, n^ 75). Il y a enfin
un minuscule perçoir fort délicat sur le coin d'une jolie lame.
Pièces sectionnées ou à encoches. — Nous nommons ainsi
une série de 30 pièces, surtout des lamelles, qui portent vers
I
I
— 328 —
rextrémité,,le plus souvent à gauche, comme une encoche
plus ou moins profonde (fig. 8, n*» 69 à 71, et 76), ou en grat-
toir rectiligne ou concave, transversal ou oblique (flg. 8,
n*' 72 et 73), sans burin latéral. Toutefois, l'extrémité poin-
tue a été plusieurs fois transformée en perçoir (flg. 8, n" 79).
Un exenoplaire est retouché à la manière solutréenne sur le
reste de la lame (fig. 8, n® 80). 11 y a quelquefois plusieurs
encoches latérales, ou une seule très profonde (fig. 8, n" 77
et 74). Les pièces de ce genre sont nombreuses aux Baoussé-
Rousse.
Lames à dos rabattu. — Pour terminer cette aride énu-
mération il nous reste à parler des lames à dos rabattu, dites
couteaux ou canifs.
A les classer suivant leurs dimensions, on en peut compter
vingt-quatre de très fortes (fig. 9, n*» 88, 101), en fragments
sauf deux (flg. 9, n°' 94 et 100) ; environ 60 (dont un grand
nombre complètes), de dimensions un peu plus réduites, 6 à
8 centimètres de long ; une quinzaine de pièces plus petites
encore, et 45 fragments notables ; enfin, il n'y a guère plus
de 80 débris de minuscules lamelles. En somme, dominent
les pièces de dimension notable, dans le genre de celle de
la Gravette, quoique moins belles.
Mais on pourrait les étudier au point de vue morphologi-
que ; il se trouve alors que chaque série contient des pièces
de toutes dimensions et à peu près en nombre égal.
D'abord les pièces sectionnées transversalement (flg. 9,
n°« 88 à 96) : une l'est aux deux extrémités (fig. 9, n*^ 96) ; les
autres le sont seulement à la base, et l'autre extrémité se
termine généralement en pointe, voire même fort aiguë : un
seul bord est rabattu.
Puis viennent celles tronquées obliquement, ou plutôt
celles dont un des bords est rabattu sur toute la longueur,
l'autre ne l'étant que vers les extrémités comme pour les
rendre plus acérées (fig. 9, no« 82 à 87, et 97, 98).
Il arrive même que les deux bords ont été rabattus, et sur
toute la longueur (flg. 9, n* 108), souvent en sens inverse
(fig. 9, n" 109 à 112).
i
— 329 —
Le dernier type enfin est celui de la pointe à gibbosité
(flg. 9, n*»» 101 à 105, 107), signalée par M. Piette, à côté de
laquelle se rangent des pointes à pseudo-cran (flg. 9, n^» 100
et 106), analogues à celles rencontrées aux Baoussé-Roussé.
w *«» ^ ^ Tr mi
Fig. 9. — Lames diverses à dos rabattu. — La Font-Robert (Corréze), 1/2 gr. nat.
On a trouvé aussi à Font-Robert une pièce minuscule
triangulaire, avec deux côtés rabattus (fig. 9, n° 99), dans le
genre des silex Tardenoisiens. Nous en avons deux du même
type de Puy-de-Lacam ; il en est plusieurs de fort sembla-
bles dans les niveaux supérieurs des Baoussé-Roussé.
Ces pièces étaient-elles des pointes de flèches à section
triangulaire, très pénétrantes et pouvant faire des blessures
graves ? ou bien faut-il y voir des couteaux ou canifs dont
— 330 —
on utilisait Je tranchant laissé vif? (1). La première hypo-
thèse paraît la plus vi^aisemblable dans la plupart des cas,
mais elle est inadmissible pour les pièces tronquées volon-
tairement aux deux extrémités. En revanche, on ne saurait
avoir affaire à un couteau quand les deux bords ont été ra-
battus sur tout ou partie de la longueur. On peut encore
voir : dans certaines lamelles à retouche inverse, de petits
tarauds ; dans la petite pièce triangulaire, un cran en silex
que Ton pouvait adapter sur une flèche en os ou en bois ;
enfin, les pièces n*» 97 et 98 pouvaient fort bien faire des
pointes à graver.
Conclusion
L'industrie de la Font-Robert, par les burins et les lames
à dos rabattu, se rattacherait plutôt à l'Aurignacien supé-
rieur. Mais, d'autre part, cette station a donné une pièce à
retouche solutréenne nette, sur un bord de lame plane, et
un bon nombre d'autres où la retouche parait bien être de
même facture, mais d'exécution inhabile. On assiste pour
ainsi dire à la naissance de cette nouvelle et merveilleuse
taille du silex, qui atteindra bientôt son apogée.
Les pointes à pédoncule participent à la fois de la lame à
dos rabattu, par la base, et de la feuille de laurier par la
pointe. Ce n'est qu'une forme transitoire, mais caractéristi-
que des niveaux solutréens inférieurs, comme on l'a reconnu
en Belgique et en Dordogne. Elle se retrouvera, quoique
modifiée, dans certaines pointes à cran. Plus tard, preuve de
l'utilité de cette forme, ces pièces abonderont sous les aspects
les plus divers dans le Néolithique, après avoir existé à
l'état aberrant dans le Magdalénien.
En définitive, nous plaçons ce gisement à la base du So-
lutréen; c'est d'ailleurs l'opinion de M. l'abbé Breuil et de
M. Rutot.
(1) On peut facilement tailler un crayon avec telle pièce comme celle
fig. 9, n» 94.
— 331 —
TABLEAU
Grattoirs, simples ordinaires 190\
— sur lames retouchées et divers 32> 268
— doubles, ou associés au burin 46;
Burins de fortune 167 \
— en biseau 150> 587
— sur bord de lame à troncature retouchée . . . 27o)
NucLÉr 100
Rabots larges 35 1
— étroits (passant au burin) 27> 74
— aplatis 12;
Pièces écaiJlées 105
Lames sans retouches, ordinaires 325/
— à crête médiane écrasée 215^
Lames retouchées sur les deux bords, en pointe 25
— — sur un seul bord 21
— — sur un des bords, au revers 12^ 91
— — d'aspect pseudo moustérlen 28*
— — avec coches (fragments) 5
Lamelles à crête retouchée sur toute la longueur 130,
, 260
sur une partie de la longueur 130)
Lames à base étranglée (fragments) 13
Pointes à pédoncule, complètes 31 \
— — fragments notables 42/ ._g
-— sans pédoncule, avec retouche plate 13i
— — à flne retouche latérale 92/
Pointks-Perçoirs : 13
Lamelles sectionnées ou encoches 31
Lames à dos rabattu, fortes (fragments) .' 24i
— — moyennes (avec fragments) 120- 227
— — très petites (fragments) 83;
Total 2.487
•L. Bardon, a. et J. BouYSSONiE.
J
I
(
REMPARTS DE BRIVE
Le Comité de rédaction de la Société historique et
scientifique de Brive a bien voulu nous autoriser à
publier dans le Bulletin du mois de juillet, le procès-
verbal de la visite de nos fortifications du 5 mai 1608
et Tordonnance d'Henri IV du 24 avril 1610.
Ce dernier acte du gouvernement avait été déter-
miné par renvoi d'un nouveau placet des consuls.
Ils réclamaient l'établissement de nouvelles tailles
pour la réparation des murailles qui protégeaient
l'indépendance et la sécurité des habitants. La ville
avait été deux fois prise d'assaut en 1577 par le sire
de Vivans et le sire de Biron, chefs des bandes protes-
tantes qui parcouraient le pays. Onze ans plus tard,
en 1588, elle avait échappé à un coup de main tenté sur
la porte de Corrèze par les ligueurs. Pendant les luttes
religieuses, comme pendant les plus sombres jour-
nées de la guerre de Cent-Ans^ toute ville ouverte
était alternativement saccagée par les soldats indis-
ciplinés de tous les partis.
Nos pères veillaient à la conservation de leurs rem-
parts avec un soin jaloux. Ils entendaient relever
du roi, c'est-à-dire appartenir sans réserve à Tunité
française, quels serments qu'ils eussent été obligés
de prêter aux seigneurs de Turenne et de Malemort.
La politique de Henri IV avait rétabli la paix inté-
rieure. Mais ce bien inestimable que la France avait
— 334 -
cessé de goûter depuis La mort de François P^ ne
pouvait avoir des bases bien solides. Les protestants
avaient des privilèges, des places de sûreté et une
organisation qui créait un état particulier dans le
pays. Aussi ne saurait-on être surpris que le consulat,
pour hâter les résultats de la visite de 1608, ait
adressé à la Cour la supplique dont nous avons parlé
plus haut et dont nous donnons le texte, tel qu'il
existe dans les archives municipales (FF-^).
d Au roy. Les consuls et habitants de votre
« ville La Gaillarde en Limousin, vos très hum-
ai blés sujets, vous remonti^ent très humblement
a que, pendant les guerres civiles qui ont eu cours
« en votre royaume et même dans la province du
a Bas-Limousin j pour se maintenir et conserver
(( en votre obéissance, ils se seraient tellement
a engagés envers plusieurs personnes^ que, du
a depuis, il n'a été en leur puissance de se pou-
a voir rédimer; si bien qu'ils ont été contraints
€ (vuj le peu de revenu de ladite ville Lés-
ai quels frais et dépenses ayant été remontrés au
« feu roy Henry (troisième dudit nom) en l'année
a quatre-vingt-huit (1588) ClequelJ aui^ait fait
« don à ladite ville de certaines sommes de de-
« niers à prendî'e sur le pais de Bas-Limousin;
« Maisy au moïen du don et remises faites par
a Sa Majestéy la ville ne s'est que bien peu pré-
€ valu de la grâce à elle faite; si^ qu'à raison de
a ce, lesdits habitants sonty comme dit est, enga-
cc gés et dénués de moïens ;
« Que n'ayant pu faire aucunes réparations en
- 335 -
« ladite villes la plus grande partie des murailles
(( d'icelle sont tombées en ruine, ainsi qu'a été
<r remontré à Monsieur le comte de Schomberg^
« votre lieutenant général audit pais; à cette
d cause j ordonnant (?) auxdits habitants re-
t mettre ladite ville en son premier étaty con-
a server icelle pour votre obéissance^ plaira à
a Votre Majesté à faire don aux habitants de
a ladite ville et paroisses d'icelle, du paiement de
a toutes tailles pour dix années à venir^ pour
a icelles être employées au rachat de leur dit
« revenu et en outre pour suppléer de partie des-
a dites réparations^ nonobstant la remise gêné-
a raie desdits restes;
« Ordonner qu'ils soient payés de ce qui pourra.
a leur être dit sur les remises faites par les rece-
« veurs de Tulle et de Brive, à cause des tailles
a ordi7iaires et extraordinaires de mil six cent
a sept des frais du dudit Brive imposée
a Vannée mil six cent neuf Si ferès bien. »
Cette préoccupatioa constante des consuls de se
conserver, en nous servant de leur expression, en
Tobéissance au roi, et l'indépendance vis-à-vis de la
puissance anglaise et des seigneurs féodaux, a été le
caractère particulier de l'existence de la ville pendant
toutes les phases de son histoire. Saint Louis avait
rendu au roi d'Angleterre, par le loyal mais funeste
traité de 1259, les quatre diocèses de Tulle, Limoges,
Périgueux et Cahors. II avait cependant excepté cer-
taines villes^ qu'il nommait privilégiées et sur les-
quelles il maintenait les droits de sa Couronne. Brive
— 336 —
était comprise dans la liste des cités conservées à la
puissance française, conformément à plusieurs lettres
patentes de Philippe- Auguste et de Louis VIII. Elle ne
pouvait l'oublier.
Jamais sa fidélité ne fut plus éclatante qu'au début
de la guerre de Cent-Ans. Nous en trouvons la preuve
dans le compte des consuls, que nous publions, et
qui contient des renseignements intéressants sur Tétat
des remparts pendant le xiv* siècle.
En 1340 une courte trêve interrompit les hostilités,
qui, commencées dans la Flandre, devaient s'étendre
sur tout le territoire. Les provinces qui faisaient partie
ou étaient limitrophes de la Guyenne étaient particu-
lièrement menacées. En 1342, l 'évoque de Beau vais
fut chargé par le roi de parcourir tout le sud-ouest
de la France, de hâter la mise sur le pied de guerre
de toutes les villes et de lever les tailles nécssaires au
paiement des frais de la prochaine campagne.
Les instructions rovales excitèrent à Brive une très
vive émotion. Avec un enthousiasme presque fébrile,
des réparations furent faites aux nouvelles portes, aux
fossés et aux remparts. Ainsi put-on voir à la porte
des Prêcheurs 45 femmes, unies à 84 hommes, a far
la manobria deus pezicadors.
Ailleurs on trouve trace des sommes dues aux
femmes occupées aux mêmes travaux de défense.
« Alors a les consuls euî^ent mandement d^ar-
a réter et faire venir tous maçons ^ charpentiers y
a couples de bœufs et chevaux pour réparer les
a murs et portes de la ville et que chacun^ selon
« sa condition^ eût harnais ».
En 1351 les consuls et les prud'hommes se plai-
— 337 —
gnaient (se rancuravo) des dépenses faites per la
chausas necessarias a la vila^ pour la construction
des murs, pour établir des échafauds et des passages
(corredors) derrière les parapets, sur les tours et les
remparts, pour faire des palissades, formant le che-
min couvert et les places d'armes, autour de la ville
(per far palena al tory de la vila), pour creuser les
fossés et faire la contrescarpe (per reparar los valats
e far contrevalats), pour acheter des armes (per crom-
par canos, arbalestas et tilharia) et pour payer une
solde aux nouveaux soldats (e per pagar subsidis).
Nous avons traduit le mot contrevalats par con-
trescarpe, lui donnant le sens qui nous parait le plus
exact. Ailleurs on voit encore que des palissades
étaient placées sur les glacis. Le système de nos for-
tifications se rapprochait donc, en considérant les
tours engagées dans les fossés comme la première
forme des bastions, du tracé plus moderne que Vau-
ban devait porter à sa perfection.
La ville avait sept portes^ en 1350 comme en 1608 :
les portes de Corrèze (portai de Correza), des Frères
Prêcheurs (portai deus Prezicadors), du Salan (portai
Salem), de Puy-BIanc (portai de Pech-Blanc), des
Sœurs dénommée (A las Sors), et ailleurs (portai de
las Menudetas), porte des Sœurs Clarisses, Sœurs
Minimes appartenant au second ordre Franciscain, de
même que les Cordeliers du premier ordre étaient
appelés Frères Mineurs.
Dans l'état de l'armement des sept portes on trouve,
entre celles de Puy-Blanc et de Corrèze, les portes de
la Branda et de Lerneigey qu'il est difficile d'iden-
tifier sans faire des hypothèses.
— 338 —
Une tradition, dont aucun document n'établit l'exac-
titude, laisse supposer que les troupes anglaises du duc
de Lancastre et Tarmée française du duc de Bourbon,
entrèrent dans la ville par la porte de la place du
Puits-du-Roi. Cette place, aujourd'hui disparue, a été
connue de nous et de tous les anciens habitants. Elle
était formée par la réunion des rues Barbecane et de
la Jaubertie. On considère nos porches comme les
restes des anciennes portes. On pourrait donc sup-
poser qu'une des deux portes, dont l'emplacement n'a
pas été fixé, existait au point où, sous le dernier de
nos porches, la rue Saint-Ambroise rejoint la rue de
la Jaubertie, près du Puits-du-Roi.
Cette hypothèse aurait pour résultat de déterminer
le tracé de l'enceinte en 1350, de la porte des Sœurs
à celle de Corrèze, par les rues de la Jaubertie, Bar-
becane et de Corrèze, laissant au dehors la moitié de
la rue Carnot, tout le quartier des Carmélites et la
rue Jean Mestre. On pourrait en conclure que Texten-
sion qui fut donnée aux ouvrages fortifiés en 1374,
conformément aux lettres de rémission de Charles V,
aurait suivie la ligne actuelle des boulevards. Mais
naissent des objections, dont il est difficile de mé-
connaître le fondement. Le document inédit, dont
nous sommes heureux d'offrir la primeur aux lecteurs
du Bulletin^ mentionne la construction des murs.
Mais pourquoi n'y serait-il pas question de ceux qui
existaient en 1608? Les fortifications paraissent défi-
nitives puisque, suivant l'interprétation donnée au
mot contrevalatSj des contrescarpes ont été établies.
Des palissades ont permis la circulation à couvert sur
les glacis de tous les défenseurs de la place. Dans
— 339 —
Tune ou l'autre supposition le nombre des portes n'a
pas changé et celle des Sœurs^ quel que soit le nom
qu'on lui donne, la Branda^ las Sors y las Menu-
deltas, Lerneige, garde un emplacement dont on
ne peut discuter la situation. Tous les doutes ne peu-
vent reposer que sur la place de la porte Barbecane.
Or, qu'elle ait été à la place du Puits-du-Roi ou à
l'entrée actuelle de la rue Carnot, la tradition qui
nous montre les Anglais et les Français entrant suc-
cessivement de ce côté dans la ville, est confirmée, car
le Puits-du-Roi, séparé du boulevard par une faible
distance de cent mètres environ, était relié avec lui
par la vieille rue Barbecane, aujourd'hui remplacée
par une partie de la rue Carnot.
On pourrait, il est vrai, soutenir avec quelque raison
que le périmètre des remparts a été étendu et que les
fortifications ont été complétées en 1374, conformé-
ment aux lettres patentes de Charles V. Mais cette exten-
sion peut s'entendre des nouveaux travaux exécutés
aux portes de la ville qui alors furent protégées par de
nouvelles murailles formant comme des demi-lunes,
dénommées éperons dans le procès- verbal de 1608.
Des modifications nouvelles furent faites après la
destruction du pont du Buis, en 1405, par le vicomte
de Turenne, Raymond-Louis de Beaufort, désigné
quelquefois sous le nom de Raymond VUI. Alors
furent bâtis le pont de treize arches et le quai qui
donnèrent à la porte de Corrèze l'importance qu'avait
auparavant celle des Frères Prêcheurs L'agglomé-
ration, dans l'enceinte des murailles, comprenait
216 feux, soit 1,100 âmes environ en 1178, lorsqu'elle
était menacée par les routiers, maîtres du château de
— 340 —
Malemort, et en '1184 lorsqu'elle était assiégée par
Raymond III de Turenne. Elle en conoptait 626, soit
environ 3,000 âmes après Textension des fortifications
et l'adjonction des anciens faubourgs.
Toute la population valide, hommes et femmes,
travaille avec empressement à fortifier la cité. Elle
fait des fouilles pour les fondations des murailles,
elle transporte les matériaux, elle creuse des tran-
chées, elle élargit et nettoie les fossés remplis de tous
les immondices de la ville, et d'une eau croupissante.
La défense de la place est confiée aux hommes en
état de porter les armes. En compte-t-on plus de
sept à huit cents, si Ton déduit les vieillards, les
malades et les enfants?
Soixante-dix montent la garde aux portes pendant
la nuit et soixante-dix pendant le jour. Un poste est
établi dans le clocher de Saint-Martin, des rondes et
des patrouilles circulent sur les remparts et les glacis.
Deux cents hommes environ sont sous les armes
pendant chaque période de vingt-quatre heures. Cha-
que citoyen, noble, bourgeois^ artisan, est de service
tous les quatre jours, il est menacé d'une pénalité
s'il ne se rend pas à l'appel. La ville trouve encore
des recrues pour assiéger les châteaux de Juillac,
d'Ayen et de Comborn occupés par des partis anglais,
sous les ordres du maréchal d'Aubeterre(l), désigné
sous le nom de maréchal Dandenau dans le compte
de la gestion consulaire.
Un spectacle réconfortant nous est présenté, un
exemple viril, qui excite notre légitime fierté, nous
(1) Histoire de Brive, par quatre citoyens, page 141.
— 341 —
est donné par cette petite cité. Entourée d'Anglais,
elle veut rester française. Aux prises avec les puis-
sants barons, dont les possessions louchent ses mu-
railles, son consulat n'entend ne relever que du roi.
Elle assiège Turenne, elle prend d'assaut Malemort,
Lachapelle et Lagarde. Elle mêle l'offensive à la
défensive, tantôt elle attaque, tantôt elle se défend.
Lorsque la France est prospère, elle est forte; elle
est faible lorsque les batailles de Crécy et de Poitiers,
lorsque le traité funeste de Brétigny, courbent le pays
sous le joug des Anglais.
Sa vaillance, son esprit mâle et guerrier ne méri-
tent-ils pas le nom de Gallia ardens, par lequel on a
parfois traduit celui de La Gailla^'de?
La générosité des habitants n^est pas moins grande
que leur courage et que leur mépris du danger. Ils
s'imposent les tailles les plus lourdes et ils paient en
outre celles qui sont taxées par les représentants du
roi. Les consuls font des avances onéreuses et la ville
devient la créancière du seigneur de Malemort, tenu
à son égard, soit à titre d'inféodation, soit à titre de
prêt, de 20 écus d'or pour un palefroi; de Mathe de
L'Isle- Jourdain, épouse de Bernard de Turenne (1), de
56 florins d'or. Ils acquittent à Tévêque de Beauvais,
représentant du roi, un fouage de 380 livres. Ils re-
mettent 161 livres à Aymeric de Roehechouart pour
les frais de l'expédition contre les châteaux de Com-
born, de Juillac et d'Ayen, expédition qu'il n'aurait
pas tentée sans ce subside, et ils sont contraints de
prêter personnellement 500 livres à ce lieutenant du
(1) Bernard VII, comte de Comminge, veuf et héritier de Marguerite,
vicomtesse de Turenne, 130i.
T. XXX. 5-6
[
r
— 342 —
roi. Il leur en remet une reconnaissance scellée de
son sceau ; il ne la remboursera jamais. Les recettes
de la ville sont nulles pour ainsi dire. Elles se com-
posent de quelques droits d'octroi, barrage et corre-
tage; droits de place, droits sur la viande avariée, sur
le cuir mouillé, sur les poissons qui sont vendus sur
la place publique devant Téglise Saint-Pierre (1).
Nos pères n'avaient, pour ainsi dire, que des dé-
penses ; et, pour y faire face^ ils s'accablaient eux-
mêmes des impôts les plus onéreux. Les consuls se
croyaient tenus de donner l'exemple de la générosité
et du désintéressement. Jean Raynal prend à sa charge
le recouvrement des 20 écus d'or que doit à la ville le
baron de Malemort ; il s'expose ainsi à la vengeance
de notre proche et trop puissant voisin.
L'administration municipale veut remplir ses enga-
gements, dut-elle prendre les sommes qui lui sont
nécessaires dans l'escarcelle des citoyens. Elle offre
des cadeaux au juge royal, au sénéchal et à son fils :
a Item fazen presen a la couchada del senescal
a. 31. iOs.
a Item per 3 torchas que ac (eût) Johan Saret
a en Vassiza et can vent lo filh del senescalh, 18 s.
« Item en Vassiza davan^ 5* Pierrey tramezen
a {transmettons) presen al Juege^ al preuraire
ce (procurairejy hi al chanseliery de pa (pain) et
« dé vi ».
Elle achète du papier pour transcrire les délibéra-
tions et les comptes du consulat^ pour correspondre
(1) Église Saint-Pierre, aujourd'hui maison privée^ située rue Biaise-
Reynal, vis-à-vis la chapelle du vieux Collège.
— 343 —
avec toutes les villes voisines, Beaulieu, Aubazines,
Turenne, Périgueux, Tulle, Sarlat, Limoges.
ce Item per una mas papier per escrire las de-
a falhas el cossolat.
a Item et per 7 mas de papier que
a ai costet el cossolat ^ . *
Chaque citoyen convoqué pour monter la garde
doit être armé suivant son état, et sera de plus por-
teur d'une épée ou d'un glaive.
a Item que tots homes que devran gardar la
a porta estinga armât à la porta segon c/iascu de
a son estât.
« Item que chascu portant l'espaza ho glavi en
a lors mas ».
Mais la ville fournit l'armement permanent des
portes et des remparts. Elle achète de la poudre à
canon.
a Item que payen e per lo palvera de
« cano ».
Elle commande des pièces de canon aux forgerons
de Sainte-Féréole et de Champagnac.
a Item despendet lo faure de 5* Ferrials can
a vent far los canos 3 s.
a Item que pagen a il de Champagnac per las
« feradinas dels sauls e per un canOj lo divenre
cf (divendî'e) d'avan S Michial tout
Nous pouvons aujourd'hui sourire en pensant à
l'artillerie du xiv* siècle, dont la fabrication était
confiée à des forgerons de la campagne. Mais son
emploi à Brive avait été postérieur à celui qui en
— 344 —
avait été fait dans des villes plus importantes et plus
rapprochées des champs de bataille. II contredit l'as-
sertion de certains historiens et surtout des nom-
breux manuels scolaires qui prétendent que les ca-
nons ou bombardes, existant à Brive en 1342, plus
meurtriers parfois pour ceux qui s'en servaient que
pour les ennemis contre lesquels ils étaient braqués,
ont fait leur première apparition à Crécy en 1346.
La ville en possédait cinq en 1349. Les consuls les
avaient placés aux portes des Prédicateurs, de Cor-
rèze, de La Brande, de Lerneige et de Puy-blanc.
Les sept portes étaient encore défendues par des
balistes de bois et de cuir.
« Item balista de cory^ una autra
de fust 2 balistas. »
Les consuls donnaient à chaque poste cinq douzai-
nes de traits où flèches revêtus de laiton : « Tilharia
enponada de leto, 5 dozenas » et vingt-deux dou-
zaines de traits plus petits : « Item tilharia petita,
22 dozenas », deux massues au poste de la porte des
Frères mineurs, une à celui de Lerneige ; six fléaux
garnis à la porte des Prédicateurs, à La Brande et à
Lerneige.
(( Item flageladas 6 flageladas. »
a Item flageladas garnidas. . 6 flageladas. »
Aux Prédicateurs, de^ carreaux ou projectiles pour
le canon,
a Item caros per cano ».
Les principales dépenses de la ville avaient pour
objet la construction, la réparation et la garde des
remparts. Elle fournissait du vin aux travailleurs.
— 345 —
ce Item que pagen per vi. a la manobria del
a trenchat de las Mentidetas que es
a G. Lajohanna ify h. u
et aux hommes de garde qui recevaient encore des
chandelles pour Téclairage intérieur des postes et des
torches pour l'extérieur.
« Item que pagetP. B. per quatre torchas e per
a lo VI e las chandelas de W sers e per far las
a gachs 3 L 9 s,
« Item per una. torcha 7 a. »
Ailleurs les torches sont payées 6 sols.
« Item per 3 torchas que ac Johan Saret en
« Vassiza e can vent lou filh del senescalh.. ISs. »
Le prix en parait d'autant plus élevé que celui de
la journée d'un homme, travaillant aux fossés, ne
dépasse pas 8 deniers.
(( Ite77i per 6 homes que tengueren el fbssat 3
« jours 12 sols. »
Une livre de chandelles coûtait 7 deniers i/i-
« Item per 2 liouvres chandelas an Olivier
c( d'Antissac 15 d. »
La dépense de l'éclairage extérieur était coûteuse.
a Item per 7 torchas que payet B, B. en 2 neiz^
« costuro 2 L 7 H. 1^
Des pièces de bois sont achetées pour les palissa-
des.
« Item que payen à D^ d'Antissac per douas
a perpounchas.
« Item que payen à Pierre Bernât per Ires
« perpounchas ».
- 346 •
D autres étaient employées aux marches qui ser-
vaient à monter sur les passages des crénaux.
(( liera per far aportar la fti8ta{d\i latin fustis)
« de per la vila a far los marchaus els corre-
cf dors JD.
On répare les fossés et les barrages qui y condui-
sent l'eau de la rivière, des ruisseaux de Verdanson et
des Gaulies.
« Item per 6 homes que tengueren el fossat 3
(( jours 12 s. j>
La journée était payée 8 deniers.
a Item que payen à 4 homes per adobar laus
(( fossats dous Praires Menors ï l. 6 s.
ce Item payet Jean Soret per lo gach de très
a portas e per adobar la peichonaria (lo pei-
« chièroj iO s. t>
Des tranchées sont ouvertes à la porte des Sœurs
où ont travaillé G. Lajohanna, P. B., pendant 15
jours, 44 hommes pendant 2 jours, des manouvriers
la veille et le jour de saint Martin « la vespra e joris
de S* Marti d.
Mais des efforts plus grands et des travaux plus
pénibles étaient faits aux portes des Frères Mineurs,
du Salan et de Puyblanc et les préoccupations les
plus vives avaient pour objet celle des Prédicateurs
par laquelle était ouvert un accès sur le pont du Buis,
le seul qui existât alors sur la Corrèze. Sur ce point
les femmes, comme nous Ta vous déjà dit, rivali-
saient d'activité et de dévouement avec les hommes.
« Item per logier de 84 homes et de 45 femnas à
« far la maiiobria deus Pezicadors. . 3 l. ïï s. »
— 347 —
Le document que nous transcrivons ci-dessous nous
donne des renseignements incomplets et parfois con-
tradictoires sur le salaire des ouvriers.
84 hommes et 45 femmes, soit 129 ouvriers, re-
çoivent 3 livres 11 sols^ soit 6 deniers et 3 dixièmes
pour chacun d'eux. G. Donna reçut 15 s. pour 15
jours de travail, soit 1 sol ou 12 deniers par jour.
« Item que payen a G. Donna per 15 joris que
« estet a la manobria. . ., 15 s. i>
Quarante-quatre hommes pour deux jours de tra-
vail ont été payés 1 1. 18 s. 6 d., soit 5 d. 2 1/10 par
jour. Six hommes, tenus au fossé du Salan pendant
trois jours, ont reçu 12 sols, ou 8 deniers par jour.
Nous n'entrerons pas dans des détails plus circon-
stanciés pour éviter des longueurs et donner plus de
place aux mesures prises et aux dépenses faites pour
la garde des différents postes.
Des escouades de dix hommes faisaient le service de
chacune des portes. Elles étaient commandées par un
dizainier, qui devait laisser un de ses hommes jus-
qu'à l'arrivée de leurs remplaçants. Elles répondaient
à l'appel qui était fait par une corne ou instrument
de cuir : a Al cory corna, al dith cory cornât d,
et se réunissaient sur la place Saint-Martin. Les re-
tardataires ou ceux qui ne se présentaient pas étaient
punis.
d Vide lice f que lo gach deves lo matdinas parla
« de sa garda de mièza nocthj say que à la hora
n de 5 gros ; e si adonc s'en partia que lo déze-
« nier sia tegut de laischar un home de sa de-
« zeina bo e sufficien que garda» be say que
— 348 —
a venha la garda del jory, laquai sia legvda de
(( venir al cory corna ; ho sian tégtit à la pena ».
La garde de jour se réunissait aussi sur la place
Saint-Martin. La nioitié des hommes de service atten-
dait les clefs de la porte qui lui était attribuée, l'au-
tre moitié devait être rendue à son poste à Theure de
l'ouverture, pendant la messe, qui était dite à la
chapelle de saint Michel (1).
Chacun des hommes de service, armé selon sa
condition, devait, pendant le jour, manger au corps
de garde et ne pouvait quitter son poste sous peine de
punition. 11 gardait, le jour et la nuit, soit au-dessus,
soit au-dessous des portes, ou sur le clocher, en per-
sonne et ne pouvait être remplacé. La garde mon-
tante de nuit devait trouver la garde descendante de
jour devant la porte fermée et le dizainier ne pouvait
se retirer avant l'arrivée de son collègue.
Nous avons déjà dit que les hommes de garde re-
cevaient une solde. Ainsi quatre sols furent comptés :
l"" à Jean Reynal pour une soirée de faction.
« Item que payen à Johan Reynal per un au-
dc tre ser que fetz lo gach {le guet), despendet 4 s. »
2° A S^ Clère, Jean de Malhise, Pierre de Bessac et
son compagnon, 8 s. chacun 1 1. 12 s.
Pical del Sostre et Jean Lecroc, qui étaient restés
sept jours à la porte des Prédicateurs, ne reçurent
que 7 s. Ailleurs, 24 journées de garde ne sont payées
que 1 1. 4 s., soit i s. par jour. On trouve encore que
(1) La chapelle de saint Michel était au point de réunion du prieuré
et de la collégiale. On pourrait l'identifier avec la chapelle de la
sainte Vierge ou celle des fonls baptismaux.
- 349 —
la garde des sept portes, pendant trois nuits, ne donna
droit qu^à une rétribution de sept sols. Jean La Croz
et Bernard Delpeuch reçurent cinq sols pour la garde
des portes pendant sept jours. Pour douze jours, Le
Clère toucha 11 s. 10 d. Pierre Deljaral, pour 22 jours
de service à la porte des Sœurs (de las Menudetas),
reçut 1 1. 1 s. 4 d., soit un peu moins de 1 s. par jour.
L. Dinat fut payé à raison de 8 d. par jour. Les postes
des portes de Corrèze et des Prédicateurs étaient
payés, pour leur présence *du 25 novembre à Noël,
pendant trente jours, 11.4 s. Pical del Sostre garda
la porte des Prédicateurs de Noël au 5 mars, et reçut
27 sols que lui remit Pierre de Prenhac au compte
de la ville.
Nous trouvons encore trace, dans le compte des
consuls, de plusieurs sergents (servientes) ; ce mot
peut avoir plusieurs significations. On distinguait les
sergents d'armes qui appartenaient quelquefois à la
noblesse, officiers du sénéchal, des fonctionnaires
attachés au tribunal du juge. Ceux-ci portaient, comme
insigne, un bâton sur lequel était gravées les armes
de la ville ou de la juridiction seigneuriale à laquelle
ils appartenaient. Ils exerçaient souvent les fonctions
des huissiers. La transaction de 1361 décide que trois
sergents, ou même un plus grand nombre s'il est
nécessaire, seront attachés à la justice ordinaire de
Brive et seront élus par les coseigneurs et les consuls
et qu'ils recevront un denier Raymondin pour une
citation et deux pour une saisie.
Le compte consulaire que nous commentons n'a
pour objet que les frais de la défense de la ville. Il
parait donc probable que les sergents qu'il mentionne
— 350 -
sont des sergents d'armes, peut-être d'un ordre infé-
rieur, auxquels leur expérience militaire faisait con-
fier une partie des troupes bourgeoises ou une section
des remparts. Leur solde était plus élevée que celle
des soldats sous leurs ordres. A trois d'entre eux et à
un messager chargé de réclamer les subsides, une
indemnité de cinq livres est accordée.
Les évaluations qui précèdent sont discordantes et
ne nous laissent aucune indication claire sur la solde
d'un soldat citoyen. On pourrait peut-être penser que
les différences se rapportent à celles de la force, de
l'intelligence ou de la durée de la faction de chacun
d'eux. L'obscurité est d'autant plus grande sur ce
point, que plusieurs des opérations que relate ce
compte sont inexactes. Nous le publions tel qu'il
existe dans les archives municipales, sans le discuter
davantage.
Les consuls élus^ au second degré, par les seize
prudhommes désignés par tous les habitants, chefs
militaires, agents administratifs, judiciaires et finan-
ciers^ cumulaient toutes les fonctions qui leur étaient
dévolues par leur dévouement et la confiance de
leurs concitoyens, contrairement à la théorie moderne
de la séparation des pouvoirs. Ils étaient alors à la
peine^ dans le trouble et l'anarchie des débuts de la
guerre de cent ans. Ils méritaient la gloire de comman-
der à leur ville natale et de suppléer à l'insuffisance
dos anciens pouvoirs. Ils présentaient chaque année, à
leurs successeurs désignés le jour de Saint-Pierreaux-
Liens, en présence de cinquante prudhommes, leurs
comptes consulaires, qui établissent encore les avances
qu'ils faisaient habituellement sur leur propre for-
- 351 -
tune et dont le remboursement était pour eux incer-
tain.
Ils construisirent, pendant la première moitié du
XIV' siècle, une enceinte fortifiée, à peu près identique
à celle de nos boulevards et qui fut augmentée, au
point de vue de la défense, après 1374. On se trom-
perait cependant si Ton croyait que toutes les exigen-
ces militaires aient été alors remplies. De nombreuses
maisons ou ayrages étaient contigus aux remparts et
mettaient obstacle à la continuité des chemins de
ronde. Nous avons trouvé dans nos archives person-
nelles des notes, dont nous transcrivons quelques
lignes :
a r Die 25 7^^^ i453, nobilis Thomas de Cas-
a teanœ recognovit se tenere in feudum a prœdic-
Œ tis condominis villœ Brivœ quœdam agralia
« sita in villa Brivœ juxtà murum dictœ villœ ;
« S** Die 9 " junii ià96^ providus vir Joannes
« Laforestiay mercator et burgensis Brivœ^ prose
a et suis y recognavit tenere in feudum a dictis
a condominis quasdam domos^ hortum et fur-
« num contiguos, sitos infrà villam Brivœ^ con-
«c fronlatos cum carrierâ publicâ^ per quam itur
« a Macellis Brivœ versus partam Fratrum Mi-
« noi'um et cum domo et de forlicu nobilis Joannis
« de Casteaux et cum muralhâ villœ Brivœ et
« cum horto et domo nobilis domini Guillelmi
ce de CosnacOj militis, domini de Bordis. »
Deux reconnaissances de 1741 mentionnent le
même fait, et la seconde dit que la maison de M. de
— 352 —
Cosnac, seigneur des Bordes, était devenue la pro-
priété de M. de Gilibert.
Quelle qu'ait été de ce chef, l'insuffisance de nos
moyens de défense, nos anciens consuls ont maintenu
Taulorité du roi, c'est-à-dire l'union française, dans
nos murs. Brive a été considérée, pendant la guerre
de cent ans, comme une place frontière, poste avancé
au milieu des possessions anglaises. Jean-leBon lui a
reconnu ce glorieux privilège. Elle a été livrée au
duc de Lancastre en 1373, par ses consuls, effrayés
par le sac et le pillage de la ville de Limoges par le
Prince Noir. Rendue un an après à la puissance de
Charles V, elle a gardé ses franchises jusqu'à la Révo-
lution.
Elle a dû sa fidélité et sa force au dévouement dé-
sintéressé de ses consuls. Nous pouvons être fiers de
notre passé et être assurés que nous ne connaîtrons
jamais les difficultés, les dangers et les souffrances
de nos pères.
Julien Lalande.
TITRES & DOCUMENTS (1)
Dépenses faites par les Consuls pour l'entretien
et la garde des remparts et fossés de la ville, en 1344,
Garde de la ville.
Item que pagen à Robert de la Mainardia per Vincent de
Malmont e per una netz que anez à Torena am Johan Ray-
nal e per lo dommaige que la vilha Ihi fetz en un ostal ser
cair on y fetz un agachier montet tout 2 L
Item que pagen à Johan Raynal per 2 lioures sera e per 2
liouvres chandellas e per lo vi del ser del premier gach. 7 s.
Item que pagen per vi à la manobria del trenchat de la
Menudetas que es G. Lojohanna 18 s.
Item que pagen à Johan Raynal per un autre ser que fetz
lo gach, despendet 4 s.
Item que pagen à Pierre Malubier per un servent de
Doma (2) e per lo polvera de cano e per una torcha que iku:
Johan Rainaus 1 I, 1 s. 3 d.
Item que pagen à. . . . D*^ d'Antissac per douas perpoiin-
chas e per anar à Torena e per un trave als sarh e per far 3
gach 3 L 2 s. 8 d.
Item à la manobria del trenchat des Las MenudGtas que
es P. B., en 15 joris costet 12 1. Il s. 8 d.
Item que pagen à G. Donna per 15 joris que estel à la ma-
nobria 15 8,
Item per 44 omes que es P. B. a far la dicha trenchada en
2 joris, costèro 1 1. 18 s* 6 d.
(1) Archives de la ville de Brive, FF 7.
(2) Officier du sénéchal du Périgord et Quercy résidant à Doinme,
i
- 354 -
Item per 2 torchas que ac P. B per far los gach e per tra-
mestre un massip a Labat daubazina 15 s.
Item per la manobria que o met lo premier jour als Pezi-
cadors (1), als Praires Minors, a Salem (2), hia Puech-
blanc (3) 4 1. 15 s.
Item que paget P. B. per quatre torchas e per lo vi e las
chandelas de 40 sers e per far los gachs 3 1. 9 s.
Item per logier de 84 homes e de 45 femnas a far la ma-
nobria deus Pezicadors 3 1. 1 1 s.
Item per far la manobria que a acom à las Sors (4) per far
lo trenchat, la vespra e joris de S^ Marti, costet. . 2 1. 11 s.
Item per lous jornals de 23 peiriers e per lo jornals del
valadié e des amolher al dit trenchat 2 1.17 s.
Item pagen als très sirvens, hia un nocbrier que vengo
per demandât lo subsidi 51.
Item per un massip que tramezen a Perigors e per 2 tor-
chas que agez P. B. a far los gachs 1 1. 16 s.
Item à S. Clère hiumar, hia Jean de Molhise, hia peiret
de Bessac, hia so companho per gardar las portas. 1 1. 12 s.
Item à Pical del Sostre, hia Jean Lecroc, per gardar la
porta dous Pezicadors 7 joris 12 s.
Item per gardar las portas per vingt quatre
jornadas 11.4 s.
Item pagen à quels que gardavo las portas del jour de sus
entre lo jour de S* Jaime 1 1. 7 s.
Item per une torche 7 s., per 12 jornals de gardar las por-
tas 12 s., e pagen al trezaurier a cost 5 s., forma. . . 1 1. 2 s.
Item fazen prezen à la couchada del séneschal 3 1. 10 s.,
hia quels que gardavo de noch 2 s. 2 d., tout 6 1.
Item que pagen à Pierre Bernât per très perponchas per 6
laulachas, per 6 lansas e per 8 torchas per far
lo gach 7 1. 12 s.
(1) Porte des Frères Prêcheurs.
(2) Porte du Salan.
(3) Porte de Puyblanc.
(4) Porte des Sœurs.
— 355 —
Item per los gachs de las 7 portes par 3 nochs 7 s. e pré-
zen al jusqe à mi setembre coster 3 8. 10 d.. tout. 10 1. 10 s.
Item per 4 sirvens que estero à las portas 38 jours en tram-
bedos agra 10 d. per jor, monthi tout. 1 1. Il s. 8 d.
Item per 3 torchas que ac Jâhan Soret en lasiza et can
vent lo fllh del senescalh 18 s.
Item per una corda à la porta coladisa dels Praires Me-
nors, e per un fust al dich loc.
Item despendet lo faure de S* Ferriols can vent far los ca-
nos 3 s. et 2 s. 4 d. per un gach, tout 5 s. 4 d.
Item que pagen à il de Ghampagnac per las feradinas dels
sauls e per un cano lo divenres davan S' Michial, tout.
Item per una taula à far lo pàssaige de Puech Blanc 3 s.
6 d. et per un massip per anar à Sarlat 4 s., tout. . 8 s. 6 d.
Item per una torcha que despendet Pierre Raynaus per
far los gachs et per un cent de clavers als sauls 6 s.
Item per 7 jours que gardero las portas Johan La Groz et
Bernart Delpeuch 5 s.
Item per 2 liouvres chandelas au Olivier Dantissac 15 d. et
per 7 mas de papier que al costet al cossolat.
Item per lo vi et las chandelas de 30 sers, 45 s. et per 4
torchas 28 s. can fo aco dalbaroche.
Item per 7 torchas que paget P. B. en 2 nets,
costero 21.7 s.
Item que pagen à Aymeric Simo et so que presten à Ma-
domna de Malemort et lettre que n'aven 19 1. 18 s.
Item que pagen à L. Glere, hia Pical del Sostre, hia Jean
Lacrox per las portas gardar 13 jours 1 1. 12 s.
Item per 6 homes que tengueren el fossat 3 jours 12 s. et
10 s. à Guillaume Borel per son trebalh de la talha,
far tout 7 1. 2 s.
Item per los gachs de doas portas, 7 jours et per laus gachs
de la vila et per 5 jours que L. Glere estet a las portas,
tout 1 1 s. 10 d.
Item per los gachs dels portais e de per la vila per 15 sers
à las 2 portas, finis à 23» 9»»" 16 s. 3 d.
— 356 —
Item à Pierre Deljarat per 22 jours que estet al portai de
Las MenudetaSi comte fach am Vincent Roche, 1 1. 1 s. 4 d.
Item per 25 jornals de mes à curât lo fossat deprès lo por-
ta/ Salen mes las ji B. Nadals 16 s. 3 d.
Item à L. Dinat per gardar lo portai deus Praires Me-
nors 17 jours à 8 d. lo jour 1 1 s. 4 d.
Item per lo gach deous Prézicadors et de Corrèza et per
la vila 7 sers, coslèro 7 s. 4 d.
Item que pageren à Pical del Sostre per gardar la porta 13
jours, 8 d. per jours 9 s. 4 d.
Item per las portas deous Prejsicadors, de Correza et 300,
et per lo gach de la vila entro à Nadal, tout. 1 1. 19 s. 10 d.
Item pagen à Pierre Deljaret a 3* X^^ per gardar la porta
dis Las Menudetas 21 jours 14 s.
Item à L. Dinat per gardar la porta deus Praires Menors
entro à Nadal et fo à 25 novembre, tout l 1. 4 s.
Item à Pierre d'Algaric da 4* X*»»*® entro à Nadal per la
porta de Las Menudetas 15 s.
Item per lo vi et las chandelas dels portais deus Prézica-
dors e de Correza e per aquel dels gachs de per la vila, de
Nadal entre à la S* Pierre La Cadienna,
monte tout 3 1. 17 s. 6 d.
Item en l'assiza d'avan S* Pierre, tramezen prezen del
juege, al preuraire hi al chanselier, de pa et de vi
Item despendet Pierre Bernât per lo vi et las chandelas de
84 sers am lo gach de las nochs
Item 4 torchas que despendet can l'evesque de Beauvais fo
à Briva
Item per far aportar la fusta de per la vila, à far los mar-
chaus els corredors
Item que pagen à 4 homes per adobar lous fossés dons
Fraires Menors 1 1. 6 s.
Item que donen à Pical del Sostre de gardar la porta dous
Pré;2icadors de Nadal entre à 5 jours de mars rebatus 20 s.
quo agut de Pierre de Prenhac per la vila 1 1. 7 s.
Item per las portas et las fenestras que hom prendet de
lostal de Naurs, fo rebatut 7 s.
— 357 —
Tlem paget Jean Soret per lo gach de 1res portas et per
adobar la peichonaria 10 s.
Item per une mas papier per escrire las défalhas e\ Gassa-
lat 11.4 s.
Item perlos gachsde 3 sers als Fraires Menors et Salen
et la Branda 3 s, 9 d.
Item per lo portai de Puech Blanc per 11 sers desai S^
Pierre 5 s. 6 d.
Item que bailen à Robert La Meinardia, hia Ugo Rocho,
hia N. Clergos, hia Vincent Maurizi cossols en deuias, los-
cals eren en 4 Rolles, tout 106 L 7 s. 4 d.
Distribution des armes pour la garde des 7 portes
de la ville, 1349(1).
Portai dos Fraires.
L'an de nostre Senhor, 1349, en la semana de S* Marti
D'ivery Devizero Ihi Cossol, la thilaria et las balistas, Baylel
à N. Clergos, per lo portai deus Frayres Menoi^s :
Thilaria en ponada de lito 5 dozeaas.
Item thilaria petita 22 dozènas.
Item tos aycho es de la vila. Item de la vila.. ! cano.
Item à Pierre La Gruthalenia que Ihi baylet
une baliste maurizis de cory 1 balisLa.
Item 2 massues de la vila 2 massues.
Portât Satem.
A Hugo Chabrier per lo portât Satem :
Tilharia en ponada de lito 5 dozenas.
Item Tilharia petita 22 doïenas<
Item Balesta de Cory, una autra de fust 2 balistas,
(1) Archives de la ville de Brive, FF 7, f* 24 du registre.
T. XXX. 5 — 7
— 358 -
Portât deus Prezicadors.
Item à Kerre Rainai per lo portai deus Prezicadors^ Bay-
lero Ihi Cossol de la vila :
1 Balesla de fust et de Cory 2 balistas.
Item de tilharia en ponada de lito 5 dozenas.
Item tilharia petita 22 dozenas.
Item flageladas 6 flageladas.
Item de la vila 1 cano.
Item caros per cano 4.
Portai de Correza.
A Jaime del Sadre, baylero Ihi Cossol per lo portai de
Correza :
1 balesta de fusit et de cory 2 balistas.
Item tilharia en ponada de lito 5 dozenas.
Item tilharia petita 22 dozenas.
Item flageladas 6 flageladas.
Item de la vila 1 cano.
Portai la Branda.
A Marti Donadieu per lo portai la Branda baylero Ihi
Cossol de la vila 1 cano.
Item tilharia en ponada de lito 5 dozenas.
Item tilharia petita ... ; 22 dozenas.
Item flageladas 6 flageladas.
Portai Lemeige.
A Jean Rainai, per lo portai Lemeige, Baylero Ihi
Cossol 1 cano.
Item tilharia en ponada de lito per la granda
balista de la vila 5 dozenas.
Item tilharia petita 22 dozenas.
Item à la grande Balista de fust dicha 1 balista.
Item flageladas garnidas *. 6 flageladas.
Item massue ... « 1 massue.
359 —
Portai de Pech Blanc,
A N. Dantissac, baylero Ihi Cossol per lo portai de Pech
Blanc 1 cano.
Item tilharia en ponada de leto 5 dozenas.
Item tilharia petita 22 dozenas.
Tailles, 1851 (Ij.
Nota. — Dans cet acte de ville, il est fait mention que
pour réparer les murs de ville et fossés, pour acheter de
Vartillerie, pour payer subsides et autres affaires de la
villBy on avait été forcé d'imposer plusieurs tailles.
In nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti. Amen.
L'an de Nostre Senhor 1351, que ero Cassol en Jean Ray-
naus, James de Sadre, Marti Donadieux et Robert Castel,
fo fach Cossolat, de grand Re de prudhomes et de la major
et melhor partida de la vila et quar aceu prudhome se ran-
curavo et dision quel temps passât, per la chausas nécessa-
rias à la vila, ces assaber, per bastir en acuis soc los murs
et per far ac nous (2) echadafaut et corredors, e per far palene
al tory de la vila et per réparar los valat et far contrevalat
et per crompar canos, arbalestas et tilharia et per pagar
subsidis.
Item per deniers prestat forsadament a Monsg' de Ro-
choart, 500 1. de que agro Ihi Cassai que ero adonc lettras de
son scel sayladas et per maintas autras despesas, elh avio
grand re prestat à la vila.
Item disian que, per raso de las dichas despessas et grand
re d'autras, ero estadas fâchas de grandas talhadas et de
grossas, de lasquals resta vo mais à pagar.
Est grand re d'autres prudhomes dichero que o era be
rasos que los pageshom et que li encbareramen que lor ero
estât autrogat per la major partida de la Bonagen de la vila
(1) Archives de la ville de Brive, FF 7, (• 26 du registre.
(2) Nouveaux.
— 360 —
se Causselesso quant de granda soraa vinsion que no devihom
ero et que B. Rochas que ero estât Cossol en Tan passât avio
comptât en la major partida daqueus a qui erohom obligat et
que comteshom am los autres et saubet hom que devria la
viia e la resta de las talhas de cos que poyriahom bonde-
nen tro aliory doy.
Et en aquel mis Cossolat preget hom Jean Rainai que era
Cossol quelh plagues de levar deus arreirages de las talhas
per pagar aqueus cui séria degut et segon que levaria sos
salaries, Ihi fo cregut.
Et a qui mis J. Rainaus promes que el auria diligensa en
levar, et juret et promes que aquo que el en levaria, no
metria en degus usacges, mas à pagar los dich deudes, e
so que encobaria deviria et pagaria à castu segon que Ihon
escheyria am volontat daqueus am cui auria hom comtat.
Fo ordennat peus dich Cossol e per los prudomes e la bona
gen de la vila per complir las dichas chausas e per so que
saubet hom soque la vila devria e los arreyrages de las
talhas que la resta deus comtes daqueus am losquals B. Ro-
chos avia comtat, debatut lor talhas e comtat tos con lo
devriahom ni elh devrion e deus autres am on contrariahom
que en aquest papier s'escria.
Item fo ordenat que a chastu d'aqueus am cui contra-
riahom de soque Ihi devriahom, e de so final compte Ihi
donahom acta si la requer.
Item que tuh Ihl arreirages que trobatahom que seram
degus siam après escrihs en aquest papier.
Lo 5* jory de janvier l'an 1351, far en Cossolat Johan Ray-
naus, B. Rochas, P. Rochos, Marti Donadieus, P. Domenc,
P. Debraedor, Aymeric La Ruatier, Martis Nicolaus, aux-
quals dévia la villa aycbi come es de sus escrih en los com-
tes, e Pierre Rainaus ero absens, acui dévia ichamen la
vila, e aqui mis J. Rainaus disque el avia cobrat deus dichs
arreirages 76 escus, deusquals, de volontat de tos, payet et
bailet a qui mis, sus, assaber, à B. Rochas 32 escus, à
P. Rochas 8 escus, à Martin Donadieu 1 escut, Aymeric
Larua 6 escus, à P. Domenc 8 escus, à P. Dubraedor 3 escus,
— 361 —
e per se restet net 5 escus et a M* Marti Nicolau paye ne
5 escus et puey après fora de Cossolat, Pierre Rainaus dit
et reconut davant me et B. Rochos, presen J. Raynal que
a Ihui n'avia pagas 4 escus; et aquestas somas so escrichas
disas en la fi del comte de chascu.
Ordonnance des Consuls pour la garde
de la ville, 1858 (1).
Hic sunt Ordinationes quse scribi et fieri inceperunt die
mercurii, post festum beatae cathedrse Sancti Pétri, anno
Domini 1358, per consules qui dicto festo erant de novo
creati, videlicet Joannes Reynaldi, Petrus Dominici, Mar-
tinus Donadei et Joannes Yschartarii, cum consilio et vo-
luntate proborum vivorum qui sunt infrà scripti.
Videlicet, que lo gach deves lo matdinas parta de sa garda
de mieza nocth, say que à la hora de 5 gros; e si adonc s'en
partia, que lo deszenier sia tegut de laischar un home de sa
dezena bo e sufilcien que garde be say que venha la garda
del jory, laquai sia teguda de venir al cory corna; ho siau
tegut à la pena.
Item que la garda que devran gàrdar lo jory, sian al dith
cory cornât en la plassa S* Marti, o la maitat de lous per
penre las clans de la porta que se devra ubrir, e l'autre
meitat sia venguda à la dicha porta que hom ubrira dins la
messe S<^ Michel, ho lo defalhens sia tengus en la pena.
Item que lots homes que devran gardar la porta estinga
armât à la porta segon chascu de son estât, e que toutas
aquelas gardas se dinen à la porte et d'aqui que tout lo jory
nos parto de la porta ; lo defalhen si nia sio tegut en la pena
dessus.
Item que chascu que devra gardar ho la noch, ho lo jory
ho sus las portais, ho dejos, garde en sa propria persona,
ho si garde al cluchier.
(1) Archives de la ville de Brive, FF 7, f* 64 du registre.
— 362 -
Item que tolas lâs gardas que lo jory auran gardât, sian
al sarrau de la porta, si no que degues fa lo gach de noich,
que adoDC s'en poscha anar quan hom sonara lo 5 gros,
à laquai hora, tots lo gach que devra velhar de sers, venha,
e lo deszenier ne se parta daqui que l'autre deszenier que
devra levar a matdinas sera vengut, et fach lo regach dese-
nieis per sa banda.
Item que chascu portant Tespaza ho glavi en lors mas.
Et à la marge dudit registre sont les noms des particuliers
qui étaient du Conseil au nombre de cinquante-un.
Tailles, 1355(1).
Et ce que me redet Pierre Raynal consul et despessa que
avia mes e despendut aquel dich an que era estas Cossol am
SOS dichs autres companhos per una partida del palene et
per lo (?) reparacion del mur de Puech Blanc et d'aulras
talasas, ayschi adapareis per sos rolles escrichs (un mot
illisible), loscals redet et baylet 230 1. 11 s., e per las autras
despensas 592 1. 1 s. 2 d.» e deduch la pressa e la despensa
trobet hom que det lo Cossolat al dich Pierre Rainai 10 1.
6 s., 8 escuts d'aur à 20 s., e cum M' Jaubert de Malemort
fo tengut per un palefer à la vila en 20 escus d'aur (2) ledit
Pierre Raynals ho près sobre se ; aysi que los auro cobrato,
cl sera tegut el Cossolat en 9 écus et dous tiers d'escut.
Et redet per pessas en escrih de sa ma quel avia pagat per
la iinansa de Combory à Monsg** lo mareschal Daudenau o à
sas gens 161 escuts à 20 s.
Item per la charitat 55 1. 5 s. 9 d.
Item per la resta que hour li dévia aychi come era con-
tegut el papier deus affinât e per sos gatges d'aquel an, e per
despensa que avia fâcha sus murs e en la fortalizza de la
vila, e en maintas autras manieyras 20 1. 6 sols.
Item e en aysi la viela noilh der niel al Cossolat.
(1) Archives de la ville de Brive, FF 7, f* 28 du registre.
(2) M. de Malemort étail tenu envers la ville, de 20 escus d'or.
— 363 —
Tailles, 1848(1).
L'an de Noslre Senhor 1343, estant cossols Pierre La
Rebière, N. Coissas, Jean Delcolh e Vincent Raimon Cler-
gue, fo fach prest à Madompna Matha (sic) (2), vicomtesse de
Turenne per los dichs cossols e per la viala, e preslero à
pagement 54 florys ; locals perso la somme de 33 1. 6 s. 6 d.
Se assaber aquelh que s'en sego, e fo recobedor quest per
se Guillaume Raymons.
Nota. — A la suite Ton trouve les feux qui ont contribué
pour parfaire cette somme imposée par les consuls. Le nom-
bre des feux est de 216, sauf erreur.
Dans le rôle de la taille de 1374 Ton trouve 626 feux.
Extraits de divers actes, 1884(1).
Comment Tan 1334, les consuls dudit lieu eurent un cachet
pour signer la vaisselle d'argent; les assises furent tenues à
Brive par diverses fois pa^ le séneschal du Périgord et
Quercy, auquel fut fait plusieurs présens et à sa femme
aussi ; ains qu'appert folio 10.
Ordre du Roi,
Gomment aux dites assises vint un message de par le Roi
qu'on se tint en point d'armes.
Fouage payé par la ville, 380 livres (1342).
Comment ledit temps, l'évêque de Beauvais, à cause des
guerres de Gascogne, fut commis à lever le fougaige à Brive
par le Roi; et en eut 380 1. par composition.
Ordre pour réparer les murs de i;i//e(1342).
Comment les consuls eurent mandement d'arrêter et faire
(!) Archives de la ville de Brive, FF 7, f» 18 du registre.
(2) Probablement Mathe de L'IleJourdain, épouse de Bernard Vil
de Comminges.
(1) Archives de la ville de Brive, FF 7, f» 29 du registre.
— 36'i —
venir tous maçons, charpentiers, couples de bœufs et che-
vaux pour réparer les murs et portes de la ville, et que
chacun, selon sa condition, eût harnois.
Taille pour gens d'armes, imposée par les Consuls (1375).
Comment à la Magdeleine (1375), les consuls et ville, pour
lever les bleds, étaient contraints tenir gens d'armes et pour
iceuz salarier, imposèrent taille.
Monseigneur François de Gain-Montaignac
Évéque de Tarbes.
FRANÇOIS DE GAIN-MÔNTAIGNAC
Évéque de Tarbes (1744-1812)
D'après deux ouvrafet récente :
Abbé L. Dantin, François de Gain-Montaignac, évêque de
Tarbes (1182-1801), et son diocèse pendant la Révolution
(Paris, Letouzé et Ané, 1908, gr. in-8^ de pp. xv-257, orné
de 15 gravures dont deux portraits.)
Abbé Ferdinand Dufau, Épreuves d'un Évêque français
pendant la Révolution, — Lettres et Mémoires de Mgr de
Gain-MontaignaCy évêque de Tarbes (Paris, Poussielgue,
1897, in-12 de pp. 270).
François de Gain-Monlaignac n'est pas ici un in-
connu. Nous avons noté nous-natênaie son rôle lors du
Concordat et esquissé sa vie aventureuse (1).
Il nous semble que ce sont autant de motifs pour
nous engager à présenter deux ouvrages qui méritent
d'être connus, à son sujets dans le public érudit du
Limousin. En outre, Tauteur du livre définitif qui
parait écrit sur notre compatriote, M. Tabbé Dantin,
nous autorise à reproduire en réduction un des deux
beaux portraits qui enrichissent notre iconographie
(1) La Petite Église et le Clergé limousin, Bulletin, 1898.
Aux documents sur la famille, le Nobiliaire du Diocèse et de ta
Généralité de Limoges, des abbés Nadaud et Leclerc (Limoges, Du-
courtieux, 1876-1880), article de Gain, à la Table chronologique et
analytique des Actes de la Maison de Montaignac, cités par lui,
M. Dantin ayoute en Pièces justificatives, I, p. 503, les Notes sur la
famille de Gain, par Ghérin. M. le chanoine Poulbrière l'a aussi do-
cumenté sur les origines de cette famille.
366
provinciale (I). Quelques développements biographi-
ques sur le personnage, s'imposent avec toutes les
ressources qui nous sont offertes.
^isn-^^-^ms
ARMES DE MONSEIGNEUR DE GAIN-MONTAIGNAC
(Cliché communiqué par l'Abbé Dantin.)
Le 6 janvier 1744, au château de Montaignac, pa-
roisse de Saint-Hippolyte en Limousin, naquit Fran-
çois de Gain -Montaignac^ ?• fils de Henri-Joseph
(1) Celui que nous donnons, est la reproduction photographique d*une
toile appartenant au général Privât, petit-neveu de l'évéque. Le se-
cond, que nous regrettons de ne pouvoir reproduire, représente Mgr
de Gain-Montaignac, un jour de réception, d'après un portrait du
château de Cahuzac (Gers), appartenant à M. le baron Gustave de
Saint-Julien, et qui a été donné à son arrière*grand*mère par Tévôque
de Tarbes lui-même.
— 367 —
de Gain, marquis de Monlaignac, et de Léonarde Le
Groing, dame de Fage-Brunel. Il eut deux frères :
Tainé, Jean-Marie, qui fut écuyer du roi, et un cadet,
Marie-Joseph, comte de Gain — sans compter ensuite
deux sœurs : Julie, M"' de Monlaignac, et Gasparde,
M"* de Rosier.
Clerc du diocèse de Limoges, il fut admis au
Grand-Séminaire de Saint-Sulpice, à Paris, le 29 oc-
tobre 1764 (I). C'est là qu'il se lia d'amitié avec Louis-
Apollinaire de Latour du Pin-Montauban^ son futur
métropolitain d'Auch qui partagea son exil en Es-
pagne.
Ordonné en 1768, le jeune prêtre fut investi
aussitôt du bénéfice d'abbé commendataire de Qua-
rante^ au diocèse de Narbonne; puis il reçut Tabbaye
de Saint- Vincent-du-Mans, une des plus riches du
royaume, et maintes autres collations qui en firent
très vite un grand seigneur ecclésiastique, se consti-
tuant jusqu'à 100,000 livres de rentes.
L'abbé de Gain n'est pas moins choyé par le roi.
En 1776, lorsqu'il alla visiter l'Italie, une lettre per-
sonnelle de Marie-An toi nette le recommanda à sa
sœur, la reine des Deux-Siciles. El à Rome, comme
à Naples, l'accueil le plus bienveillant et le plus flat-
teur lui est réservé. Ces relations lui serviront aux
jours d'épreuves, quand viendra l'exil.
Dès 1779, le 14 août, le voilà aumônier du roi, et
il est plus lard successivement nommé conseiller du
(Ij Franciscus Degain de Monlaignac, clericus Lemovicensis, na-
tu8 anno ilûi die 6 januarii. — AdmissiLSinSeminariodieoctobris
176^ (Archives du Séminaire de Saint-Sulpice, Registre des élèces,
cité par M. Dantin, p. 5, en note.)
— 368 --
roi, commandeur, grand-croix des ordres de N.-D. du
Mont-Carmel et de Saint-Lazare. A ces honneurs, le
cardinal Charles- Antoine de La Roche- Ai mond, arche-
vêque de Reims — enfant, lui aussi, du même diocèse
de Limoges et grand-aumônier de la Cour^ — ajoute
celui de vicaire-général, ce qui n'empêche pas Tabbé
de Gain de rester étroitement attaché au service de la
maison royale. Il est aimé de Louis XVI et jouit de
toutes les faveurs de Versailles.
A la nomination à Angers de Mgr Lorry, le roi
nomma son aumônier pour le remplacer sur le siège
épiscopal de Tarbes. Le nouvel évêque fut sacré à
38 ans, le 20 octobre 1782. Deux autres Limousins,
le même cardinal de La Roche- Aimond et Pierre II
de Sainl-Aulaire, Pavaient précédé à cet évêché du-
rant le XVIII* siècle.
Dès son arrivée à Tarbes, Mgr de Gain voulut acqué-
rir une connaissance complète de son diocèse. Dans ce
but il adressa à tous les curés un long questionnaire
dont les réponses ont été conservées. Il eut ainsi tous
les renseignements désirables sur ses auxiliaires et sur
la situation matérielle et morale de chaque paroisse.
M. Dantin analyse ce précieux document auquel Tévê-
que donna, en corollaire, des instructions confiden-
tielles et pratiques : cette seconde pièce sera ultérieu-
rement publiée (1).
Les ordonnances du nouvel évêque, ses mandements
sur Téducation ecclésiastique au séminaire, sur ren-
seignement du catéchisme (1784 et 1785), prouvèrent
(t) Note en addenda à la fin du volume.
— 369 —
encore son zèle éclairé (1). Président-né des Etats de
Bigorre, sa sollicitude s'étend aux biens temporels de
la province, avec sa générosité : en 1783, il fait dis-
tribuer 3,000 livres aux victimes d'un incendie qui
dévora une rue entière de Tarbes; en 1787, c/est
1,200 livres pour remédier à une disette générale;
en 1789, une autre somme non moins importante
aux paysans dont la récolte est ravagée par la grêle.
Arrivent les jours critiques^ que M. Dantin appelle
« la Crise du Serment ». L'évêque de Tarbes, au début
de Tère nouvelle, dit la messe sur Tautel de la Fédé-
ration^ le 14 juillet 1790, sur une place publique de
la ville; il est très conciliant, mais il hésite cependant
devant le serment imposé par l'Assemblée nationale;
pour gagner du temps il passe en Espagne, le 9 dé-
cembre, et de Saint-Sébastien il fulmine en une épltre
contre ce fameux serment.
A dater de cette époque (1790), Mgr de Gain écrit
cette série de lettres que publie M. l'abbé Duffau :
« Le langage du polémiste, bien que toujours tem-
péré par la charité et la modération, s'éleva jusqu'aux
accents de la plus haute éloquence » pour défendre
l'autorité de l'Eglise.
Ces lettres avaient été en partie réunies en deux
volumes par son vicaire-général, compagnon de ses
vicissitudes, M. de Layrolle, qui ne nous est pas étran-
ger, ayant été nommé à l'abbaye de Lesterps, au dio-
cèse de Limoges. M. Duffau en publie les premières et
(1) Le mandement du catéchisme servait encore, il y a quelques
années, de préface à celui du diocèse de Tarbes. C'était, écrivait
M. Bilière à M. Dufau (p. iv-v) le 8 décembre 1896, une c délicieuse
introduction » que « ce mandement de notre évoque limousin ».
— 370 —
les dernières, qui sont les plus intéressantes. Déjà, les
lettres pastorales adressées à son diocèse par Mgr de
Gain avaient été résumées dans les Mémoires qu'avait
fait paraître sur Tordre de Pie VI, à Pise en 1814,
dernier volume, consacré à l'histoire religieuse de la
France pendant la Révolution.
Ce bagage littéraire, déjà important, se complète :
1 Me 136 lettres particulières écrites à Tabbé de Cas-
teron, réunies par Tabbé Cusajoux, un érudit local,
et utilisées par M. Dantin; — 2" de 172 a Lettres de
Mgr François de Gain, évèque de Tarbes, à ses neveux,
sur la religion catholique, écrites pendant la Révo-
lution de France n, 12 volumes in-8% actuellement
en possession de son historien et dont, en bon pré-
curseur, M. Duffau avait extrait la relation de ses
voyages durant Texil :
ce Ces écrits, dit celui-ci, forment, dans leur ensem-
ble, un monument des plus précieux pour le diocèse
de Tarbes. 11 serait à souhaiter qu'un généreux Mécène
ou qu'une souscription du clergé en favorisât l'im-
pression. On peut espérer qu'ils tenteront la curiosité
et l'ardeur d'un écrivain à peindre le passé et qu'il
les mettra en œuvre pour raconter la vie complète de
Mgr de Gain, avec l'histoire de son diocèse durant la
Révolution. »
Ce dernier vœu est aujourd'hui réalisé par M. l'abbé
Dantin, aussi bien qu'il était désirable ; maïs, nous
plaçant au seul point de vue limousin, ce qui nous
retient, c'est surtout les faits personnels qui inté-
ressent la notoriété de notre compatriote épiscopal;
aussi faisons -nous beaucoup état du petit volume
de M. Dufau qui, en somme, est un pur recueil de la
— 371 —
prose de Mgr de Gain, à peine cinoientée par des phra-
ses essentielles de Téditeur pour renchalnement des
faits.
La prenoiière lettre de Tévéque de Tarbes fut une
réponse à Tinjonction des administrateurs du dépar-
tement des Hautes-Pyrénées, pour lui faire constituer
un Conseil épiscopal, conformément à la Constitution
civile du clergé (10 septembre 1790). Il s'y refusa,
mais avec les ménagements voulus par l'espoir qu'il
avait de voir modifier cette loi. Il se montrait néan-
moins très imbu des préjugés gallicans^ si bien en
cours dans le clergé de Tancien régime.
Auprès de ses prêtres, Mgr de Gain organisa la
résistance en adressant une première lettre-circulaire
à tous les curés du diocèse. A Saint-Sébastien, en-
suite, il attendit l'extrême limite deç deux mois
laissés par la loi aux ecclésiastiques résidant en pays
étranger, pour prêter le serment; il espérait toujours
quelque accommodement! Exhortation aux fidèles^
protestation contre la menace de nomination par les
électeurs d'un successeur en son siège épiscopal, tout
fut mis en œuvre par lui. Il vint lui-même, enfin,
prononcer un vigoureux discours pour montrer une
fois de plus qu'il était inutile de lui demander de
jurer, de prêter serment à la Constitution civile.
Ce discours fut le dernier qu'il fit^ le dimanche
13 mars 1791, en sa cathédrale de Tarbes.
Mais rien n'arrêta la marche de la révolution parmi
son clergé : les Pères Doctrinaires, qui régentaient le
Séminaire et le Collège, balancèrent son influence et
se rangèrent parmi les Constitutionnels, prédisposés
au schisme par leurs doctrines jansénistes. Le rec-
— 372 —
teur du Collège, Guillaume Molinier, — qui avait
notamment professé à Brive, — accepta le rôle d'évê-
que élu des Hautes-Pyrénées, malgré l'admonestation
sévère que lui envoya Mgr de Gain. Ce prélat fidèle
n'eut plus qu'à s'éloigner devant les désordres qui
déjà révolutionnaient le pays (mai 1791).
Il alla retrouver son métropolitain, Tarchevêque
d'Âuch, qui Tavait précédé dans le val d'Aran, au
village de Lés ; mais sous la pression des municipali-
tés françaises voisines, les deux évêques partirent pour
l'intérieur de l'Espagne. L'abbé de Montserrat les
arrête dans son monastère bénédictin, où notre com-
patriote séjourne jusqu'en décembre 1792 et d'où il
ne cessa de correspondre avec les catholiques de son
diocèse. Retiré ensuite, par économie, à l'ermitage
Saint-Onufre^ il y rédigea ses Lettres sur la Reli-
giouy en douze volumes, sorte de catéchisme de per-
sévérance pour ses deux neveux, Marlian et Alphée
de Gain de Montaignac, venus au monde peu d'années
avant la Révolution et restés en France, presque
orphelins, durant la tourmente : leur père, Jean-
Léonard, chevalier de Montaignac, attaché à la maison
du roi, et leurs oncles, erraient à l'étranger; leur
mère était en réclusion, leur grand'mère accablée
d^âge. Notre évêque chercha de* loin à exercer une
tutelle paternelle. L'un d'eux^ qui seul semble avoir
vécu^ le comte Martian de Gain de Montaignac^ né en
janvier 1778, chevalier héréditaire de l'ordre de
Malte, devint, sous la Restauration, gouverneur du
château de Pau et mourut en 1819, sans laisser
d'héritiers de son nom.
Mais la Terreur sévit à Tarbes durant la retraite de
— 373 —
son pasteur exilé. Son clergé, chassé, emprisonné,
recevait toujours de lui des instructions fortifiantes et
consolatrices. La guerre avec l'Espagne le força encore
à s'éloigner. Il partit, appelé par un ami, dans les
Etats romains (1794) et demanda Thospitalité au pape
qui lui assigna le couvent des Cordeliers, à Lugo,
ville de la Romagne.
De là, encore^ mais avec toutes les précautions pos-
sibles, Mgr de Gain envoya, deux années durant, ses
instructions à ses fidèles diocésains et à ses clercs
exilés. Il assiste de loin aux rétractations des asser-
mentés, que reçoit son vicaire général délégué, l'abbé
de Chavalon.
Mais, en 1796, Bonaparte entre en Italie et mar-
che sur les Etats de l'Eglise. L'évêque de Tarbes
et ses compagnons fuient encore devant les armes
françaises. Dans une odyssée très pénible, il gagne
succes.sivement Rimini, Capo d'Istria, Lorette, Morro-
valle dans la Marche d'Ancône et finalement, par
une barque de pêcheurs, le royaume de Naples. Là, à
Caserte, il revoit Mesdames de France, les trois filles
infortunées de Louis XV, réfugiées dans une rési-
dence d'été de leur royal cousin ; elles accueillent
très affectueusement Tancien aumônier de Versailles.
C'est vingt mois de répit où la correspondance devient
de plus en plus active, avec la reprise de son diocèse
sur les Constitutionnels. Les missives continuent de
plus belle encore quand Mgr de Gain séjourne dans
l'abbaye de Sainte-Trinité de la Cava, où l'hospitalité
lui était accordée.
L'armée de Championnet, maîtresse de Rome,
s'avance sur Naples. Le roi, la reine et son ministre
T. XXX. a - 8
— 374 -
partent pour la Sicile. Notre évêque se réfugie, lui
aussi, sur un navire portugais que commande un
ami^ Français comme lui, le comte de Puységur, qui
le transporte à Palerme. Mais une loi sicilienne inter-
dit le séjour aux émigrés. Heureusement qu'il se lie
avec le jeune amiral de la flotte du Portugal, le mar-
quis de Niza, qui lui fait renoncer à un projet d'aller
en Russie rejoindre son frère, le chevalier de Montai-
gnac, pour lui faire accepter Lisbonne comme rési-
dence (27 mars 1800).
Habitant un agréable couvent de franciscains, sur
les bords du Tage, le pasteur put s'adonner encore, en
toute sécurité cette fois-ci, à son rôle épiscopal, admi-
nistrant à distance son diocèse avec une sûreté de
main égale à ses principes pleins de droiture. Et Dieu
sait si les questions des serments exigés des prêtres,
autant que l'organisation des Missions, lui offrirent
des difficultés !
Il avait pour ainsi dire gain de cause, quand sur-
vint le Concordat. C'est une nouvelle source de tribu-
lations. M. l'abbé Dantin explique les hésitations du
fervent royaliste à accepter le contrat, dont les pre-
mières conséquences étaient d'entraîner les démis-
sions des évoques restés fidèles impeccables dans les
plus mauvais jours !
Il reçoit enfin un bref spécial du pape : Pie VH
demande sa démission à Mgr de Gain, qui la donne
avec beaucoup de dignité, en faisant naturellement
profession de foi gallicane et royaliste. Mais les articles
organiques l'irritent bientôt. Ses protestations le ran-
gèrent parmi les mécontents et il signa le manifeste
— 375 —
des trente-sept évéqiies anticoncordataires, les pères
de la Petite-Eglise.
Sur ces entrefaites (1808), Lisbonne était troublée
par l'invasion subite des troupes françaises. Privé de
tout secours, Tancien évêque connut des jours de
détresse. La pension, dont il était le bénéficiaire, ne
put plus lui être payée par les princes portugais,
enfuis au Brésil. Son dernier recours fut de se réfu-
gier à Londres.
11 était attiré en Angleterre par la présence de plu-
sieurs évoques, ses amis, et celle de la famille royale
de France, à laquelle il fut heureux de pouvoir faire
sa cour dés le lendemain de son arrivée, comme il
récrit. C'est dans ce milieu, en harmonie avec ses
affections, que s'écoulèrent, paisibles et sereines, ses
dernières années. Il peut achever ses Lettres sur la
Religion^ qui contiennent son autobiographie, et qu'il
dédie paternellement à ses anciens diocésains, les
soumettant humblement au jugement du Souverain
Pontife.
Sa santé éprouvée par tant de vicissitudes physiques
et morales, ne lui permit que d'atteindre le seuil de la
vieillesse ; il mourut le mois de juin 1812^ à l'âge de
68 ans.
Ainsi finit l'existence d'un prélat de l'ancien ré-
gime, qui, sans jouer un grand rôle politique, nous
présente une curieuse, originale et sympathique phy-
sionomie :
Abbé de cour, mais doué d'une piété sincère et
d'une forte instruction ; — esprit d'abord fort conci-
liant pour les idées nouvelles^ mais s'affermissant
dans ses principes à mesure qu'ils sont davantage
— 376 —
menacés et persécutés; — grand seigneur et mon-
dain, affiné par Téducation et cependant résistant à
toutes les épreuves ; — chevaleresque comme soutien
du trône et de l'autel, et mélangeant ses convictions
gallicanes et royalistes à une obéissance tantôt fière^
tantôt humble envers le pape
Cet évoque-gentilhomme d'un autre âge méritait
d'avoir un aussi digne historien que M. l'abbé Dantin
et nous avons été heureux de faire connaître son
ouvrage. Un critique de valeur, M. A. Mathiez, juge
ainsi ce livre : a Excellente monographie, bien docu-
mentée, bien conduite, bien écrite, où je ne trouve à
reprendre qu'un peu de partialité pour l'ultramonta-
nisme (1) »
C'est une bonne fortune pour notre compatriote
d'avoir à son actif, pour faire revivre sa mémoire, une
telle œuvre, avec, déjà, un commencement de publi-
cation de ses nombreux écrits.
Non seulement son intéressante odyssée et son ca-
ractère gagnent d'être racontés dans ces publications,
mais elles nous font désirer, à notre tour, que le
bagage de l'écrivain soit édité.
Notre compte rendu^ si borné qu'il a dû être au
résumé biographique^ ne servirait-il qu'à appuyer ce
vœu, que son but doublerait de portée.
(1) Revue Critique, n* du 16 juillet 1908, pp. 35 36. — Ajoutons cette
indication que donne à juste titre M. Mathiez : « On trouvera dans
ce livre des détails intéressants sur la vie des évoques et des prêtres
émigrés, sur l'accueil assez froid qu'ils reçurent en Espagne et dans
les Etats romains, sur les différents subterfuges dont ils usaient pour
communiquer avec leurs anciens diocésains. » — C'est dire la portée
générale du travail.
— 377 —
Et nous devons savoir déjà beaucoup de gré à nos
distingués confrères tarbais du monument historique
et littéraire qu'ils érigent à Mgr François de Gain-
Montaignac. C'est une importante contribution à no-
tre propre domaine limousin d'érudition,
Louis de Nussac.
De\x3c OlioixeirLS
LE CHEVALIER DE lONTIAUR ET LE BARON DE COIIARQUE
A la limite du canton de Vayrac, en bordure de la
route de Martel à Saint-Denis, non loin de la station
des Quatre-Routes, se dresse le petit château de la
Tulle. C'est une construction rectangulaire que flan-
que une tour ronde, véritable tour de guetteur, d'une
forme très élancée. De loin, on dirait une personne
vivante qui, au-dessus de la route et derrière le rideau
des peupliers, fixe attentivement la ruine de Cazillac.
Là vivait, en 1789, un ancien garde du corps du
roi, M. Jean de Montmaur, qualifié seigneur de la
Tulle, avocat en parlement, notable de la ville de
Martel, âgé d^environ soixante-cinq ans, époux de
dame Anne de Marquessac de Croze. De leur union
étaient nés plusieurs enfants : trois fils et des filles.
L'aîné des fils, Tiburce, à l'âge de 18 ans, était
entré comme garde du corps à la compagnie écos-
saise (I), sur la présentation de M. de Lagrange, gen-
tilhomme du Quercy, sous-lieutenant à cette compa-
gnie, dont le capitaine était M. le duc d'Ayen. On
retrouve Tiburce de Montmaur mentionné aux pièces
du procès de Louis XVI comme figurant encore parmi
les gardes du corps, aux appointements de 610 livres.
(1) La compagnie écossaise, dont Torigine remontait à Louis XI,
avait le pas sur les trois autres compagnies de gardes.
— 380 —
lors du licenciement, opéré en 1791. Emigré en sep-
tembre 1791, il fit à Tarmée de Condé toutes les
campagnes jusqu'en 1800. Il se distingua notam-
ment à l'affaire de Kramlach. Lors du licenciement en
mai 1801, il servait encore au régiment d'Angoulême-
Cavalerie, lequel avait pour colonel un Périgourdin,
M. de Mellet, et pour lieutenant-colonel un Limousin,
le maréchal-de-camp vicomte de Brachet. Une pre-
mière fois, le 22 septembre 1788, il avait épousé
Madeleine-Marie Vidal de Lapize^ d'une famille dis-
tinguée du Quercy. Après divorce prononcé le 25 plu-
viôse an II, il l'épousa une seconde fois le 2 novembre
1812. En 1815, le roi Louis XVIII le nomma chef
d'escadron de cavalerie et Tadmiit à la retraite.
Un autre fils fut l'abbé Jean-Jacques-Philippe-
Suzanne de Montmaur, chevalier de Malte et du
Phénix de Hohenlohe, dont il sera question un peu
plus loin.
Un troisième fils^ le chevalier Joseph-François-
Etienne de Montmaur^ dit Montmaur Lagilardie, joua
un rôle des plus actifs dans les mouvements roya-
listes qui suivirent la réaction thermidorienne.
Entré aux gardes du corps, compagnie écossaise, le
30 mars 1787, à Tâge de 18 ans, comme son frère et
sur la présentation de ce dernier, il était parti pour
l'émigration en septembre 1791.
En 1792, il sert dans la cavalerie de l'armée des
Princes, et prend part au siège de Thionville.
Après la retraite dos émigrés sur les pays-bas au-
trichiens, en avril 1793, il rejoint le corps de Condé
et prend part à toutes les campagnes^ jusqu'en 1797.
En 1798 il rentre en France, malgré la loi qui
— 381 —
punissait de mort les émigrés; il y revient avec des
pouvoirs spéciaux; il accompagne le marquis de Sur-
ville, chargé par Louis XVIII a d'organiser le Midi ».
C'est une figure bien curieuse que celle de ce mar-
quis de Surville et, à son sujet, on peut ouvrir ici une
parenthèse.
La Terreur était alors terminée. Mais, suivant un
mot bien connu, les morts parlaient. Un vent de
représailles, de vengeances parfois atroces et de ré-
bellion, soufflait sur le Midi. Sous un gouvernement
méprisé et sans autorité^ le Directoire, les anciennes
provinces du Languedoc et de la Provence, la région
du Vivarais, du Velay et du Forez, voyaient passer
avec leurs masques sombres, leurs cadenettes et leurs
triques redoutables, ces bandes qu'on appelait les
Compagnons du Soleil, les Ganses Noires, les Chouans
du Gard, les Vengeurs de la Nature outragée, les
Compagnons de Jéhu.
On s'attaquait aux caisses publiques, aux acqué-
reurs de biens nationaux. Des rives de la Méditerranée
au Plateau central régnait une grave effervescence.
Quelques royalistes s'offrirent au prétendant pour
aller chouanner sur les escarpements des Cévennes.
Parmi eux il ne s'en trouva pas de plus séduisant, ni
de plus audacieux que Jean-Louis-Armand Tallard^
marquis de Surville : ce fut un vrai personnage de
roman.
Né à l'Ile-de-France vers 1760, d'une famille ori-
ginaire du diocèse de Viviers, il avait été capitaine
au régiment de Pondichéry. Une première fois, au
lendemain du 9 thermidor, il était rentré en France,
et, par Lyon, avait gagné son pays d'origine, le Viva-
— 382 —
rais. Créole comme saint Georges, il en avait la sou-
plesse et, comme lui, c'était une épée dangereuse.
A ses heures perdues, il rimait sans en faire la con-
fidence à personne. C'était aussi une tête folle, dont
se défiaient les hauts conseillers de l'émigration, tels
que Précyqui, de Vérone, devait le diriger. Louis XVIII
et le prince de Condé se renvoyaient ses offres de ser-
vices, qu'ils encourageaient sans les accepter nette-
ment.
Dans son étude remarquablement documentée. Le
Prologue du iS fructidor^ à laquelle nous emprun-
tons les détails concernant Surville, M. Ernest Daudet
exprime l'avis que ce dernier n'aurait jamais reçu,
comme il l'a prétendu, le brevet de commandant
suprême dans la Haute-Auvergne, le Vivarais et le
Velay. Le contraire paraît ressortir du dossier mili-
taire du chevalier de Montmaur qui fut l'un des lieu-
tenants de Surville et dont les déclarations sont cer-
tifiées par plusieurs émigrés, le vicomte de Montchal,
le marquis du Boscage^ le vicomte de Lafaye et le
comte Louis de Clermont-Tonnerre.
C'est à la fin de 1797 ou au commencement de 1798
que le marquis de Surville et le chevalier de Mont-
maur revinrent en France^ sans qu'il soit possible de
mieux préciser.
Montmaur avait commission pour comfnander une
région déterminée du Forez et du Vivarais, mais il
était sous les ordres de Surville qui se qualifiait,
d'après ses papiers, « colonel légionnaire et commis-
saire départi par Sa Majesté très chrétienne dans l'in-
térieur du royaume^ près des Français amis du trône
et de l'autel d.
— 383 —
La situation des royalistes dans les montagnes de
la Haute-Loire était alors bien mauvaise. Ils avaient
éprouvé plusieurs échecs. La gendarmerie et les corps
d'infanterie légère les traquaient de toutes parts. Un
de leurs meilleurs officiers, le chevalier de Lamothe,
après s'être emparé de Pont-Saint-Esprit, avait été
arrêté, écroué à la prison du Puy, où on Tavait trouvé
égorgé le 6 octobre 1797.
Surville et Montmaur^ dans les gorges et les forêts
de cette région, menèrent pendant quelques mois une
existence mystérieuse, et vraisemblablement des plus
misérables.
Ce fut une femme, Marie Thiouleyre, veuve de Jean-
Pierre Brun, une « Messaline », a-t-on dit^ qui livra
le premier.
Voici le récit de son arrestation d'après le rapport
du général de brigade Colomb, commandant la T* sub-
division de la 19"** division militaire :
a Le 15 fructidor^ à 8 heures du soir, la gendar-
merie de Graponne s'est mise en marche pour se
rendre dans la commune de Saint-Pol, avec quarante
chasseurs de la 16'"*" demi-brigade d'infanterie légère,
en cantonnement à Craponne, commandée par le
lieutenant Meusnier, se dirigeant sur une maison
située dans des gorges indiquées comme repaire de
prêtres insermentés. A 4 heures du matin, la troupe
investit la maison en silence. Au moment où la porte
s'ouvre au jour, comme à l'ordinaire, par une femme
de l'intérieur qui ne se doutait de rien, la troupe
entre et trouve tout le monde au lit. Elle entend du
bruit sur sa tête et un mouvement* précipité. L'offi-
— 384 —
cier demande de la lumière qu'il n'obtient (ju'après
beaucoup de menaces.
<r Dans cet intervalle, le citoyen Delaigue, briga-
dier de la gendarmerie, aperçoit par une ouverture la
clarté d'une lampe qui est éteinte sur-le-champ^ et,
regardant vers Tendroit où il l'avait aperçue^ il re-
marque un trou par lequel un homme peut passer à
peine. Le brave Delaigue entre et se trouve dans une
caverne où, aussitôt qu'il a pénétré, un des brigands
— l'ex-marquis de Surville — le prend par les che-
veux et, lui tenant une espingole sur la poitrine, lui
dit :
ce J ... f. .... tu es mort si tu parles ! »
« Le brigadier s'écrie :
« Chasseurs, je suis perdu; mais faites rôtir tous
les gueux qui sont ici. »
a Dans cette caverne, à l'instant, l'officier Meusnier
fait braquer toutes les armes sur l'ouverture et or-
donne aux brigands de lâcher le brigadier s'ils ne veu-
lent tous périr. Enfin, sur sa promesse et celle de
Delaigue de leur ménager la vie, ils sortent, quoique
avec beaucoup de peine, un à un, de leur caverne,
au nombre de quatre, et sont enchaînés de même, et
amenés à Craponne, d'où le lendemain ils prennent
la route du Puy, escortés par le même détachement
et vingt-cinq hussards du 9"' régiment. »
Telle est la version officielle sur cette affaire, sui-
vant le rapport qui figure au dossier Surville aux
Archives nationales. Mais^ comme l'a remarqué M. Er-
nest Daudet^ en réalité, les royalistes épuisés et pris
au traquenard s'étaient rendus sans combattre.
- 385 —
Dans les papiers de Surville, on trouva des mani-
festes, des appels aux armes adressés « à la brillante
Jeunesse ». Transféré à la prison du Puy, il s'y con-
cilia, par sa bonne humeur et sa belle attitude, toutes
les sympathies. Il reconnut tout ce qu'on lui repro-
chait, se bornant à affirmer qu'il était étranger à tout
acte de brigandage, à toute fabrication de fausse mon-
naie et qu'il s'appelait tout simplement Tallard. Le
17 octobre 1798, il comparut devant une commission
militaire comme prévenu d'émigration. Il suffisait de
constater son identité pour lui appliquer la peine
capitale aux termes de la loi du 19 fructidor an V.
Dix témoins, sur onze, le reconnurent. Il avait en
effet une physionomie charmante, « une figure qu'on
n'oublie pas quand on Ta vue ». D'après une tradi-
tion, il se rendit sur le terrain d'exécution a rose et
poudré, son mouchoir à la main, saluant du geste la
foule accourue sur son passage ». A 11 heures du
matin, on le fusilla sur une place de la ville que do-
mine le rocher Corneille, en présence de la garnison
et de la population.
Avant de mourir il avait écrit à sa femme, lui re-
commandant les poésies d'une personne de sa famille
qui aurait vécu au temps passé, et qu'il appelait Clo-
tilde de Surville, œuvre immortelle, disait-il, qu'il
avait confiée à des mains amies et qu'il voulait don-
ner au public.
C'était un manuscrit de vers dans la manière an-
cienne, non sans grâce, mais tout entier de sa com-
position, comme on le reconnut plus tard.
A la directrice du journal littéraire de Lausanne,
il avait écrit : « 11 est des circonstances. Madame, où
— 386 —
l'on ne peut écrire que des billets. Je vais, sous peu
d'instants, me faire casser la tête. Il ne me sera plus
possible d'avoir quelque légère part à la confection de
votre journal intéressant »
Plus heureux que Surville, le chevalier de Mont-
maur, après la mort de son chef, parvint à se dérober
à la police du Directoire. Jusqu'en 1800, il erra dans
les montages du Forez et du Vivarais. On ignore s'il
prit part à l'agression dirigée peu de temps avant la
bataille de Marengo, contre la Manufacture d'armes
de Saint-Etienne.
En 1800, le comte de Noyant, venu en France au
nom de Louis XVIII, lui donna une mission d'inspec-
teur dans l'Agence royaliste de Lyon dirigée précé-
demment par Imbert Colomès(l), puis par le général
Willot(2). Il y demeura jusqu'en 1801. L'agence roya-
liste fut alors dissoute. L'amnistie des émigrés allait
intervenir. Montmaur accepta néanmoins plusieurs
missions. Mais une nuit, sur les quais du Rhône, il
se trouva en face d'agents qui lui mirent la main au
(1) Imbert Golomès (Jacques-Pierre), né à Lyon le 3 novembre 1729,
mort à Bath, en Angleterre, le 12 décembre 1809, fut premier échevio
de Lyon en 1788 et commandant de la garde nationaJe de cette ville
en 1790. Dévoué à Louis XVI, il émigra. Rentré à Lyon en 1797, il y
fut nommé député au Conseil des Cinq- Cents. Au coup d'État de fruc-
tidor, sur le point d'être arrêté comme royaliste, il se réfugia de nou-
veau en Allemagne. £n juillet 1801, le premier Consul le fit arrêter à
Bayreuth par le gouvernement prussien. Il ne fut mis en liberté qu'en
1809. Il alla aussitôt retrouver Louis XVIII en Angleterre, où il
mourut.
(2) Le général Willot, ami de Picbegru et de Moreau, déporté à la
Guyane après le coup d'État de fructidor, puis évadé de cette colonie
en 1798, devait en effet diriger un soulèvement dans le Midi, (d'après
les papiers saisis à Bayreuth et à Mende, publiés par le gouverne-
ment en l'an X). Dans une lettre du 3 septembre ISOO, il est dénommé
général en chef pour S. M. Louis XVIII et il a pour chef d'état-major
le général Danicau,qui avait pris le commandement des sections roya-
listes de Paris à la journée du 13 vendémiaire.
— 387 -
collet. Il se débattit, réussit à prendre la fuite. Dans
Tobscurité, on tira sur lui. Il reçut une balle dans la
jambe, put néanmoins échapper à la patrouille qui le
poursuivait. Recueilli par des personnes charitables,
il entra sous un nom supposé à THôtel-Dieu de Lyon
et y resta plus de quarante jours pour se faire guérir.
Mais la police était sur sa trace et sa tête avait été
mise à prix, suivant les pratiques inaugurées par
Fouché.
L'amnistie survint heureusement pour lui. Après
dix ans d'absence, il regagna le Limousin. Ses biens
de Martel, où son père lui avait légué une maison,
avaient été vendus comme biens d'émigré. Il se fixa
à Meymac (l), où il avait épousé, le 6 mai 1790,
M"* de Segonzac.
Là^ pendant toute la durée de l'Empire, il fut
l'objet d'une surveillance attentive.
En 1814, il ce rejoignit le corps », le régiment des
gardes licencié vingt-trois ans auparavant. Chevalier
de Saint-Louis du 9 août 1814, il fut incorporé de
nouveau à Versailles dans la compagnie écossaise pla-
cée sous le commandement de M. le duc d'Havre et
de Croy. Il fut même nommé garde de la Manche. Ces
derniers, au nombre de vingt-quatre, étaient les plus
rapprochés du roi dans les cérémonies.
Mais, dans sa vie aventureuse, l'ancien chouan du
Forez avait vieilli. Il avait désappris le métier mili-
taire. Sur la proposition du duc d'Havre et de Croy,
il fut admis à la retraite le l*"" novembre 1815, avec
rang de capitaine de cavalerie.
(1) Une branche de la famille de Montmaur était établie à Brive
même au xvii* siècle. Elle possédait en outre des biens à Meyssac.
- 388 —
La devise des siens était : Dieu et le Roi. La vérité
oblige à dire qu'il y était resté aveuglément et déses-
pérément fidèle.
L'abbé Jean-Jacques-Philippe-Suzanne de Monl-
maur, troisième fils de Jean de Montmaur, seigneur
de la Tulle, et frère du chevalier de Montmaur^ était
né à Martel le T** mai 1764. Dans sa correspondance,
il rappelle qu'il avait étudié la théologie avec un
jeune séminariste du nom de Joachim Murât. Vers
1787, ce dernier quitta l'habit religieux et s'engagea
à Toulouse dans un régiment de cavalerie, Ardennes-
Chasseurs.
On sait ce qu'il devint : époux de Caroline Bona-
parte, commandant en chef la cavalerie de la Grande-
Armée, il eut en partage le royaume de Naples.
L'abbé de Montmaur, en une existence moins bril-
lante, mais également accidentée, quitta la France,
fuyant les lois qui frappaient les prêtres insermentés.
11 arriva à Worms au mois de juin 1791. En novem-
bre de la même année il fut attaché, comme aumô-
nier, au quartier général de l'armée de Condé. Là, il
fut adjoint au grand aumônier, Mgr de Conzie, évo-
que d'Arras et l'un des conseillers les plus écoutés
du prince (1). De 1791 à 1801, date du licenciement
de l'armée Condéenne, il fit toutes les campagnes
auprès de ce dernier^ supportant, malgré sa santé
délicate, comme les combattants, toutes les intem-
(1) Marie-Hilaire de Conzie, d*une famille originaire de la Bresse,
d'abord capitaine de dragons, puis entré dans les ordres, avait été
évoque de Saint-Omer en 1766, évoque d'Arras en 1769. \\ mourut à
Londres en 1804.
— 389 —
péries des saisons et la vie pénible des camps. « L'hon-
neur de servir le roi, écrivait-il, sera pour moi la
plus belle récompense; je n'en demande pas d'au-
tre. » Sur les champs de bataille, dans les hôpitaux
militaires, il donnait ses soins, écrivait-il encore^
aux patriotes comme aux royalistes. Après les événe-
ments de 1815 il exerça^ de 1822 à 1830, les fonctions
d'aumônier au i'"' régiment de Grenadiers à cheval de
la garde royale. Le colonel marquis Oudinot, fils du
maréchal Oudinot^ l'avait en haute estime. Il connut
la veuve de Lescure, la marquise de la Rochejaque-
lein, qui lui fît part des souvenirs de sa vie aventu-
reuse en Vendée. Enfin, il fut lié avec le personnage
auquel s'applique la seconde partie de cette étude^
le baron de Commarque, qui, parti de la Corrèze,
devint l'un des chefs de la chouannerie normande.
Le 23 avril 1800, il écrivait d'Augsbourg à Munich^
à son correspondant, l'abbé de Lespine, qui fut plus
tard bibliothécaire adjoint à la Bibliothèque natio-
nale : a On dit que l'état-major de Monsieur est
nommé et que ce prince doit se rendre en Bretagne
avec Mgr le duc de Bourbon pour y réorganiser l'ar-
mée royale (t). La mort de Frotté, loin d'intimider,
y a exaspéré les esprits. Le baron de Commarque, no-
tre voisin et mon intime ami, a été fusillé avec lui.
Je le regrette sincèrement. »
M. de Commarque (Armand -Joseph), Tintime ami
de l'abbé de Montmaur, était d'une famille origi-
naire de la Dordogne. Mais il s'était marié à Beau-
ci) On voit que la conduite du comte d'Artois à nie-Dieu, en 1795,
et lors de l'affaire de Quiberon, n'avait pas découragé les espérances
des royalistes et leur confiance en ce prince.
T. XXX 3-9
— 390 —
lieu, où il avait épousé sa cousine, M"* Massoulié, fille
de Jean-Pierre Massoulié, écuyer, seigneur de la Veil-
lane, subdélégué de Tintendant à Beaulieu, et de
dame Anne de Commarque. Il ne semble pas qu'il en
ait eu des enfants. Sur la liste des émigrés de Tan II,
on trouve : « Commarque (Armand-Joseph), domicilié
à Beaulieu. » D'autre part, le 31 juillet 1792, l'agent
du domaine, séquestre, affermait, au prix de 1525
livres par an, les biens de M. Commarque, à Beau-
lieu.
D'après la savante étude de M. de la Sicotière sur
Louis de Protté, ouvrage où se trouvent rapportés
presque tous les documents ci-après utilisés, M. de
Commarque aurait été^ avant la Révolution^ capi-
taine au régiment de Beauce. Il ne figure cependant
pas sur les anciens contrôles de ce régiment.
D'après d'autres sources, qui paraissent exactes^ il
sortait des gardes du corps.
En 1792, on le trouve servant dans les rangs des
Comdéens.
Il revient ensuite de Témigration, désabusé sur
cette dernière comme Frotté. Plus tard il apparaît
en Vendée.
En 1799, il est devenu le premier aide de camp du
comte Louis de Frotté, lieutenant général, comman-
dant en chef l'armée royale de la Basse-Normandie.
Ce dernier, qui persista à combattre, lorsque Bour-
mont, d'Autichamp, Cadoudal et les autres chefs
angevins ou bretons avaient déposé les armes, fat
l'âme entêtée jusqu'à la mort de la chouannerie nor-
mande.
Dans un article du journal normand, La Foudre^
— 391 —
du 30 octobre 1821, signé Urbain Guilbert, on seni-
ble placer Commarque au-dessus de son chef, Louis
de Frotté. Le 3 septembre 1799, il commande une
importante division qui opère dans l'arrondissement
de Falaise et qui comprend 1425 chouans. C'était,
dit M. de la Sicotière, un homme d'une rare intrépi-
dité. Un soir, caché au château du Tertre avec d'Oil-
liamson et de la Pivardière, et prévenus qu'une visite
domiciliaire aurait lieu dans la nuit, à trois heures du
matin, ils se couchèrent en disant : Dormons jusqu'à
deux heures, et alors nous irons faire un tour dans les
bois. Au bout d'un certain temps, l'un d'eux touche
sa montre : elle sonne trois heures. Ces messieurs se
hâtent de sortir et de se sauver dans les bois. Mais le
temps était froid, la nuit toujours sombre. On inter-
roge de nouveau la montre qui, cette fois, sonne
minuit. Ils s'étaient trompés lors du premier appel.
« Rentrons au château, se disent-ils, nous nous chauf-
ferons pendant deux heures, puis nous reviendrons
ici. » Et les voilà qui regagnent le château du Tertre.
Ils en étaient tout proches, lorsqu'ils virent à l'en-
tour les feux de bivouac de la troupe qui, ayant de-
vancé l'heure annoncée, cernait l'habitation et avait
commencé de la fouiller. Ils purent heureusement se
replier.
Au début de Tan VIII, en l'absence de Frotté auquel
il servait de chef d'état-major, Commarque prend le
commandement des quatre divisions de l'armée de la
Basse-Normandie. Son quartier général est au château
de Fiers. Sa vie d'aventures allait se terminer.
Le 22 pluviôse an Vlll, le premier Consul lui-
môme, pour en finir avec cette poignée de factieux,
- 392 -
écrit au général Gardanne, chargé d'opérer contre elle,
une lettre par laquelle il naiet à prix à niille louis la
tête de Frotté. Celle de Commargue était cotée cent
louis.
Ces procédés rappelaient, il faut le reconnaître, les
mœurs de la Corse et les pratiques du niaquis.
Quoi qu'il en soit^ les volontés du premier Consul
ne tardèrent pas à être exécutées.
Quelques jours après. Frotté, Commarque et cinq
autres officiers royalistes, munis cVnn sauf-^conduit
en bonne forme, s'étaient rendus à Alençon pour
conférer au sujet d'un armistice avec le général Gui-
dai, commandant le département de TOrne, le même
qui fut arrêté en 181 '2 avec le général Malet, et fusillé
avec lui dans la plaine de Grenelle. En pleine nuit,
après quelques pourparlers, à Timproviste et sans
explications, les officiers Chouans furent arrêtés. On
les transféra immédiatement à Verneuil, avec ordre
de les traduire devant une commission militaire.
Dans cette affaire, comme à la suite de l'arrestation du
duc d'Enghien, les pièces de la procédure et la sen-
tence elle-même ont disparu. Frotté et Commarque,
a-t-on dit^ invoquèrent en vain la parole donnée et le
bénéfice de leur sauf-conduit. 11 n'y eut, ni témoins,
ni défenseurs. D'après une tradition, Louis Bonaparte,
le futur roi de Hollande, alors colonel du S"*' dragons
en garnison à Verneuil, refusa de présider la com-
mission militaire. On lui prête ces paroles : « Je ne
suis soldat que depuis peu de temps. Mais j'en sais
assez sur l'honneur militaire pour ne pas compro-
mettre mon nom dans une pareille iniquité. i> Pendant
la délibération du conseil^ les accusés, sans illusion
- 393 —
sur leur sort, demandèrent une bouteille de vin
qu'ils burent à la santé du roi. Par application de la
loi sur rémigration, ils furent condamnés à être pas-
sés par les armes.
L'exécution eut lieu à Verneuil, le 29 pluviôse an
VIII (18 février 1800), à cinq heures du soir, sur un
tertre aux environs de la ville, en un lieu qu'on
appelle encore le Clos-Frotté. Les condamnés s'y ren-
dirent à pied. Ils marchaient deux par deux, encadrés
par la troupe. Les fenêtres, sur leur passage, s'étaient
fermées en signe de deuil^ car la population était
royaliste. Une musique militaire jouait le Ça ira.
Frotté, dans la marche, vint à perdre le pas. Com-
marque, ou un autre, lui en fit la réflexion : « C'est ce
maudit air qui en est cause », répondit-il en souriant.
Devant le peloton d'exécution, les sept officiers se
prirent par la main et, avec une calme intrépidité
qu'ont reconnu leurs adversaires, tombèrent au cri
de : (T Vive le Roi ! »
Voici ce que contient le petit portefeuille en ma-
roquin rouge de Commarque, tout éraillé et usé, tel
qu'il fut saisi sur le « brigand » et tel qu'il a été con-
servé aux Archives nationales :
Passe-port en blanc de la municipalité d'Alençon,
lettre de sa sœur lui donnant des détails sur .ses niè-
ces, et particulièrement sur Angélique^ sa filleule,
a la plus jolie des trois petites. »
Chiffon de gros papier renfermant une mèche de
cheveux blonds, fins et soyeux, avec ces lignes qui
semblent avoir été renvoyées à leur auteur :
a Madame, je n'ai pu vous voir sans éprouver pour
— 394 —
vous les sentiments les plus tendres. Je sais qu'il est
impardonnable de vous en avoir fait part. Mais je
n'ai pu résister au désir de vous apprendre que je
n*aime et n'estime que vous. Si Tamour respectueux,
fidèle, et surtout discret, peut ne pas vous déplaire,
je jure de vous adorer toute ma vie. »
Notes d'auberge, recette de cirage, liste de sobri-
quets chouanniques ; billet d'Auguste, secrétaire de
Frotté, mandant Commarque auprès du général en
chef; deux chansons, l'une : a f aimons que Voti
chante gaiement coînme faisaient nos pères »,
l'autre, sur le vin et l'amour : a Las ! je sais borner
mes désirs ».
On voit combien était léger le bagage de ces hom-
mes d'action. Au milieu de dangers incessants, non
seulement ils restaient pleins de confiance, mais ils
trouvaient encore à se distraire avec les sous-enten-
dus de la joyeuse chanson des départements :
Heureux enfin qui te découvre,
0 département du Mont-Blanc !
Frotté, Commarque et leurs compagnons ont, dans
la vieille église de la Madeleine, à Verneuil, un mo-
nument en marbre blanc qui leur a été consacré par
la Restauration, avec un remarquable bas-relief de
David d'-Angers. On y lit l'inscription :
Sicut Machabœif perierunt hac in urbe anno
1800 die XVIII februar Ludovicus Cornes de Frotté^
Dux primarius 7'egii per Neustriam eœercitus
ejusque commilitones B^ de Comarc (1), /?** d'Hu-
(I) Sic,
— 395 —
gon^ Saint Florent, Dv. Verdun, Cavalier Duhuniy
Paschal.
Pro Deo et rege.
La maquette du bas-relief est, avec les œuvres de
David^ au musée d'Angers. Il représente les sept offi-
ciers royalistes devant le peloton d'exécution. Le génie
du grand statuaire s'y révèle dans sa beauté simple et
dans tout son éclat. Les attitudes sont pleines de
noblesse. Les têtes, où les yeux semblent agrandis^
sont admirablement expressives. Commarque est à la
droite de Frotté, qui est placé au centre.
Rappelons en terminant que, du rocher de Sainte-
Hélène, Napoléon lui-même, après avoir subi à son
tour les injures de la Fortune et reconnu le prix de
la fidélité, a écrite rendant hommage à ces braves
qu'il avait envoyés au dernier supplice : « La France
donna la mort à leurs actions et des larmes à leur
courage. Tout dévouement est héroïque. »
J. DE Saint-Germain.
AUTRES VÉNÉRABLES DOCUMENTS MONASTIQUES
SUR
TULLE ET ROCAMADOUR
ÉDITÉS AVEC NOTES
PAR
(Suite).
II
Sequuntur Census et Redditus.
SsLncti Hilarii de Fouissac.
Imprimis débet prior de Afaensaco 6 librâs turonenses et
2 solidos solvendos in festo omnium sanctorum.
Item praepositus de Navis débet 3 solidos quos habebat ibi
vicecomes Ventodorus.
It. qui tenent affarium de Palagingas debent 4 sextaria
siliginis ad bonam et 2 sext. frumenti ad bo. quae habebat
ibi vicecomes Ventodors (1).
SequWir parrochia de Chameyrac.
It. in manso de la Chieza d'à Poissac debent decem soli-
dos solvendos in festo beati Martini hiemalis cum mero et
mixto dominio et jurisdictione alta et bassa, et etiam servi-
tia et explectamenta.
(1) Seigneur de Sérilhac, co-seigneur de Lagarde et environs, ainsi
que d'Ârgentat, suzerain pour Saint-Chamans, etc.
T. XXX. 4 - 1
- 398 —
Sequitur parrochia SANCTiE FoRTUxATiE.
In manso de Vaurs (1) debent 35 solid. quos habebat ibi
vicecomes Ventadorus solvendos, medietalem in festo beati
Martini hiemalis et aliam medietatem in martio.
Sequitur parrochia d'à Orliac.
In manso d'à Crossac debent 10 sezt. aven. a. p. et 3 sext.
sil. quse ibi habebat vicecomes Ventodorius.
Praemissa superiù? scripta levantur cum terra Tutellensi
et non computantur de facto Sancti Hilarii.
Sequitur parrochia 8. Hilarii d'à Fouissac.
De Noualias sotranas debent 1 sext. frum. ad mensur.
viscontal et 13 sext. eyminam silig. ad eandem mensur. ; et
8 sunt calcati ; et 10 sext. avense ad mensur. Detglotonis
(delglotonis ??) et 10 et 6 solid. 5 denar. obolum solvendos
in terminis qui sequuntur, videlicet in festo beati Michaelis
6 sol. 5 den. obol. it. in martio 5 solid. it. in majo 5 sol. ;
item debent 1 mutonem et 3 gallinas et 2 gallos et 20 ova.
It. in manso d'à Chabanas sotranas debent 1 sext. frum.
ad mensur. viscontal sextar. silig. ad mensur.
Gloton (2) et ad mensur. viscontal et 11 sext.
aven, ad mens. Gloton et 60 sol. in terminis qui sequuntur,
videlicet in festo b. Mich. 15 sol. in festo b. Andréa» 20 sol.
it. in marcio 10 sol. it. in maicr 10 sol. et 2 gallin.
In manso d'à Jo debent 20 sext. frum. ad mensur. viscon-
tal, calcatos, et 7 sext. et 1 quartonem silig. ad mens. vise,
et 12 sext. aven, ad mens. Gloton, et 50 sol. solvendos in ter-
minis qui sequntur, videlicet, in festo b. Mich. 20 sol. ; in
festo b. Ândrese 18 sol. et in martio 12 sol. in maio
(siCf en blanc). It. 1 mutonem, it. 20 ova, it. 5 gallin. et 2
gallos.
(1) Meyssac. — Vaurs, 31 hab. fief. Tous ces lieux existent; Job,
43 hab.
(2) Egletons ; vicomtale (de la vicomte de Ventadour, éclipsée de
Comborn).
- 399 —
It. in affario del ChamboriSi debent 2 sext. frum. ad mens,
viscontal et 3 sol. solvendos in festo S. Michaelis, item 1
gallinam.
It. in manso de La Borgada, debent 1 sext. frum. ad mens,
viscontal et 14 sext. eyminam silig. 5 sext. ad mens. Gloton,
et 2 sext. calcatos ad mens, viscon. et 7 sext. eymin. ad
eandem mens, viscon. et 10 sext. eymi. aven, ad mensur.
Gloton et 54 sol. 4 den. renduales, in terminis qui sequntur,
videlicet in festo b. Mich. 20 sol. ; in festo b. Andreae 14 sol.
4 den. ; in mai*tio 10 sol. ; in majo 10 sol. et 3 gallin. et 2
gallos et 20 ova, et 1 mutonem in maio.
In manso d'à La Charlania, debent 12 sext. silig. ad mens.
Glotonensem et 18 sext. aven, ad eandem mensur. et 24 sol.
et 6 den. rend, in terminis qui seq. videlicet in festo b.
Mich. 10 sol. ; in festo b. Andreae 10 sol. in maio 4 sol. 6
den. et 3 gallin. et 60 ova.
In manso d'à La Clercia, debent 2 sext. frum. ad mens,
vise, uno calcato et 13 sext. eymi. silig. ad dictam mensur.
et 6 sext. sunt calcati et una tortada(i) silig. et 13 sext. emin.
aven, ad mens. Gloton, et 48 sol. et 6 denar. obolum solven-
dos in terminis qui sequntur, videlicet in festo b. Mich. 12
sol. 6 den. obol. ; in festô b. Andr. 15 sol. ; in martio 11 sol. ;
in maio 10 sol. et 3 gallin. et unam albergam.
In affario de Malfon, debent 1 sext. silig. et 1 sext. aven,
totum ad mensur. viscon. et 12 den. rend, in festo B. Mich.
et 2 gallinas.
It. in bordaria de La Massonia (2) et d'à La Clida, debent
1 sext. frum. calcatum, ad mensur. viscon. et 8 sext. silig. ;
5 calcatos ad mensur. viscon. et 2 tortadas silig. et 6 sext. et
duas partes unius eyminae aven, ad mensur. Gloton et 13 sol.
turon. 2 den. solvend. in term. qui seq. videl. in festo b.
(1) Mesure usitée pour la cendre uniquement à Corrèze, soit un
comble panier {paillaasoa) à a tourte » de pain. Chambort, signalé
1771 et 1451 d'après série B. 721, Archiv. de la Corrèze, près Char-
lane de Saint Hilaire, distinct de la Charlane, haute et basse, de La-
pleau, 25 hab. ; Clercie, 38 hab. ; Bourgeade, haute et basse, 143 âmes.
(2) Une autre Massonie que celle de Soudeilles, cela va sans dire.
Clida, porte clôture eu bois tressé.
— 400 -
Mich. 5 sol. ; in festo b. Andr. 2 sol. G den. ; in mârtio 2
sol. 6 den. ; in maio 3 sol. minus 2 den. et unam gallin.
In bordaria d'at Poch et d'à Lâusedat et pro loco de Las
Vaus Sobranas, P. Lasvaus débet (debent?) 11 sext. eymin.
silig. ad mens. yisc. et 6 den. ave. ad mens. Gloton et in
festo b. Andr. 20 sol. 7 den. ; in maio 20 den. et 10 ova et 2
gallin. et unam albergam.
In affario d'à La, Chatgeyria Sancti Hilarii, debent 1 sext.
frum. ad mens. vise, et 7 sext. et 1 quartonem sili. ad eand.
mens, et 3 sint calcati et 9 sext. et 1 ras aven, ad mens.Glo-
tonen. et 24 sol. 9 den. solvend. in terminis qui sequntur,
videl. in festo b. Mich. 9 sol. 9 den. ; in festo b. Andr. 5 sol. ;
in martio 5 sol. ; in maio 5 sol. et 3 gallin. et 1 albergam.
It. in bordariis d'à Lasvaus sotranas S. Hilarii et d'à Las
Bordas, debent eyminam frum. ad mens. Glot. et 7 sext. sili.
ad mens. vise, quorum 2 sext. sunt calcati, et 6 sext. aven,
ad mens. Gloton et 18 sol. et 7 den. rendual. solvend. in
term. qui seq. videl. in festo b. Mich. 8 sol. 7 den. et in festo
b. Andr. 4 sol. ; in martio 4 sol. ; in maio 2 sol. ; et 1 gallin.
in festo nativit. Domini et 1 albergam.
Item 6 den. turon. pro molendino Saraiur (farnier??) de
novo aedificato et 1 den. de accaptamento in mutatione do-
mini utriusque (1).
It. d'à La Mauria debent 1 sext. frum. ad mens, viscon.
et 4 sext. frum. ad mens. Glot. et 11 sext. sili. quorum 3
sunt calcati ad mens. Glot. et 1 sext. ad,mens. Glot. et resi-
duum ad mens, viscon. et 12 sext. et 1 ras aven, ad mens.
Glot. et 28 sol. et 9 den. rend, solven. in term. qui seq. videl.
in festo b. Mich. 10 sol. 9 den. ; in festo b. Andr. 8 sol. ; in
martio 5 sol. ; in maio 5 sol. ; item 7 gallinas.
Item Joannes et Alaida et Bartholomaeus Lamoria debent
2 sext. sili. ad mens. vise, et 5 ras aven, ad mens. Glot. pro
affario de Las Vaus Sotranas et d'al Poch-à-la-Rocha ; item
12 sol. minus duos den. rend, in term. qui seq. videl. in
(1) J'écarte Sarcueil, 1577 ; Sercuer, 1406, paroisse de Laval, dépen-
dant de Saleys, près la Jarrige ; il a disparu.
— 401 -
festo B. Mich. 4 sol. ; in festo B. Andr. 4 sol. ; in martio 2
sol. ; in maio 22 denarios etc.... (sic).
Actum Tutellse, die 12 mensis Junii, anno Domini 1487,
praeseutibus testibus infra scriptis, existens et personaliter
constitutus Joannes, aliàs Joanisso Demarses, aliàs Ptc-
vert (1), laborator Tutellse, coram venerabili et religioso
viro fratre Martino de Campo, eleemosinario ecclesiae cathe-
dralis Tutellensis, tamquam domino fundali et directo horti
infra confruntandi, etc. (sic).
Cuiquidem domno eleemosinario dixit et explicavit quod
ipse acquisiverat titulo permutationis et excambiaverat
quoddam nemus suum, situm in lerritorio de Saumieyras,
cum quodam horto ipsius germani qui dictus Ger-
mani (sic) eidem de Marses sibi diviserat dictum hortum,
quiquidem hortus est situs in territorio de Las CostaSy con-
fruntatur cum quodam alio horto haeredum quondam Pétri
Pierre (sic, probablement pour Petit-Pierre) et cum quàdam
vineâ dicti Marses et cum quodam itinere publico per quod
itur de Barrio de la, Barrieyra ad Crucem de Bar, tran-
seundo per Bassiam, et cum quodam alio horto illorum de
Vernia, aliàs Bedde, quadam parva via intermedia, cum suis
aliis confruntationibus.
De quoquidem horto dictus dominus eleemosinarius est
dominus fundalis et directus et eidem pertinet jus vestiendi
et divestiendi ; quare gratis recognovit ipse Marses tenere
ab eodem domino dictum hortum, tamquam à domino suo
fundali, promisitque et juravit alium non advoare alium
(sic) iii dominum. Et cum praemissis dictus dominus eleemo-
sinarius, tamquam dominus fundalis dicti horti investi vit
(1) Marseix, fief (Yigeois) ; Ëgletons, Latronche. Saumières (Tulle-
Saint-Julien), non loin de Poissac. La Barrière et la Racsie, quartiers
de Tulle, continus ; le deuxiènoe en 1510, peu distant du pont de la
Barrière. — Ceindriat, près la Ghèze et Chanac ; le Charlat, aliàs
Feix, 1600 (Tulle). — Croix-de-Bar (Tulle), 62 hab. ; Mazaleyrat, 95 h.
(Pradines) ; Peyrelevade (Chameyrat).
— 402 —
dictum Marsès de dicto horlo praeconfruntato, cum juribus
et pertinentiis suis, per traditionem notse, et recognovit ha-
buisse et solulum fuisse de capissolido, laudimio et investi-
tione, et eundem quittavit penitus cum paclo etc. (sic). De
quibus premissis omnibus et singulis dictae partes petierunt
instrumentum et instrumenta in meliori forma, etc. praesen-
tibus Petro Mathaeo et Joanne, aliàs Joanot de Peiralata,
lignifabris, Tutellœ habitantibus, testibus ad haec vocatis et
rogatis. — De Chieza, notarius, qui praemissa recepit.
Actum Tutellae, die 22 nov. 1488.... testibus : domino
Joanne de Jos et Martino Pouly, qua die personaliter cons-
titutus coram fratre Martino de Campo, eleemos. eccl. ca-
thedr. Tut. dominoque juridiquo et fundali et directo man-
sorum infrascript. videlicet : Joannes de Cendriac, aliàs
Penel, mansi de Cendriac, parrochiae de Chanaco, qui eidem
explicavit et insinuavit arrenduationem et assensam eidem
factam per Anthonium del Mazaleyrac, mercatorem Tutellae,
de sexta parte, partim pro divisoet partim pro indiviso man-
sorum de Cendriac, d'à la Bachelaria et de la Meyrandia,
ad invicem contiguorum, sitorum in parrochia de Chanaco,
confrontantium cum pertinentiis mansorum d'à La Chiesa
de JoSy de Vedrenas et d'aZ Trecht^ cum suis aliis confrun-
tationibus, sub annuo censu seu redditu 50 sol. monetae cur-
rentis, rendualium, et sub intraggio 40 librarum monetae
currentis semel solvendarum, quod quidem pratum [pro
pactum seu pretium] et intraggium confessus fuit et reco-
gnovit se habuisse et realiter récépissé et ipsum Joannem
praesentem solvit et quittavit, cum pacto, etc. (sic) et quod
de praemissis se divestiverat et ipsiim investiverat, et per
praefatum dominum Eleemosinarium investiri voluerat,
eidemque supplicaverat quatenus dictam arrendationem lau-
daret et confirmaret, et ipsum de praemissis investiret et
investire vellet,- quia erat praesto et paratus facere deverium
suum.
— 403 —
Et qui, inquam, dominus eleem. audila requesta, eandem
arrendationem modo praedicto factam, laudavit et ratificavit,
etc et ipsum Joannem Penel de prsemissis, tamquam do-
minus fundalis eorundem investivit per traditionem notulse
arrendationis, jure suo et quolibet alieno semper salvis, et
salvis sibi censibus, redditibus, aliisque juribus ad causam
praemissorum debitis, et recognovit habuisse cappissolidum
et laudimiencium et jus investiturae pro prsemissis débita et
eundem Joannem presentem solvit et quittavit cum pacto, etc.
Et ibidemmet ipse Joannes Penel de Cendriac gratis, etc.
confessus fuit et recog. se tenere à dicto elee. prœs. tanquam
à dno juridiquo, fund. et direc. dictam sextam partem ipso-
rum mansorum superiùs confrunt. et se debere anno quolib.
et perpet. census et reddit. ad causam ejusdem debitos et
consuetos et quos solvere promisil et convenit lerminis et
pactis debitis et consuetis sub obligat. et hypotheca, etc.,
renuntians, etc., juri, etc., comp. noluerunt, etc.
De quibus praemissis ipse Joannes Penel petiit pro se, et
dictus dominus expensis dicli Joannis etiam petiit instru-
mentum et eorum quilibet. Datum pro copia extrada ab
originali notula receptum per B. Solerii, r.
29 janvier 1528. Les tenanciers del Trecht (Chanac) ont été
condamnés par sentance du séneschal au siège de Tulle,
à cause du tènement de Jos (Chariâc), à payer 2 sestiers
seigle, une eymine d'orge, une de froment à petite mesure
de Tulle, 4 sesliers avoine à bonne mesure de Tulle et
32 s. ts. d'argent et 2 gelines de annuelle et perpétuelle
rente. [Je résume.]
10* déc. 1529. Sentence dud. sénéch. condamnant ceux de
Bessas (Espagnhac) à payer in futurum aud. aumônier de
rente sur Bessas à petite mes. de Tulle, avec dépans.
2 septemb. 1529 contre ceux de la Chkse (Chanac) de 2 ses-
tiers seigle, sentence donnée à la cour de TAumonerie tenue
- 404 —
au village de Gendriac (Chanac) par M. Anth. Agrafeuil,
juge d'icelle. Est écrit au papier de la cour de lad. jurid.
21 mars 1529. Contre ceux de BouUse (Corrèze), par le
juge de Vantadour, pour payer à Taumôn. 4 cestiers seigle,
petite mesure. 28 aoust 1556. Contre Jean Pinhot Chadabec,
meusnier, paroisse S*-Germain-les-Vernias, par B. de Loyac,
lient' partie, de Tulle, pour payer rente 4 cestiers seigle,
mesure Tulîe, à l'aumo. sur le Moulin de Chad&bec,
14 juillet 1556. Sentence du sénéc. de Tulle contre ceux
d'Aujsière (Rosiers) pour rente sur Auzière, de 20 s. ts. à
chaque Noël, et continuer in futurum avec dépans tels que
de raison. Signé dud. B. de Loyac.
20« fév. 1592 contre Ant. Dupuy, dit fort espeix, de Tulle,
par le juge ordin. de Tulle, rente d'un cestier seigle, mezure
Tulle, payab. entre les 2 fêtes N.-D. d'août et sept, pour un
bois assis au Charlat (S* Julien de Tulle).
G. de Coderc^ commis du greffier.
Compulsoire du livre entier dont les directeurs raportent
l'original pour justifier que les rentes sur lesquelles le pré-
vôt Rajaut a fondé l'aumône du caresme, de 40 cetiers de
seigle, dans l'acte de 1216 ont esté toujours joijes par l'au-
monier et pour justifier que les mêmes rentes de Bussières,
d'Aubes, de Maugenès, de Rochepaluc, de la Jutzia et de
Longmànteil sont contenues dans ce livre comme apparte-
nant à Taumonerie. — Cote O.
Déposition à Venquête de 1671 (\).
lo Tutela civitas est sita in parte inferiori provinciae
Lemovicensis, in territorio satis fertili respectu montium
circunstantium; in ea fluunt Cur7'etia et SoJanafluvii; sunt
in ea 24,000 animarum, aut circiter, et sicut episcopum in
spiritualibus dominum cognoscit, ita et illi subjacet in tem-
poralibus; hsec scio quia in ea natus sum et fui educatus et
(1) Papiers Talin.
— 405 —
sum cadonicus in Ecclesia cathedrali Sancto Martino Turo-
nensi.
2^ Episcopo dedicata, arte magniôca sedificata, et inter
alias regni cathédrales, insigni mememorata (sic), in qua
Dovemdecim sunt a{(ana bene ornata in quibus singulis
diebus ut plurimum sacra mysteria celebrantur; multis
tamen indiget reparationibus, tum quia est antiqua, tum
quia valdé pauperes sunt illius ministri ; fornix multis in
locis ruinae proxima est, sicut et clsLUStrum et refectorium :
campanilis, pyramidœ admirandae eletationis super 4 co-
lumnas promptissima indiget reparatione, sine qua opus
illud (arlis miraculum existimatum) brevi ruens civitatem,
imo regnum maximo privabit ornamento. Libri cantus et
ornamenta deficiunt et numéro et qualitate. Haec scio quia
vidi.
3** Bituricensis archiepiscopatus suffraganea est eclesia
Tutelensis, hoc scio : 1® quia legi ; 2® quia dum vocat suffra-
ganeos archiepiscopus Bituricensis ad deliberandum de ne-
gotiis cleri et ad eligendum, unum ex primo ordine, alte-
rum ex secundo, qui deputentur ad Comitia Cleri Gallicani
vocatur episcopus Tutelensis; 3^ quia sententiae officialis
ordinarii Tutelensi, per appellationem devolvuntur ad ar-
chiepiscopum Bitur. quemadmodum ego vidi.
4^ In dicta ecclesia 4 dignitates existunt, quarum una
decanatus, que est major post pontificalem, alia autem prae-
positatus quœ secunda, alia thesauraria loco sacristae quae
tertia, quarta denique cantoria, cuilibet earum annexa est
praebenda. Sunt insuper 12 canonicij qui modicos mensâe
capitularis fructus cum 4 dignitatibus praedictis simul divi-
dunt, excepto quod decanus duplici gaudens praebenda du-
plicem accipit portionem.
Unicum est propriè beneficium in inferiori (ut vocant),
choro, quod t^icaria S. Benedicii nominatur; illius titularis
officiis diurnis et nocturnis interesse tenetur : non sic de
multis ejusdem ecclesise (olim abbatialis) sive offlciariis sive
beneficiariis, nuUus enim illorum ex quo ex regularibus
facti sunt saeculares divinis officiis interesse tenetur.
- 406 —
Hœc sunt nomina eorura quorum nunc recordor, iofficia^
olim et adhuc claustralia nuncupata, eleemosinaria scilicet,
cameraria, infirmaria et celeraria. 6 prœpositatus : de Va-
letta, de CapelJa 8. Joannis de Genesta, de Navis, de Gler-
gorio, de Seilliaco, de Planis.
12 prioratus : de Rupe, de Liloo, de Bougayrous, de
Ussaco, de S. Clémente, de Guzancia, d'Autoy, de Meyri-
niaco, de Floiraco, de Banieiris, de Meyssaco. de Gapella-
TEspinassa, quibus nulla animarum cura, nisi per vicarios
perpétues ; qusedam capitule sunt unita.
Est alia vicâria domini Ademari, quorum omnium titu-
lares (servi veré inutiles) ecclesise substantia pingues facti,
pauperrimos irrident Ganonicos, servosque suos vocant, dum
pondus et aestus eclesiae sustinent, divinis offîciis sine adju-
torio magno cum iabore vacando : durum enim est et inau-
dilum ecclesiam cathedralem cernere amplis reditibus fun-
dalam à praefatis beneûciariis destitutam qui bonis ejus
utuntur nihilque servitii illi prsestant, dum parvus ille
numerus 16 canonicorum quantate (sic) potest assiduitate
ministrat, verùm quia non respondet splendori tantœ eccle-
siae defectus beneficiariorum, vicariorum, vel sacerdotum in
ea ministrantium, sanctissimus Papa Julius 3 decrevit in
buUa data Romae, apud S. Petrum, 8 calend. martii, ponti-
ficatus anno I. ut mensse capitulari qusedam bénéficia uni-
rentur, quorum fructus applicarentur partim 16 canoniciSi
partim 4 aliis canonicis instituendis, hebdomadariis nuncu-
pandis, 12 vicariis manualibus, et 6 pueris chorealibus cum
eorum magistro, qui omnibus horis canonicis et Missis
majoribus interesse tenerentur, quse incepta nondum per-
fecta, facienda incumbunt episcopo designato : intérim
bedellum habent praesbyterum et 4 alios praesbiteros vica^
nos de Sanct Marsal vulgo appellatos.
Prima dignitas post pontificalem est decanatus, cui an-
nexus est praepositatus de Marquelatour; reditus illius cum
duplici prsebenda non excedit 1000 libras. Prsepositatus^
secunda dignitas, cum praebenda, circiter 2000 libr.; thesau-
raria cum praebenda et emolumentis sacristœ octingentas
— 407 —
libr.; cantoria quae est quarta et ultima dignitas annezum
habet prioratum A'Auriolt cum quo et prœbenda septin-
gentas libras redditus annui percipit.
12 canoaici vix habent 200 libr. pro quolibet, nec suffi-
ciunt pro média anni parte : vicaria S. Benedicti 100 lib. ad
summum; bedellus 60 1.; 4 vicarii de Sanct Marsal debent
habere pro singulis eorum 75 lib.; ex 12 prsebendis una est
theologalis; pœnitentiaria ûulla est.
5* Neque in ea exercetur cura animarum, neque est fons
baptismalis.
6® Tenuem habet supellectilem in sacrario, 3 tantum
calices argenteos modici valoris, dalmaticas paucas, âI6âs
nullas, circiter 20 casulas vetustate et longo usu laceratas,
quarum aliquae sunt ex CamelottQ, pluvialia ex damasceno
serico, sed non in sufficienti quantitate pro omnibus, nec
sunt nigri coloris, neque violacei ornamenta necessaria, qui-
bus maxime indiget ecclesia sicut plurimis rébus aliis ad
divinum cultum pernecessariis : quorum habet amplum et
peristromatis ornatum sed non sanctuarium quod valde de-
deret (dedecet) augustissimum templi locum esse sine orna-
mento : fuit organum^ locus et ligna adhuc rémanent, sed
organa desunt. Campanile habet admirandum, et campanas
magnitudine et harmonia maxime laudatas. Cœmiienum
reliquit parochiœ vicinae. Haec scio quia vidi.
7<> Sunt in ea corpora 4 sanctorum in thecis argenteis
religiosé asservata, primum est S. Ciari, martyris, cujus
caput in theca argentea peculiari reclusum septimo quoque
anno publiée exponitur veneratioui populorum, qui ex lon-
ginquis regionibus religionis ergo conveniunt; secundum
corpus est S . Laudi , episcopi Gonstantiensis ; tertium
S. Baumadi, confessoris; quartum S. Lyphardi.
Praeter illa sunt reliquise multae in minoribus thecis
reconditae. Sunt adhuc 3 cruces, quarum prima est aurea
lapidibus pretiosis et praecipué saphiro nuce majori insi-
gnito; secunda crux est ex cristallo; tertia vero ex jaspide,
bis aut ter tantum in anno illis utitur capitulum. Hœc scio
quia vidi.
— 408 —
8' Palatium habet episcopus salis amplum, ecclesiae ad-
jacens, ab ultimo episcopo reparatum, et haec vidi.
9« Redditiis mensx episcopalis 10,000 lib. annuatim vix
exccdit. Constat dominio civitatis, 4 furnis in eadem civi-
tate, 4 beneficiis annexis, nempe abbatia Rupis Âmatoris in
Cadurcensi diœcesi, praepositatibus de Aquina, S. Ferreola
et de Veyraco. Tenetur quolibet anno soivere capitulo Tutel-
lensi sexcentas et quinque libras, 7 asses et 1/2, pro parte
pensionis canonicorum : 300 libr. pro reparatione ecclesiae,
150 1. pro 2 pueris chorealibus et eorum magistro et alia
quorum non recordor.
10^ 2 sunt eclesiae parochiales, quaelibet illarum habet
fonlem baptismalem. In prima S. Petro dicata, sunt 30 sa-
cerdotes, et in secunda 6. Juliano dicata, sunt 50 sacerdotes,
4 sunt monasteria virorum, primum et maximum est RecoZ-
leciorum, ordinis S. Francisci; secundum Patrum societatis
Jesu, qui 600 juvenes soient in coUegio suo docere; tertium
est patrum Fulliensium; quartum est Patrum Carmeli-
tarum discalceatorum.
5 sunt monasteria mulierum : primum est monialium
S. Ursulspf quae docent adolescentulas ; secundum est ordi-
nis S. Francisci beatae Clarse dicatum; tertium ordinis
S. Bemardi; quartum Visitationi B. Mariœ dedicatum ;
quintum denique S. Benedicto. Nulla eclesia coUegiata. Duae
sunt confraternitates pœnitentium et 1 hospitale; non est
Mons pietatis. Haec vidi et audivi.
11^ Ad 10 leucas extenditur longitudo diœcesis, latitudo
ejus est mullo minor ; 4 habet civitates : Tutelam scilicet,
Argentacum, Curreiiam eiAquinam, Aliquas supra 50 habet
parrochias. Haec vidi et audivi.
12® Non est in ea erectum seminarium, eadem causa
scientiae.
13® Scio ecclesiam Tutelensem vacare per demissionem
reverendissimi et illusirissimi D. D. Ludovici de Rechigne-
voisin de Guron, ultimi episcopi factam, die 8 januar. anni
praesen. 1671, ut ab ipsomet sicut et ab aliis audivi.
— 409 —
I
(Sans titre ni signature; sur papier libre; écriture du
temps.)
Factum des unions pour Messieurs du Chapitre (i).
Le faict est que le monastaire bénédictin de Tulle
ayant été érigé en evôché, ses religieux demeurèrent rei-
guliers, et l'évôché toujours séculier comme est encores.
Ensuitte de ce et en 1514 Louis XII auroit supplié Léon X
de voUoir séculariser le monastaire et relligieux tout ainsin
que Tabbé auroit esté sécularisé. Ledit pape auroit concédé
ses bulles de sécularisation avec délégation et commission
ad partes. Sur Texécution desquelles bulles se seroit rendu
opposant ung nommé M* Annet Joubert, lors prieur clostral.
Quoy nonobstant le commissaire exécuteur de la bulle
Tauroit fulminée et exécuté le rescript de sécularisation. En
conséquence, les relligieux y auroient délaissé leurs fros et
habits réguliers et prins les habits des Chanoines séculiers
qu'ils ont gardé despuis.
D'où procédures au parlement de Bourdeaux et Conseil du
Roy, sur l'opposition de Joubert, jusqu'à son décès, 1547.
Après lequel l'évêque et chappitre se seroient adressés à
Henri II, et la mesme année lui auroit représenté qu'à la
supplication de feu Louis XII ils auroient obtenu ledit res-
cript, à l'exécution duquel Joubert s'estoit opposé seulle
partie en ceste cause.
Et auroient l'évêque et chapitre demandé qu'il pleust à
Sa Majesté déclairer lad. église séculière. A quoy inclinant
elle donne ses lectres patantes, y déclairant avoir faict voir
à son conseil le rescript et autres pièces, et n'y avoir rien
treuvé contrevenir aux sainctz décrets et privillèges de Tei-
glise gallicane, mandant à ses procureurs généraux de Tho-
louse [pour les biens quercynois] et Bourdeaux, dans le
(t) Je résume cette pièce Talin, d'environ 1600, sans date ni signa-
ture.
— 410 —
I
ressort desquelz est scitué le monastaire et bénéffices en
deppendans, qu'il entend et veult que Tegl. calhéd. de Tulle
soict servie par personnes séculières, selon Bulle de Léon X,
et que sillence perpétuelle leur soict imposée et qu'ils ayent
à requérir la publication desd. lettres.
Le rescrit publié et enregistré à Thoulouse sans aulcun
contredict trouva opposition (seconde) au parlement de Bor-
deaux, qui nonobstant vériffîa lesd. lettres patantes sans
préjudice desd. oppositions, pour lesquelles il renvoya les
parties pardevant le sénéchal de Lymosin.
Durant la poursuitte et avant faire vuider les oppositions,
l'évoque et chappitre prient Henry H volloir supplier Sa
Saincteté d'unir tant à la Table épiscopalle que capitulaire,
certains bénéf. simples de leur Église, fondés sur le peu de
revenu d'icelle et sur ce que les chanoines servans ne jouis-
soient que de simples portions monacales, insuffisantes à
leur entretènement, veu mesme la dignité où ils estoient
constitués, et d'ailleurs que par la Bulle de sécularisation
ils auroient institué 12 vicaires portés par icelle, qui y fai-
soient journellement le service divin, estans estipandiés sur
les dictes portions monacales, qui leur venoit à grand pau-
vreté.
Pol, papCi inclinant à la supplication d'Henry 2*, auroit
uny plusieurs bénéf. simples tant à la mense épisc. que ca-
pitulaire, et ce tant per cessum quant decessum. Lesquelles
bulles auroient esté deslivrées soubz lé siège de Julie, J548.
[Tous ces conditionnels valent du certain.] Sur leur exécu-
tion se rendirent appellans comme d'abus aulcuns cwnmen-
dataires pourveus des dicts bénéf. unis et tant feust procédé
que toutes parties feurent renvoyées au parlement de Paris;
devant lequel les appellans voyans ne pouvoir empescher
que la Bulle d'union ne sortist son plein effect, se vont
adviser de s'attacher à la bulle de séculari. et demandent
à estre subrogés audict feu Joubert. A quoy ils feurent
receus appuyés de l'authoritté du feu s' Président, de Rouf-
finhac et de Miliars, conseiller au Grand Conseil, qui jouis-
soient de quelques bénéf. unis, bien que Joubert feust
f
- 411 -
relligieux quand vivoict et qu'eux ne feusent que Commen-
dataires.
Estant doncques subrogés, se rendent appellans de la vé-
rifiBcation et publication desd. patantes d'Henry 2* pour
empescher Tunion, en en détruisant le fondement qui estoit
la sécularisation. Les parties -plaident au long là dessus,
escripvent et produisent de part et d'autre. Enfin, 1561, le
parlement de Paris, gens du roy ouys, déclare bien recep-
vables les bénefficiers particuliers opposants à publicat. des
patantes, et nonobstant icelles, déclaire abusives l'exécution
et fulmination des Bulles de sécularis. et d'union, et pour
le surplus des autres appellations interjetées comme d*abus,
la Céur met les parties hors de cour et de procès.
Quelques-uns ont escript que les Bulles avoient esté cas-
sées, mais cella n'est pas, c'est seullement l'exécution. Après
lequel Arrest, qui ne se treuve pas, ny mesme la dicte pro-
cédure, le chappitre présente Requette Civille qui feust
signiffiée à toutes parties, lesquei^ consantirent par leurs
responces et procurations expresses à la sécul. mais non pas
à l'union, qu'ils ûssent vollontiers accordée per decessum,
en retranchant la clause per cessum (1).
Le dict Arrest n'ayant jamais esté ny levé ny mis au
greffe, l'église de T. a toujours demeuré séculière, tous ses
bénéf. lorsqu'ils ont vacqué, soit par résignation, par mort
ou autrement, ont esté comférés in titulum à des séculiers
et sont encore remis soubs mesme tiltre sans contestation
quelconque, et le Roy a jouy sur cet évesché du droit de
régalle et maintenu les nommés par arrest de parlement de
Paris.
A présent le chappitre désirant reprendre la poursuitte
des unions, demande s'il sera expédiant résumer le procès
de lad. requette civille, ou s'il faudroit recourir à aulcunes
expéditions des cours de Rome pour valider les précédentes
— ou bien d'obtenir Lettres du Roy pour procéder de nou-
(1) Tous ces ergotages, manigances ou tergiversations nous ont paru
savoureuses, utiles môme à connaître.
— 412 —
veau à Texécution de lad. bulle d'union, taisant lesdictes
poursuittes et arrest, attandu qull ne se treuve.
Et sy le Conseil jugeoit qu'il y eust trop de contestation
et qu'il falleust de grandz frais à cause des parties qui s'y
pourroient opposer, à quoy le chapitre ne pourroit fournir
veu sa pauvreté, il se contenteroict, quant à prèsant, d'ob-
tenir l'union desd. bénéf. vacquans per decessum, retran-
chant la clause per cessum.
Ils ont une grande raison pour eux que leurs chanoines
sont de fort petit revenu, duquel ils n'ont moyen de vivre et
fere le service et résidence qu'ils doibvent en lad. église,
leur qualitté en estant mesprisée, et veu l'Ordonnance d'Or-
léans et Bloys favorisans les unions, et mesme que le Colla-
teur desd. bénéf. ne s'y oppo(seoit ?) pas et encore y a divers
préjugés en faveur des egl. cathéd. de ce royaulme, mesmes
dans la primace de Bourges, comme Sarlat et autres; et
d'ailleurs que l'union doibt de nécessité suivre la sécula-
risation de lad. église pour pouvoir entretenir le nombre
des au cœur d'icelle.
Plaira au Conseil de donner advis sur le tout.
Factum pour Vévêque de Tulle contre celui de Cahors;
après 1633 (vers 1650), [abrégé].
J.-B. Champeval.
(A suivre.)
UN SOLDAT DE L'AN I
Pierre LALANDE
Lorsqu'après la campagne de 1792, les éclaireurs
de Tannée de Custine^ ayant franchi la frontière à la
suite de l'ennemi qui battait en retraite, s'avancèrent
dans le Palatinat, ils trouvèrent sur une porte ces
mois inscrits à la craie : Adieu, braves Français ! Ce
qui va suivre n'est qu'une courte notice concernant
un des bons soldats qui méritèrent cet hommage, et
qui, formés par les cadres solides de l'ancienne armée
royale^ mieux que les volontaires peu disciplinés de
1792, arrêtèrent l'invasion austro-prussienne.
Pierre Lalande était né à Brive le 9 novembre 1763.
Il était le septième des treize enfants de Libéral-
Martin Lalande, négociant en draps, dit Lalande de
la Place, et de Marguerite Sigalas. Le 14 décembre
1787, il s'était engagé au 1*' régiment de carabiniers.
Les deux régiments de carabiniers formaient alors
brigade dans le commandement des Trois-Evêchés.
Leurs garnisons étaient en Alsace et en Lorraine^ avec
dépôt à Metz. Ils constituaient un corps d'élite. On les
considérait comme les grenadiers des troupes à che-
val. Le 1*' régiment avait pour lieutenant-colonel un
officier Limousin de beaucoup de distinction et d'une
parfaite bienveillance, le marquis Urbain-Pierre-
T. XXX. 4-2
— 414 — .
Louis de Lasteyrie du Saillant, gendre du marquis
d'Aubery, seigneur de Saint-Julien-Maumont. Lors-
qu'éclata la Révolution, les officiers émigrèrent en
grande partie : les soldats et les sous-officiers, dont
l'avancement était mieux assuré par le nouvel ordre
de choses, se prononcèrent énergiqueraent en faveur
des idées qui se propageaient. On a manifestait x) alors
de toutes manières dans les régiments. Lauzun-hus-
sards criait : a Vive le roi ! Au diable la nation ! »
Les hussards de Saxe devaient suivre leurs officiers
dans rémigration. Au contraire, à Strasbourg^ les
carabiniers allaient au club des Amis de la Constitu-
tion. Ils y juraient de mourir pour la patrie. « Si
nous avons ce bonheur, déclarait le carabinier Hugue-
nin en juillet 1791, nos froides cendres ne cesseront
de répéter en leur langage muet : nous sommes les
restes d'hommes qui ont vécu et combattu pour la
liberté et qui ont été martyrs pour établir son règne :
suivez leurs traces. » En janvier 1792, le carabinier
Cariet offrait à la Société des Amis de la Constitution
le sixième de sa paie, et il ajoutait : (c II viendra, ce
jour heureux, où le Français reprendra son audace et
sa noble fierté ; il s'armera pour exterminer le des-
potisme. Qu'il s'arme, qu'il porte dans le camp
ennemi la mort et l'effroi ! Je sacrifierai volontiers ma
vie pour seconder ses efforts guerriers. Vivre libre ou
mourir, c'est le cri unanime^ et les carabiniers n'au-
ront jamais d'autres sentiments. »
Les représentants applaudissaient ce langage tenu
par de simples soldats et où apparaît un reflet de l'élo-
quence enflammée de Vergniaud. Nous devons, écri-
vaient les commissaires de l'Assemblée législative.
— 415 -
Prieur de la Marne, Carra et Sillery, rendre particu-
lièrement justice au "civisme pur des carabiniers : ils
ont, des premiers*, crié : Vive la nation ! Vive la liberté
et l'égalité! Ces sentiments n'étaient pas partagés par
toute la cavalerie, et, se plaçant à divers points de
vue, le 9 août 1793, Bouchard, commandant en chef
l'armée du Nord, demandait qu'on lui envoyât
a l'étonnant régiment des carabiniers de l'armée de
la Moselle. j>
Lorsqu'éclate l'insurrection militaire de Nancy, en
1790, les carabiniers obéissent tout d'abord aux ordres
du maréchal de camp de Malseigue, qui veut une ré-
pression vigoureuse ; ils chargent et dispersent les
mutins du régiment Mestre-de-Camp. Mais ensuite
ils font cause commune avec les soldais rebelles. Fina-
lement, après la mort héroïque du jeune Desilles,
qui s'est interposé entre les combattants, ils viennent
à résipiscence et se soumettent au général de Bouille,
qui leur témoigne plus d'indulgence qu'aux Suisses
de Château vieux.
En 1792, au moment de la déclaration de guerre
à l'Autriche, Pierre Lalande était brigadier-fourrier.
Son régiment fut incorporé à la réserve de l'Armée du
Centre, rassemblée sous Metz au camp de Frescaty,
aux ordres du maréchal de camp Valence (1), le gen-
dre de M"* de Genlis, lequel était placé sous le com-
mandement supérieur de Kellermann.
Dès le début des opérations, les carabiniers eurent
(1) Cyrus de Timburne-Timbroune, comte de Valence, né à Agen le
20 août 1757, colonel de Chartres- Dragons, puis lieutenant-général,
pdr de France, mort à Paris le 4 février 1822, fut Tun des meilleurs
généraux de la Révolution et de l'Empire. « Valence, a dit Napoléon,
fut très bien ; il fut national.
- 416 -
à échanger des coups de sabre^ soit avec les hussards
autrichiens de Waldeck et de Hohenlohe-Kirchberg,
soit avec la cavalerie des émigrés* venue de Thion-
ville qu'assiégeaient les Princes. Dans les rangs de
cette dernière combattaient deux officiers, originaires
de Brive, que le jeune Pierre Lalande avait certaine-
ment vu venir^ dans sa ville natale, de TAlsace, où,
comme lui, ils avaient tenu garnison. C'étaient les
neveux du subdélégué de Tintendance de Limoges,
MM. Raymond et Marc de Salés, Tun, ancien capi-
taine dans Royal-Cavalerie, chevalier de Saint-Louis^
devenu à Coblentz brigadier des mousquetaires lors
de la reconstitution de la Maison du Roi ; l'autre, an-
cien capitaine aux hussards de Chamborant, servant
alors comme simple maître ou cavalier sous le mar-
quis de Jaucourt(l), à l'escadron d'avant-garde Cham-
borant et Lauzun.
Le 31 août 1792, une attaque ou plutôt une recon-
naissance du prince de Waldeck sur Ladonchamp et
la Maison-Rouge fut repoussée. Les carabiniers, avec
le surplus du corps de Valence, furent alors dirigés
sur l'Argonne pour renforcer l'armée de Dumouriez
qui barrait la route de Paris. Ils devaient, avec une
partie des troupes de Kellermann, prendre la pre-
mière place dans cette armée et essuyer devant le
tertre de Valmy le premier choc d'un ennemi formé à
l'école et suivant les méthodes du gr;and Frédéric.
A la veille du 20 septembre, Kellermann plaça le
corps de Valence sur la hauteur de la Lune, en avant
de la position de Valmy.
(1) Le beau Jaucourt. Gomme il était très grand et très pftie, on
rappelait Glair-de-Lune (d'Allonville, Mémoires secrets).
- 417 —
Quand s'engagea la fameuse canonnade, dont Técho
devait se prolonger dans toute l'Europe, les carabi-
niers étaient là, formant, avec quatre bataillons de
grenadiers et des détachements de dragons, une masse
immobile, imposante.
Au-dessous d'eux et vers eux s'avancèrent en pre-
mière ligne, dans le brouillard de la vallée, les esca-
drons des cuirassiers de Weimar, dans les rangs des-
quels le grand poète allemand, Gœthe, avait pris
place, « galopant, selon ses propres expressions, dans
le gris et dans l'inconnu. » L'artillerie de Valence,
tirant à toute volée au lever du soleil, fit reculer ces
manteaux blancs. Mais, immédiatement, les batteries
prussiennes ripostèrent, et le feu, de part et d'autre,
devint extrêmement vif.
Les carabiniers français, d'après ce qu'a rapporté le
prince de Massau-Siegen, n'en éprouvèrent pas le
moindre désordre. L'un d'eux, un officier égaré dans
le brouillard et fait prisonnier, fut amené au roi Fré-
déric-Guillaume et tout l'état-major prussien, d'après
les récits des officiers, admira sa haute taille, avec sa
figure martiale ombragée du bonnet à poil (1).
Ce fut seulement à une heure assez avancée dans
la matinée, qu'après avoir couvert les mouvements
par lesquels Kellermann prenait ses positions de com-
bat, tout le corps de Valence, grenadiers, dragons,
carabiniers et canon niers, se replia sur le gros de
Tarmée.
(1) Royal-Allemand, le premier des régiments de cavalerie, avait
porté le bonnet à poil. Lors d'une inspection à Metz, Monsieur, comte
de Provence, colonel-général des carabiniers, fut si enchanté de cette
coiffure qu'il la fit adopter pour les carabiniers.
— 418 —
Dans 1 après-midi, les Prussiens aperçurent de
nouveau les carabiniers dans la plaine. Les boulets
s'enfonçaient autour d'eux dans la boue qu'ils fai-
saient jaillir de tous côtés (1). Les ordres de Dumou-
riez étaient de se maintenir strictement sur la défen-
sive. Les cavaliers français observaient une menaçante
immobilité. Quelques-uns donnaient tranquillement
l'avoine à leurs chevaux ou maintenaient les bêtes
cabrées. Derrière eux, les musiques françaises jouaient
le Ça ira (2)^ et, sous la pluie de fer, s'élevait le cri
de : Vive la nation ! Le généralissime Brunswick se
tourna vers son état-major : Voyez^ Messieurs, dit-il,
à quelles troupes nous avons affaire : ces Français
attendent que nous soyons sur eux pour monter à
cheval et nous charger. » Dans sa correspondance,
Kellermann relate également que les carabiniers fu-
rent des modèles de courage et de tranquillité.
On sait que le lendemain, 21 septembre^ Dumouriez
et Kellermann, se trouvant trop en l'air, prescrivirent
un mouvement rétrograde. Les carabiniers, placés à
(1) Gœthe a analysé d'une façon bien curieuse ses impressions sur
cette canonnade : « Le bruit qu'ils font, a-t-il écrit, parlant des bou-
lets, est bizarre : on dirait à la fois le bourdonnement d'une toupie,
le bouillonnement de Teau et la voix flûtée d'un oiseau. Bientôt je pus
remarquer qu'il se passait en moi quelque chose d'extraordinaire,
mais je ne puis exprimer que par des images la sensation que j'éprou-
vais. On croit être dans un endroit très chaud, et il semble qu'on se
sente entièrement pénétré de la même chaleur et comme en parfaite
harmonie avec l'élément qui vous entoure. Le regard ne perd rien de
sa force et de sa netteté, mais le monde prend pour ainsi dire une
teinte rouge&tre et parait absorbé dans cette fournaise. »
(2) Ce fut seulement huit jours après que, Kellermann, ayant pro-
posé de chanter un Te Deiem à la cérémonie organisée pour le 29
septembre, le ministre Servan lui répondit que la mode en était pas-
sée, et, pour y substituer quelque chose de plus utile et de plus con-
forme à l'esprit public, lui envoya VHymne des MarseillaiSy paroles
et musique, « qu'on pouvait chanter solennellement et avec la même
pompe qu'on eût mise au Te Deum. »
- 419 —
l'arrière-garde, furent au nombre des troupes qui
couvrirent ce mouvement.
Le 29 septembre, lorsque commença la retraite de
Brunswick, ils suivirent de près les Prussiens. La
cavalerie de Valence, après avoir repris possession
de Verdun, menaça Tennemi au passage de l'Aisne ;
mais sur Tordre formel de Dumouriez, qui avait
engagé des négociations secrètes avec le général prus-
sien^ elle neTattaqua point. Elle se contenta d'inquié-
ter sa marche et de faire mine d'un enveloppement
par la droite. Les ordres ainsi donnés furent amère-
ment reprochés par CoUot d'Herbois et Camille Des-
moulins à Dumouriez, lorsqu'avec son habituelle
désinvolture, il se présenta au Club des Jacobins et
vint donner l'accolade au président Robespierre.
L'excuse du général diplomate est qu'il espérait déta-
cher les Prussiens de la coalition. « On ne fauche
pas une armée, a-t-il dit pour sa défense dans ses
mémoires, comme on fauche un |)ré : les Jacobins,
passés de la plus grande consternation à la plus
grande insolence, croyaient qu'on prend une armée
avec autant de facilité qu'ils assassinaient un aristo-
crate dans les rues de Paris. »
Quoi qu'il en soit, les Prussiens ne regagnèrent
l'Allemagne que dans le plus triste état. Un grand
nombre succombèrent aux maladies et aux fatigues
de la retraite.
A la suite de cette première campagne à l'Armée,
dite du Centre, Pierre Lalande fut nommé sous-lieu-
tenant au IS"' dragons, ci-devant dragons de Fimar-
<;on.
C'était assurément bien débuter. Mais, comme on
— 420 —
le verra plus loin, il n'était pas né en réalité sous
une heureuse étoile. Sa carrière devint dés lors dif-
ficile, et, malgré de beaux états de services, elle fut
marquée par une série de déconvenues.
A la date du 28 février 1793, son père écrivait au
citoyen Lidon, député de la Corréze à la Convention
nationale et président du Comité de la guerre, pour
lui signaler que son fils n'ayant pas encore reçu son
brevet ne pouvait quitter le corps des carabiniers.
d La saison approche, disait-il, et la campagne va
s'ouvrir : jugez du désagrément qu'éprouverait mon
fils si, par la lenteur des bureaux, il ne pouvait obte-
nir ce qu'il désire depuis longtemps. J'aime à me
persuader que vous ne m'oublierez point et je suis,
dans cette cruelle attente, votre concitoyen et votre
égal en droit, d
Le 4 mars 1793, Lidon signala l'urgence de cette
requête au Ministère de la guerre. Mais, alors même
que les régimes et les ministres changent, les bureaux
demeurent ce qu'ils sont : une lente et lourde ma-
chine. Ce fut seulement le 6 mai 1793 que le sous-
lieutenant Pierre Lalande, en possession de son bre-
vet, fut reçu au 13""* dragons, à l'Armée du Nord,
commandée par le général Dampierre. Le 5 avril
précédent, après la fuite de Dumouriez, le maréchal
de camp Henri Picot, ci devant comte de Dampierre,
sur la proposition des représentants Bellegarde et
Leguinio, avait été investi du commandement en
chef. 11 avait alors 37 ans. D*umouriez, contre lequel
il s'était violemment prononcé, a dit que Dampierre,
homme de qualité et fait pour bien penser, avait trahi
sa confiance. C'était en réalité un entraîneur d'esca-
— 421 —
drons, un vaillant sabreur et rien de plus. Il adressait
à ses troupes de grandiloquentes apostrophes : a Je
te salue, armée victorieuse. Ressouviens- toi sans
cesse de Jemmapes où tu fis rougir la terre du sang
des esclaves des tyrans, et que nos épées soient tou-
jours consacrées à faire respecter les lois et la sainte
humanité.... Mères républicaines, élevez vos filles
pour ces guerriers; à leur retour courez au-devant
d'eux, le myrte à la main ; que la joie du triomphe
les console des fatigues, et que la plus belle soit des-
tinée au plus brave !» Un de ses officiers a dit, non
sans exagération, qu'il eût étonné un gardien d'alié-
nés.
Le chef d'état-major général de l'Armée du Nord,
Des Bruslys, qui appartenait, comme Pierre Lalande,
à une famille de Brive (1), attacha ce dernier à sa per-
sonne, et, aidé notamment de ce jeune collaborateur
qui, d'après sa correspondance, était en même temps
son ami, s'appliqua à réparer un désordre que Des
Bruslys, moins exubérant et moins confiant que
Dampierre, ne cessait de signaler. Les bataillons,
écrivait-il, étaient confondus ; on ne pourrait débrouil-
ler ce chaos. .. Un esprit d'hostilité s'était établi, d'au-
tre part, entre les anciennes troupes de ligne, imbues
du vieil esprit militaire, et les bataillons de volon-
taires^ qui répandaient la désolation dans les campa-
gnes, comme le reconnaissait Carnot, et avaient
amené jusqu'à 3,000 femmes dans les casernes de
Douai. Le corps dont faisait partie Pierre Lalande, les
(1) Il était né à brive le 7 août 1757 et avait été nommé général de
brigade provisoire le 7 avril 1793. 11 sortait du corps d'artillerie.
— 422 —
dragons regrettaient Duraouriez. A Avesnes, en mai,
ils avaient cessé de porter la cocarde tricolore, et à
l'observation qu'on leur en avait faîte, ils avaient
répondu par des huées. La gendarmerie elle-même
montrait une grande indiscipline.
Le 8 mai 1793, en essayant de débloquer Condé
qu'assiégeaient les Impériaux, le général en chef
Dampierre tomba frappé par un boulet qui lui em-
porta la cuisse. Il mourut le lendemain à Valencien-
nes. On lui fit d^imposantes funérailles. Des Bruslys,
les autres chefs de brigade et Tétat-major entouraient
le cercueil, a L'ombre de Dampierre, proclama le
représentant Leguinio^ vous accompagnera partout;
elle vous donnera de nouvelles forces, elle sera la
terreur des hordes d'esclaves liguées contre vous. »
La Convention décerna au général tué à l'ennemi les
honneurs du Panthéon. Mais finalement, comme
Dampierre n'était qu'un ci-devant, sa conduite parut
suspecte^ sa mémoire le devint et le décret ne fut
pas exécuté.
Le 23 du même mois, à la suite d'une série de
combats qui furent défavorables aux Français, le
camp de Famars et la position d'Angin furent évacués.
Des Bruslys dirigea la retraite. On perdit beaucoup
de monde.
Le 27 mai, le nouveau général en chef, Custine,
arriva à Cambrai. Le lendemain, il passa l'armée en
revue et la trouva profondément désorganisée.
Pendant les mois de juin et de juillet 1793, il s'ap-
pliqua à la reconstituer et à la remettre en haleine
par une série d'opérations, qui ne furent pas toujours
heureuses. Le 4 juin notamment, aux environs
— 423 —
d'Orchics, Blûcher^ alors colonel, fit tomber dans une
embuscade la cavalerie française. Le colonel Montjou,
du régiment de Pierre Lalande, 13* dragons, fut
blessé à mort ; le lieutenant-colonel Geffroy, 8 offi-
ciers, 11 sous-officiers furent faits prisonniers.
Blùcher fit enterrer solennellement le colonel fran-
çais, et la population fut bien étonnée de le voir infli-
ger lui-même, suivant les habitudes prussiennes, une
correction manuelle au menuisier qui s'était permis
de faire un cercueil trop exigu.
A TArmée du Nord, les espions des Comités^ les
Clubistes^ les journaux jacobins ne cessaient de dé-
noncer et d'attaquer les généraux de l'ancienne
armée qui défendaient la France et qui avaient résisté
aux sollicitations de l'émigration. Des Bruslys était
un aristocrate. A la date du 30 juin, il avait donné un
mot d'ordre, Condorcet-Constitution, qui dénonçait
un esprit fédéraliste, car il signifiait adopter la Con-
stitution de Condorcet. Son état -major offrait le
spectacle <r d'un luxe asiatique. » Dans le Bulletin
de V Armée il avait essayé de justifier l'arrestation de
Colliez et Compère, deux émissaires du ministre Bou-
cholte, qui avaient été surpris distribuant aux soldats
des journaux remplis d'insultes contre le général en
chef Custine.
Dans le Père Duchesnej Hébert appelait ce dernier
Dumouriez-Cadet, bandit, pilier de biribi, espion
royaliste et demandait qu'on lui donnât de la pelle au
c... Le 12 juillet 1793, Custine fut mandé à Paris.
Le 25 août 1793, il montait sur l'échafaud.
Des Bruslys à son tour fut suspendu de ses fonc-
tions, puis mis en état d'arrestation le 12 août 1793;
— 424 —
Emprisonné à TAbbaye, — vingt-quatre généraux se
trouvaient dans le mênae cas, — il n'en devait sortir
que le 19 frimaire an III.
L'aide de camp Pierre Lalande^ ayant ainsi perdu
son chef direct, rentra dans le rang au 13°* dragons^
qui, sous le colonel Chanoine, couvrait la place de
Douai.
Le 22 octobre 1793, à Marchiennes, dans un pays
coupé de fossés et de marécages^ il fut grièvement
blessé d'un coup de feu à la cuisse. Une fois rétabli
de cette blessure, il revint immédiatement à son
corps. Il y prit part à toutes les campagnes qui suivi-
rent jusqu'en 1800.
Pour ne pas lasser la patience du lecteur, nous allons
en donner la rapide énumération. Ce ne sont que
coups de sabre largement distribués, largement ren-
dus. Les hommes de ce temps agissaient. Leurs
impressions étaient simples et brèves.
Moscou ! jolie ville ! devait écrire tout simplement
dans son journal le brave Coignet, en arrivant devant
la ville sainte.
Le 18 février 1794, combat avec les dragons autri-
chiens de Latour. Le 25 mars 1794^ rencontre avec la
cavalerie anglaise; le 17 avrils échange de coups de
pistolets avec des cavaliers hessois : un général ennemi
est fait prisonnier. Le 10 mai, nouveau combat à
Baizieux avec les hussards anglais. Trois capitaines
français sont tués ou blessés.
En septembre 1794, le régiment rattaché à la 6"*'
division que commande le général Delmas, un autre
Corrézien, part pour l'expédition de Hollande. Le 19,
engagement à Graves, puis investissement de Bois-le-
— 425 -
Duc : la division Delmas opère à l'Est de la place ; la
division du général Souham, encore un Corrézien, est
à rOuest. Le 24 décembre, reconnaissance des ouvra-
ges de Bréda : un brigadier du 13"* dragons est dé-
puté à la Convention pour présenter des drapeaux
pris à Tennemi. Le 27 décembre, combat devant
Nimègue, où Ton fait plusieurs prisonniers. Puis,
une série de cantonnements en Hollande. Finale-
ment, la paix est signée à la Haye, en mai 1795.
Le 13 du même mois, de Delft le régiment est dirigé
sur la Vendée, où il doit opérer sous les ordres de
Hoche, le plus illustre des généraux de la République.
Une année se passe dans la Vendée que sillonnent les
colonnes mobiles. Mais le pays se prête peu aux
mouvements de la cavalerie. Le 13"' dragons^ placé
sous les ordres du général Canuel, à Challans, est
peu engagé. Au blocus de Montaigu, on fait passer
des vivres aux Chouans affamés, conformément d'ail-
leurs aux vues conciliantes du général en chef, qui
sera le pacificateur de la Vendée.
Au commencement de 1796, le commandement de
Hoche est étendu à toutes les côtes de l'Océan, et, à
la fin du mois de mars 1796, le régiment passe en
Normandie où il va tenir garnison à Saint-Lô, aux
ordres du général Lemoine. En juillet 1796, Hoche,
nommé général en chef de l'armée d'Irlande et pré-
parant une expédition par mer^ écrit de Paris à Ren-
nes à son chef d'état-major à l'Armée des Côtes de
l'Océan, le général Hédou ville, pour le charger de
faire au plus vite l'appel de 125 nouveaux officiers
« d'une bravoure à toute épreuve et d'une bonne
a santé, devant compter sur un avancement et une
- 426 —
« fortune rapides. » Le sous-lieutenant de dragons
Lalande est compris dans cet appel. On saitTavorte-
ment de cette expédition, qui fut contrariée par les
tempêtes. Une partie des troupes désignées ne put
partir, de sorte qu'en septembre 1796, ce fut sur
Strasbourg que se dirigea le tS""* dragons, pour faire
partie de l'Armée de Rhin et Moselle.
C'était après la fameuse retraite de Moreau. Le ré-
giment fut attaché à la réserve de cavalerie et can-
tonné, pour la défense de l'Alsace, à Sarrebourg,
Reichshoffen, Halten, Pont-à-Mousson et environs.
En janvier 1797, cantonnements à Sarreguemines
et Puttelange jusqu'en avril.
Les 20 et 21 avril 1797, reprise des opérations,
passage du Rhin à Diersheim qui est défendu par les
Autrichiens ; le régiment, déployé en avant de Dier-
sheim, pousse vigoureusement l'ennemi. Sous le
commandement d'un nouveau chef de brigade, Roget
de Belloguet, il enveloppe le régiment autrichien
d'Alton et le fait prisonnier avec son colonel et ses
drapeaux ; Offenbourg ouvre ses portes. Le 22 avril,
le 13"' est attaché à la division du Centre que com-
mande le général Davout. Une forte colonne enne-
mie, comprenant plusieurs régiments d'infanterie,
un régiment de dragons^ des escadrons de hussards
attaque l'arriére de cette division. Résistance achar-
née des dragons français, qui méritent les éloges du
général en chef Moreau. Le 23 avril, arrive la nou-
velle des préliminaires de paix de Léoben, signés
par Bonaparte, qui arrêtent l'action. En août, can-
tonnement à Salzbach. Le monument élevé à la mé-
moire de Turenne est solennellement rétabli. Tous
— 427 —
les corps se cotisent pour subvenir à cette restaura-
tion. On installe là^ avec une petite dotation, un
vétéran, qui servira de gardien.
Le l**" vendémiaire an VI, revue et fêtes, anniver-
saire de la fondation de la République, dans la plaine
d'Offenbourg. En passant sur le front du régiment
rangé en bataille, le général Duchesne lui adresse les
paroles suivantes : or Braves dragons, vous avez com-
mencé la campagne par un coup de maître : le der-
nier passage du Rhin sera mis au compte de vos plus
glorieuses journées. »
En 1798, campagne d'Helvétie, passage du Rhin
grossi par les crues au gué de Hag, le 6 mars 1799,
charge commandée par le général Oudinot. Le 25 mai,
après concentration ^es armées du Danube et du Rhin^
combat de Frauenfeld contre les troupes de Tarchiduc
Charles et du général Hotze, charges conduites par les
généraux Soult et Humbert; puis, du 2 au 4 juin,
bataille indécise de Zurich, où le régiment est en
réserve. Le 25 septembre, passage de la Limmat, vic-
toire de Zurich, où Masséna se couvre de gloire ; le 13*
poursuit l'ennemi vers Winterthur ; le chef de brigade
Levasseur est blessé. En octobre, cantonnement à
Obernofferen. En décembre, garnison à Saint-Dié.
Lieutenant depuis le 18 messidor an VII, Pierre
Lalande est repris vers la même époque comme offi-
cier de correspondance et porteur d'ordres par le gé-
néral de brigade Des Bruslys, à la division Souham.
En cette qualité il fait, à TArmée du Rhin, la cam-
pagne de 1800, qui se termine les 2 et 3 décembre par
les glorieuses journées de Hohenlinden. Le général
en chef Moreau a conduit son armée jusqu'à vingt-
— 428 —
cinq lieues de Vienne. L'armistice de Steyer et la
paix de Lunéville terminent la campagne.
Réintégré dans son régiment en vertu de disposi-
tions nouvelles sur l'organisation de Tarmée, le 20
messidor an IX, Pierre Lalande est à Bruxelles, siège
de la 24"' division militaire.
Le 19 nivôse an X, le général Des Bruslys, qui Ta
de nouveau repris comme officier d'ordonnance et
qui est à Paris désigné pour un commandement à
l'Ile-de-France, écrit au Ministre de la guerre la let-
tre suivante :
Citoyen Ministre,
Vous avez bien voulu me donner une preuve de confiance
et d'intérêt dans la destination coloniale à laquelle vous
m'avez fait nommer ; elle remplit mon vœu.
La justice et l'intérêt que je porte à mes aides de camp
me font un devoir de vous demander pour eux le grade de
capitaine auquel ils ont d'ailleurs droit par le zèle, le dé-
vouement et l'intelligence avec lesquels ils ont rempli leurs
fonctions militaires pendant toute cette guerre.
Mon départ de Rochefort étant fixé au l**" du mois pro-
chain, il me serait bien agréable d'être près de mes deux
aides de camp (1) l'organe immédiat de votre bienveillance.
J'ai l'honneur de vous saluer avec respect.
Des Bruslys.
Mais Des Bruslys, général de brigade depuis 1793
et qui ne passera, malgré l'abnégation dont il a tou-
jours fait preuve et Tingrate mission qu'il a acceptée,
général de division qu'en 1808, est peu en faveur,
(1) Le général Des Bruslys eut, comme aide de camp, avec M. Pierre
Lalande, son neveu, le lieutenant Dalvimart {L'Ile-de-France sous
Decaen, H. Preutout, Paris, 1901).
- 429 —
comme Souham, comme Delmas, comme plusieurs
officiers généraux de TArmée du Rhin qu'on appelle
les derniers républicains et qui se groupent autour
du général Moreau.
Le ministre de la guerre, Berthier, ne répondra à
la lettre qu'on vient de transcrire que le 8 brumaire
an XIII, par l'intermédiaire du Ministre de la marine
et des colonies :
J'ai l'honneur de vous prévenir, Monsieur, écrira-t-il au
gouverneur de l'Ile-de-France, que, sur ma proposition,
l'Empereur a rendu, le 26 du mois dernier, un décret qui
élève au grade de capitaine le s"" Lalande, aide de camp du
général de brigade Desbruslys ; je vous adresse la lettre et
commission pour cet officier, je vous prie de la lui faire par-
venir.
J'ai l'honneur de vous saluer.
M. Berthier.
Embarqué à Rochefort sur la frégate La Thémisy
le 16 pluviôse an X, Pierre Lalande est arrivé à l'Ile-
de-France en juin 1802, avec son général et une com-
pagnie de la 15""* demi-brigade légère.
Dans une excellente étude qu'a publiée le Bulletin
de Tannée 1903, le regretté Marcel Roche a dit ce que
fut, dans la colonie, la vie du général Des Bruslys,
lieutenant gouverneur à Tîle de la Réunion^ alors île
Bonaparte^ et celle de ses compagnons, comment ils
résistèrent à Tinvasion anglaise de 1809 et dans quel-
les conditions Des Bruslys, comme Beaurepaire à
Verdun en 1792, se donna la mort plutôt que de
souscrire à une capitulation. Le 25 septembre 1809,
après avoir essayé de se faire sauter la tête avec des
T. XXX. 4-3
— 430 —
gargousses de poudre pendues à son cou, après s'être
inutilement blessé avec la pointe de son sabre en
pleine nuit, dans son cabinet de toilette, il se coupa
la gorge d'un coup de rasoir. Sa veuve obtint, en 1811,
une pension de 1.000 livres.
Après avoir veillé le corps de celui qui avait été son
chef, son protecteur et son ami, le capitaine Lalande,
dont l'avancement, contrarié par d'aussi tragiques
événements, eût été mieux assuré sur les champs de
bataille de l'Europe, se détermina à regagner la
France. Le 16 novembre 1809, il s'embarqua sur la
flûte L'Espérance^ commandée par le lieutenant de
vaisseau Bourgoin et destinée à se rendre dans un port
de l'Empire. Le petit bâtiment, au nom plein de
promesses, réussit à forcer le blocus des Anglais;
mais, comme le dit l'Anthologie grecque, FEspérance
flotte sur une mer de mensonges. Pierre Lalande était
de ceux sur lesquels s'acharne la fatalité. Le 12 avril
1810, après une traversée de plus de quatre-vingt dix
jours, une frégate anglaise, qui croisait sur la côte
de France^ captura le navire qui le portait. Il fut con-
duit sur les pontons, puis interné en Angleterre jus-
qu'à la paix, c'est-à-dire jusqu'en 1814.
Enfin, le 9 mai 1814, il débarqua au Havre du
cartel anglais « Lady Wellington » . Il courut au
bureau de l'état-major au Ministère de la guerre ; il y
reçut l'ordre de se présenter au lieutenant général
Dupont-Chaumont, inspecteur de la T* division mili-
taire. Ce dernier^ en réponse à sa demande de mise
en service, l'invita à se rendre dans ses foyers à Brive
en demi-solde.
Ainsi se termina, comme pour beaucoup d'autres
— 431 —
officiers à la môme époque^ la carrière militaire du
capitaine Lalande. Malgré Tappui du maréchal de
camp Sainte-Suzanne, commandant le département
de la Corrèze, qui l'avait connu et apprécié aux colo-
nies, il ne fut pas admis à reprendre du service.
Vainement il sollicitait, en 1817, la croix de Saint-
Louis, « cette honorable marque qui distingue les
enfants de mars » et que méritaient tout au moins
ses bons et longs services. Le gouvernement de la
Restauration fit la sourde oreille. Peut-être faudrait-
il en chercher la cause dans cette correspondance
qu'avait échangée son père avec le conventionnel
Lidon, en 1793, et qui était restée dans son dossier
aux Archives de la guerre ?
Quoi qu'il en soit, définitivement fixé au pays na-
tal, il y épousa, le 23 août 1816, Suzanne-Louise
Choumeils de Saint-Germain, fille de François de
Saint-Germain, ancien militaire au régiment d'Aunis,
inspecteur des contributions directes, et d'Anne-Marie
Gramond. Un lien de parenté assez rapproché unissait
sa femme à M. de Martignac, Tillustre homme d'Etat,
qui devait être le plus sage et l'un des derniers con-
seillers de la légitimité expirante, puis, devant la
Chambre des pairs, et, avant de mourir, le généreux
défenseur d'un adversaire politique, M. de Polignac.
En 1826, par un billet, tout entier de son écriture fine
et élégante, le vicomte de Martignac, alors ministre
d'Etat et directeur général des Domaines, demanda
pour le capitaine d'état-major retraité, Pierre Lalande,
la croix de la Légion d'honneur.
Le Ministre de la Guerre, considérant qu'il s'agis-
sait d'un officier depuis longtemps hors de fonctions.
— 432 —
parait avoir renvoyé la demande à la Grande-Chan-
cellerie,
f Sur ces entrefaites, Pierre Lalande mourut^ le 26
mars 1827 (1).
9f
J. DE Saint-Germain.
f
f
t
(l) Sources ; Ghuquet, Les Guerres de la Révolution ; — Mémoi-
res de Mallet'Dupan ; — Historique du 13* Régiment de Dragons,
par le capitaine Miron ; — Chassin, Les Pacifications de VOuest ; —
L'Armée au temps de la Récolution^ par M. d'Uauterive ; — Goethe,
Campagne de France; — Archives du Ministère de la Guerre; —
Archives de la Mairie de Brive.
LES AÉROLITHES
En lisant dernièrement un article dans le journal
La Science au XX^ siècle^ sur les aérolithes, il m'est
revenu le souvenir de faits qui ont eu lieu dans les
environs de Brive.
En 1853, j'étais alors dans une administration et
je devais par mon itinéraire aller vers le 15 juillet à
Allassac. Étant monté à MorioUes voir mes parents,
je revenais la veille coucher à Brive; je repartais à
9 heures du soir; la nuit était noire, mais sans nua-
ges. Arrivé à 350 mètres environ du château, je suis
très vivement et subitement éclairé par une lumière
intense très blanche. Je tourne sur ma selle et je vois
un bloc lumineux tombant à plomb du ciel. Il ne
devait pas avoir pris feu à plus de 500 mètres au-
dessus de moi. Il a dû tomber dans une rangée de
peupliers bordant un chemin de service à 50 mètres
environ de la terrasse nord-est de Thabitation. Je
pensai bien à faire une recherche à mon retour de
tournée, mais je Tai oublié, et quand Tidée m'en est
revenue, on ne voyait plus de trace de pénétration en
terre. Je fus très étonné de ne pas entendre une déto-
nation ou au moins un sifflement dans Tair.
Cet aérolîthe, car cela ne pouvait être autre chose,
devait avoir pris feu par le frottement à 500 mètres
environ au-dessus de terre; Tair plus dense dans cette
partie de l'atmosphère avait été suffisant pour l'en-
— 434 —
flammer, car sa course n'était pas très rapide. Je le
vis tomber pendant 6 à 8 secondes, franchissant une
hauteur d'environ 300 mètres, il n'avait guère que la
vitesse d'un corps qui tombe sans propulsion, tandis
que les aérolithes arrivent avec une vitesse extraor-
^dinaire acquise dans l'espace céleste, presque vide. Il
est possible que la flamme qui Tentourait l'ait re-
tardé dans sa chute.
Ayant donné ma démission deux ou trois ans après
ce fait, j'avais à m'occuper de la propriété de MorioUes
et de celle du Ryz en Poitou, passant mon temps entre
ces deux endroits, environ un mois de suite dans cha-
cun d'eux. Dans l'une et l'autre un domestique intel-
ligent me remplaçait dans mes absences.
Un jour, avec quatre paires de bœufs, l'un d'eux à
MorioUes faisait labourer le champ dit le Puy-Pertus.
Mes bouviers entendirent au Levant une forte déto-
nation, et presque aussitôt des pierres vinrent s'en-
foncer dans la terre de ce champ ; celles qui étaient
plus hautes dépassèrent la crête et furent s'enfoncer
dans la petite colline de MorioUes-Haut. Aucune de
mes bêtes ne fut touchée. D'après ce qui me fut dit,
la direction étant, venant chez moi, du milieu de l'es-
pace entre Noailles et Nazareth, c'est-à-dire Est-quart-
Sud-Est. Pas un seul de mes domestiques n'eut l'idée
de ramasser de ces pierres pour moi.
Cela fît que l'un deux me raconta que revenant la
nuit de Puy-Jarrige à MorioUes et passant dans le
lieu dit le Grand-Bois, dans un petit vallon, la pla-
nète (c'est ainsi que les paysans nomment les étoiles
filantes très rapprochées de terre) coupait les bran-
ches de châtaigniers au-dessus de sa tête.
r
— 435 —
Je crois avoir trouvé, ii y a plus de cinquante ans,
un aérolithe ramassé dans un tas de pierres venant
d'un champ auprès de Lissac — appelons-le Pierre,
sa compagnie nous y oblige. Cette pierre donc, était
ronde et creuse, d'un diamètre de 12 à 14 centi-
mètres, cassée à peu près par moitié; sa nature pa-
raissait être composée d'une partie de matière ferru-
gineuse roussâtre foncé, rempli d'une quantité de
quelque chose de noir, comme du pyroxène ou de
l'amphibole, sans cristallisation bien visible.
L'épaisseur de cette demi-coquille pouvait être de
25 à 30 millimètres.
On m'en a demandé. J'en ai donné si souvent que
je ci'en ai plus. Je le regrette vivement pour notre
Musée.
Gaston de Lépinay.
PRESENTEE AU ROY
Par RIRI. les Députés de la VIcompté de Turenne
Le Bulletin de la Société d'Archéologie d'octobre-
décembre 1881 publiait, grâce à Tobligeance de M. de
Bosredon, un document d'un grand intérêt pour This-
toire du Limousin : Tacte de cession de la Vicomte
de Turenne. Le 8 mai 1738^ très haut et très puis-
sant prince Mgr Cliarles-Godefroy de la Tour-d'Au-
vergne, par la grâce de Dieu duc de Bouillon, vicomte
de Turenne, duc d'Albret et de Château-Thierry,
comte d'Auvergne, d'Évreiix et du Bas-Armagnac,
baron de La Tour, Montgacon et Cazillac, seigneur de
Créqui, etc., etc., cédait au roi de France pour la
somme de 4,200,000 livres sa terre de la Vicomte de
Turenne dans l'étendue des provinces du Limousin et
Quercy. Cette vente, qui faisait entrer dans le domaine
royal un des rares fiefs indépendants qui existaient
encore, ne se fit pas sans soulever de graves diffi-
cultés et des protestations énergiques de la part des
ayant-droit. Nous publions aujourd'hui la protesta-
tion des députés de la Vicomte contre la vente de
ladite Vicomte. Ce curieux document, que M. Del-
mont, directeur de l'École primaire d'ftillassac, a bien
voulu nous communiquer, éclaire d'un jour lumi-
neux les privilèges des vicomtes de Turenne et les
— 438 —
immunités des feudalaires. Nous avons respecté et
Torthographe et la ponctuation de cette requeste
présentée au roi au nom des gentilshommes et des
habitans de la Vicomte. Nous ne voulons même
pas relever certaines erreurs historiques dont les lec-
teurs s'apercevront facilement.
J. ESPÉRET.
Sire,
Les gentilshommes et les habitans de la Vicompté de
Turenne en Limosin et Quercy, prouince de Guienne, repré-
sentent très humblement à Voslre Majesté quils ont apris
que M. le duc de Bouillon, vicomple de Turenne, auoist
proposé à Vostre Majesté de luy vendre les tittres et domaines
de cette Vicompté, et que dans lestât des reuenus ordinaires
ou casuel sur le pied desquels il se propose den faire faire
les évaluations il comprend les dons gratuits que les habi-
tants de la Vicompté ont volontairement faits tant a ses
encestres qu'a luy ennuellement ou en certaines occasions
par le seul motif de la reconnoissance quils ont creû deuoir
au vicompté pour la protection quil leur auroit accordée et
quils espéroient de Sa Majesté et des roys ses prédécesseurs.
Vn article aussi intéressant pour touts les habitants de la
Vicomte dont M"" le duc de Bouillon met la bonne volonté
purement gratuite au rang des reuenus du domaine et sei-
gneurie quil se propose de vendre a Vostre Majesté que les
dons quils ont bien voulu faire au vicompté ne sont pas un
patrimoine dont il aye droit de disposer comme de son
dommaine , mais les dons purement uolontaire et absolu-
ment gratuits qui selons les loix de la justice ne sont point
dans le commerce, quils ne peuuent y estre mis que de leur
consentement, qijils n'ont de valeur que celles que les su-
pliants peuuent leur donner et dont eux seuls auroint le
droit de toucher le prix sils estoint susceptibles destre apré-
ciés et que Vostre Majesté voulut les y assujettir.
— 439 —
Quoy que touls les peuples soummis a la souuerenelté de
Vostre Majesté contribuent aux impositions quil luy plaît
leur donner pour soutenir les charges de lestât, cepandant
les habitants de la Vicompté de Turenne ont eu jusques a
présent laûantage particulier detre aussi que leur vicompté
libres et exempts de toutes inpositions, leuée des deniers,
subcîdes, et autres charges réelles, personnelles et mixtes
comme le duc Dacquitaine dont les roys prédécesseurs de
Votre Majesté ont reuny les tittres a la Couronne, ont reco-
gnu en tout le temps quil devoist en estre exempt.
Cette exemption et immunité est establie par toutes nos
istoires comme un fait vniuerselement recognu, Paipin pre-
mier des roys de la seconde race ayant conquis en 764 la
Guienne sur Geffre qui en estoit le duc laissa suivant les
istoires de ce temps-là les peuples du payis dans leurs priui-
leges, libertés, sans y donner aucune atteinte et s'est con-
seruer par ce moyen les leurs et lobeissance. Ea 771 ce
prince la donna a Louïs le Débonnaire son fils ayné, pour
son entretien en le mariant auec Immongarde, fille Dingrene
duc Dangers. Louïs le Débonnaire la laissa de son vivant a
Paipin, l'un des fils de son premier mariage, duquel elle
passa a Guilhaume duc Dacquitaine, un de ses descendants,
et de luy a Eleonor sa fille, qui la porta en dot en 11 28 au roy
Louis 7"' qui la luy rendit lors de la dissolution de leur
mariage, après quoy elle la porta a Enry roy Dangleterre,
duc de Normandie, quelle épousa en 1149. Les vicomptes de
Turenne possedoint dans le Limousin, Perigord et Quercy,
vne estanduë asses considérable de payis detfandu par sa
situation seule pour ce temps-la. Les peuples de la Vicompté
le recognoissoint en quelque sorte pour leur souverain immé-
diat parcequil leur faisoit rendre justice et quil les mainte-
noit dans laifranchissement de toutes inpositions dont ils
auoint toujour jouis, et quil faisoist battre mounoye blanche
et noyre a son effigie qui auoit cours dans le dioceze de
Caors, Limoges et Perigeux, mais sil eut fait quelque entre-
prise contre les libertés et franchises dont ils jouissoint
depuis plusieurs ciecles ils eussent eu recours au duc de
— 440 —
Guienne auquel ils estoinl subordinés pour la souverenetté,
hommage et le ressort.
Tant que la Guienne feust dans la prospérité masculine
de Paipin, fils de Louis le Débonnaire, c'est a dire depuis
818, jusques en 1128, les vicomptes de Turenne reconnurent
le duc de Guienne de cette race pour souverain, quand a
Ihommage et au ressort seulement. Quand elle fut passé
dans la main de Louis 7°*' par son mariage avec Eleonor, ils
reconnurent Louis 7°*' de la même manière et quand elle
feust entrée en 1149 en la pocession de Enry, roy Dangle-
terre et duc de Normandie, ils luy rendirent le même hom-
mage en conséquence du traité de Londres en 1163, et le
reconnurent en même termes sans troubler les peuples de la
Vicompté de Turenne dans les libertés et franchises dont ils
auoint toujour jouis tant auant que Paipin, père de Charle-
magne, se feust randu maitre de Guienne que depuis quil le
feust devenu.
Saint-Louis ayant confirmé ce traité en 1269 et assuré a
Enry, roy Dangleterre, les terres au délia de la Guaronne
avec le Quercy et le Limousin, et Saintonge, jusques a la
Charante, sous Ihommage lize de la Couronne de France, les
peuples de la Vicompté de Turenne, aussi que les vicomptes,
continuèrent de jouir des mêmes libertés et franchises. Ces
droits ne feurent altérés que peu a peu par les différents sei-
gneurs de la Guienne, pour suivre les interesl des roys pré-
décesseurs de Vostre Majesté.
Le vicomte de Turenne, qui esloit vn des plus puissants,
vn des premiers, et les peuples de la Vicomte, tant gen-
tilshommes quaulres qui esloint subjets libres, suiuirent
lexemple de leur seigneur, et comme il estoit naturel que la
Vicomte de Turenne estant rentrée dans la mouuance immc-
diatte des roys prédécesseurs de Vostre Majesté, conservât
les droits, immunités, libertés et franchises dont elle jouis-
soit depuis plusieurs ciecles, le roy Philippe le Hardy, fils
de Saint-Louïs, en donna des lettres patantes du mois d'aoust
1280. Ils est exposé par ces lettres que la Vicomte auoist fait
prensenter a Philippe le Hardy toutes les lettres données de
— 441 —
temps immémorial par ses prédécesseurs duc de Guienne,
lesquelles contenoit la reconnoissance des droits du Vicomte
et de ceux des habitants de la Vicomte que ceux du Vicomte
auoint toujour été dauoir le droit de reconnoissance de tout
ce qui concernoit les eaux, les fleuues nauigables dans les-
tandue de la Vicompté, pors pessieres et moulins y estants,
les grands chemins, le port darmes et les crimes qui cy
commetoint dans sa mouvance et les vtiles des fiefs nobles,
avec la haute-justice, et la permission aux noms nobles d'en
posséder, quil auoist droit de donner des sauues gardes, et
den punir les infracteurs, de sobliger tous les subjets de la
Vicomte, de comparoistre devant sa cour avec armes ou sans
armes, sans toutes fois les y pouuoir contreindre par amande,
ce que le duc de Guienne nauroit pas pue exiger deux, et dy
repondre sur touts contrats, délits, ou considelix, ou nature
mixte que les vicomtes auoint droit de connoistre en pre-
mier ressort de toutes les appellations des juges, des sei-
gneurs mouuants deux et de faire battre mounoye blanche et
noyre. De bonne loy a laquelle les ducs de Guienne estoint
tenus d'en donner cours dans les diocezes de Limoges, Peri-
geux et Caors, que Tun des principaux droits des vicomptes
de Turenne et du territoire de tous les habitants de la
Vicomte estoit désire et de avoir toujour été libres et
exampts de toutes impositions et contributions, payement
des subcides et charges réelles, personnelles et mixtes, que
les ducs de Guienne ne pouuoint exiger sous prétexte de
guerre ou autres causes dans lestandûe de la Vicomplé,
quoyquils enleuassent dans les autres parties de leur duché
de Guienne.
Quoy les officiers de la justice du Duc de Guienne ne
pouuoint faire citer devant eux les habitants de la vicomte
ny tenir leurs assiges si non dans la ville de Martel dans
laquelle il ne pouuoint auoir que deux sergents que les
chcneschaux et les autres officiers du Duc de Guienne
estoint obligés de faire le scrmt aux vicomtes de Turenne
dentretenir les libertés, franchises et immunités de luy et
des habitants de la vicomte sur la suplique du vicomte de
Turenne a Philipe le Hardy son souverain, de conserver,
valider et confirmer ses libertés et franchises tant pour luy
que pour les habitants de la vicomte, le dispositif de ces
lettres feut que sur la considération des faits y exposés, le
Roy de sa pleine puissance et gré, gardoit, y maintenoist,
confirmoit et conseruoit La Viconsté et les habitants de la
vicomte, dans ses libertés, franchises et immunités pour en
jouir de plein droit pour eux et leurs successeurs commils
auoint toujours fait pour le passé.
Ce titre émané par un des Roys prédécesseurs de Votre
Majesté il y a plus de quatre cents cinquante ans qui annonce
une pansion qui estoit delors de plus de cinq ciècles a été
suiuie depuis une contante et parfaite exatitude dans toutes
ses parties a légard des habitants de la vicomte.
Les Chartres qui ont précédé celle de 1280 pour ordonner
la continuation de cette franchise et immunité absolue doi-
uent être dans la Charité de M' le Duc de Bouillon au
château de Turenne ou il est cité de les vérifier; elles es-
toint aussi dans les greffes des Estats dont M' le Duc de
Bouillon a fait emporter touts les tittres et papiers d'autorité
depuis quatre ou cinq ans, les supliants n'ont peu recouvrer
que celles qui ont suiui les titres de 1280, Lon y voit que
Philippe de Valois en 1330 ordonnée a ses seneschaux et
receveurs de Toullose, Carcassonne, Périgord et Quercy
dentretenir des libertés sans exiger des subjets de la vicomte
aucuns subcides pour cause de la guerre de Flandre auec
enjonction de rendre ce qui pourroist en auoir été exigé.
Que le Roy Jean renouvela la confirmation portée en la
chartre de philippe le hardy de 1242 presque dans les mêmes
termes tant pour les habitants de la vicompté que pour les
vicomtes que Louis de France, Duc Danjou, lieutenant gé^
néral du Roy Charles 5 son frère, en Guienne, et L'anjou
confirma les droits, franchises et immunités aux vicomptes
de Turenne et aux habitants de la vicomte par lettres de
1314, lettres qui ont été suiuies de celles de Louis duc Dan-
gers, régent du royaume sous Charles 6, du mois doctobre
1342; de Charles 7, du mois de may 1446; de Louis 11, du
— 443 —
mois de 9^^ 1469; de Charles 8, en juillet 1484 ; de Louis 12,
1499; de François, en avril 1522; denry deux, en octobre
1547, en octobre 1556; de Charles 9, en aoust 1564; D'enry 3,
en x^ï-e 1574; Denry 4, en 8bre 1593; œoust et octobre 1619;
de Louis 13, en aoust 1641 ; en 1646.
Toutes ces lettres pattantes qui portent la reconnaissance
et confirmation faites par les roys prédécesseurs de Vostre
Majesté de ses libertés, franchises et immunités tant des
peuples habitants nobles et non nobles de la vicomte de
Turenne que de vicomte même ont été rappellées dans les
hommages randus par les vicomtes de Turenne aux ducs de
Guienne, a la couronne toutes les fois que les s" intendants
et autres commissaires de Vostre Majesté ont voulu com-
prandre les vicomtes les habitants nobles ou non nobles de
la vicomte au rang des contribuaux impositions ordinaires
entières, nouuelles et extraordinaires, les vicomtes et les
habitants se sont opposés par voye de droit et de représen-
tation des lettres de chartre qui viennent d'être exposées
sur les vuees desquelles ils ont été maintenus dans leurs
libertés, franchises et immunités de touls subcides ou droits
ou par les s" intendants mêmes ou autres officiers ou com-
missaires de yostre Majesté ou par Vostre Majesté même en
son conseil; en sorte que les habitant supliants joignent aux
lettres quils viennent de rapporter une pention de plus de
huit ciecles de la Liberté immunité franchise de toutes im-
positions subcides levées des deniers dans tout le temps et
pour quelque chose que ce soit.
Par une suitte de cette immunité franchise consacrée par
une si longue pocession et autorité par la reconnaissance
expresse du duc de Guienne et des roys prédécesseurs de
Vostre Majesté, les habitants nobles et non nobles de la
Vicomte ont tenue leur Assemblée ei forme Detats par les
députés de villes et paroisses pour les affaires communes et
comme la plupart de ces états ne pouuoint se faire que sur
les yieux du vicomte ils ne manquoint pas dy représenter
par ses officiers les puissants effets que les habitants ressen-
toint de la protection que leur accordoit auprès des rois
— 444 -
prédécesseurs de Vostre Majesté pour les faire maintenir
dans les libertés, franchises dont ils auoint jouis et jouis-
soint actuellement que le Roy naccordoit cette grâce quaux
grands et importants services quil leur rendoit a gros fraix
pour les Guerres et les besoins de Lestât que tout cella me-
ritoit considération de la part des Estats et une marque de
gratitude par un don volontaire.
Sur ces pareilles représentations les Estats se portoint en
arrestant les Leuées des deniers nécessaire pour la dépance
de leur Assemblée et pour leurs affaires accorder au vicomte
dindemniser des fraix quil disoit faire pour leurs intérêts, et
pour luy témoigner leur reconnaissance une somme qui se
leuoit en même temps sur les habitants de la vicomte.
Ces sommes qui furent une fois payée et pour cette fois
seulement ayant été accordés au vicomte sur tout lors des
lettres quils obtenoint de nos roys furent tantost plus tan-
tost moins fortes selon quelles estoint plus ou moins fré-
quentes, mais toujour données volontairement et réglées
uniquement par la délibération de l'Assemblée des estats.
En 1550 le payis ayant receu des seruices importants du
vicomte luy accorda par sa délibération du 2 feurier six mil
ecus une fois payés et mil ecus par an pour lavenir aux con-
ditions (?) que cette sommje serait imposée sur touts les
habitants par les députés des États pour Estre déliurée au
Tresaurier du vicomte tant quil les feroist maintenir dans
les immunités et franchises, et que des quils cesseroint den
jouir ils ne seroint plus tenus de payer les mil ecus par la
partie de la Vicomte de Quercy, ne voulut pas entrer dans
cette charge annuelle que les seuls habitants de la partie qui
est dans le Limousin voulurent bien slmposer de ceux du
Quercy donnèrent seulement aux vicomtes des fois et autres
des sommes plus ou moins fortes selon leur volonté et tou-
jour auec protestation que cestoit de pur Don et sans obli-
gation ny conséquence que le pays fust tenu a aucune sub-
uention Enuers les vicomles et a la charge d'estre maintenus
dans leur exemption.
Cette fixation a trois mil livres par an réglée en 1550 feusl
r
— 445 —
augmentée en diuerses reprises jusques en 1607 et portées a
9,000 livres par an a savoir : 6,000 livres pour la partie du
Limousin et 3,000 pour celle du Quercy parceque largent
estoit devenu plus commun et que le vicomte ne cessoit de
représenter les soins quil se donnoit et les grands fraix quil
faisoint pour soutenir les interest du pays.
Enfin federic Mauville de La Tour Dauvergne Duc de
Bouijlon souverain de Sedan, Racours et vicomte de Tu-
renne représenta luy môme aux Etats de la Vicomte assem-
blée en 1649 ses grandes dépances quil estoit obligé de faire
pour soutenir son rang et la dignité de sa naissance les
effets puissants de sa protection pour maintenir les habitanls
de la vicomte dans les pocessions libertés et franchises et
immunité dont ils jouissoint depuis plusieurs siècles et la
justice quil auoint de luy accorder un don annuel propor-
tioné a ce que les Roys levaient dans les autres pays de leur
dommination qui navoint pas la même immunité pour Estre
ce don de même qualité que l'immunité sur quoy il feust
accordé par les États de la Viconsté que le pays lui paye-
roist annuellement la somme de 3,200 livres scauoir la par-
tie du Limousin 2,100 et celle du Quercy 3,100 livres et ce
au lieu de 9,000 livres que Ion avoist accoutumé de lui
donner annuellement et de touts les dons extraordinaires
qui auoient ete plus ou moins forts selon le temps et quils
ne seroint plus levés a lavenir le tout en considération des
priuileges franchises et immunités dont il auoist pieu au
roy daccorder la confirmation a tous les habitants de la
Vicomte avec conuention expresse que cette somme ne pour-
roist estre augmentée et sous la condiction que la leuee nen
dureroist que tant et si longuement que le vicomte les feroist
jouir de ses priuileges franchises et immunités ce que M. le
duc de Bouillon vicomte de Turenne accepta et promit auec
clause quau cas de manquement les habitants du pays
seroint et demeureroint déchargés de la promessie et obliga-
tion quils contractoint et encore sous la condiction que si les
roys prédécesseurs de Vostre Majesté reduisoint les tailles
au même pied quen 1607, 3,000 livres des dons seroint
T. XXX. 4-4
— 446 —
réduits aux 3,000 livres qui auoint lieu alors et seroint dimi-
nuées a proportion a la diminution des charges qui se-
roint mises sur les autres peuples du royaume par Vostre
Majesté quoy que cette flxation de don annuel a 3,400 livres
deut estre invariable et tenir droit de touts autres dons sui-
vants les conventions de 1642.
Cependant a mesure que les besoins de lestât ont obligé
le feu roy Louis 14 de mettre sur le peuple du royaume des
nouvelles impositions dont ceux de la vicomte ont été exâmpts
les officiers et agents du vicomte en ont prix occasion de
demander encore des dons et présents extraordinaires quils
ont profité de lestablissement du Controlle, des actes du
papier timbré pour les actes de notaire ou de justice de la
capitation et enfin de la liberté que le pays auoint de la plan-
tation du tabac pour son usage, ils en ont même pris
auantage pour faire porter haut des nouueaux donts beau-
coup plus haut que touts ceux qui avoint été faits auant le
don de 34,000, ce qui a fort surchargé les habitants.
Quand Vostre Majesté a jugé en 1734 de leur interdire la
liberté de faire du tabac M' le Duc de Bouillon au lieu de
maintenir par sa protection auprès de Vostre Majesté la poces-
sion ou le pays auoit été jusques alors traité auec les fer-
miers Généraux de Vostre Majesté moyenant une pention de
1,200 livres pour consentir a tenir luy même la main par
ses officiers a lexecution de cette suspanlion il a continué
de jouir de cette pention pour le prix de labandon quil fai-
soist de linterest du païs sur cet article et de receuoir en
même temps annuellement Lentière somme de 3,400 livres
qui ne lui estoint données que pour maintenir les mesmes
interests pour la conseruation desquels le païs venoist luy
même faire un don extraordinaire de 10,000 livres qui n'es-
toint pas encore achevé de payer.
Les leuées que les agents de M' de Bouillon seftbrcoient
de multiplier sur les habitants de la vicomte ayant donné
lieu a des murmures et même a des résolutions des habi-
tants les plus sénés de représenter a M*" le duc de Bouillon
que de pareilles exactions pouroint porter les peuples de la
r
- 447 —
vicomte qui sont libres et exampts des charges a recourir a
Ihautorite de Vostre Majesté pour lobliger a leur laisser la
liberté dont ils doiuent jouir ils ont apris auec douleur que
M' le duc de Bouillon ayant résolu de vendre a Vostre
Majesté la vicomte de Turcnne parce qu'il ne le voyait plus
en cet estât ny en la volonté de luy faire de pareils dons
avoient compris ceux que ces peuples luy ont faites volon-
tairement par pure affection aux rangs des reuenus fixes et
certains quil propose a Vostre Majesté pour former le prix
quil demande du dommaine De la vicomte quil lui avoist
porté le don ordinaire des supliants pour 33,225 livres, les
dons extraordinaires pour 1723 de la pantion de 12,000 livres
quil reçoit des fermiers Généraux de Vostre Majesté en con-
séquence qui a ete faitte de la defance faitte aux habitants
de la vicomte de planter du tabac ce qui forme a ces yeux
un revenu de 51,998 livres dont il demande a Vostre Majesté
le dernier ce qui monteroit a 3,116,880 livres sans y com-
prendre les autres exagérations des reuenus.
Un euénement aussi extraordinaire dont le projet avoit
été déjà projette du uiuant de Godefroy Mauville duc de
Bouillon vicomte de Turenne auoit déterminé les habitants
de la vicomte a venir se jetter aux pieds de Vostre Majesté
leur. unique souuerain ; et y réclamer la puissance suprême,
et célla non seulement pour arrester les exactions inouïs que
les agents de M" le Duc de Bouillon voudroint exercer sur
un païs dont les roys prédécesseurs de Vostre Majesté ont
maintenu conserué la franchise immunité, mais encore afin
qu'un seigneur auquel ils ont dans touts les temps prodigué
si libéralement leur bien pour peure reconnaissance de leur
protection quil disoint leur donner auprès de Vostre Majesté
et des roys vos prédécesseurs ne vande a prix Dargent a
Vostre Majesté les mêmes franchises et immunités dont il
nest pas propriettaire dont il ne peut disposer au préjudice
des habitants de la vicomte a qui elles sont propres et per-
sonnelles.
Les supliants reconnoissent par la seule puissance que
Vostre Majesté tient de Dieu seul quelle est maîtresse abso-
— 448 —
lue de les assujettir au même droit charge et imposition
quil lui plait dimposer sur les autres subjets de sa Dommi-
nation et que sil luy plaisoist de le faire les vicomtes de
Turenne leur seigneur nauroist comme eux que la voye de
la plus respectueuse représentation a Vostre Majesté pour
obtenir de sa bonté et de sa clémence la conseruation des
immunités et franchises dont lui et les habitants jouissent
depuis plus de dix ciecles cette immunité dont touts les
peuples de la Guienne jouissoint des le S"* ciecle lorsque
Paipin premier de la seconde race reunit sous sa dommi-
nation par la conqueste qu'il en fisl sur Geffre fils Deudon
qui s'en estoit emparé et qui privait (?) les peuples qui jus-
ques la avoint été libres sest conseruéo entière dans la
vicomte de Turenne.
Les peuples de cette vicomte qui est au milieu des mon-
tagnes de Limousin et Quercy dans un pays dont la pros-
périté leur interdit toute sorte de éommerce ont conserué
toutte la pluralité de leurs meurs et ont eu le bonheur destre
gouvernés par des seigneurs qui ont randu des seruices
signalés a leur souuerain et a lestât attaché à leur vicomte
quils ont suiui dans toutes les Guerres ou il estoit obligé de
servir la couronne ils ont mérité comme luy que les roys
prédécesseurs de Vostre Majesté leur conseruassent les im-
munités et franchises auec lesquelles ils estoint entres avec
luy sous lobeissance de Papain père de Charlemagne et
auoint conserué de viure libres sous celles des Ducs de
Guienne et des roys de France ce pays a toujour fourny et
fournit encore a proportion de son eslandue aux armées de
Vostre Majesté autant doflciers et de soldats quaucune autre
partie de vostre royaume, ses dfoits reconnus mentionnés et
confirmés dans la chartre de philippe le hardy de 1280 sont
les droits des habitants de la vicomte ainsi que ceux du
vicomte.
Le Vicomte qui esloist seigneur en cette qualité le pre-
mier des habitants de son pays a demandé pour luy comme
pour eux la conseruation de leur immunité ce que les roys
prédécesseurs de Vostre Majesté eussent peu refuser en
I
J
f
- 449 —
usant a la rigeur de leur puissance absolue, ils ont creu de
leur bonté et de leur magnificence, et les supliants osent
dire de leur justice de les leur conserver.
C'est sous la protection des roys prédécesseurs de Vostre
Majesté que les habitants de la vicomte de Turenne jouissent
depuis près de mil ans de limmunilé et franchise de toutes
impositions et subcides. Les viconles nont été que lorgane
de leur vasseaux et tenanciers quand ils ont demandé la
confirmation des privilèges pour les habitants de la Vicomte
comme pour eux et Votre Majesté permettant depuis son
règne quils continuassent de jouir de leur liberté, na fait
que suivres les traces des roys ses prédécesseurs et de son
auguste bisoyeul qui a creu se deuoir à luy même plus
encore qu'à la maison quil possède, sa vicomte de ne donner
aucune atteinte a des immunités et franchises aussi an-
ciennes et si authantiquement lecognues et confirmées suc-
cessivement par touls nos roys pendant plus de 150 ans par
la suilte dune pocession qui remontât encore a un plus
grand nombre de ciecles et dans une antiquité qu'on ne
peust connoistre que par les istoires et dont la loogeur du
temps n'a pas permis que les lettres vinssent jusques a nous.
Mais il suffit aux supliants den trouuer les traces claires
dans la chartre de 1 180 qui est le plus encien des tittres de
la vicomte quils y connoissent ou Philippe le hardy ne con-
firme aux habitants de la vicomte les privilèges franchises
et immunités que sur la voie de trouver les lettres précé-
dantes des enciens ducs de Guienne qui les auoint recon-
nues et confirmées.
Après un aussi grand nombre de mouuementsde la justice
et de la Bonté de nos roys qui ont maintenu cette pocession
d'immunités de leur subcides et impositions dont les habi-
tants de la Vicomte ont loujour jouis et jouissent encore
annuellement sous le règne glorieux et fleurissant de Vostre
Majesté ils peuuent dire auec confiance quils sont propriai-
taires de ses libertés franchises et immunités quelles leur
appartient comme leur bien propre et non au vicomte de
Turenne qui ne peust ny leur otter ny en disposer a leur
— 450 -
préjudice par une attantion ou donnation et quils ont autant
de droit d'en jouir sous la puissance de Vostre Majesté que
le vicomte de Turennc du Domaine de sa Vicomte, s'il estoit
donc possible qu'un bien aussi précieux que le sont leurs
libertés franchises et immunités peust estre vendue et mise
a prix elle pourroist lestre que par les supliants a qui seuls
elles appartiennent quils sont les seuls propriai taires et non
le vicomte qui na ny la proprietté ny la pocession si non
pour ce qui le concerne seul et non pour ce qui concerne
les habitants qui possèdent les franchises et immunités
comme il possède la sienne.
Il est vray que les vicomtes de Turenne qui ont toujour
été des seigneurs de grande considération et du grand crédit
auprès de nos Roys ont demandé et obtenu la confirmation
de ses libertés pour les habitants de la Vicomte ce que les
habitants ont témoigné a leur vicomte la reconnaissance et
cette protection par les dons que les agents des vicomtes
ont aumanter peu a peu par sucession de temps.
Mais les dons accordés volontairement par les États de la
vicomte uniquement pour marquer leur reconnaissance dune
protection puissante auprès du Souuerain ne font une lettre
en la personne du vicomte pour leuer des deniers sur ces
vasseaux et tenancier de sa seule authorité sil voulait les
obliger a payer ce qui ne luy est pas accordé de leur pure
et franche volonté ou plus qu'ils ont voulu luy accorder ils
luy resisteroint avec justice et recourrait au pouuoir suprême
de Vostre Majesté Son souuerain et le leur de qui ils sont
également subjets pour les deffandre de loppression quil
voudroist exercer contre eux ils luy diroint auec justice
qu'estant francs de louts subcides, impositions enuers Vos-
tre Majesté leur seul souuerain ils le sont a plus forte raison
envers luy que quand ils luy ont fait un don de finance et
pour cella assis et leués sur eux-mêmes des deniers, sa a ete
un acte de nature purement volontairement quil neust peu
exiger deux sils neussent pas voulu les donner que touts les
pretandus que touts les vicomtes ont pris pour ce faire
accorder par les États du pays des dons gratuits quils ont
— 451 —
converty a une somme annuelle dont la leuée se fait article
par article et imposition comme la taille dans les autres
pays, ne leur ont pas donné un peuple libre, et que tout ce
quils ont recueilli a ete de receuoir les présents que les États
leur faisoint volontairement par reconnaissance de leur pro-
tection et bons offices qu'ont eu a leur faire, quon peut cas-
ser dès quon ne voudra plus faire de pareils présents et
quon a raison de ne vouloir plus les leur faire des qvie au
lieu de protéger et de deffandre les immunités des habitants
de la Vicomte il veust vendre les droits de leuer les deniers
sur eux comme si cestait un bien qui leur appartint Les
habitants pour soutenir une deffance aussi naturelle deuant
Vostre Majesté nauroint besoin que des lettres mêmes que
le vicomte porte pour marquer les grandes prérogatives de
la vicomte quil veust vandre puisque ces lettres annoncent
leurs libertés commes les siennes.
Les supliants portent donc auec confiance leurs très hum-
bles représentations auprès du trône de Vostre Majesté sur
cette vente proposée par M' le duc de Bouillon et ils sous-
tiennent auec la plus parfaitte soummission pour Vostre
Majesté et sans sescarter du respect quils conseruent pour
M' le duc de Bouillon leur vicomte quil ne peust comprandre
au rang des reuenus de la vicQnité quil veust vandre les gra-
tifications des marques de reconnaissance quil a reçue deux
que parcequils ont bien voulu les luy donner sans quil eut
aucun droit et tittre pour les exiger.
Si M' le duc de Bouillon ne veust pas a lexemple de ses
pères user de laxés quil a auprès de Vostre Majesté pour
obtenir la confirmation de leur libertés pour les y faire main-
tenir ils espèrent de la bonté et de la justice de Vostre
Majesté quelle voudra bien les escouter eux mêmes dans les
très humbles suplications quils lui en font.
Ils espèrent conseruent depuis près de dix ciecles les
libertés si précieuses pour eux par la bonté des roys pré-
décesseurs de Vostre Majesté qui au nombre de plus de vingt
les ont sucessiuement confirmées si le vicomte par des veues
contraires a celles de ses pères qui les ont protégés auprès
_ 452 —
des roys pour les leur faire conseruer les abandonne et
qu'en vendant la vicomte il veuille aussi vandre comme son
bien les marques quils luy ont volontairement donnés de
leur reconnaissance et les mest en estât de les plus deuoir
qua Vostre Majesté seule.
C'est dans cette situation que munis de tant de lettres ils
se prosternent en toute humilité deuant elle pour luy de-
mander la conseruation et quils lui représentent que si elle
veut reunir les lettres de la viconste a sa couronne elle na
point de prix a payer a M' le duc de Bouillon pour luy
acquérir de luy un droit quil na point qui ne luy a jamais
appartenu et dont ils sont seuls propriaitaires que leur
liberté sont leur bien propre et personnels et dans la poces-
sion desquels les roys prédécesseurs de Vostre Majesté con-
tinue de les y maintenir comme ils espèrent de sa clemance
et de sa justice ils regarderont de luy donner volontairement
les mêmes marques de leur reconnaissance quils donnoint a
leur vicomte sans quil aye coutté a Vostre Majesté a con-
quérir cet empire sur les cœurs.
L'Intantion de Vostre Majesté ne peust estre danéantir en
un estant pour satisfaire linlerest seul de M*" le Duc de
Bouillon ce que ks roys prédécesseurs de Vostre Majesté ne
voudrointque des subjets deu«us ses vasseaux et tenanciers
immédiats pour lacquisition quelle auroist faitte de la sei-
gneurie du pais quils habitent deuinssent d'une condition
pire que celle dont ils estoient sous le vicomte leur encien
seigneur et quayant toujour esté francs et libres de touts
subcides et impositions par la bonté et justice des roys vos
prédécesseurs tant quils nauroient point d'autre seigneur
immédiat quun vicomte vassal de Vostre Majesté ils per-
dissent toutes les libertés et franchises au moment quils
seroint passés sous la mouuance dun roy aussi grand, aussi
bon, aussi juste, Vostre Majesté ne voudroil pas jouir de la
vicomte de Turenne autrement quen ont jouï les vicomtes de
La Tour dauvergne et auant eux ceux de la maison de Beau-
fort Commises et les anciens vicomtes qui les ont précédé
ny faire perdre aux peuples de cette vicomte les libertés
— 453 —
que les roys vos prédécesseurs ont conserué souà les anciens
vicomtes.
Les Estats du pais demeurés francs et libres de touts sub-
cides 6t impositions sous le vicompte de Turenne, représen-
teront a Vostre Majesté que comme les libertés dont ils
jouissent nont point ete vanduôs au vicomte ni a ses pères
il ne peust les vandre ny entrer de Vostre Majesté a aucun
prix que leurs libertés sont toutes anciennes a eux quil ny
a aucun droit et que si contre leur espérance et la confiance
qu'ils ont en la bonté et en la justice de Vostre Majesté sa
volonté estoit de le leur oster et de les soummettre a toutes
impositions comme ses autres subjets il ne seroit pas juste
que Vostre Majesté payât pour cella un prix au vicomte
puisquil ne luy appartient pas den disposer.
Ils espèrent au contraire que si Vostre Majesté acquiert
de M"" le Duc de Bouillon la vicomte de Turenne elle ne
voudra pas permettre quil comprenne dans les reuenus
quelle produit et dont il propose leualuation des sommes
que les Estats du pays ont bien voulu payer de leur franche
volonté et sans y estre obligés ny par les douze mil livres
quil tire des fermiers généraux de Vostre Majesté pour la
supression de la plantation du tabac dont les seuls habitants
ont soufert, ils espèrent aussi que Vostre Majesté voudra
bien si elle acquiert la vicomte permettre aux Estats du pais
de sassembler en la manière ordinaire pour pouvoir sous
son bon plaisir a la conseruation de leurs libertés dont les
habitants de la vicomte ont toujours jouï et luy présenter
leurs cayets et ils continueront leurs veufs et leurs prières
pour sa santé et prospérité
De Vostre Majesté.
Faye-I-ieLOlièze
ET
LES DÉBUTS DE LA RÉVOLUTION A BRIVE
' (d'après des docmnents inédits)
Les curieux documents contenus dans les archives
municipales pourraient servir àcompléter, sinon même
à renouveler l'histoire des débuts de la Révolution
à Brive. Nous nous proposons seulement ici d'en
extraire les détails qui se rattachent à la biographie
du docteur Pierre -François Lachèze, dit Lachèze
jeune, et Faye-Lachèze(l), député à l'Assemblée na-
tionale législative, puis chef du Bureau des Consulats
au Département de la Marine, commissaire diploma-
tique près l'armée d'Italie et consul général à Gênes,
enfin directeur de l'Enregistrement et des Domaines
à Aquila (royaume de Naples), ayant peut-être rempli
d'autres fonctions encore dans des villes différentes
d'Italie.
Ce personnage, par lui-même assez médiocre, type
assez caractéristique de Varriviste au commence-
ment de la Révolution, se trouve occuper une place
aussi importante que singulière dans l'histoire du
(1) Faye parait avoir été à Forigine le nom de quelque petite pro-
priété de famille, ajouté au nom patronymique pour distinguer le frère
cadet du frère aine, suivant un usage devenu assez commun dans la
bourgeoisie, à la fin de Tancien régime.
— 456 -
général Antoine Marbot, sur laquelle une publication
récente de notre distingué compatriote, M. Louis de
Nussac, a fourni de si piquants renseignements (1).
11 a aussi une petite place dans Thistoire de Mirabeau,
Cabanis se Tétant adjoint pour soigner, comme mé-
decin, le grand orateur dans sa dernière maladie, et
celui-ci lui ayant donné dans son testament une mar-
que de souvenir et de reconnaissance.
Nous ne reviendrons pas ici sur ce qui concerne
les rapports d'amitié très étroite établis entre le gé-
néral Antoine Marbot et François Faye-Lachèze, à
compter de leur élection simultanée à l'Assemblée
législative, comme députés de la Corréze, et du ma-
riage du second avec une jeune protégée de M"' de
Condorcet, Rose Dupré de Geneste, la Rosette des
lettres écrites sous la tente par le général Antoine
Marbot. Nous nous bornons à renvoyer à cet égard
nos lecteurs à la brochure de M. de Nussac, et au
commentaire que lui a donné Tun de nous dans un
article de la Revue des Questions historiques^ de
janvier 1908(2).
Nous allons remonter un peu plus avant dans la
vie de François Lachéze^ et raconter les origines de
sa carrière politique.
I
Un mot d'abord sur la famille dont il est sorti.
C'était une famille de petite bourgeoisie campa-
(1) Études historiques militaires, — Le général Antoine Marbot,
amitiés, amours et guerres, par L. de Nussac. —Paris, Picard. 1905.
(2) Marbot garde- du- corps et général de la République, par Gh. de
Loménie,
— 457 —
gnarde, originaire de Voutezac ou d'Orgnac, dont le
chef, à la fin de Tancien régime^ François Lachèze,
époux de Marianne Lacoste, avait le titre d'avocat en
Parlement, mais était surtout l'homme d'affaires au-
quel la famille de Lasteyrie du Saillant accordait toute
sa confiance. 11 est fréquemment question de lui dans
la correspondance inédite entre le marquis de Mira-
beau, ÏAmi des HommeSy et son gendre le marquis
du Saillant. Successivement procureur d'office, puis
lieutenant de juge, puis juge de la juridiction sei-
gneuriale d'Allassac, il habitait le Saillant. Son lils
aîné Pierre-Remy, légiste comme lui, et qui devait
finir ses jours juge au Tribunal de cassation, était
pareillement à la fin de l'ancien régime juge d'une
autre justice appartenant à la famille du Saillant,
celle du Saillant, Comborn^ Saint- Viance et Objat.
Ayant amassé une jolie fortune bourgeoise pour le
pays et Tépoque, une centaine de mille francs envi-
ron, après avoir commencé avec très peu de chose,
ayant assuré des emplois à ses fils (1) (le second Pierre-
François était devenu médecin après avoir obtenu une
des six bourses de la ville de Brive dans les collèges
de l'Université de Toulouse), le vieux Lachèze ache-
vait avec bonne humeur, au Saillant, une vie assez
longue qu'il devait terminer en 1791, entre ses deux
filles, la Margoutou, ménagère experte, et la Pou--
lettej très entendue en affaires (2). Il était très res-
(1) D'après le relevé des actes notariés et d'état-civil relatifs à la
famille Lachèze. relevé donné par M. Louis de Nussac dans la bro-
chure précitée, l'homme d'affaires de la famille du Saillant aurait eu
six enfants lui ayant survécu, dont trois fils.
(2) Les lettres de Lachèze à son ami Antoine Lalande nous montrent
la Margoulou faisant exécuter des travaux pour ses amis de Brive
— 458 —
pectueux de Tautorité^ et d'un voltairianisme prudent
à l'égard des gens d'Eglise.
Les premiers événements de la Révolution à Brive
allaient donner à ses deux fils établis tous deux dans
cette ville, et âgés alors l'un, l'avocat, de trente-six
ans, l'autre, le médecin, de trente-trois, l'occasion de
se créer d'emblée un rôle politique.
Brive et le Bas-Limousin étaient éloignés des in-
fluences aristocratiques et parlementaires qui ont
commencé la Révolution. Ni la lutte des Parlements
contre le ministère Brienne, et le projet apporté
de Bordeaux par un conseiller au Parlement de cette
ville, seigneur de fiefs en Bas-Limousin, M. de Pois-
sac, en vue de reconstituer les Etats de Guienne (au
lieu des assemblées provinciales instituées par le gou-
vernement); ni les élections aux Etats- Généraux qui
ont provoqué tant de désordre dans d'autres régions,
ni même les premières discussions entre les repré-
sentants des trois ordres^ le serment du Jeu de Paume,
la séance royale du 23 juin n'ont ému beaucoup la
population du Limousin. V anarchie spontanée par
laquelle Taine a caractérisé la première phase de la
Révolution n'a pas existé chez elle. C'est un point
qu'il n'est pas inutile de mettre en lumière, les pré
cédents historiens locaux, M. de Seilhac notamment,
ne l'ayant pas assez dégagé.
Jusqu'au 14 juillet 1789, Brive en particulier a joui
d'une tranquillité parfaite, non exempte, il est vrai,
par les fileuses du Saillaivt. Quant à M"* Poulette, la marquise du
Saillant s'adresse à elle en 1791 pour écrire les lettres délicates que
son frère, le procureur-syndic du district, peut être embarrassé de
faire lui-même.
- 459 —
d'engourdissement. Cette ville était administrée par
un maire perpétuel, lequel était en même temps
lieutenant -général de la sénéchaussée, un lieute-
nant de maire, quatre échevins, et quatre con-
seillers de ville en titre; à ces officiers municipaux
s'adjoignaient, dans les occasions importantes, un cer-
tain nombre de notables ou fonctionnaires formant
avec eux ce qu'on appelait le Conseil politique (i).
Dans la plupart des villes de France les charges
municipales électives avaient été transformées suc-
cessivement, on le sait, en offices qui s'acquéraient
et se transmettaient moyennant finances et étaient
recherchés à cause des prérogatives honorifiques
ou autres qu'ils conféraient à leurs titulaires. Il y
a à la fin de V Ancien régime et de la fiévo-
lulioUj de Tocqueville^ une note particulièrement
instructive sur Une administration de ville au
XVIIP siècle. Cette ville qui est celle d'Angers avait,
comme certaines autres (2), racheté à différentes re-
prises les offices plusieurs fois créés par le gouverne-
ment, c'est-à-dire, comme le dit un mémoire de 1764,
cité par Tocqueville, a payé de ses finances pour con-
server la liberté de ses élections (d'ailleurs peu démo-
cratiques), et faire jouir ses officiers élus^ les uns
pour deux ans, les autres à vie, des différentes préro-
(1) Le Conseil politique, en 1789, était composé de MM. de Maledent
de la Bastille, maire perpétuel; Mayjonade, lieutenant de maire; Man-
tet, avocat; Bachélerie, procureur; Déjean, négociant; Delpeuch, no-
taire, échevins; Delbos du Bousquet, Antignac, Laborderie, Maie-
peyre, conseillers de ville; de Gilibert, curé de Saint-Martin; Crozat,
Lemas, Goulmy, Rogemond, de Rivaud, Guittard, Laulerie, Rebière,
de Corn, du Peyron; de Lavareille, chanoine; de Lansade, receveur
des tailles; de Vielbans, lieutenant particulier; Védrenne de Lacha-
pelle.
(2) Celle de Limoges, notamment.
— 460 —
gatives attachées à leur charge ». A Brive la transfor-
mation en offices remonte à 1692, malgré une autre
indication donnée dans un document ci-après, et les
mêmes sacrifices n'avaient pas été faits pour main-
tenir un régime municipal électif. La flscalité du
gouvernement avait su donner une satisfaction à
Tamour-propre de la bourgeoisie, en créant ainsi des
charges soustraites à Tobligation féodale d'hommage-
lige^ genibus flexis et capuciis amolis^ laquelle
existait précédemment au profit des ducs de Noailles
devenus seigneurs des deux tiers de la ville. Les
anciens consuls ayant été d'abord maintenus à côté
des nouveaux officiers municipaux, avec des attribu-
tions réduites à des objets spéciaux, comme la répar-
tition ou le recouvrement de Timpôt, nous voyons, le
15 mai 1770 encore, le duc de Noailles obtenir contre
eux du Parlement de Paris la reconnaissance de cette
obligation féodale. Depuis lors les consuls avaient
cessé d'exister et le duc de Noailles s'était trouvé sans
action contre les nouveaux officiers municipaux.
Les transformations dont nous parlons sont pour-
tant au nombre des causes q.ui ont le plus contribué
à affaiblir l'organisation administrative de l'Ancien
régime. Des municipalités électives ne se fussent pas
effondrées devant les premières insurrections popu-
laires, comme nous allons voir s'effondrer la munici-
palité de Brive, constituée en offices héréditaires.
II ne faudrait pas croire pourtant que les personnes
revêtues de ces fonctions en 1789, M. de Maledent de la
Bastille, maire, et les collègues qu'il présidait, fussent
animées d'un étroit esprit de caste ou inspirassent
de l'antipathie à la population. Nul ne leur refusait
— 461 —
au contraire Testime qu'ils avaient méritée par le
désintéressenient de leur administration; et les suc-
cesseurs qui leur furent donnés^ le 7 septembre 1789,
leur rendirent cet hommage significatif, par une déli-
bération consignée dans les registres municipaux :
a Lorsque la communauté a cru devoir exprimer son
a vœu (pour le renouvellement de la municipalité),
« elle n'a eu d'autre raison que Tillégalité de la nomi-
« nation^ et la réclamation d'un droit qui lui avait été
oc usurpé. La conduite des anciens officiers munici-
« paux et du Conseil politique étant à Tabri de tout
« reproche pendant leur administration, il serait in-
« juste de laisser le moindre nuage sur le personnel
« d'honnêtes gens qui ont bien mérité de la chose
« publique. Il a donc été délibéré unanimement qu'il
a serait fait une mention honorable sur les registres
a de l'Hôtel-de-Ville, et que particulièrement M. May-
« jonade, ancien lieutenant de maire^ serait remer-
« cié, au nom de la communauté, d'avoir fait em-
« bellir à ses frais nos promenades publiques et donné
« des preuves en toutes occasions de son zélé et de sa
a générosité envers la patrie. j>
Les précieux registres de délibérations du corps
municipal de Brive transcrits par M. Julien Lalande,
l'un de nous, montrent ces officiers municipaux con-
sciencieusement occupés de leurs petites affaires admi-
nistratives, sans diversion politique jusqu'au 19 juillet.
Le calme des esprits, et parmi eux et dans la popu-
lation^ commence à être atteint lors de la réception
des lettres par lesquelles M. Malès, député du Tiers-
Etat aux Etats-Généraux, représentant plus particu-
lièrement la sénéchaussée de Brive, raconte aux
T. XXX. /i - 5
— 462 —
officiers municipaux les événements des 12, 13,
14 juillet et jours suivants. Mais, comme la présence
de Necker (M. de Necker comme on dit à Brive) à la
tête du gouvernement est ce à quoi la population
attache alors le plus d'importance, comme la nou-
velle de son rappel arrive presque tout de suite après
celle de son renvoi^ le premier effet produit est sur-
tout un effet de joie dans toutes les classes de la
population.
Cette joie se manifeste d*abord par des cérémonies
religieuses : grand'messes solennelles à Téglise collé-
giale, Te Deum chanté à deux jours différents^ ser-
vice célébré a pour le repos des âmes des généreux
citoyens de Paris qui ont sacrifié leur vie pour la
défense de la patrie ». Le jeudi 23 juillet, après la
première grand*messe solennelle, trois drapeaux, des-
tinés à la future garde nationale de Brive^ Tun blanc,
l'autre blanc et bleu, le troisième rouge et bleu, sont
présentés par les maire et échevins, en robes et cha-
perons, à la bénédiction de M. Sapientis, chanoine et
hebdomadier. Ensuite, le dimanche 26 juillet, à huit
heures du matin, sur convocation régulière des offi-
ciers municipaux, et aux sons de la grande cloche, se
réunit à THôtel-de-Ville une de ces assemblées de
tous les habitants, qu'on formait encore parfois dans
les derniers temps de l'ancien régime, conformément
à de vieux usages, pour délibérer sur des questions
extraordinaires d'intérêt municipal. On y établit les
bases d'organisation d'une milice bourgeoise, ou plu-
tôt, comme l'ont demandé^ à Tulle, les gentilshommes,
pour pouvoir y entrer sans déroger, d'une milice ci-
tovenne à l'instar de celle de Paris; on nomme des
— 463 — •
officiers, avec les maire et échevins comme comman-
dants généraux; — le tout^ comme il est dit dans la
délibération arrêtée séance tenante, sous le bon plai-
sir du Roi et de Monsieur V Intendant.
C'est seulement quatre jours après, le jour de la
Peur^ c'est-à-dire à Brive le 30 juillet, que l'état
révolutionnaire commence. Une lettre arrivée d'Uzer-
che a annoncé que la province du Limousin était in-
festée par une troupe de brigands, au nombre d'en-
viron douze mille, qui pillaient et incendiaient tous
les lieux où ils passaient, La même nouvelle a été
apportée par des députations d'Allassac, Objat, Don-
zenac, Sarrazac et autres localités environnantes. Tous
les hommes en état de porter les armes sont assemblés
en hâte sur les deux ponts de la ville, sous les ordres
des officiers municipaux, dit le procès- verbal^ mais
sous l'autorité effective de MM. de Géogéghan, ancien
colonel d'infanterie; de Lansade de Lardimalie, an-
cien gendarme de la garde, et Grivel, avocat, nommé
major-général de la milice bourgeoise. Un conseil,
comprenant pour la première fois des personnes
étrangères à l'ancienne municipalité, au nombre de
treize, se réunit à l'Hôtel-de-Ville. L'aîné des deux
frères Lachèze, l'avocat, fait partie des treize nou-
veaux venus (1), qui s'introduisent ainsi dans la mu-
nicipalité pour la supplanter.
Huit membres de cette réunion restent en perma-
nence jusqu'à quatre heures du matin^ et sont relevés
par huit autres. Toute la nuit la garde bourgeoise
(1) MM. de Lavarde» Lachèze, Malepeyre fils, de Géoghégan, Male-
Eeyre, de Gorrèze; Sapientis-Favars, chanoine; Sahuguetde la Roche,
lalande père, de Gorrèze; Sapientis-Chauffengeal, cTîanoine; La He-
naudie, Malès père, des Bruslys, Maillard.
demeure en armes et fait des patrouilles autour de la
ville. On ne dort guère à Brive toute cette nuit-là.
Dès le lendemain matin pourtant les alarmes com-
mencent à se dissiper. Une lettre, apportée par deux
députés de Terrasson, fait connaître que les pillards,
au nombre de soixante-quinze environ (au lieu de
douze mille), sont cantonnés et observés dans la forêt
de Confolens, sur les confins de TAngoumois; et la
terreur panique disparaît aussi vite qu'elle est venue,
a II paraît dit le procès-verbal du corps municipal,
« que cette terreur panique passe du côté du midy,
« mais on espère qu'elle cessera bientôt, au moyen
« des conseils et des avertissements que le conseil
a permanent a eu le soin de faire répandre. »
Deux résultats politiques importants restent acquis :
sans l'intervention, réservée jusqu'alors, des repré-
sentants de l'autorité royale, la garde nationale est
constituée; elle a un commandant supérieur dévoué
aux idées nouvelles, et disposé à l'indépendance en-
vers l'ancienne municipalité; et d'autre part le noyau
d'une administration future ayant un caractère popu-
laire est formé dans le sein même de celle-ci. Com-
ment douter qu'une panique se propageant avec cette
régularité dans toute la France, du nord au midi, et
produisant partout les mêmes effets, puis cessant aus-
sitôt qu'ils ont été assurés, réponde à un dessein et
à un mot d'ordre de ceux qui ont intérêt à provo-
quer ces effets?
II
La panique a cesssé, mais la surexcitation des es-
prits persiste; et il suffira de peu d'efforts encore pour
— 465 —
faire disparaître complètement lancienne municipa-
lité. Tout d'abord les membres nouveaux du Conseil
permanent institué le 30 juillet sont portés de treize
à vingt-six. Ce Conseil se subdivise en comités où
figurent encore les anciens officiers municipaux, mais
où dominent les nouveaux venus, bourgeois encore,
jaloux d'autres bourgeois, mais ouvrant la route aux
chefs d'émeutes et de clubs.
Le 6 septembre^ sur l'initiative d'un personnage
appartenant à cette dernière catégorie, et qui, étran-
ger à la municipalité, a écrit pourtant la minute de
la convocation, Després (duquel nous reparlerons),
les habitants de Brive sont convoqués pour un enrô-
lement définitif dans la garde nationale, ensuite du-
quel ils auront à prêter serment d'obéissance à la
municipalité.
Réunis d'abord sur les fossés de la ville, puis dans
les cloîtres des Jacobins, les miliciens se rangent en
bataillon carré. On bat un ban pour leur faire lecture
du règlement établi par le nouveau commandant géné-
ral^ M. de Géogéghan. Alors deux d'entre eux : l'homme
même qui a écrit la convocation, Després (1), fils na-
turel du prince de Soubise, destiné à devenir un des
agitateurs et terroristes les plus en vue à Brive, et un
cousin-germain des deux Lachèze, Serre de Lacoste,
sortent des rangs, et déclarent que ni eux, ni la
troupe au nom de laquelle ils parlent ne veulent
(1) Proche parent de Lachèze-Faye par son mariage avec une nièce
de Marianne Lacoste. Cette alliance explique dans une certaine me-
sure la tuneste influence qu*a exercée Després, aussi aristocrate d'al-
lures que démocrate de position, sur la bourgeoisie très pacifique de
Brive de 1789 à 1794.
— 466 —
servir sous les ordres de MM. les officiers municipaux
actuels.
L'échevin qui préside la réunion, M. Bachèlerie,
fait observer que l'autorité des officiers municipaux
sur la nouvelle garde « est un droit attaché aux places
de ceux-ci, et qu'ils ne peuvent y renoncer sans por-
ter un préjudice notable au corps municipal ». On lui
répond que la nomination des officiers municipaux
n'ayant pas été faite par la communauté ne peut être
regardée comme légalement faite. « Et (Després et
Serre) ayant demandé Tavis de la troupe là-dessus »,
la majeure partie donne par acclamation son consen-
tement à la déclaration.
L'échevin ôte son chaperon (1) pour lever la séance,
et se rend à THôtel-de-Ville pour se concerter avec
ses collègues. Ceux-ci décident de donner collective-
ment leur démission. Ils convoquent pour le 27 une
nouvelle assemblée générale des habitants, devant la-
quelle ils réitèrent cette démission, « pour prouver
« à la communauté le sincère désir qu'ils ont de faire
a tout ce qui pourra lui être agréable; ils la requiè-
« rent de nommer tout de suite d'autres personnes
<r pour les remplacer. »
On élit un nouveau Conseil permanent de vingt-six
membres (2), auxquels s'adjoindront pour délibérer en
Conseil patriotique, les officiers élus de la garde na-
tionale. Cette nouvelle municipalité qui, en raison
(1) Le chaperon, comme de nos jours l'écharpe, était le signe dis-
tiuctif des officiers municipaux. Aujourd'hui les présidents se couvrent
pour lever les séances ; alors c'était l'inverse.
(2) MM. de Lavarde, Lachèze. Malepeyre fili» de La Henaudie, Malès
père, des Bruslys, Maillard, ancien conseiller : de Géoghégan ; Male-
peyre, de Corrèze; Sapientis-Favars. chanoine; de la Roche; Lalande
père, de Corrèze, et Sapientis-Chauffengeal, chanoine, auxquels furent
— 467 —
d'autres démissions dans son sein, n'est définitive-
ment constituée qu'à la fin de septembre, comprend
les deux frères Lachèze, et Lachèze aîné, l'avocat, en
est le premier président. Les délibérations pour la
formation de cette municipalité sont prises « sous le
bon plaisir de l'Assemblée nationale et de Sa Majesté » ;
il n'est plus question de l'Intendant.
L'ancien maire, M. de Maledent de La Bastille, reste
lieutenant-général de la sénéchaussée. Il conserve à
ce titre des pouvoirs de police créés en 1699. Voici en
quels termes le nouveau Conseil patriotique le somme
de les exercer conformément à ses vues propres :
a Monsieur,
et Un grand nombre de citoyens se plaignent de la
a négligence avec laquelle la police est administrée
ce dans cette ville.
oc C'est vous qui êtes chargé de la faire Nous
« n'ignorons pas quels sont les droits imprescrip-
a tibles d'un peuple à des fonctions qui Tintéressent
a de si près; nous n'ignorons pas non plus que, dans
ce cette cité, les magistrats populaires les avaient
ce exercées de tous temps jusqu'à l'époque où le gou-
« vernement^ sous la dernière régence (1), par une
a avide spéculation, les usurpa sur la communauté.
adjoints MM. Bachelier, médecin; Mayjonade, de Lintillac; Lacroix,
curé de l'Hôpital; Lafeuille, des Sœurs; Lidon, procureur; Aubert,
notaire; Bessot fils; Marbeau, greffier; Orcel, bourgeois; Peyralade,
serrurier; Chassaing, perruquier; Lalande, de la place, et Roque aîné.
On trouve ensuite, avec les noms qui précèdent, ceux de Lachèze
jeune et de Després, soit en vertu d'élections complémentaires, soit
à titre d'officiers de la garde nationale.
(1) Plus exactement en 1699, après la création des offices municipaux
en 1692.
— 468 —
<r Instruits que TAssemblée nationale va s'occuper
a incessamment des municipalités, nous n'anticipe-
« rons point sur ses décisions, à moins que le salut
a du peuple ne l'ordonne, mais en attendant nous
ce remplissons envers la communauté tous les devoirs
« que nous impose la qualité de ses représentants :
a c'en est un bien essentiel de veiller à ce que les
« magistrats chargés de telles ou telles fonctions s'en
(c acquittent avec exactitude. Nous vous requérons
a donc. Monsieur, au nom du Conseil patriotique,
« et nous vous sommons expressément, au nom de
a la communauté, de mettre plus de soins et de vigi-
« lance dans l'exercice de la police.
ce On se plaint spécialement de ce que, depuis plu-
« sieurs mois, la viande est au même taux, quoique
a le prix du bétail de toute espèce ait diminué consi-
« dérablement, de la qualité et de Tétat des animaux
flf qu'ils Csic) tuent, de ce qu'ils laissent leurs tueries
« dans un état de malpropreté capable de corrompre
<( la salubrité de l'air, de ce que les rues ne sont pas
« balayées. On se plaint encore de ce que la visite
a des poids et mesures chez les marchands, artisans,
a bouchers, boulangers, cabaretiers, n'a pas été faite
a depuis longtemps.
a Nous vous avons vu, Monsieur, dans d'autres
(( temps, remplir avec éloge les mêmes fonctions que
a vous négligez aujourd'hui ; nous espérons que vous
a ranimerez votre zèle, dans les moments où il est
a aussi important pour le peuple, et pour les magis-
a trats eux-mêmes, de rendre aux lois leur activité.
a Nous vous prévenons du reste que l'approvision-
ne nement de la ville, sa sûreté intérieure et extérieure
— 469 —
« sont d'un intérêt majeur qui, dans les circonstances
« actuelles, ne peuvent CsicJ être confiés à la vigi-
« lance d'un seul homme; nous continuerons donc à
« nous en occuper; cela n'empêchera pas que vous
« puissiez concourir avec nous à des soins si impor-
« tants, en nous communiquant les vues que vous
a pourrez avoir, comme tout citoyen est en droit de
« le faire.
« Vous voudrez bien, Monsieur, nous faire une
« réponse prompte et précise, pour que, d'après vos
4 intentions connues, la communauté sache si elle
« doit se reposer sur vous, ou aviser aux moyens qui
« lui paraîtront le plus convenables pour rétablir
« l'ordre qu'elle désire.
a Nous sommes très parfaitement, Monsieur, etc.
« Les membres du Conseil patriotique :
« Signé Lachèze, président; Le Clère, vice- président;
« Després, secrétaire; Mailher, secrétaire-greffier. »
M. de La Bastille n'ayant fait aucune réponse à une
telle lettre, le Conseil patriotique nomme quatre com-
missaires pour s'occuper de la police, et se saisit de
la question des subsistances.
Pour maintenir les grains et le pain à un prix qui
ne soulève pas de réclamations, il est décidé que la
Ville fera elle-même au dehors des achats de grains
en vue de sa consommation. Où prendre les fonds
nécessaires à ces achats? Le Conseil patriotique décide
de les demander à une souscription. Les Brivistes
généreux et patriotes sont invités à devenir a action-
naires dans un Comité de subsistances ». Ces a ac-
tionnaires » d'une espèce assez particulière ne doivent
toucher aucun bénéfice, ni même aucun intérêt de
- 470 —
leur argent. La Ville, représentée par le Conseil
patriotique, se porte seulement garante envers eux
des pertes auxquelles pourront donner lieu les opé-
rations du Comité de subsistances. Ces pertes seront
réparties entre les habitants « au marc la livre des
a fortunes de chacun ». Le produit total de la sous-
cription ne nous est pas donné ; il est probable qu*il
ne fut pas bien élevé. Parmi les souscriptions de quel-
que importance mentionnées dans les vieux registres
des délibérations municipales^ nous notons celles du
chapitre de Saint-Martin pour 300 francs, et de Caba-
nis pour 200.
Au reste la famine ne s'est pas fait sentir en 1789
dans le Bas-Limousin comme dans d'autres provinces,
et l'insurrection des campagnes va donner de bien
plus graves préoccupations aux autorités et aux gardes
nationales récemment constituées.
Cette Jacquerie^ pour reprendre le mot de Taine,
qui ne Ta étudiée en Bas-Limousin qu'un peu plus
tard, cette Jacquerie a été évidemment facilitée par
les alarmes de la journée de la Peur, et les excitations
communiquées ensuite des villes et des bourgs dans
les campagnes. « C'est ainsi que le peuple a appris
« à s'attrouper, écrira quelques mois après Faye-
<r Lachèze, dans un mémoire consacré pourtant à la
a défense des chefs d'émeutes. »
Mais la cause directe des soulèvements dans les
campagnes résulte de l'équivoque sur la portée du
décret rendu par l'Assemblée constituante, dans le
bel enthousiasme de la nuit du 4 août, et sanctionné
seulement le 5 octobre par le Roi.
L'article l*' de ce décret commençait par déclarer
— 471 —
le régime féodal entièrement aboli. Il faisait ensuite
une distinction assez peu précise entre les droits féo-
daux tenant à la main-morte réelle ou person^
nelle, et à la servitude personnelle^ lesquels étaient
abolis sans indemnité, et les autres, c'est-à-dire les
rentes perpétuelles foncières, champarts^ etc., décla-
rés rachetables. Il y avait en effet un grand nombre
de ces rentes constituées par les conventions les plus
libres et les plus favorables au développement de la
petite propriété, et à des dates, pour quelques-unes^
très récentes. Mais, pour préciser la distinction, il a
fallu un autre décret de juin 1790; et puis, les
événements ayant marché, la Convention a sup-
primé cette distinction d'une manière aussi radi-
cale qu'injuste. Elle n'entrait pas dans l'esprit des
paysans. Ceux-ci, oubliant que les constitutions de
rentes en censives, comme on disait alors, avaient
été pour eux un moyen, le principal peut-être, d'ac-
céder à la propriété, ne voyaient qu'une chose, c'est
que le moment d'affranchir cette propriété de toute
redevance était venu, et, suivant une autre expres-
sion de Faye-Lachèze, a qu'ils avaient gagné leur
procès contre les seigneurs ».
D'où violences contre les seigneurs qui essayaient
encore de percevoir des redevances féodales, même
rentrant dans la catégorie des droits rachetables, et
contre les voisins qui consentaient à les payer. L'agi-
tation en ce sens commence à se manifester en Bas-
Limousin dès le mois de septembre, à Pompadour et
à Saint-Julien-Maumont. En novembre, M. deLaporte
de Lissac, ancien officier supérieur du génie, est
menacé dans son château, et sa femme demande pro-
— 472 —
tection à la nouvelle municipalité de Brive. Celle-ci
lui envoie des commissaires qui, ne se trouvant pas
suffisamment bien reçus par les châtelains, s'en vont
et ne reviennent plus. Les paysans, que la maré-
chaussée, seule force militaire existant alors dans la
contrée, est tout à fait impuissante à contenir, dres-
sent une potence à la porte du château le 6 décembre,
et en attaquent les issues. Le vieux châtelain est
maltraité et meurt de saisissement. C'est le prélude
des scènes sanglantes qui vont se produire le mois
suivant, notamment au château de Rouffîgnac, chez
M. de Lamaze, et dans le bourg même d'Allassac;
au Glandier, chez les Chartreux ; à Favars, près de
Tulle, chez les Dubois de Saint-Hilaire. Ces événe-
ments ont été racontés et par M. de Seilhac dans son
ouvrage : Scènes et portraits de la Révolution en
Bas Limousin j et par M. Victor Forot, dans une bro-
chure plus récente : V Année de la Peur à Tulle,
Très favorable à la Révolution, cette dernière ne mo-
difie pourtant pas les données générales sur les faits
qu'elle raconte avec plus de détail.
Il y a deux particularités assez curieuses dans la
Jacquerie limousine. Tout en cherchant, comme par-
tout, à détruire les terriers ou autres titres de droits
féodaux, nos paysans se sont en outre attaqués spé-
cialement à deux choses. D'abord les bancs honori-
fiques dans les églises, ce qui prouve à quel point en
ce temps-là l'église est encore le centre de la vie
sociale. Les bancs pour les seigneurs et pour" leurs
officiers y sont le symbole des inégalités de castes.
Aussi, dès qu'ils apprennent qu'il y a des décrets res-
treignant les prérogatives des seigneurs, les paysans
— 473 -
cherchent à enlever ces bancs et à les brûler sur les
places. C'est ainsi qu'ont commencé les émeutes
d'Allassac.
Puis les étangs. Nous savons par des incidents
récents, dans notre pays de Limousin, quelles con-
voitises et quelles discordes soulève encore cette forme
de propriété qui n'a plus rien de féodal. En 1789^ elle
se rattache aux droits qui étaient réservés aux sei-
gneurs sur les petits cours d'eau. Les émeutes les
plus sanglantes de 1789-1790 en Bas-Limousin, celles
de Favars, ont commencé par des tentatives pour
ouvrir l'étang du seigneur, afin d'en prendre le pois-
son. Le fait s'est plusieurs fois renouvelé par la suite.
Taine a fait un récit coloré, dans le second volume
de son grand ouvrage (1), de l'assaut donné à l'étang
de Sédières, le 17 avril 1791. « Vers la fin de sep-
tembre 1791, dans tout le département (de la Corrèze),
écrit-il, toutes les chaussées sont rompues; à la place
des étangs il reste des marais infects ; les moulins ne
tournent plus; l'arrosage manque aux prairies. Mais
les démolisseurs emportent des pannerées de pois-
sons, et le sol de l'étang rentre dans leurs commu-
naux. » Ces souvenirs peuvent être utilement rappelés
aujourd'hui à l'Administration des Eaux et Forêts, se
faisant inconsciemment l'auxiliaire de passions sem-
blables.
Contre la Jacquerie que nous venons de caracté-
riser, les administrations plus ou moins régulières de
deux •des chefs-lieux de districts créés dans le nou-
veau département de la Corrèze, Tulle et Dzerche,
(1) La Révolution, 1. 1, livre III. LaConslUution appliquée, chap. II.
— 474 -
ont manifesté au début beaucoup d'énergie ; elles ont
provoqué et secondé les poursuites du tribunal pré-
vôtal composé du présidial de Tulle, sous la prési-
dence du grand-prévôt de la maréchaussée, M. de
Gillibert de Merlhac, contre les atteintes aux per-
sonnes et aux propriétés. A Brive la municipalité et
ses agents furent moins décidés. La troupe de garde
nationale briviste envoyée à Allassac pour secourir
M. de Lamaze, et qui s'y rencontra avec vingt hom-
mes de la garde nationale d'Uzerche, se contenta de
protéger le départ du châtelain, de sa famille et de
ses amis, et se retira ensuite, laissant le champ libre
aux insurgés qui envahirent et pillèrent le château
sous les yeux des vingt gardes nationaux d'Dzerche,
impuissants. Brive était alors dominée par quelques
jeunes ambiteux comme les frères Lachèze, leur cou-
sin Serre, le futur procureur de la commune Chignac
des Ailleux, ou des personnages pires comme Després,
dont nous avons déjà parlé, et le tambour de la garde
nationale Durieux. Ce dernier^ ancien soldat, auber-
giste et maître de billard, après avoir successivement
organisé Tinsurrection à Lissac, à Allassac, ailleurs
encore, eut la malechance de se faire arrêter à Tulle,
au lendemain des événements de Favars. La munici-
palité de Brive fît réclamer sa mise en liberté par
deux délégués. Tulle la refusa. Ce fut, depuis février
1790, le point de départ d'un antagonisme assez pro-
noncé entre les deux municipalités ou les personnages
parlant en leur nom.
En janvier et février avaient eu lieu les élections
pour la constitution de municipalités régulières, con-
formément à la loi votée par l'Assemblée constituante.
— 475 -
Au cours des opérations électorales, Faye-Lachèze, à
qui ses adversaires reprochèrent ensuite de n'être
même pas citoyen actif (1), trouva moyen de se faire
désigner pour une mission délicate, par une assem-
blée générale d'habitants, dont la régularité fut d'ail-
leurs contestée dans des protestations couvertes de
nombreuses signatures. Il s'agissait de se rendre, avec
son cousin Serre, auprès de l'Assemblée constituante
pour obtenir d'elle la suspension des poursuites con-
tre les auteurs des derniers troubles en Bas-Limousin.
C'est ainsi qu^il arriva à Paris à la fin de février,
entra en rapports, probablement par l'entremise de
Cabanis, avec Condorcet et ses amis, et parvint à
faire appuyer par la Commune de Paris la prétendue
réclamation de Brive auprès de l'Assemblée nationale.
L'abbé Mulat, à la tête d'une députation de la muni-
cipalité parisienne, vint le 6 mars présenter et sou-
tenir la pétition des Brivistes, à la barre de l'Assemblée
nationale (2). Faye-Lachèze avait précédemment, le
2 mars, adressé au journal Les Annales patriotiques
et littéraires^ une lettre dans laquelle il rejetait
entièrement sur les aristocrates la responsabilité des
troubles du Bas-Limousin. Cette lettre, signée de lui
et de Serre, est insérée au supplément du numéro 55
de ce journal (6 mars 1790). Nous en extrayons les
passages caractéristiques ci-après :
a Ne pouvant dans un court espace faire le récit
« des faits, nous nous bornerons à attester au public
(1) C*e8t-à-dire payant l'impôt égal au prix de trois journées de tra-
vail au moins.
(2) Cette pétition fut appuyée par M. Malès, député de Brive, avec
le concours de M. Charles de Lameth.
- 476 -
a que les paysans de notre province sont en général
ce d'un bon naturel, que, dans tous les temps, ils ont
a été cruellement vexés ; que, malgré les calomnies
a qu'on a débitées contre eux^ ils n'ont encore tiré
« aucune vengeance de ces vexations ; que, dans les
a paroisses où les seigneurs ont été tant soit peu
« modérés dans leurs prétentions, ils n'ont pas fait
« le moindre mouvement, si ce n'est pour planter
« des mais, et se réjouir en l'honneur de la liberté ;
€ que, dans les paroisses où le désordre a régné, ce
« désordre a été le fruit ou de l'imprudence ou de
« la cruauté des ci-devant privilégiés; qu'aucun de
« ces derniers n'a été tué ni blessé; qu'aucun châ-
« teau n'a été incendié ni pillé, proprement dit Csic)^
« et que, du côté des paysans, on compte plus de
a 30 hommes morts et Un plus grand nombre de
« blessés (Lachèze accuse ensuite les seigneurs
« d'avoir publié la loi martiale sans le concours et
a Taveu des municipalités, et d'avoir, pour la mettre
a à exécution, tiré des coups de fusil sur un peu-
a pie désarmé assemblé uniquement dans Vinten--
ce tion de brûler les bancs d'une église; d'avoir
« cherché à amuser le peuple par de vaines caresses,
« jusqu'au moment où ils ont été assez forts pour
« l'attaquer avec plus de sûreté.....) Mais, poursuit-il,
« de tous les désastres qui affligent notre malheu-
cc reuse province, le plus cruel de tous, aux yeux des
« bons citoyens, est de voir que le triomphe de
a l'aristocratie est consacré de la manière la plus
ce effrayante par le tribunal prévôtal de la ville de
« Tulle. De 60 infortunés qui ont été traînés dans
ce ses prisons, 2 ont subi déjà une mort ignomi-
- 477 -
« nieuse; d'autres ont été condamnés par contumace,
a 2 fouettés et marqués, et nous apprenons que le
a tribunal se prépare à renouveler ces scènes d'hor-
(( reur une fois chaque semaine, jusqu\à ce qu'il n'y
« ait plus de victimes. On fait courir le bruit que
a TAssemblée a envoyé des ordres secrets pour pres-
a ser les jugements. Qm sont cependant ces infor-
cc tu nés qui sont immolés ainsi aux ressentiments
« des riches? Peut-être que ce sont des vagabonds,
« de mauvais sujets; non, Messieurs, ce sont pour la
« plupart des pères de famille, petits propriétaires
« aimés et estimés dans leur canton. Un surtout de
a ceux qui sont dans Tattente de leur sort (M. Du-
« rieux) est notre camarade, nous nous faisons gloire
« de l'avouer, et membre de la garde nationale de
a Brive, qui le reconnaît comme un des plus zélés et
a des plus braves citoyens qu'elle renferme dans son
« sein »
Les faits étaient ainsi dénaturés d'une manière trop
impudente, et la municipalité de Brive, administra-
tion assez timide dans son ensemble, ayant alors pour
chef^ comme maire, un ancien procureur de Brive
et juge seigneurial de Malemort, M. Saiviat(l), ne
crut pas pouvoir se dispenser de protester et de désa-
vouer ses prétendus délégués. « J'ai lu dans un jour-
ce nal connu sous le nom de Journal de Mercier ^
a disait Salviat dans sa réponse, une lettre signée de
« MM. Paye et Serre, députés extraordinaires de la
« commune de Brive. Je pense que, si ces. messieurs
(1) M. Salviat fut emprisonné pendan- la Terreur. U est mort con-
seiller à la Cour de Limoges, laissant une réputation très honorable.
T. XXX. 4-6
- 478 -
a l'avaient signée comme particuliers, nous n'aurions
a rien à dire, mais que, signant en qualité de dé-
« putés extraordinaires de la commune de Brive, ils
a sont tenus d'être nos organes^ de ne parler qu'à
« notre instigation et en notre nom, ou au moins
« d'après nos instructions Je suis bien éloigné de
a croire que la cruauté des oi-devant privilégiés soit
a la cause du désordre qui a régné dans nos pro-
« vinces, puisque, d'après les procès-verbaux dépo-
« ses en notre greffe, ce sont les non-privilégiés qui
ce ont commencé par s'attrouper pour enlever les
ce bancs des églises et les brûler, et pour dévaster
a les étangs. Pouvons-nous permettre de hasarder
« le moindre récit de ce qui se passa dans l'autre en-
« droit dont parle cette lettre (Favars), sans connaître
« la vérité des faits, qui ne peut réellement être éta-
« blie que par la procédure instruite à Tulle? Le
a pouvons-nous même sans inculper la milice natio-
a nale de cette ville, et sans manquer de respect aux
« représentants de la nation qui ont approuvé la
a manière dont elle s'est comportée dans cette occa-
« sion? Pouvons-nous aussi nous permettre d'aecu-
« ser messieurs de la juridiction prévôtale de Tulle,
<t contraints par leur devoir à faire des exemples né-
« cessaires, sans lesquels la tranquillité publique ne
a se serait peut-être pas encore rétablie? Nous ne
a pouvons pas nous dissimuler que notre province
a était menacée des plus grands dangers par des bri-
cr gands qui avaient commis bien des désordres, et
a que nous devons notre salut en partie à la juridic-
« tion de ce tribunal. »
La municipalité de Tulle nomma à son tour une
— 479 -
députation formée de MM. Melon de Pradou et de
Saint-Priest pour demander à l'Assemblée d'accorder
à la commune de Tulle a une réparation aussi pu-
blique et éclatante que Tinjure et la détractation », et
cinquante-cinq communes du département unirent
leurs protestations aux siennes. Dans cette bourgeoisie
du Bas-Limousin, un moment enivrée par le rêve
d'une régénération sociale, accomplie avec une con-
corde universelle, il y avait bien des éléments de
résistance courageuse et sage à Tanarchie. Mais il leur
manqua Tappui d'en haut sur lequel la monarchie de
l'ancien régime avait habitué plusieurs générations à
compter. Dès le 6 mars, comme suite à la démarche
faite auprès d'elle par les représentants de la com-
mune de Paris, l'Assemblée nationale avait décrété
que a son président se retirerait s ^u-- le- champ par
devers le Roi, pour le supplier de suspendre toutes les
procédures dirigées par les prévôts du royaume ».
Malgré toutes les bonnes raisons exposées dans le
mémoire qui lui fut remis ensuite par- les députés de
la commune de Tulle (annexe au procès-verbal de la
séance du 2 juin 1790)^ mémoire mal réfuté dans une
réponse signée cette fois par l'autre frère Lachèze, et
par le procureur de la commune de Brive, Chignac
des Ailleux, les prévenus non encore jugés pour les
affaires d'Allassac^ Favars et Tulle furent renvoyés
devant le tribunal du district de Bordeaux. Durieux,
notamment, fut défendu devant ce tribunal par Ver-
gniaud, le 7 février 1791, et tous les prévenus furent
acquittés.
— 480 —
III
En définitive Faye-Lachèze avait eu gain de cause.
II n'était pourtant pas revenu habiter Brive, et il
avait même laissé son frère aîné et son ami le pro-
cureur de la commune Chignac des Ailleux prendre
la suite de la mission qu'il avait engagée à Paris.
Comme nous Tavons dit, Cabanis avait fait de lui le
médecin en second du grand orateur révolutionnaire,
frère et beau-frère de ses anciens seigneurs. Dans le
testament de Mirabeau, en date du l*"" avril 1791, veille
de sa mort, se trouve une disposition ainsi conçue :
« Je donne et lègue au sieur Lachèze une bague de
a cinquante louis, ou pareille somme en deniers à
a son choix ; je recommande à mon ami La Marck de
« faire placer cet excellent sujet. » Le legs dut être
acquitté par la piété amicale de M. de La Marck, la
succession de Mirabeau n'ayant pu, comme on sait,
suffire à payer ses créanciers. La sœur qui n'avait
jamais cessé d'être unie d'affection à Mirabeau, M"* du
Saillant, rendit témoignage du reste au zèle de son
jeune médecin. Nous trouvons le passage suivant dans
une lettre écrite le 17 avril 1791 par M™' du Saillant
à Lachèze aîné, devenu procureur-syndic du district
de Brive, duquel elle sollicitait l'appui pour faire re-
connaître le droit à indemnité qu'invoquait son mari,
à raison de la perte de la jouissance traditionnelle
appartenant aux seigneurs de Comborn sur les terres
épiscopales d'Allassac et Voutezac, pendant les va-
cances de Tévêché de Limoges : « Je ne vous dis rien
« du malheur affreux que je viens d'éprouver^ et qui
« restera à jamais gravé dans mon cœur. Vous le
- 481 —
a partagerés, mon cher La Chèze, et sçavés mieux
« qu'un autre retendue d'une tplle perte. Je ne m'en
^ consolerai de ma vie, j'ai perdu un frère et plus
« encore un ami, il m'est doux de voir les témoi-
« gnages publics donnés à sa mémoire^ mais ils ne
« m'en font que mieuK sentir ce que je perds. Votre
<( frère lui a donné des soins et des preuves d alta'^he-
« ment que je ne croirai jamais assez pouvoir recon-
« naître, et que je n'oublierai jamais. »
Mais ce qui, mieux encore que le souvenir des soins
donnés à Mirabeau, assura à « cet excellent sujet »
les places auxquelles il n'avait pas cessé d'aspirer
depuis juillet 1789, ce fut son habileté à profiter des
circonstances : prépondérance acquise en 1791 parles
divers clubs d'omis de la Constitution formés dans
la Corrèze; mort tragique et mystérieuse de Chignac
des Ailleux en novembre 1790(1), épisode qui donna
un nouvel aliment aux passions révolutionnaires sem-
blant près de s'éteindre à Brive. Il fut élu à l'Assem-
blée législative avec Germiniac, Brival, Borie, Chas-
saignac, Marbot, administrateurs du département, et
Bardon, juge du district de Brive. Et deux mois après
il contractait son étrange mariage avec la jeune pro'-
tégée de M*"* de Condorcet, Rose Dupré de Geneste.
M. de Nussac nous parle des discours et des travaux
(I) Rentrant de Paris à Brive, en novembre 1790, fier du succès
obtenu par la mission qu'il avait remplie avec Lachëze, Chignac
des Ailleux disparut soudain. Pendant dix jours on le chercha sans
pouvoir arriver à savoir ce qu'il était devenu. On finit par découvrir
son corps dans la retenue d'un moulin, à un kilomètre de la ville.
Sans pouvoir établir qu'il y eût crime, plutôt qu'accident ou suicide,
on accusa les aristocrates de cette mort. Survenu à la veille du renou-
vellement de la municipalité, cet événement exerça une influence
fâcheuse sur les élections, alors et plus tard.
— 482 -
de Faye-Lachèze «à IWssemblée législative : ils ont
laissé peu de traces. En revanche son court passage
à cette Assemblée lui a valu les divers postes dont
nous avons parlé au début de cet article. Il a reçu le
dernier soupir du général Antoine Marbot pendant le
siège de Gènes, et rapporté d*Italie la traduction des
Animaux parlants, de Cesti. C'est tout ce qu'il est
possible d'ajouter à sa biographie; la date même de
sa mori reste incertaine.
(^H. DE LOMÉMR et JuLlEN LaLANDE.
U BOIARDE DE fiRIYE-LA-HAHUlE
Depuis bientôt trois années, je recherche les docu-
ments nécessaires pour reconstituer Thistoire des
ancieanes fortifications de Brive. Après un pénible
labeur, je suis parvenu à relier ensenibie les diverses
phases de Texistence des murs, fossés, bâtisses, etc.,
aujourd'hui disparus. — Je suis à la veille de publier
mon travail, qui est actuellement sous presse.
Au cours de mes recherches, j'ai rencontré un docu-
ment, daté de 1344, qui prouve que la ville de Brive
possédait alors six canons, huit arbalètes de différen-
tes formes, trois massues, vingt-quatre fléaux, deux
cent quarante traits empennés et mille huit cent
quarante-quatre petits traits.
Des massues, arbalètes, fléaux et autres engins, je
n'en parlerai pas ; mais il n'en sera pas de même des
canons, car ces objets là étaient de véritables nouveau-
tés, à cette époque, et méritent aujourd'hui une des-
cription spéciale.
Si j'en crois les Tablettes chroiiologiques uni-
verselles de Girault, « l'invention définitive de la
c( poudre à canon date de 1325 », bien que chacun
sache que cette poudre était connue depuis longtemps
en Chine. Toujours d'après le même auteur, « en 1346
« on commence à faire usage des canons, qui ne fu-
- 484 -
(t rent dans Torigine que des feuilles de cuivre ou de
« fer battu roulées les unes sur les autres et liées
a avec des cercles de fer. Les Anglais s'en servirent
« pour la preniière fois à la bataille de Crécy. »
Or, cette fameuse bataille se livra le 26 août 1346,
et les documents que possèdent les archives de la
ville de Brive démontrent que la cité gaillarde se ser-
vait de canons déjà en 1344 (1). Je lis en effet ce qui
suit se rapportant à cette même année 1344 :
Item que pagen a Pierre Maie per lo polvera
de cano et per un a torcha y i l. 1 s.
Plus loin, le même document porte :
Item que pagen a Pierre Maluhier per un ser-
vent de doma et per la polvera del cano, i L i s.
3 d. (2).
Il est donc certain que deux ans avant que les An-
glais se soient servis de canons pour battre, à Crécy,
les orgueilleux chevaliers de Philippe VI, la ville de
Brive employait les bouches à feu, alors plus bruyantes
que terribles. Mais voici qui est plus caractéristique :
non seulement Brive possédait des canons avant la
bataille de Crécy, mais encore il est certain que les
consuls de cette ville faisaient fabriquer ces engins
dans leur ville même. Le registre consulaire en donne
une preuve irréfutable :
(1) Archives de la ville de Brive, série F.F. 6. Document cilé par le
Bulletin archéologique d'avril juin 1908.
(2) Traduction du patois : Item que nous avons payé à Pierre Maie
pour la poudre à canon et pour une torche, 1 livre 1 sol.
Item que nous avons payé à Pierre Maluhier pour un servant. . . .
el pour la poudre à canon, 1 livre 1 sol 3 deniers.
— 485 —
Item (en 1344) despendet lo fauve de St Ferriole
can vent far Los canos 3 «., et 2 s. 4d. per un gach,
tout 5 s. 4d.
Item que pagen a il de Champanhac per la
feradinas del sanhs et per un canOy lo divenre
davan SI Michial (1).
Longtemps je nie suis demandé quelle pouvait
bien être la forme de ces canons, de même que les
matières employées et encore la manière de les fabri-
quer.
Larousse dit que ces engins étaient de « simples
tubes en fer forgé, de dimension médiocre, de petit
calibre et dont la volée était soutenue sur toute sa
longueur par des frettes de fer. On les nommaient des
veuglaires (glaive aveugle). Dans ces veuglaires, ou
dans ces bombardes du type primitif, la culasse ou-
verte laissait pénétrer une boite à charge qui s'assu-
jettissait par un étrier à queue. Comme elles n'avaient
pas de tourillons, ces pièces étaient fixées sur un
plateau creusé d'une longue rainure, où elles étaient
maintenues par des arceaux de fer. »
Je ne citerai pas les autres auteurs qui ont décrit,
plus ou moins exactement, les premières bouches à
feu ; ils sont trop nombreux et varient aussi dans
leurs descriptions, quelquefois fantaisistes. Je préfère
(1) Le document n'indique pas la somme qui fut payée pour ce tra-
vail. 11 est vrai que ce document n'étant qu'une copie, le scribe a pu
oublier de mentionner cette somme.
Traduction du patois : Item, dépensé par le forgeron de Sainte-
Féréole lorsqu'il vint faire les canons, 3 sols ; et 2 sols 4 deniers pour
un guet, en tout 5 sols 4 deniers.
Item que nous avons payé à celui de Champagnac pour les ferre-
ments de laffùt et pour un canon, le vendredi avant la Saint-Michel....
— 486 —
décrire ici celle qui est conservée au Musée de
Brive ; elle a servi, au xiv' siècle, à la défense de la
ville.
Tout d'abord, voici la photographie de la pièce et
aussi la notice explicative, mise sur Taffùt de la boni-
barde, par M. Ernest Rupin, le savant conservateur
du Musée de Brive :
BOMBAUDE DU XIV SIECl.E
AYANT SERVI A LA DÉFENSE HE LA VILLE OE IIRIVE
Lacabane, dans la Bibliothèque de V École des
Chartes, 2' série, T. 1*% p. 46, s'exprime ainsi :
(( Après le désastre de Crécy, se fit sentir le besoin
de perfectionner le moyen de guerre auquel les An-
glais avaient dû la victoire. On inventa un canon
appelé CoNNAiLLE. Les villes libres se pourvurent de
- 487 —
poudre et de bouches à feu. Dès 1348, Brive-la-Gail-
larde, en Limousin, possédait cinq connailles ou
bombardes sur ses murs. »
On lit aussi dans Louis Figuier, Vai'tillerie an-
cienne et moderne, p. 319 :
« Chaque ville voulut avoir à sa solde son maître
d'artillerie et ses artilleurs. Dès 1348, Brive-la-Gail-
larde était défendue par cinq canons, d
Bien qu'en ait dit Térudit Lacabane et après lui
le non moins savant Louis Figuier, Brive-la-Gaillarde
avait son maître d'artillerie, ses artilleurs et ses ca-
nons avant 1348. Les documents municipaux de cette
ville le prouvent.
La bombarde qui est au Musée de Brive dato-t-elle
exactement de 1344?.... Ce serait bien osé de l'affir-
mer, il est même probable que non... Il faudrait pour
cela que ce fut la première, ou l'une des premières,
dont la ville se fut servie. 11 est très probable, cepen-
dant, que cette pièce a été fabriquée au milieu du
xiv" siècle. En effel, ce canon, de forme toute spé-
ciale, répond bien aux descriptions qui sont faites par
divers auteurs spécialistes en ce qui concerne les pre-
mières bombardes; mais il n'est pas cependant
comme la veuglaire^ décrite par Larousse, dont « la
culasse ouverte- laissait pénétrer une boite à charge
qui s'assujettissait par un étrier à queue. »
Voir ci-contre le dessin de la bombarde briviste :
Sa culasse est fixe et forme une véritable boite à
charge pour la poudre. Elle a 185 millimètres de lon-
gueur et un diamètre de 60 millimètres en queue ; à
lautre extrémité, ce diamètre est de 68 millimètres.
L'âme de cette culasse a un diamètre de 45 milli-
mètres.
Dans son entier, la bombarde est faite avec des la-
mes de fer forgé, superposées les unes sur les autres
et solidement soudées à chaud ; sa longueur totale
est de 65 centimètres. La bouche a un diamètre inté-
rieur de 90 millimètres. Depuis la bouche jusqu'à la
culasse, le corps de ce canon est renforcé par des ner-
J^ljtn elùro/il Je U BomOArae dui a servi i (a. aé^nse Je U ifule Je ffrn/
^ ^ AU y/ ^^ sied f
^^^^M^miiMm^v^^^^
vures variant de 8 millimètres à 12 millimètres de
largeur, avec un relief de 2 millimètres à 5 millimè-
tres. Ces nervures sont au nombre de cinq, non com-
pris celle formant le pavillon de la bouche.
L'âme est conique et va en s'élargissant depuis la
sortie de la culasse jusqu'à la gueule.
— 489 —
Celte bombarde a été trouvée, dit-on, dans une
cave de Brive.
C'est M. de Lépinay, propriétaire actuel de cette
maison, qui a fait don de la bombarde au Musée de
la ville.
M. E. Massénat reconstitua Taffût de cette pièce (1),
qui se compose d'un madrier de 99 centimètres de
longueur et 70 millimètres d'épaisseur. Sa largeur
en tête est de 24 centimètres et en queue de 155 mil-
limètres. La queue est garnie d'une frette en fer et de
deux pitons d'amarage. Une sorte de crémaillère en
bois, percée de quatre trous^ est placée à l'arrière
afin d'aider au pointage rudimentaire de la pièce.
Le tout est supporlé par deux roues en bois fer-
rées, de 25 centimètres de diamètre et 8 centimètres
d'épaisseur, montées sur un petit essieu en fer carré
de 22 millimètres de côté.
Le canon est fixé sur Taffût par des frettes en fer
plat de 28 millimètres de largeur.
Le travail de soudage des lames formant le corps
de la b3mbarde^ de même que le soudage des ner-
vures, est fait d'une façon remarquable. La bouche
de cet engin primitif, qui est déchirée par la force de
la poudre et des projectiles, laisse voir combien
étaient solidement amalgamées toutes ces lames de
fer. Certes nos excellents canonniers du siècle dernier,
à la manufacture d'armes de Tulle, ne soudaient pas
(1) D'après la gravure publiée par Victor Gay, Glossaire archéolo-
gique, I. p. 171, qui reproduit un dessin de bombarde extrait de Pail-
las Sandinus (vers 1460). Bibliotheca Richelieu, mss. latin 7.239,
folio 98, verso.
- 490 ^
mieux leurs canons de fusils que les faoures de
Sainte-Féréole et de Champagnac au xiv' siècle.
Il m'a paru intéressant, pour mes collègues et lec-
teurs du Bulletin historique de la Corrèze^ de
détacher ces quelques lignes de mon travail sur Les
Guerres et les Fortifications de Brive-la-Gail-
larde.
Victor Forot.
MONOGRAPHIE DE SÉGUR
Au fond d'un entonnoir formé par les pentes
abruptes (lui dévalent des derniers plateaux du Haut-
Limousin est bâtie l'antique cité de Ségur(l).
Nous n'en ferons pas la description, car nous vou-
lons nous attacher surtout au côté historique et
économique.
Et la première chose que nous noterons, parce que
nous sommes curé de Saint-Eloi, c'est que Ségur
servit à désigner notre petite paroisse qui, s'appelant
d'abord <r Las Fargeas y>, prit ensuite le nom du bien-
heureux évêque de Noyon.
Mais, le diocèse de Tulle n'existant pas encore, il
y avait déjà, dans le diocèse de Limoges, dont nous
faisions partie, un autre Saint-Eloi, situé aujour-
d'hui dans la Creuse.
Pour éviter la confusion, l'on désigna donc notre
paroisse sous le nom de : Saint-Eloi-de-Ségur.
On dit, dans certains écrits :
Saint-Eloi « prope Securium », c'est-à-dire^ près
Ségur.
On peut traduire : de Ségur, môme en y mettant
une idée d'appartenance, car Saint-Eloi fut de la
châtellenie (2) dudit Ségur, dont furent vicomtes les
(1) M. Lavialle, Lemouzi d'octobre 1901.
(2) Châtellenie = seigneurie.
On lit dans Pantagruel : « Ha, ha! tu est gentil compag^on... Je te
donne la châtellenie de Salmigondin. »
¥
»
— 492 -
Des Cars(l) et, ensuite, les Hautefort comme nous
l'avons noté ailleurs.
.. .Le mot de châtellenie éveille l'idée de château,
Ségur est, en effet, dominé par les ruines impo-
santes d'une ancienne construction féodale, sur les
quelles se trouve aujourd'hui une maison bourgeoise
(appartenant à M'"' de Lavareille).
Mais^ à en juger par le nombre des touristes qui
viennent chaque année le visiter, a le château » est
assez connu pour que nous n'ayons pas à rééditer son
histoire (2).
Nous nous contenterons de rappeler sur Ségur
quelques faits isolés.
En 1290, on cite un Pierre de Saint-Julien, da-
moiseau, qui consent une vente à Gardin, chevalier
dudit Ségur.
En 1373, les gentilshommes limousins expulsent
les Anglais de la terre de Ségur (communication de
M. Dutheillet de Lamothe).
En 1454, Guillaume de Bretagne, comte de Péri-
gord et vicomte de Limoges, fait son testament dans
le château. Nous avons noté au cours des monogra-
phies respectives de Saint- Eloi et de Saint- Julien,
(1) Dicton populaire :
« Pompadour, pompe!
Des Cars (a), richesse!
Bonneval. noblesse !
Châteauneuf, pas si neuf que ça! »
(a) Le comte François des Cars, baron de Juillac, Ségur, Aixe, fort
attaché aux vanités et au fasie de la cour, aimait la bonne chère et la
fortune. — 1576.
Les Des Cars devinrent seigneurs de Ségur par achat à Henri IV.
(Note de M. Lavialle, instituteur à Sanas.)
(2) La chapelle de ce château, à cause de l'importance de ses restes,
est monument historique.
à
493 —
que cet acte contenait certaines libéralités aux églises
de ces deux paroisses.
Maison Henri IV, a Ségur.
Voici maintenant un fragment qui intéressera, peut-
être.
a ...Le 23 octobre 1520, a été présent noble homme
« Reynaud du Mas, seigneur du Repaire du Mas(l),
(1) Jacques du Mas, écuyer, fit hommage de ce repaire en 1541, au
roi de Navarre, alors vicomte de Limoges et seigneur de Ségur.
En reconnaissance, le roi de Navarre lui céda le droit de justice sur
Saint-£ioi tout entier et partie de Saint-Julien.
T. XXX
'i - 7
— 494 —
ce chaptelenie de Ségur, lequel reconnaît devoir des
« rantes sur certains terrains... au conte d'Autefort,
« rantes constituées par Eymeric Pinet, seigneur du
« repaire du Mas, au profit de Messire Gauthier de
« Pey russe des Gars... gouverneur de la vicomte de
a Limoges, comme tuteur de damoyselle Françoise
« de Bretaigne...
« Signé : Teyssière. »
...Une pièce que nous avons partiellement tran-
scrite, dans notre travail sur Saint- Eloi, nous apprend
que Ségur, qui y est qualifié du titre pompeux de
(( ville », eut une « cour ordinaire de la vicomte ».
La même pièce nous montre que cette cour était
composée d^officiers, de procureurs, d^avocats, de
sergents (1).
Au point de vue judiciaire, précisément, Ségur est
célèbre par sa susdite « cour des appeaux », fort im-
portante à répoque d'Henri IV.
Un ouvrage parfaitement docuiùenté, de Téminent
M. René Fage, traite cette question. Il est intitulé :
« Une ancienne justice : les appeaux de Ségur. »
Aux environs de 1748, Ségur fut dépossédée de ses
Ces du Mas se faisaient inhumer à Saint-Éloi, devant le grand-autel
de l'église.
La tradition de se faire enterrer dans cette paroisse s'est toujours
conservée chez les châtelains de Ségur^ qui ont, au cimetière de
Saint-Éloi, leur sépulture de famille.
(( La Jarrousse » fut aussi un repaire noble. Idem pour o la Groi-
sille », tout près de Saint-Julien.
La Croisille dépendit longtemps du temple maltais de MagnaC
(1) Sergent = officier de justice remplissant les fonctions de nos huis-
siers actuels. D'autres fonctionnaires, qui percevaient les impôts, por-
taient ailleurs le même titre :
0 Gomme il fut à la barrière des sergents... »
Cardinal de Hetz (Mémoires).
— 495 -
« appeaux », qui avaient duré quatre cents ans, et qui
furent supprimés par notre compatriote limousin, le
chancelier d'Aguesseau.
En 1749, et comme dédommagement, on constitua
Ségur en paroisse, sous le patronage de saint Léger (1).
Saint Léger avait, du reste, une chapelle au lieu du
Baillargeau^ et c'est sur l'emplacement de cette cha-
pelle que Ton construisit Téglise paroissiale.
Cette église fut^ primitivement, desservie par le
clergé de Saint-Julien (2).
Mais, pour se constituer en paroisse, Ségur prenait
quelques territoires environnants, surtout sur Saint-
Eloi.
C'est ainsi que ledit Saint-Eloi possédait sur les
(1) Saint Léger, archidiacre de Poitiers, ensuite abbé du monastère
de Saint- Maxence, fut évêque d'Âutun pendant dix-neuf ans, et, spé-
cialement^ au temps de Childéric II, dont il éiaii le ministre. Ëbroîn,
maire du palais et adversaire du saint, lui fit crever les yeux et or-
donna même de le décapiter. Meymac garde la tète de saint Léger,
ainsi que ses deux mains
(2) Ensuite, Ségur eut, non-seulement son église, mais encore son
curé, n y eut même des sommes imposées t pour les honoraires d'un
vicaire auxiliaire et d'un régent ». Cette imposition commença en 1770
et, à cause du régent, fut étendu aux paroisses a de Sainct-Julien,
Beyssenat et Sainct-Éloy ».
Peu après, ces quatre paroisses s'imposent de môme jusqu'à con-
currence de 100 livres pour une régente a qui fasse la leçon aux (llles •
et devra, tout comme le régent, demeurer à Ségur 0 où les autres
paroisses aboutissent ».
Puis il se passa « nombre d'années » qu'il n'y eut ni régent ni ré-
gente. En vertu de quoi les habitants de Saint-Éloi " négligèrent de
se cotiser ». Et si les autres paroisses tributaires de Ségur firent
preuve de générosité, Saint-Éloi fit montre de bon sens.
Mais la chose surprit douloureusement les « supplians » signataires
d'un certain papier qui nous a été communiqué par M"' Octavie Renau-
die, lesquels supplient donc « Mgr l'Intendant de la Généralité de
Limoges » de faire cotiser leurs voisins de Saint-Éloi.
Mgr rintendant y réussit-il ?.. Je me permets d'en douter... Il aura,
sans doute, soufilé aux « supplians » de se procurer un régent et une
régente ; après quoi les voisins de Saint-Éloi se seront cotisés tout
seuls, sans obliger les Ségurins de l'époque à prolonger leurs
supplications...
— 496 —
bords du Haut-Vézère, un oratoire dédié à saint Lau-
rent.
Or, Ségur s'en emparait.
Sous la doniination de Ségur^ il est vrai, cet ora-
toire conserva, tout d'abord, sa destination religieuse.
Mais, en 1791, il fut désaffecté et transformé en
corps-de-garde.
C'est à cette époque troublée que disparut égale-
ment la chapelle de Saint-Médard, au faubourg de
TAumôniére.
Depuis la Révolution, Tancien oratoire de saint
Laurent, devenu corps-de-garde, était resté plus ou
moins abandonné. Mais, en 1819, il fut transformé
en maison d'habitation ; il est occupé aujourd'hui par
M"' Octavie Renaudie.
Comme curé de Saint-Eloi, nous avons eu la pieuse
curiosité de visiter ce lieu. On nous a prouvé que la
cheminée qu'on y a ménagée marque la place de
l'autel.
A gauche de cette cheminée, on nous a montré
une excavation où, selon une tradition incontestée,
on mettait les burettes nécessaires à la célébration de
la messe.
Une statue provenant de l'oratoire, aurait été re-
cueillie par un voisin, M. Dufour, boulanger.
C'est avec plaisir et émotion que nous avons écouté
tout cela (1).
A l'époque de la Révolution, le curé de Ségur était
M. Meynardie.
(1) De celte chapelle et de la dévotion qui s'y manifesta, le pont
— 497 —
En 1790, fut imposé au clergé de France le ser-
ment de la Conslitution civile; mais l'abbé Meynardie
le refusa courageusement et prit, en 1791, le chemin
de Texil.
Il fut imité par son confrère de Saint-Eloi, M. Tabbé
Fournier, et on croit que tous deux gagnèrent l'An-
gleterre (1).
Ce qu'il y a de certain, c'est qu'ils furent rem-
placés par des prêtres assermentés et, partant, schis-
matiques.
L'abbé Reix, curé de Villemaux, devint curé de
Ségur, tandis qu'on intronisait à Saint-Eloi un Ségu-
rin, M. Bardon de Brun.
Après la Révolution, les curés de Ségur furent, en
même temps, desservants de Saint-Eloi (2), et cela
dura jusqu'à la mort de M. l'abbé Roux, décédé à
Ségur en 1880.
A cette époque, Saint Eloi obtint un curé, et put
se passer momentanément des services des voisins.
Plus tard, Saint-Eloi étant venu à vaquer de nou-
voisin fournit encore un témoignage : on l'appelle, en effet, « le pont
Saint-Laurent ».
il) Beaucoup de prêtres français de cette époque passèrent en ce
pays. Qui sait si le réveil de foi catholique se manifestant actuelle-
ment outre- Manche n'est pas le résultat et la récompense de l'hospi-
talité que ces proscrits y trouvèrent?...
(2) Notre compatriote et ami, M. liOuis de Nussac, dans son ouvrage
sur Saint-ÉIoi (sa légende et son culte), relate que les habitants de
Ségur, jaloux de la cloche de Saint-Éloi, avaient suscité de vrais com-
bats pour la disputer (page 247}. Cela n'était pas d'une délicatesse
achevée. Aussi les Ségurins ont reconnu qu'il y avait mieux à faire;
et, en 1905, grâce à M. l'abbé Farges et à M. le comte'de Fleurolles,
on baptisait une cloche qui, sans être aussi puissante que celle de
Saint-Éloi, peut consoler la paroisse, et même l'honorer.
— 498 —
veau, un autre curé de Ségur accepta le binage, mais
pour le résigner bientôt.
Nous voulons parler de M. Tabbé Dallet, un des
pasteurs dont Ségur garde le meilleur souvenir, et
auquel nous ferions une large place dans cette notice,
si nous n'étions obligé de nous restreindre.
Le successeur de M. Dallet, qui était nommé doyen
de Juillac, fut M. l'abbé Vitrac, lequel resta peu
d'années.
Le successeur de M. Vitrac est M. Dominique
Farges^ qui a vu à Ségur la fin du régime concor-
dataire, et saura inaugurer le nouveau régime du
culte avec intelligence et dévouement.
11 y a seulement quelques années, les foires de
Ségur étaient encore célèbres et justement renom-
mées. Cette importance commerciale n'est malheu-
reusement plus qu'un souvenir. Et les foires actuelles
n'en méritent pas même le nom. On m'excusera de
le constater.
...Ségur est une « ville morte ». Et l'on y trouve^
plus que de raison, des bras inoccupés. De moins en
moins, cependant; pour le motif tout simple que le
chiffre de la population diminue. Les annuaires n'ac-
cusent que modérément cette dinainulion. Elle est
réelle^ cependant.
Pour mettre fin à l'oisiveté de pas mal de Ségu-
rins^ on devrait faire attention, il me semble, que
— 499 —
Ségur possède une rivière assez considérable (le Haut-
Vézère ou Auvézère). Je ne croirais pas impossible
d'y établir une usine^ une manufacture, un atelier
important. Les ouvriers seraient nombreux sur place ;
et leur apprentissage se ferait peu à peu.
Cela vivifierait Ségur et mettrait du bien-être dans
beaucoup de familles indigentes. Gela retiendrait,
surtout, dans leur pays intéressant et pittoresque,
tant de jeunes gens des deux sexes qui s'en vont
tenter la fortune^ ou, du moins, trouver une occu-
pation à Paris.
Mais aller à Paris, c'est abandonner la famille,
déserter le foyer, se séparer du pays natal. Et la
capitale qui est; je le veux bien^ la ville des rêves,
épuise cependant les corps et tue les âmes.
...Dans les premières années de notre pastorat à
Saint-Eloi, nous avions un Bulletin Paroissial qui
a disparu avec les besoins- qui l'avaient fait naître, et
dans un numéro duquel nous disions :
a ...Sans vous laisser éblouir par un mirage déce-
« vant et vous laisser tromper par de dangereuses
a apparences, restez sur ce terroir natal qui a su
« nourrir vos ancêtres, les rendre robustes et ver-
ce tueux et qui traitera aussi bien les générations
(t futures si elles ont confiance en lui... »
Mais cela, je le disais aux habitants de Saint-Eloi.
Et je n'aurais pu le dire aux émigrants de Ségur. Car
a il vaut mieux rire loin que pleurer près »,
assure le proverbe.
Cependant, qu'on trouve aux Ségurins, comme nous
le désirons, une occupation, une situation sur place^
et nous leur tiendrons le même langage.
- 500 —
Car : « Les quatre cinquièmes des provinciaux qui
viennent en la capitale^ nous écrivait un jour Pierre
l'Ermite, oublient les devoirs les plus essentiels du
chrétien et les pieuses traditions qu'ils apportent. »
Nous avons donc cru faire, jadis, œuvre sacerdotale
en écrivant des articles et donnant des conférences
qui pouvaient se résumer par ce conseil, qui est,
comme on le sait, le titre d'un ouvrage connu :
« Restez chez vous! »
Depuis, d'autres devoirs plus pressants ou plus par-
ticuliers nous ont empêché de continuer, mais nous
avons suscité des jeunes gens dévoués qui s'emploient
à cette œuvre et font beaucoup mieux que nous.
...Cependant, nous voilà loin de Ségur.
Revenons-y en constatant que le nombre des per-
sonnes qui désertent cette localité augmente chaque
jour, comme nous l'avons insinué plus haut.
Ces Ségurins vont à la grande ville, qui, selon notre
formule (ne craignons pas le mot) épuise les corps et
tue les âmes.
Il y a donc là une question de vitalité physique et
de santé morale.
La première regarde positivement les autorités civi-
les; la seconde ne leur est certainement pas indiffé-
rente.
Nous n'avons, évidemment, la prétention de dicter
son devoir à personne. Mais il nous semble que les
autorités qui président aux destinées de Ségur auraient
bien mérité de la commune si elles dirigeaient leur
activité dans le sens que nous leur indiquons hum-
blement; c'est-à-dire en cherchant à établir un cen-
tre industriel qui ressusciterait la localité.
— 501 —
Je sais bien quMl y aurait là une question subsi-
diaire de chemin de fer ou de tramway, mais cette
question-là doit être précisément englobée dans Tétude
que je propose. Elle est même tout à fait d'actualité.
En attendant, je souhaite que Ton fasse, de plus
en plus, connaître Ségur pour son pittoresque, et que,
de plus en plus, y viennent les touristes.
Ce sera de l'agrément pour le visiteur et du profit
matériel pour Thabitant.
C'est précisément pour le faire connaître, que la
Fédération des Ecoles limousines félibréennes se pro-
pose de tenir, en 1910, à Ségur, une assemblée gé-
nérale.
Nous avons appris la nouvelle de ce projet avec
grand plaisir et en verrons la réalisation avec plus
de plaisir encore.
P. J.-B. JOFFRE.
EN SOUVENIR D'UN NATURALISTE
Dans son étude sur la Société d'agriculture du Li-
mousin, créée par Tordonnance royale du 12 mai
1761 et qui se divisait en trois sections s'adminis-
trant et se gouvernant elles-mêmes, à Limoges, Brive
et Angoulème, TAngoumois avait été exceptionnelle-
ment réuni au Limousin, feu M. Taillebois, auteur
de ce travail vivement applaudi à la Sorbonne^ nous
parle, dans la 4"* livraison du Bulletin de la Société
archéologique de Brive, de la venue et de Taccueil
de la pomme de terre dans notre Bas-Limousin :
a 11 dit que le duc d'Hamillon, qui séjourna long-
a temps à Brive sous le nom de chevalier de Binet,
a introduisit la pomme de terre dans cette ville (il
« n'en donne pas la date) ; on la propagea peu à peu
(f et^ en 1768, un pain fait d'un mélange de cette
a racine et de seigle ou de froment fut expérimenté
c( successivement à Brive et à Limoges. La société
« d'agriculture de Rouen avait déjà donné l'exemple
« en 1762.
<x La première récolte importante fut faite par
a M. de Saint-Hilaire fils (à Favars), qui en ramassa
a soixante quintaux, regrettant de ne pas avoir donné
« plus de terrain à ce produit qui remplaçait la châ-
« taigne dont il y avait disette et l'année suivante il
a en récolta plus de soixante charretées ».
— 504 —
Nous avons entendu dire qu'eu 1773, les char-
treux du Glandier, affermant un domaine à un cul-
tivateur, mettaient comme condition qu'il ferait
annuellement une sétérée (soit vingt-et-un ares
passés) en pommes de terre, qui leur seraient toutes
remises. Je sais que Tacte se trouve chez M' Colin,
notaire à Troches.
Vers 1850, trois illustres membres de TAcadémie
des Sciences, MM. de Quatrefages, Milne Edwards et
Blanchard, étaient partis ensemble pour une tournée
scientifique en Sicile, ramassant tout ce qui pouvait
être utile à connaître ou à posséder dans nos Musées.
Ils ont reconnu Tétat stationnaire de cette lie admira-
ble et constatèrent que la pomme de terre y était in-
connue, car pendant tout leur séjour ils n'ont pu s'en
procurer une seule.
M. de Quatrefages le consigne à la page 7 du
deuxième volume de ses Souvenirs d'un 7iatura-
liste et, à la page 420, il donne la note suivante
que je m'empresse de reproduire, car elle est très
instructive :
v(( Les botanistes appellent cette plante précieuse
(( la morelle tubéreuse {solanum tuberosum). Nous
« rappellerons ici que les tubercules qui se mangent
« ne sont pas, comme on le croit généralement, les
a racines du végétal, mais bien de véritables tiges ou
« des branches souterraines, renflées par places et
a qui doivent leurs propriétés nutritives à la grande
c( quantité de fécule qu'elles renferment. Nous em-
« pruntons à M. Duchartre les détails historiques*sui-
(( vants, sur l'origine et les progrès de la culture des
a pommes de terre en Europe :
— 505 -
« La moreDe tubéreuse est connue de temps immé-
« morial au Pérou, dont les habitants la connaissent
ce sous le nom de papas. Mais on n'a pu déterminer
« d'une manière précise le vrai lieu de son origine,
ce Son introduction en Europe remonte à moins de
ce trois siècles. Au milieu des versions diverses qui
ce ont été publiées sur ce points la plus probable est
(( celle qu'a fait connaître le docteur Putsche. D'après
a ce savant, le capitaine John Hawkins aurait le pre-
« mier apporté en Irlande, en 1565, quelques tuber-
a cules pris à Santa-Fé de Bogota et qui furent com-
ce plètement négligés.
a Le célèbre navigateur Francis